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ELECTIONS LEGISLATIVES EN ITALIE : les vraies raisons de la demi-victoire

Publie le mercredi 3 mai 2006 par Open-Publishing
4 commentaires

Campagnes électorales. C’est l’utlisation de la télé et le peu d’implication des personnes qui a caractérisé les élections législatives. Et c’est ici la plus grande différence avec les élections locales.

de FRANCESCO INDOVINA traduit de l’italien par karl&rosa

Le constat d’une Italie "coupée en deux" fait partie de l’inconsistance du débat politique ; un système bipolaire livre en général des résultats serrés (on en a de nombreux exemples), ce qui provoque l’accusation de truquages, fautes, irrégularités etc. S’il livrait des résultats très distants (de 60 à 40%, comme par exemple en Toscane) on répèterait les accusations de truquages, fautes et irrégularités pour un "résultat coréen" (l’insulte politique est mise à jour, la Bulgarie autrefois , la Corée aujourd’hui). Mais laissons tomber ces vacuités et regardons les résultats.

Le Pôle a perdu de très peu, une donnée factuelle non discutable. Pourquoi une défaite de justesse alors qu’on annonçait un échec ? Pourquoi une divergence si forte entre l’avis général d’une victoire certaine et consistante pour l’Union et son maigre résultat ? Pourquoi une différence si marquée entre les résultats des élections locales et ceux des législatives ?

Chacun a un point de réflexion à fournir, car il s’agit d’une question qui ne manque pas d’implications sur la tenue du gouvernement et sur la possibilité de mener à bien le programme de l’Union (et on ne se réfère pas aux maigres marges du Sénat, mais au rapport avec la société).

Peut-on attribuer le résultat, complètement, à la grande capacité de Berlusconi ? Mais Prodi, n’a-t-il pas toujours gagné face à lui ? Plus, où mettons-nous la faute capitale des "couillons qui votent pour l’Union" ? Sont-ce les abstentions qui ont déterminé le résultat ? Je ne le crois pas. Est-ce la faute d’une communication erronée et pas coordonnée de l’Union aux électeurs ? Certes, la question des taxes, si maladroitement gérée, a pesé. Mais je crois que la question est encore autre.

La certitude d’une victoire large et sèche naissait d’une erreur de fond : la non perception de la mutation anthropologique qui a investi le pays ; nous avons voulu cultiver l’illusion que le berlusconisme était un argument de sociologie politique et non pas un enracinement dans les consciences des gens. Le poison social semé par le Pôle a pollué les consciences de beaucoup et un peu de tous. Un pays qui raisonne avec les tripes ; qui se sent frappé quand il entend parler d’augmentation des taxes, qu’il y soit impliqué ou pas ; qui a entendu "justifier" l’évasion fiscale ; récompenser ceux qui ne respectent pas les règles ; pousser à nier toute valeur de cohabitation réglée.

Un pays corrompu par la télé dans l’attente du coup de chance colporté comme habileté (quelle est la ville principale du Japon entre Tokyo, Moscou et Sydney ?... Tokyo. Eh bien, vous avez gagné 100 mille euros), abruti par des spectacles qui font de la vulgarité et de l’agressivité la mesure de leur succès. Un pays clérical et, évidemment, adepte du satanisme, mais qui se prélasse dans les péchés et les vices privés et publics, de toute façons un pardon et une remise on ne les nie à personne. Un tel pays ne peut pas voter à gauche. Dans un tel pays le Pôle a fait le miracle de perdre et l’Union celui de gagner. Ce n’est que l’excès de mauvaise administration, l’appauvrissement de couches importantes de la population, le manque de perspectives pour les jeunes, le fait d’avoir compris que la "flexibilité" n’était pas une opportunité mais une tromperie, c’est-à-dire le refus de Berlusconi et non pas l’adhésion au centre-gauche et une certaine, de plus en plus mince, fidélité politique qui ont un peu poussé les voiles de l’Union, avec peu de mérites de la part de l’équipage.

Et cela sans oublier le soutien dont a profité l’Union de la part de l’intelligentsia (mais qui l’entend ?), des grands journaux (mais qui les lit ?), de secteurs importants du pouvoir économique (mais quel pouvoir ?). Dans un pays immergé dans ce bouillon de culture, la gauche (même si elle est de centre) n’aurait pas dû gagner, à moins d’aider les gens à réfléchir, à se réveiller du sommeil de la raison. Les gens sont empoisonnés, étourdis, mais ils peuvent revenir au raisonnement, les pieds sur terre, aspirer à nouveau au mieux en construisant péniblement, démystifier des espoirs sans fondement. Mais comment ? Voila le problème. Il est possible de commencer par l’écart entre les résultats des élections locales et des législatives ; il s’agit d’un indice important.

Qu’on réfléchisse au fait que la différence la plus importante entre la campagne électorale des élections locales et celle des législatives est toute dans l’utilisation de la télé et dans l’implication des personnes. Les aspirants maires ont évolué dans le tissu social, ont dialogué avec les personnes, ont essayé de convaincre chacun, les partis ont été contraints à soigner les électeurs, chaque électeur, pas seulement ceux qui étaient déjà convaincus. En somme, on a fait en général pour les élections locales ce qu’on appelait jadis un travail politique de base. L’intervention à la télé a été modeste, pour des raisons évidentes. La campagne pour les élections locales a été enracinée chez les gens, participée ; la confrontation rapprochée a été l’instrument pour désenvenimer les consciences, pour aider à raisonner, à regarder la réalité.

Il an a été bien autrement pour les élections législatives, où la télé a été le principal, et même l’unique instrument. Les réunions publiques, peu nombreuses, ont été pour ceux qui étaient déjà convaincus ; aucun travail politique de base. Avec la télé gagnent les idéaux - si l’on peut dire - de Berlusconi. Et maintenant nous devons compter avec une mince majorité, pas tellement au parlement, mais - et c’est le plus inquiétant - chez les gens.
Si on voulait que le "programme du centre-gauche" trouve un tissu social d’acceptation (même si elle n’est pas unanime) on devrait se retrousser les manches et recommencer à faire un travail politique de base, ce qui n’exclut pas l’usage parcimonieux de la télé.

Seulement par un enracinement dans le tissu des villes, parmi les différentes catégories sociales, les jeunes et les personnes âgées, il serait possible de reconstruire un espace de réflexion commune, pas tellement une homologation mais plutôt une disponibilité raisonnable, le refus des mythologies, la prise de conscience que l’engagement collectif est le fondement d’une société saine et la possibilité d’affirmer l’individualité. Nous sommes tourmentés par le doute que les partis ne soient plus capables d’un travail politique de base, qui ne répète pas les risques anciens, mais renouvelle les modalités d’une expérience fondamentale.

http://www.ilmanifesto.it

Messages

  • A tous ceux qui veulent en tirer des leçons pour la france !
    "Si on voulait que le "programme de vraie gauche" trouve un tissu social d’acceptation (même si elle n’est pas unanime) on devrait se retrousser les manches et recommencer à faire un travail politique de base, ce qui n’exclut pas l’usage parcimonieux de la télé.
    Cela nous l’avons fait lors du referendum contre le TCE , nous pouvons donc le refaire d’ici 2007 !
    demontrer ensuite que l’action collective permet l’epanouissement des individualités , nous venons de le faire dans la lutte contre le CNE
    il ne nous reste plus qu’a nous retrousser les manches , à la condition que les leaders du NON ne restent pas dix mois à s’attendre .

    claude de toulouse .