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Une baisse du chômage français en trompe-l’oeil

Publie le samedi 30 août 2003 par Open-Publishing

PARIS (Reuters) - Le taux de chômage a légèrement augmenté en France en
juillet en dépit d’un recul de 0,2% du nombre des demandeurs d’emploi, une
embellie des chiffres qui ne reflète cependant qu’un nouveau système de
décompte.
Le taux de chômage au sens du Bureau international du travail (BIT), qui
permet les comparaisons avec les autres pays, a augmenté à 9,6% en juillet,
contre 9,5% au cours des trois mois précédents, avec 2.615.000 chômeurs
contre 2.595.000 en juin, selon les statistiques publiées vendredi par
l’Insee.

Sur un mois, les chiffres au sens du BIT font ressortir une hausse de 20.000
du nombre des demandeurs d’emploi, qui traduit une poursuite de la
détérioration du marché du travail.
Sur un an, le nombre des chômeurs augmente de 6,4% au sens du BIT.
"Nous pensons que le taux de chômage va continuer d’augmenter et se
rapporcher des 10% à l’horizon de la fin de l’année", commente Nicolas
Claquin, économiste à HSBC-CCF.

"Dans ces conditions, une nouvelle contraction du PIB au troisième trimestre
est possible et le risque d’une récession est donc réel pour l’économie
française", estime-t-il.
Dans ses statistiques publiées jeudi soir, le ministère des Affaires
sociales fait état d’un total de 2.399.100 demandeurs d’emploi en juillet,
contre 2.404.200 en juin, soit un recul de 0,2% sur un mois.
Le ministère précise toutefois qu’un nouveau mode de comptage a influencé
cette évolution qui, sans cela, "aurait été légèrement positive".
Il explique que "la mise en place, dans la moitié des régions environ, d’une
relance des demandeurs d’emploi télédéclarants" a conduit à "environ 15.000
le nombre de sorties supplémentaires pour ’absences au contrôle’ (...)
diminuant d’autant le nombre" des chômeurs.

En juillet, les sorties de l’ANPE pour "absences au contrôle" représentent
ainsi 47,6% de l’ensemble (166.621 personnes en données brutes). Les sorties
pour "reprise d’emploi déclarée" en représentent 19,6% et les entrées en
stage 4,1%.
Le nombre des chômeurs de catégorie 1 (ceux immédiatement disponibles à la
recherche d’un emploi à durée indéterminée et à temps plein) "évolue dans la
continuité des mois précédents", indique d’ailleurs le ministère. Il
augmente de 5,7% sur un an.
Le nombre des chômeurs de catégorie 1+6 (incluant ceux ayant exercé une
activité occasionnelle ou réduite de plus de 78 heures dans le mois) est en
hausse de 4,9% sur un an.

Le chômage de longue durée (personnes inscrites à l’ANPE depuis un an au
moins) poursuit sa progression (+0,7% sur un mois) mais le nombre de
demandeurs d’emploi inscrits depuis plus de trois ans continue de diminuer
(-0,8%).

"FLUIDIFIER LE MARCHE DU TRAVAIL"

Les économistes interrogés par Reuters s’accordent à penser que l’embellie
se fera attendre sur le front de l’emploi.
"J’anticipe une nouvelle montée du taux de chômage à 9,8% voire 9,9% de la
population active en fin d’année", indique Philippe Waechter, de Banques
populaires Asset Management.
L’Insee prévoit un taux de chômage à 9,8% de la population active à la fin
décembre.

La dernière enquête du ministère des Affaires sociales a montré à la mi-août
que la France avait continué à détruire des emplois au deuxième trimestre.
La perte de 9.000 postes dans le secteur concurrentiel s’est ajoutée aux
49.300 détruits au premier trimestre, une situation inédite en France depuis
la récession de l’année 1993.
Au titre des défaillances d’entreprises, la France a en outre enregistré des
records au premier semestre. Les dépôts de bilan ont atteint 24.810, soit
une hausse de 8% sur un an et 24,5% de plus qu’au second semestre de 2002,
selon les derniers chiffres de l’assureur-crédit Euler Hermes SFAC.
Ce dernier anticipe d’ailleurs une poursuite du mouvement au second semestre
puisqu’il prévoit une hausse des faillites de 7% sur l’ensemble de 2003,
contre 2,1% en 2002.

L’Unedic estime que les effectifs salariés seront à la fin 2003 inférieurs à
ce qu’ils étaient en 2002. Ses prévisions publiées en juillet anticipent la
perte de 15.000 emplois en 2003, ce qui correspondrait à une baisse de 0,1%
en glissement annuel des effectifs affiliés au régime d’assurance chômage.
"Au 31 juillet 2003, nous indemnisions 2,523 millions de chômeurs. C’est un
chiffre record, jamais observé par le passé", déclare le directeur de
l’Unedic, Jean-Pierre Revoil, dans une interview au Figaro-Economie.
"Parallèlement, cela nous coûtera 26,6 milliards d’euros cette anée, ce qui
représente là encore un niveau d’indemnisation record."
"Les emplois aidés peuvent être une soupape pour améliorer l’emploi mais ce
qui compte, c’est essentiellement de fluidifier le marché du travail",
estime-t-il.

Le Premier ministre, Jean-Pierre Raffarin, a promis en juillet des
"initiatives dès la rentrée" afin d’"anticiper" le retour espéré à un rythme
de croissance créateur d’emplois.
Pour l’heure, Matignon a annoncé l’entrée en vigueur en septembre d’un
premier volet du Contrat d’insertion dans la vie sociale (Civis), le nouveau
dispositif destiné à remplacer les emplois-jeunes avec les "contrats jeunes
en entreprise".