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Les (faux) mystères de Veracruz (sur la grippe porcine)

Publie le jeudi 30 avril 2009 par Open-Publishing

Les (faux) mystères de Veracruz (sur la grippe porcine)

Publié le 29 avril 2009

Une histoire de fou. De fou parce que vraie, comme si souvent. Je vous parlais ce matin même du combat pour le mot juste. De la manière dont on était passé de l’expression sustainable development à celle, qui n’a rien à voir, de développement durable. Eh bien, cela n’a pas traîné : une nouvelle bagarre mondiale vient de commencer. Faut-il, oui ou non, parler de grippe porcine à propos de ce qui se passe au Mexique et désormais partout ?

La Commission européenne, redoutant un effondrement des marchés du porc, réfute en bloc l’expression, et tente d’en faire avaliser une autre par l’opinion. Il vaudrait mieux parler de « nouvelle grippe ». Rigoureusement sic. Et ce n’est probablement qu’un début, on verra bien. Pour ma part, je ne dispose évidemment d’aucune information confidentielle sur la réalité de ce nouveau drame. Mais je me renseigne, ma foi. Si, par bonheur pour vous, vous connaissez la langue espagnole, lisez sans attendre ce pénétrant article de l’association Grain, dont je ne pourrais jamais dire tout le bien que j’en pense (ici).

Extrêmement documenté, en vérité implacable, il démontre ce que nous sommes un certain nombre à savoir. L’élevage concentrationnaire des animaux d’élevage est un lieu idéal pour la circulation des maladies. Il est un espace parfait pour la recombinaison génétique des virus, et jusqu’à preuve du contraire, il y a bien eu recombinaison. Incluant, n’en déplaise aux marchands, un virus de grippe porcine.

Peut-être le savez-vous déjà, mais le premier cas de grippe porcine rapporté au Mexique est celui d’un gamin de quatre ans de La Gloria, un gros village proche de la ville de Perote, dans l’État mexicain de Veracruz. Or il se passe des choses terribles à La Gloria depuis qu’un gigantesque élevage de porcs, Granjas Carroll, s’est installé sur place. Il s’agit d’une filiale du géant de l’Américain Smithfield Foods, plus gros producteur mondial de porcs.

Ce qui est proprement insupportable, c’est que les habitants de La Gloria - 3 000 habitants - se plaignent depuis des années des pollutions de la porcherie et depuis des mois d’un syndrome grippal qui défie l’entendement. Le quotidien La Jornada a même publié le 4 avril un article apocalyptique (ici), donc près d’un mois avant l’alerte en cours. Eh bien, lisez et relisez ce qui suit : à cette date, trois enfants étaient morts, et 60 % de la population locale souffraient d’affections respiratoires diverses, souvent atypiques. 60 % ! Commentaire du journaliste de La Jornada : « Los pobladores atribuyen la aparición de las infecciones a la contaminación generada por los criaderos de cerdos de la trasnacional Granjas Carroll ». Les habitants, qui ont d’excellentes raisons de le penser, attribuaient l’origine de leurs infections à la présence de la porcherie industrielle Granjas Carroll.

J’arrête là, car je ne suis pas devin. Peut-être s’agit-il d’un autre foyer, d’un autre virus, d’une autre tragédie que celle dont on nous parle en boucle, bien que j’en doute. Ce qui demeurera certain, c’est la volonté - là-bas comme ici - de ne surtout pas toucher à l’ignoble modèle de la bidoche industrielle. Et de cela, nous reparlerons, croyez-moi.

PS : Christian Berdot me signale que l’article de Grain cité plus haut est en français à l’adresse suivante : http://www.grain.org/articles/?id=50

Publié dans Animaux, Agriculture(s), Santé et Environnement
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Publié le 29 avril 2009
Une histoire de fou. De fou parce que vraie, comme si souvent. Je vous parlais ce matin même du combat pour le mot juste. De la manière dont on était passé de l’expression sustainable development à celle, qui n’a rien à voir, de développement durable. Eh bien, cela n’a pas traîné : une nouvelle bagarre mondiale vient de commencer. Faut-il, oui ou non, parler de grippe porcine à propos de ce qui se passe au Mexique et désormais partout ?

La Commission européenne, redoutant un effondrement des marchés du porc, réfute en bloc l’expression, et tente d’en faire avaliser une autre par l’opinion. Il vaudrait mieux parler de « nouvelle grippe ». Rigoureusement sic. Et ce n’est probablement qu’un début, on verra bien. Pour ma part, je ne dispose évidemment d’aucune information confidentielle sur la réalité de ce nouveau drame. Mais je me renseigne, ma foi. Si, par bonheur pour vous, vous connaissez la langue espagnole, lisez sans attendre ce pénétrant article de l’association Grain, dont je ne pourrais jamais dire tout le bien que j’en pense (ici).

Extrêmement documenté, en vérité implacable, il démontre ce que nous sommes un certain nombre à savoir. L’élevage concentrationnaire des animaux d’élevage est un lieu idéal pour la circulation des maladies. Il est un espace parfait pour la recombinaison génétique des virus, et jusqu’à preuve du contraire, il y a bien eu recombinaison. Incluant, n’en déplaise aux marchands, un virus de grippe porcine.

Peut-être le savez-vous déjà, mais le premier cas de grippe porcine rapporté au Mexique est celui d’un gamin de quatre ans de La Gloria, un gros village proche de la ville de Perote, dans l’État mexicain de Veracruz. Or il se passe des choses terribles à La Gloria depuis qu’un gigantesque élevage de porcs, Granjas Carroll, s’est installé sur place. Il s’agit d’une filiale du géant de l’Américain Smithfield Foods, plus gros producteur mondial de porcs.

Ce qui est proprement insupportable, c’est que les habitants de La Gloria - 3 000 habitants - se plaignent depuis des années des pollutions de la porcherie et depuis des mois d’un syndrome grippal qui défie l’entendement. Le quotidien La Jornada a même publié le 4 avril un article apocalyptique (ici), donc près d’un mois avant l’alerte en cours. Eh bien, lisez et relisez ce qui suit : à cette date, trois enfants étaient morts, et 60 % de la population locale souffraient d’affections respiratoires diverses, souvent atypiques. 60 % ! Commentaire du journaliste de La Jornada : « Los pobladores atribuyen la aparición de las infecciones a la contaminación generada por los criaderos de cerdos de la trasnacional Granjas Carroll ». Les habitants, qui ont d’excellentes raisons de le penser, attribuaient l’origine de leurs infections à la présence de la porcherie industrielle Granjas Carroll.

J’arrête là, car je ne suis pas devin. Peut-être s’agit-il d’un autre foyer, d’un autre virus, d’une autre tragédie que celle dont on nous parle en boucle, bien que j’en doute. Ce qui demeurera certain, c’est la volonté - là-bas comme ici - de ne surtout pas toucher à l’ignoble modèle de la bidoche industrielle. Et de cela, nous reparlerons, croyez-moi.

PS : Christian Berdot me signale que l’article de Grain cité plus haut est en français à l’adresse suivante : http://www.grain.org/articles/?id=50

Publié dans Animaux, Agriculture(s), Santé et Environnement

http://fabrice-nicolino.com/index.php/?p=558