Accueil > TEMOIGNAGE DE LA HAUTE VIOLENCE REPRESSIVE CONTRE LA TENTATIVE DE FAUCHAGE (...)

TEMOIGNAGE DE LA HAUTE VIOLENCE REPRESSIVE CONTRE LA TENTATIVE DE FAUCHAGE D’UN CHAMP MINUSCULE

Publie le mardi 7 septembre 2004 par Open-Publishing
2 commentaires

Alors voila, en ce qui nous concerne, nous étions venu de Montpellier à
9, parmi nous il y avait, tout confondu, des membres du CROAC (Collectif
de Résistance et d’Offensive Anti Capitaliste), des Antipubs et des
Décroissants.

Arrivés sur place vers 12h. Réunion collective de
préparation, pendant laquelle absolument tout le monde ignore la
violence qui va suivre, puisque les autres fauchages s’étaient trés bien
passés, sans violence. José Bové, conseille aux femmes de passer devant
afin de montrer qu’elles aussi sont en lutte, et qu’elle puissent
arracher de l’ogm, on conseille même de leur faire une allée d’honneur
jusqu’aux OGM et on demande à ceux qui ont déjà fauché les autres fois
de laisser l’honneur de le faire aux nouveaux car le champ n’est pas
grand et que pour les 800 que nous étions il était clair que tout le
monde ne pouvait pas faucher.

Sur ce, nous partons, j’étais même un peu
déçu, me disant, bon ça ne va prendre que 5 à 10 minutes sur place,
alors que nous aurons roulé en tout 6h30 pour l’aller retour Auch
Montpellier... Nous arrivons sur un grand terrain. Au loin on aperçoit
les barrières, gardées par les CRS qui entourent non pas le champ d’OGM
mais bien plus que ce dernier (avec le désacord du maire de la ville qui
avait fait passé un arrété anti-ogm !) Et encore derrière cette barrière
une nouvelle barrière elle même à 50 mètres autour du champ, elle aussi
gardée par les CRS mais pas seulement, il y avait des véhicules de
l’armée.

Ce que nous pensions c’était que commes les autres fois on
avancerait vers les CRS, ils se conteraient de nous bloquer, qu’il
faudrait pousser un peu mais sans plus pour atteindre la parcelle et
faucher le champ volontairement et qu’ils nous convoqueraient tous
ensuite à la gendarmerie. Ce ne fut pas le cas et loin de là. Et les
informations données par les médias sont loin de la réalité sur place
(et pourtant ils étaient là, mais pas dans l’action). La tête de cortège
arrive au niveau des barrières, sans attendre que le reste du groupe
soit entièrement arrivé, ils attrappent les barrières et les tire vers
eux, créant une ouverture.

Nous aussi en tête, nous avançons dans la
1ère strate, mais toujours LOIN, TRES LOIN du champ d’OGM, nous avançons
bras levées en l’air, nous étions venus non-violents ; parmi nous,
femmes, enfants, vieux, familles complètes, nous n’étions pas un black
block c’était clair. Nous avançions avec pour horison et objectif la
seconde barrière de CRS. Les premiers CRS qui étaient derrières les
premières barrières après l’ouverture des barrières ont tout de suite
reculés, et soudainement, sans sommation et alors que rien ne le
justifie puisqu’il n’y a eu AUCUNE VIOLENCE DE NOTRE PART, nous avons
reçu la 1ère lacrymogène.

Au début, je me suis dit, bon ok, c’est bon,
c’est juste pour nous impressionner ou nous ralentir, alors je l’ai
contournée et je continuer à avancer, et là on a reçu encore 2 ou 3
lacrymogènes... tout à tir tendu et il y eu les premiers blessés. Sur le
coup j’ai pas tout compris, j’ai tenté rapidement de voir à quel point
il était bléssé (j’ai un diplôme de secouriste), ça allait, ça saignait
mais rien de grâve apparament pour ceux-là. Déterminé à faucher de
l’OGM, nous continuons d’avancer.

Et c’est là qu’est arrivé
l’inimaginable (pas dit aux médias ! ! ! !). Un hélicoptère présent
depuis le début, mais que nous croyons venu pour filmer ou observer
commence à nous lancer des explosifs à fragmentation. Ces objets tombent
du ciel, explosent en l’air, se scindent en 3 parties brulantes et
tombent sur le sol. Pendant que dans le même temps on nous lance des
lacrymogènes et des engins qui explosent en touchant le sol, non
identifiés. QUand je parle d’explosifs et d’explosion il n’y avait pas
de flamme, mais par contre il y avait réellement explosion, les champs
de blé que nous traversions pour éviter ces charges en témoignent, et
les 60 blessés comptabilisés par les pompiers sur place aussi (chiffre
baissé à 4 quand France Info parle de ce fauchage) dont 4 iront à
l’hopital pour blessures graves, parmi les 4 deux CRS et deux faucheurs
volontaires.

On notera que les CRS se sont fait mal eux même ! Nous ne
pouvions pas les atteindre, ils étaient trop loin, leurs conneries
d’explosifs ont du leur exploser dans les mains. Pour ma part, alors que
je me rendais compte que devant, nous n’étions plus q’une poignée et que
ces tirs d’hélico, ça mettait vraiment les boules, avec les autres nous
reculons en courant pour essayer d’atteindre une distance suffisante,
Mais les tirs étaient derrière nous certes... mais aussi devant,
l’hélico faisait des rasages ! NOus nous en sommes sorti, je ne sais
encore comment. IL y eu un long temps de vide, nous nous regardions tous
les uns les autres, complètement ahuris, les visages à moitié décomposés
par l’incompréhension et la fatigue. Notre nombre diminue d’environs 200
ou 300, mais d’autres continuaient d’arriver.

On s’organisa à distance,
on se réunit et on repartit vers cette rangée de CRS que nous avions pu
atteindre, l’hélico ayant dû partir (probablement plus d’essence, il
était là depuis plus d’une heure), cette fois, on ne nous tira pas
dessus. On arrive sur place, on demande la libération de quelques uns
(dont José Bové) qui se sont déjà fait embarquer et nous les empêchons
de partir avec eux (on se jette sur les véhicules, on les bloque avec
leur propres barrières...). Ils sont contraints de les garder sur place
et les ont cependant intérrogé dans la plus grande illégalité, c’est a
dire sans avocats. Parmi les prisonniers, un au moment de sa libération,
alors qu’il retournait vers nous, FINTE ! et réussi à courir vers le
champs d’OGM car il était à ce momment derrière les barrières des CRS
censées entourer le champ. Il se fait poursuivre par 8 CRS dont certains
tombent en le poursuivant, par leur propres incompétence.

Il réussi à
rentrer dans le champ d’OGM, tellement grand que nous ne voyons plus
rien, évidemment il sera rattrapé plus tard et relaché encore mais cette
fois ci sévèrement accompagné jusqu’à nous. C’est le seul qui a réussi a
rentrer dans le champ d’OGM. Nous nous mettons alors à pousser un peu
les barrières, il faut bien qu’on les enlève ces OGM ! certain montent
sur les barrières et se font sévèrement blésser par les CRS à coup de
matraques. La situation n’avancera pas plus vers le champ, les CRS pris
de paniques pour rien, balancent à nouveau des lacrymogènes et l’hélico
est à nouveau présent mais ne tire pas (ou ne bombarde pas comme vous
voulez). On fuit comme on peut en arrière.

Alors que je fuyais
j’aperçois, une mère accompagnée de ces deux enfants une d’environs 8
ans et l’autre de 12 ans. La petite fille, ne pouvait plus marcher, la
fatigue et la peur certainement, j’ai dû la transporter sur mon dos,
suivi par sa mère et son autre fille jusqu’a ce que nous soyons
suffisament loin. Je ne veux plus jamais revivre une telle chose. Ces
CRS et leur armée ont délibérément tirer sur des familles, sur des
enfants, au risque de les tuer, ils savaient qu’il étaient là, et parmi
ceux matraqués il y avait beaucoup de vieux, des personnes qui n’avaient
visiblement pas la force de se défendre, juste venus pour marcher et
enlever ces OGMs.

Si on le refait je reviendrai quand même, et je crois
que cette fois ci tout le monde apportera son matériel photographique
même au risque de le perdre, pour avoir la preuve hallucinante de la
chose. C’était Apocalypse Now, c’était le VIet Nam ? Non pas loin,
c’était les faucheurs d’OGM volontaires à AUCH ! vraiment incroyable !
Nous appriment plus tard que le préfet qui avait donné l’ordre et
l’autorisation de cette barbarie et qu’il n’y est pas pour rien donc
dans les 60 blessés physiques et les non comptabilisés blessés
émotionnels, comme cette petite fille totalement appeurée que je me suis
retrouvé à transporter sur mon dos.

Nous imaginons que les OGM seront
fauché évidement clandestinement prochainement, malgré une probable
garde continue (comme à Cournon) de la parcelle. Après l’action nous
avions tous rendez vous au commissariat d’à côté, nous voulions tous
témoigner (600 personnes donc) pour les 3 personnes encore gardées (dont
José Bové) dans ce commissariat (ils les ont embarqué par un autre
chemin, nous n’avons pas pu les empécher). Vu notre nombre à 21h30 et
quelques, devant cette mairie ils les ont relaché avec vitesse.

La lutte continuera. La seule chose qu’a réussi pour ma part à me faire
de voir l’armée et la police se lancer dans une violence aveugle et
hallucinante, faire monter une rage que je m’ignorai (bien que
contenue), pour avoir tiré alors que des enfants étaient la, et l’envie
encore plus justifiée de retirer des OGM. Par ailleurs j’ai vécu (mais
c’est moins surprenant) la désinformation des médias, pourtant présents
sur place... mais visiblement il y a certaines choses qu’il n’ont pas pu
ou voulu dire.

Messages

  • Je voudrais apporter mon temoignage aux evenements de Solomiac dimanche 06 septembre 2004.
    Agé de 51 ans, je suis venu avec mon epouse et nos deux filles, pour participer a cette action citoyenne que j’esperais pacifique et conviviale. Nous avions pris place des 15h30 vers le milieu du cortege, entouré de gens « normaux » : des enfants, des femmes, des hommes, des grands-mères, et même des bébés en poussette. Comme nous etions nombreux (entre 400 et 600, d’après ma propre estimation), et que nous empruntions un etroit chemin de terre séparant des champs et qui menait aux parcelles gardées par les gendarmes, le convoi évidemment s’étirait sur plusieurs centaines de metres de long.
    Lorsque les premiers rangs du cortège sont arrivés auprès des premiers gendarmes (barrières les plus éloignées des parcelles de mais-OGM), nous autres etions a environ 150 ou 200 m de distance, toujours en train de marcher calmement en discutant de choses et d’autres.
    A ce moment des explosions ont débuté, des gaz lacrymogènes ont envahi le champ de soja à nos côtés, et le faible vent les a poussés vers l’ensemble du cortège. Tout le monde s’est mis a tousser, à pleurer des yeux, comme de très nombreuses grenades lacrymogènes explosaient a gauche et a droite. Puis (ou en meme temps, je ne me rappelle plus), de fortes explosions ont eu lieu, assourdissantes, comme des grenades dégageant un violent bruit tres agressif mais peu de flammes.
    Nous étions stupéfaits, désorientés, ne comprenant pas la raison de ces gaz et explosifs, comme nous etions trop loin des gendarmes pour realiser la situation et comme d’autre part la fumée grise des lacrymogènes etait dense.
    J’ai vu autour de moi des enfants, des femmes, des hommes, des grands-mères pleurer d’irritation, tousser, accroupis au sol. J’ai vu courir dans notre direction des manifestants qui fuyaient le devant des affrontements, et je me souviens d’au moins deux personnes dont du sang s’écoulait de l’oreille. J’ai ensuite vu un homme d’environ 60 ans qui été blessé à la main droite, et qui m’a répondu qu’il avait recu un éclat d’une de ces grenades.
    Nous avons ensuite reculé, rebroussé chemin, et attendu une bonne demi-heure a distance que les gaz se dissipent et que les gendarmes se calment.
    Pourquoi tant de violence contre des citoyens venus les mains nues (personne dans le cortege n’avait de baton ni d’objet dans les mains) ? Pourquoi un usage si important de gaz lacrymogènes et de grenades explosives sur une foule distante de plusieurs centaines de metres de la parcelle de mais-OGM ?
    J’ai honte pour ces gendarmes et leurs officiers !

  • Bonjour,

    Je viens de lire votre témoignage. J’étais également à Solomiac ds le Gers dimanche dernier. Ne pensez pas que les médias sont tous muselés ou se font de l’auto-censure. Pour preuve, je vous suggère de regarder l’émission "Sept à Huit" dimanche prochain à 18h45 sur TF1. A travers les portraits de Jean Emile Sanchez et de Jean Baptiste Libouban, je pense que vous revivrez certaines des scènes dignes d’un bon vieux film sur le Viet Nam ou le Salvador... Mon caméraman a reçu un éclat de grenade dans le bras et j’ai moi-même suffoqué pendant une heure sous les lacrymos alors s’il vous plait, arrêtez de mettre tous les journalistes dans le même panier car c’est nous qui "trinquons" ensuite sur le terrain. Merci d’avance

    Emmanuel REITZ, journaliste "Sept à Huit".