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SARKOZY : Protectionniste à Paris, libre-échangiste à Bruxelles

Publie le samedi 19 janvier 2008 par Open-Publishing

Protectionniste à Paris, libre-échangiste à Bruxelles

Europe . Les promesses du chef d’État d’instaurer des « protections » face à la mondialisation sont contradictoires avec le traité de Lisbonne qu’il a paraphé.

Le président de la République se flatte, plus souvent qu’à son tour, d’avoir su prendre en considération le « non » massif que les Français ont infligé au projet de constitution européenne. Prise en compte du verdict populaire ? Habile contournement, plutôt, fait de promesses de « protection » face à la mondialisation. « J’affirme qu’on peut être parfaitement européen et mettre l’Europe au service de la protection. Et ceux qui ignorent la préférence communautaire n’ont, me semble-t-il, rien compris à l’idéal européen », a répété le président de la République lors de sa conférence de presse du 8 janvier. « Si on a fait l’Europe, c’est justement pour la préférence communautaire, sinon (…) il n’y avait qu’à laisser faire l’Europe anglo-saxonne, celle du grand marché. » Son leitmotiv : protéger les produits européens face à la « concurrence déloyale » de pays qui ne respectent pas les mêmes normes sanitaires, sociales, environnementales.

Sarkozy, pourfendeur du libre-échange ? La ficelle est trop grosse, et il suffit de s’attarder sur la lettre du traité de Lisbonne dont il revendique la paternité pour se convaincre de la duplicité du discours.

Comme le projet de constitution, le traité de Lisbonne stipule que « l’Union contribue (…) au développement harmonieux du commerce mondial, à la suppression progressive des restrictions aux échanges internationaux et aux investissements étrangers directs, ainsi qu’à la réduction des barrières douanières et autres ». Une disposition qui fait des promesses présidentielles d’instaurer une préférence communautaire, de « s’opposer au dumping » et au « laisser-aller absolu », de futiles paroles en l’air.

Des promesses illusoires

Le tour de passe-passe est le même concernant la spéculation. À Paris, Nicolas Sarkozy n’a pas de mots assez durs contre la montée en puissance des fonds souverains, ces investisseurs d’origine étatique qui s’alimentent des excédents commerciaux des pays émergents et pétroliers. « Je crois à la mondialisation, mais je n’accepte pas que quelques dizaines de fonds spéculatifs et agressifs aient fait porter sur la croissance mondiale un risque majeur », lançait-il, samedi dernier, au conseil national de l’UMP, en dénonçant « un capitalisme de spéculateurs consistant à dépecer des entreprises (…) ». Avant de conclure : « Je n’accepte pas que certains fonds souverains puissent tout acheter chez nous et que nos propres capitalistes ne puissent rien acheter chez eux. Je demande la réciprocité avant d’ouvrir les barrières de l’Europe. » Une déclaration d’intention réduite à néant par le traité européen, qui stipule que « toutes les restrictions aux mouvements de capitaux sont interdites ». Cette disposition rend illusoires les promesses de taxes, barrières et autres « codes de bonne conduite » visant, pour reprendre les termes du chef de l’État, à « moraliser le capitalisme financier ».

D’ailleurs le président de la République ne s’est pas embarrassé de telles préventions, lundi dernier, à Riyad, devant les hommes d’affaires saoudiens. « Avec sagesse, plusieurs pays de la région ont canalisé une partie de cette richesse, aujourd’hui abondante, dans des fonds souverains destinés à la faire fructifier pour les générations futures, affirmait-il. Je serais bien mal placé pour contester une telle décision, gage de prudence et de vision de long terme. (…) Nous avons besoin d’investisseurs financiers de long terme, capables de voir plus loin que les résultats trimestriels. Vous êtes les bienvenus en France. » Vous avez dit double discours ?

Rosa Moussaoui
 http://www.humanite.fr/2008-01-18_P...

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Commentaire perso : remarquable article, pédagogique, à diffuser largement autour de soi en mettant bien en vis à vis les discours enfumants et leur exact contraire dans le traité que l’UMPS veut soustraire au verdict populaire.