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25 mars 2004, intervention du Ministre cubain des relations exterieures devant la presse étrangère.

Publie le samedi 3 avril 2004 par Open-Publishing

Conférence de presse offerte par Felipe Pérez Roque, ministre cubain des
Relations extérieures, à la presse nationale et étrangère, au siège du
ministère, le 25 mars 2004.

* * * *

Je souhaite la bienvenue à tous les correspondants de la presse étrangère et
à ceux de la presse cubaine. Je vous ai convoqués pour aborder devant vous
des questions d’intérêt général et pour vous donner la position de Cuba au
sujet de certaines questions qui ont fait l’objet d’une campagne de presse
internationale virulente.

Mais je voudrais avant vous donner un scoop : nous disposons depuis quelques
heures d’un document rédigé en anglais, qui est le projet de résolution que
les Etats-Unis ont préparé pour qu’un autre pays le présente dans les
prochains jours à la Commission des droits de l’homme. Le département d’Etat
l’a remis hier après-midi à un groupe trié sur le volet de diplomates de
pays membres de cette Commission. Ainsi, les Etats-Unis ont fait connaître
le projet de résolution sur lequel ils travaillaient en grand secret. Hier
après-midi. Le document est tombé entre nos mains par hasard, et nous vous
en donnerons la copie.

Je somme d’ores et déjà le pays qui le présentera ces prochains jours de me
dire s’il est vrai ou non que ce document (il le montre) est rédigé en
anglais, s’il s’agit bien du texte élaboré au département d’Etat ; s’il est
vrai ou non qu’il a été présenté hier après-midi au département d’Etat à un
groupe de pays et s’il est vrai ou non qu’il s’agit du texte grâce auquel
les Etats-Unis tentent de présenter de nouveau la question Cuba à la
Commission des droits de l’homme.

Mais nous vous avons convoqué surtout parce que nous croyons le
moment venu pour notre pays de présenter sa vérité, avec toute l’objectivité
et tout le sérieux qui le caractérise, au sujet d’une question exploitée
jusqu’à plus soif et ressassée indéfiniment à partir d’exagérations,
d’inexactitudes, de mensonges, d’affabulations pures et simples, tout aussi
scandaleusement fausses, à savoir les conditions d’emprisonnement et le
traitement médical que reçoivent les soixante-quinze mercenaire condamnés
l’an dernier pour avoir travaillé au service du gouvernement des Etats-Unis
à l’application de la loi Helms-Burton et au blocus contre Cuba, et pour en
avoir reçu de l’argent et des instructions.

J’espère que l’information que je vais vous donner jettera
quelque lumière et fera apparaître la vérité sur cette question utilisée
dans le cadre de la campagne de mensonges et de diffamations permanente
contre Cuba. Voilà trois jours à peine, une Table ronde télévisée très
intéressante a porté sur le système pénitentiaire cubain : par exemple, la
femme qui en dirige les services médicaux a expliqué comment ils étaient
organisés, a informé qu’il y avait un médecin pour deux cents prisonniers à
Cuba, ce qui est une donnée vraiment impressionnantes car c’est quasiment le
taux pour la population cubaine en général ; on y a aussi expliqué les
programmes en place pour permettre l’accès des prisonniers à l’éducation,
aux connaissances. Ici même, au ministère, nous l’avons commenté entre nous,
parce que ça nous semblait des programmes d’un sens humain, d’un rayonnement
humaniste tout à fait impressionnants. Et pourtant, à mon grand étonnement,
à ma grande stupéfaction, ces informations n’ont pas eu la moindre
divulgation internationale, n’ont pas suscité le moindre intérêt dans les
médias internationaux qui ont publié ces derniers mois des tonnes de mots
sur les prisons cubaines pour les dénigrer ! Comme si Cuba n’avait rien dit.

J’espère que ça ne sera pas le cas pour l’information que je
vais maintenant vous donner.

Je tiens tout d’abord à vous donner les antécédents des procès de l’an
dernier qui ont été une réponse forcée de Cuba, parce qu’elle n’avait plus
d’autre choix : j’ai donc choisi des déclarations de représentants de
l’administration nord-américaine, de cercles de pouvoir nord-américains qui
illustrent mieux que je ne pourrais le faire les conditions dans lesquelles
notre pays a dû vivre cette dernière année et demie. Voici par exemple
(projection sur grand écran) ce que Jeb Bush, frère du président et
gouverneur de la Floride, a déclaré le 11 avril 2003, voilà presque un an :
« Après avoir gagné la guerre en Irak, les Etats-Unis doivent tourner les
yeux vers ses voisins et exercer des pressions sur la communauté
internationale pour que le régime cubain ne puisse plus se maintenir. »
Exercer des pressions, tourner les yeux vers ses voisins.

Colin Powell, le secrétaire d’Etat, a déclaré le 4 mai : « Il ne
convient pas pour l’instant d’envisager le recours à la force militaire
contre Cuba. » Pas pour l’instant. ! J’oserais vous rappeler que M. Powell
s’est présenté devant le Conseil de sécurité pour apporter des « preuves »
que l’Irak possédait des armes de destruction massive, que l’Irak mettait au
point des armes atomiques, chimiques et biologiques qu’il se disposait à
lancer contre d’autres pays. Alors, vous comprendrez aisément que ce « pas
pour l’instant » n’est pas une phrase à laquelle nous pouvons donner
beaucoup de crédit.

Le 10 octobre 2003, le président Bush, dans le cadre d’un show électoral
monté à la Maison-Blanche devant des terroristes et des ultras cubains de
Miami - le pire de la faune ultra de cette ville - a affirmé : « Le régime
castriste ne va pas changer de lui-même, mais Cuba doit changer. » Cuba
doit changer, estime le président des Etats-Unis : « doit », ça veut dire
qu’elle est obligée de le faire même si elle ne veut pas.

L’homme qui apparaît en bas (sur l’écran), qu’on croirait
Latino-Américain, ne l’est pas. Bien qu’il soit petit-fils de Mexicain, il
est Nord-Américain : c’est Roger Noriega, le sous-secrétaire d’Etat adjoint
aux Affaires interaméricaines, autrement dit le principal responsable de la
politique latino-américaine du département d’Etat. Il a affirmé en décembre
2003 : « Nous devons être prêts à agir d’une manière décisive et souple. »
Je dois replacer cette phrase dans son contexte : il venait d’affirmer que
les Etats-Unis étaient en train d’étudier la façon d’accélérer le départ de
Fidel de la scène politique cubaine. Si bien que Fidel l’a sommé
publiquement, sans avoir encore reçu à ce jour la moindre réponse, de dire
si cette phrase signifiait l’assassinat politique, de confirmer si le décret
signé par le président Gerald Ford au milieu des années 70 pour interdire
aux fonctionnaires et aux services secrets des USA de participer à
l’assassinat de dirigeants étrangers, après le scandale qu’avaient causé les
révélations du Rapport Church qui avait présenté de nombreux cas de ce genre
dont plusieurs tentatives ratées contre Fidel en personne. Et Fidel a sommé
Noriega de dire s’il était vrai ou non que Bush, qui était alors encore
candidat, avait eu une réunion avec des représentants de la mafia cubaine
pour leur dire de ne pas se tracasser, qu’il savait « comment régler le
problème ».

Noriega a donc affirmé qu’il fallait être prêt à ce moment-là à
agir d’une façon décisive et rapide, et il a ajouté : « Les Etats-Unis
veulent être sûrs que les potes du régime ne prennent pas le contrôle des
appareils de sécurité du gouvernement », et il a annoncé que la Commission
pour contribuer à établir une Cuba libre, créée par la Maison-Blanche pour
semer la subversion à Cuba, pour renverser la Révolution et pour convertir
de nouveau l’île en un protectorat, se chargerait entre autres de veiller à
cet objectif. C’était en décembre. À cette même occasion, Melquíades
Martínez, qui était alors coprésident de cette Commission et secrétaire au
Logement, a dit à la presse que le Pentagone - autrement dit les forces
armées nord-américaines - ne participaient officiellement à la Commission,
mais il a tenu à ajouter : « On ne saurait écarter que le département de la
Défense puisse être impliqué à un moment donné dans ce travail. » Pourquoi
donc, dites-moi un peu, les forces armées nord-américaines devraient-elles
être impliquées dans la prétendue transition à Cuba ? Nul n’a encore répondu
à cette question, pas plus qu’on n’a répondu à la question de Fidel.

Noriega, de nouveau, a déclaré le 6 janvier 2004 : « Les
Etats-Unis suivent de près les agissements du dirigeant cubain Fidel Castro
dans le cadre de ses dernières équipées. Les Etats-Unis ont des informations
sur le fait que Cuba participe à la déstabilisation de gouvernements
étrangers. » C’est là un mensonge que Fidel s’est chargé de démentir : si
des gouvernements chutent en Amérique latine, c’est à cause de l’application
sauvage du modèle néo-libéral, de l’extorsion dont sont victimes les
économies latino-américaines à la suite du modèle imposé par les USA et le
Fonds monétaire international.

Comme s’il s’agissait d’un concours de rhétorique, Colin Powell
affirmait le 8 janvier : « Cuba fait l’impossible pour déstabiliser la
région. » Cuba n’a pas besoin de s’en occuper, les Etats-Unis s’en chargent
bien tout seuls pour transformer l’Amérique latine en un volcan en éruption.
Pour sa part, Mme Condoleezza Rice a affirmé : « Cuba continue de pêcher en
eaux troubles dans d’autres parties de la région. » Le 12 janvier, le
président Bush - inquiet de voir que sa cote de popularité décroît selon les
sondages, que sa réélection n’est plus si sûre, que la candidature de son
rival se consolide - affirmait : « Il faut travailler à une transition
rapide - ça, c’est sûr qu’ils le veulent - et pacifique - ça, en revanche,
c’est un mensonge ! - à Cuba. »

La dernière preuve en date du manque de scrupules, de l’insanité
de ces gens-là, elle émane d’un représentant à la Chambre des Etats-Unis, de
M. Lincoln Díaz-Balart, qui vient de déclarer voilà quelques jours à peine :
« L’assassinat de Fidel Castro s’impose. » Ce dinosaure ultra-conservateur,
ce membre du Congrès qui est un véritable homme des bois, n’a pas la moindre
pudeur de réclamer publiquement l’assassinat du président d’un pays voisin
et membre des Nations Unis ! Et il a ajouté : « Puisque Castro aiment tant
les touristes qui lui apportent des dollars, alors envoyons-lui aussi des
espions. »

Alors, je vous demande : le gouvernement cubain a-t-il ou non raison
d’adopter les mesures qu’il estime pertinentes, en fonction de son éthique
et de sa législation, pour préserver le pays et défendre son peuple de ceux
qui collaborent sur place à l’application de cette politique annoncée
ouvertement et sans fard par les principaux responsables de l’administration
nord-américaine ? Voilà ce qui est en jeu, voilà les antécédents de tout
ceci, le cadre que nul ne saurait ignorer : Cuba défend son droit à
l’autodétermination, Cuba défend son droit de vivre comme une nation
indépendante. Et pour se défendre, Cuba a le devoir et le droit d’appliquer
ses lois. Cuba n’assassinera pas, Cuba ne fera pas disparaître des gens,
Cuba ne recourra pas aux assassinats extrajudiciaires, Cuba ne torturera pas
Cuba ne recourra pas à la violence, Cuba ne réprimera pas ; Cuba, en
revanche, appliquera sa loi avec rigueur et continuera de le faire, parce
que c’est un droit que lui reconnaît la Charte des Nations Unies, que lui
reconnaît le droit international : elle a le droit de se défendre et de
punir, comme le fait la législation nord-américaine, comme le font toutes
les législations du monde, ceux qui collaborent avec une puissance étrangère
qui agresse leur pays.

Je tiens à rappeler que nous avons dû adopter l’an dernier des
mesures en réponse à l’attitude carrément provocatrice du chef de la Section
des intérêts nord-américains à La Havane. Et je tiens donc à réitérer une
fois de plus que c’est l’administration nord-américaine et le chef de sa
Section des intérêts qui sont les premiers responsables des mesures de
légitime défense que Cuba a dû adopter pour empêcher les agissements de ceux
qui collaborent de l’intérieur à l’application de la loi Helms-Burton, à
l’application de la politique subversive des Etats-Unis.

Et, toujours dans le cadre des antécédents, je tiens à reprendre
les informations que j’ai fournies au sujet des procès des soixante-quinze
mercenaires, parce que c’est un point sur lequel il faut faire la vérité.

Voici donc douze caractéristiques de ces procès.

1) Les agents de police qui ont arrêté les mercenaires n’ont pas recouru à
la violence ou à la force, même minime. Ils ont respecté les personnes et
leur intégrité.

2) Les procès se sont déroulés selon une procédure sommaire, ce qui veut
dire selon la loi cubaine une réduction des délais, mais en aucun cas une
réduction des garanties.

Je refuse donc l’idée que procès sommaire implique une perte des garanties :
cela veut dire raccourcissement des délais sans perte de garanties. C’est là
une faculté du président du Tribunal suprême populaire.

3) Tous les prévenus ont connu à l’avance les chefs d’accusation qu’on leur
imputait et ont eu la possibilité, comme tous le prévenus à Cuba, de se
prononcer avant le procès. Il est donc de dire qu’ils ont connu les chefs
d’accusation au moment du procès, ce qu’ils ont d’ailleurs reconnu eux-mêmes

4) Tous les accusés ont eu droit à un avocat. Un total de cinquante-quatre
avocats, dont quarante-quatre, soit 80 p. 100, ont été désignés par les
accusé eux-mêmes ou leur famille, et dix commis d’office, comme le prescrit
la loi cubaine.

5) Tous les accusés ont eu le droit d’être écoutés au procès ouverts devant
des tribunaux civils ordinaires constitués au préalable, conformément à la
loi cubaine et au droit international. Par conséquent, il n’a été créé aucun
tribunal spécial, il n’a été nommé aucun juge spécial ou d’urgence. Ces
juges étaient ceux qui travaillent normalement à ce titre. Ces procès n’ont
rien à voir avec ce qui attend les prisonniers de la base navale de
Guantánamo, les prisonniers de ce camp de concentration, qui passeront
devant des cours martiales spéciales et des juges spéciaux. Ne pas le
reconnaître, c’est manquer à la vérité.

6) Il n’y a pas eu de procès secret. Les séances de tous les procès, des
vingt-neuf, ont été publiques et contradictoires. Presque trois mille
personnes y ont assisté, soit quasiment cent en moyenne par procès, dont les
proches. Il est donc faux de dire que les proches n’ont pas assisté aux
procès, et c’est facile à vérifier. En plus des proches, il y avait des
témoins, des experts, d’autres citoyens. Oui, il est mensonger de dire que
c’étaient des procès secrets.

Il est vrai que certains diplomates qui avaient émis le désir
d’y assister n’ont pas été admis. Mais la Convention de Vienne sur les
relations diplomatiques et consulaires prévoit le droit des diplomates à
assister aux procès où sont jugés leurs ressortissants, et uniquement dans
ce cas. A La Havane, l’an dernier, tous les accusés étaient des Cubains, et
les diplomates étrangers n’avaient donc aucune prérogative à ce titre. Les
tribunaux n’ont donc pas violé le droit international, parce qu’ils avaient
toute latitude de permettre ou non l’accès aux diplomates, à la petite
dizaine qui avait demandé à participer. C’est leur droit le plus strict. De
là à dire que les procès en ont été secrets pour autant, c’est une
exagération manifeste.
La presse non plus n’a pas eu accès, et c’est là encore une
prérogative des tribunaux qui ont estimé que la nature des informations qui
y seraient utilisées, le caractère parfois secret de certaines, en rapport
avec la sécurité nationale, exigeaient cette discrétion. Ils voulaient aussi
éviter une ambiance de publicité qui aurait porté préjudice à l’objectivité,
à l’impartialité du procès. Et encore, c’est leur droit. Mais ça ne veut pas
dire pour autant, je le répète, que les procès ont été secrets. Les proches
y ont assisté, et plus de trois mille personnes au total.
7) Tous les accusés et tous les défenseurs ont eu le droit
d’apporter des preuves et des témoins à décharge, en plus de ceux qui ont
été présentés par l’accusation et l’instruction.
Les avocats de la défense ont présenté vingt-huit témoins à
décharge, dont vingt-deux ont été acceptés par les tribunaux et qui ont été
interrogés pendant les séances.
8) Tous les avocats de la défense ont eu accès au préalable au
dossier de l’accusation.
Je tiens à rappeler que les avocats chargés de la défense des
cinq héros cubains prisonniers politiques aux USA n’ont eu accès, au cours
de ce progrès préfabriqué, qu’à 20 p. 100 des informations présentées par le
parquet, parce que les 80 p. 100 restants ont été déclarés secrètes, et si
secrètes que personne n’a pu en prendre connaissance, et que cette situation
s’est maintenue durant le processus d’appel. Ainsi donc, les avocats des
Cinq n’ont pas eu connaissance du dossier non seulement avant le procès,
mais même après en ce qui concerne 80 p. 100 des documents !
Ça n’a pas été le cas ici. Les avocats de la défense ont eu
connaissance du dossier au préalable, comme l’ont reconnu les accusés
eux-mêmes. Nous avons même présenté ici des témoignages le confirmant.
9) Tous les accusés ont eu le droit, comme le leur reconnaît la
loi et comme ils en ont été avertis, de se pourvoir en appel, ce qu’a fait
la majorité. Ils ont interjeté appel devant le tribunal de l’instance
supérieure, en l’occurrence le Tribunal suprême. D’ailleurs, une dizaine
d’appels sont encore en examen à ce jour. Ils ont donc exercé ce droit que
leur reconnaît la loi cubaine.
10) Les saisies et confiscations de biens se sont faites sur
mandat judiciaire, une fois prouvée leur origine illicite. Il n’y a donc pas
eu de saisies arbitraires de la part de la police.
Je tiens à rappeler que certains accusés possédaient de grosses
sommes. L’un d’eux par exemple avait dissimulé seize mille dollars dans la
doublure d’une veste. La détention de dollars n’est pas interdite à Cuba.
Alors, pourquoi les dissimulait-il ? Pourquoi n’avait-il pas ouvert un
compte en banque ? Pourquoi se protégeait-il ainsi ?
11) L’intégrité physique et morale de chaque inculpé a été
respectée scrupuleusement à tout moment, ce que certains ont reconnu
volontairement durant les procès.
12) Il n’existe pas la moindre preuve - et si quelqu’un en a,
qu’il la présente - qu’on ait recouru à la coercition, à des pressions, à
des menaces ou au chantage pour obtenir les déclarations et les aveux des
accusés.

Il me semble qu’il était bon de rappeler ces douze points, pour vous
rafraîchir la mémoire et dire la vérité au milieu de l’énorme campagne qui
ressasse - je ne saurais dire innocemment - les arguments préfabriqués et
orchestrés par les ennemis de Cuba. Quiconque répète un mensonge se fait le
complice de sa divulgation, et c’est bien ce qu’il passe.
Maintenant, je vais vous donner un certain nombre d’informations
que nous ne possédions pas au moment de ces procès, car j’ai tenu ma
conférence de presse ici même à peine deux jours après. Nous avons bien plus
d’informations maintenant. Et il serait bon, pour que la vérité se connaisse
pour qu’elle se fraie un passage, pour qu’elle se comprenne, que ces
nouvelles informations soient divulguées, pour une question de déontologie
professionnelle, afin que ce ne soit pas seulement les arguments de nos
accusateurs, les arguments de nos agresseurs qui tournent dans le monde,
mais aussi les nôtres afin que l’opinion publique se fasse un jugement.
Les condamnés se montaient à soixante-quinze, dont une femme. Au
moment de leur arrestation, cinq seulement avaient un emploi, soit 7 p. 100
le reste, autrement dit soixante-dix, 93 p.100, ne travaillaient pas ou ne
touchaient pas le moindre salaire.
Alors, j’aimerais bien qu’on me réponde : de quoi vivaient-ils ?
Comment peut-on vivre à Cuba ou ailleurs sans un salaire ou sans un emploi ?
Or, 70 sur 75 ne travaillaient pas, n’avaient pas d’emploi. Leur profession
 : « chômeur » ! A supposer qu’ils ne vivaient pas de la délinquance, du vol,
d’où tiraient-ils l’argent pour se nourrir, s’habiller, faire d’autres
dépenses ? A supposer qu’il ne s’agissait pas non plus d’argent envoyé par
la famille à l’étranger. Oui, en fait, c’était de l’argent venant de
l’étranger, mais pas de la famille. C’était de l’argent provenant de leur
employeur étranger, de l’administration nord-américaine.
Je crois que je l’ai largement prouvé ici l’an dernier.
L’étonnant, c’est que les dépêches, les articles de presse n’en parlent
quasiment jamais. Or, j’en ai donné des preuves concrètes, des chèques, des
factures, des listes de salaires de trois mille dollars par mois. Non, on
n’en parle pas, et j’aimerais bien savoir pourquoi. Les médias le taisent,
le minimisent.
En revanche, les médias nous serinent tous les jours qu’il
s’agissait d’intellectuels, que la meilleur de l’intelligentsia cubaine
était sous les verrous !
Mais dira-t-on que depuis 1997, et jusqu’au 15 janvier 2004,
l’Agency for International Development des Etats-Unis, la fameuse US/AID, a
reconnu avoir alloué à elle seule, écoutez bien, vingt-six millions de
dollars du budget nord-américain pour financer la création de groupes à Cuba
pour fabriquer une opposition interne. C’est le directeur de l’US/AID en
personne qui l’a reconnu : vingt-six millions de dollars de 1997 à janvier
2004.
Pour l’exercice budgétaire de cette année-ci, sept millions de
dollars ont déjà été approuvés dans ce même but : fabriquer une opposition
interne. Vous trouverez ça sur le site Web de l’US/AID. Voilà d’où vient
l’argent, dont le plus gros reste toutefois à Miami, chez les intermédiaires
 ; mais le reste arrive ici, et ce qui arrive ici a une grande valeur, parce
que ces gens-là, indépendamment de leur position politique, de leurs
agissements contre la Révolution, indépendamment du fait qu’ils travaillent
au service du gouvernement nord-américain, n’ont pas à payer pour se faire
soigner, n’ont pas à payer pour l’éducation de leurs enfants, bénéficient de
tous les droits et de toutes les prestations sociales. Alors, vous comprenez
mille dollars à Cuba, c’est un salaire de nabab, comme vous le savez
pertinemment. Voilà donc d’où vient l’argent.
Donc, première donnée : 70 des 75 mercenaires ne travaillaient,
ne faisaient rien, et ça depuis plusieurs années pour la plupart, quatre ans
cinq ans, six ans. Pourquoi ne travaillaient-ils pas ? Parce qu’ils
touchaient de l’argent. Et d’où provenait cet argent ? De l’administration
nord-américaine.
Niveau de scolarité. Des 75 mercenaires, seuls 25, soit 33 p.
100, sont des diplômés universitaires. Les autres n’ont pas fait d’études
supérieures.
Journalistes : de ces 25 diplômés universitaires, seuls 2 ont
fait la licence de journalisme. L’an dernier, j’avais dit 4, mais je me suis
trompé. Les deux seuls à avoir fait des études de journalisme sont Raúl
Rivero et Julio César Gálvez, qui était un chroniqueur sportif. Aucun autre.
Bien entendu, si écrire ce que leur dictent leurs employeurs et l’envoyer au
Nuevo Herald ou au Miami Herald, c’est faire du journalisme, alors nous ne
parlons pas le même langage ! En tout cas, avec un titre de journalisme
décerné par une école ou une université cubaine, deux sur vingt-cinq.
Des 75, 14, soit 19 p. 100, sont bacheliers sans être jamais
entrés ensuite à l’Université. Quinze autres, soit 20 p. 100, ont un B.T.
Un a conclu la seconde. Dix-huit, soit 24 p. 100, ont terminé le premier
cycle qui correspond à l’enseignement obligatoire à Cuba. Un autre n’a fait
que des études primaires. Et il m’en manque un dernier dont je n’ai pas les
données.
Quand vous allez informer l’opinion publique, rappelez-vous : 25
sur 75 sont des diplômés universitaires, soit seulement le tiers. Et quand
vous parlerez de journalistes, rappelez-vous que deux seulement ont le titre
correspondant. Je me souviens d’un membre du cabinet espagnol qui avait
déclaré que la crème de la culture cubaine était sous les verrous. De quoi
en rester comme deux ronds de flan. En plus, une femme qui n’avait sans
doute jamais traversé l’Atlantique jusqu’ici. Mais, bon, c’est de l’histoire
passée.
Vous qui êtes de vrais journalistes, des correspondants, vous
savez quelle est notre éthique, vous connaissez notre attachement à la
vérité. Vous le savez, je n’ai pas besoin de vous demander un vote de
confiance ou de crédibilité. Vous savez que quand nous disons quelque chose,
c’est parce que c’est vrai et que nous avons raison, et parce que notre
meilleure arme est la vérité. Alors, sachez que 15 mercenaires sur 75, soit
20 p. 100, n’avaient pas un casier judiciaire vierge pour des délits de
droit commun, ce que nous ne savions pas l’an dernier quand je vous avais
rencontrés à ce sujet : trois pour viol ou abus de mineur ; un pour vol avec
effraction ; quatre pour délits économique ; un pour homicide ; deux pour
attentat ; un pour vol ; deux pour désordres publiques et un pour trafic de
drogues.
Je comprends que l’objectivité n’est pas facile, je comprends
qu’il existe des intérêts derrière les médias, je comprends qu’il existe des
conduites éditoriales tracées par les propriétaires, je comprends qu’il
existe la Société interaméricaine de presse formée par une oligarchie de
propriétaires de journaux sur ce continent, je comprends qu’on ne publie pas
certaines choses parce qu’elles ne plaisent pas aux sièges centraux, je
comprends tout ça, mais je crois avoir le droit, au nom de notre peuple, de
demander qu’on sache la vérité, que ces points que j’ai signalés ne soient
pas passés à l’as. Je crois que c’est le moins que puisse demander un pays
assiégé, soumis à un blocus.
À ce propos, je tiens à vous rappeler que la Commission des
droits de l’homme s’est prononcé l’an dernier sur un texte présenté par le
gouvernement costaricien à la demande des Etats-Unis en vue de condamner
Cuba pour sa décision de juger les mercenaires et de réclamer leur
libération. Or, la Commission a repoussé le texte costaricien par 31 voix
contre 15, a donc voté à une majorité écrasante pour rejeter cette
proposition de condamnation. Cuba estime donc que la Commission a avalisé
son droit de prendre de telles mesures, qu’elle a refusé de la condamner
pour ces procès et de lui demander la libération des mercenaires.
Je dirais que le vote de Genève, plus l’impact extraordinaire de
la visite de Fidel en Argentine où les foules l’ont accueilli d’une manière
impressionnante, plus le fait que les arguments de Cuba se sont frayé une
voie, plus le rôle des intellectuels, de personnes honnêtes dans le monde,
du meilleur de l’intelligentsia internationale, des intellectuels cubains
qui sont venus contrecarrer la campagne médiatique contestant la légitimité
des procès, tout ceci a permis de minorer celle-ci.
Mais il existe maintenant une nouvelle campagne ayant à voir
avec les conditions carcérales des soixante-quinze mercenaires et le
traitement médical qu’ils reçoivent.
Serait-ce par hasard la première campagne lancée contre Cuba au
sujet des prisonniers contre-révolutionnaires ? Allons donc, Cuba est
habituée à ce genre de choses. Cela fait quarante-cinq que nous résistons à
des campagnes médiatiques.
En guise d’exemple, j’ai décidé de vous rappeler un épisode. (Il
montre le grand écran de video.) Savez-vous qui est ce personnage ? Un
policier de la dictature de Batista, Armando Valladares, arrêté - comme le
prouve la presse de l’époque - comme poseur de bombes camouflées dans des
paquets de cigarettes dans des lieux publics, membre d’une cellule
terroriste dont était aussi membre Carlos Alberto Montaner. C’est pour cette
raison que tous deux furent condamnés et Valladares emprisonné.
Mais voyez un peu comment la presse a reflété la chose : « Un
poète invalide incarcéré à Cuba » ; « Réclamation de liberté pour Armando
Valladares » ; « Armando Valladares incarcéré à Cuba » ; « Liberté pour
Valladares » ; « Emprisonné sur sa chaise roulante » ; « Poète croupissant
dans les geôles cubaines » ; « De ma chaise roulante », titre du recueil de
poèmes d’Armando Valladares, troisième édition ; « Le cour dont je vis »,
autre recueil. Voyez un peu l’illustration d’un important journal étranger
 : « Un poète invalide ».
Et maintenant regardez un peu ce que faisait le prétendu poète
invalide dans sa prison : des exercices d’échauffement !

(Vidéo. Professeur Alvarez Cambra. L’équipe médicale de professeurs de haut
niveau composée, je l’ai dit, des plus prestigieux de quatre spécialités -
neurologie, chirurgie, orthopédie et récupération - a conclu que le patient
Armando Valladares n’était qu’un simulateur, autrement dit un comédien qui
voulait tirer profit d’une apparente invalidité, mais qui n’a jamais été
invalide à partir de son entrée à l’hôpital. Telles sont les conclusions de
cette commission.)
Voyez comment il court, le « poète invalide » avant de partir de
Cuba. On lui avait dit : « Si tu veux partir, il faut que tu prouves que tu
n’es pas invalide. »

(Vidéo. Speaker. L’ex-membre de la police de Bastita et terroriste avéré,
Armando Valladares, est parti de l’aéroport de La Havane en octobre 1982 à
destination de Paris après avoir été le protagoniste d’une campagne
internationale qui semblait viser à saper l’image du pays plutôt qu’à
établir la vérité.)

Ça s’est passé comme dans la bible : « Lève-toi et marche ». Il a fait comme
Lazare : la vérité l’a fait marcher (rires).
Et maintenant (autre vidéo), regarde-le donc, le « poète
invalide », reçu à la Maison-Blanche par Reagan. Après, il a même été le
chef de la délégation nord-américaine à la Commission des droits de l’homme
 ! Exactement pareil que l’autre terroriste qui fait maintenant partie de la
délégation nord-américaine à Genève, qui a été arrêté à Cuba alors qu’il
arrivait à bord d’une vedette rapide bourrée d’explosifs et de fusils
d’assaut, Luis Zúñiga Rey, qu’on veut faire passer pour « un militant des
droits de l’homme ».
Pourquoi avons-nous donc arrêté ce Zúñiga Rey ? Tout simplement
parce qu’il faisait partie d’un team de débarquement organisé par la CIA et
apportant des fusils, des explosifs. Pourtant, vous le voyez maintenant
occupant un siège dans la délégation nord-américaine, comme « défenseur des
droits de l’homme ».
Oui, tout ceci ne date pas d’hier. Cuba est habituée à ces
campagnes.
Dans les années 80, nous avons eu droit à la campagne pour la
relaxe du « poète invalide ». Et ceux qui avaient fait des démarches dans ce
sens, nous leur avons d’abord envoyé cette cassette vidéo pour qu’ils
sachent à qui ils avaient à faire, et ils s’en sont mordu les doigts ensuite

Régis Debray, qui était alors conseiller du président français,
a écrit ensuite dans un de ses livres : Il s’est avéré que le poète n’était
pas poète, que l’invalide marchait normalement, que le Cubain n’était plus
Cubain, mais citoyen nord-américain et a participé ensuite à la sale guerre
contre les sandinistes du Nicaragua. Voilà en gros ce qu’a écrit le
conseiller de Mitterrand qui a fait des démarches pour obtenir la libération
du « poète invalide » et l’a obtenue.
Cuba connaît donc ce genre de campagne. Elle sait qu’il s’agit
d’un mécanisme de pression qui fait partie de la guerre à laquelle elle doit
résister.
Et je soutiens ici que nous sommes en face d’une nouvelle
campagne derrière laquelle s’agitent les intérêts qui font la guerre à Cuba.
Je n’accuse pas les journalistes, je n’accuse pas les correspondants
accrédités à La Havane, je ne les en rends pas responsables, mais je dis en
tout cas qu’une nouvelle campagne contre notre pays a démarré.
J’ai d’excellentes relations, comme d’ailleurs l’ensemble du
ministère, avec les correspondants de La Havane. Nous faisons de notre mieux
pour contribuer à ce qu’ils puissent faire un travail sérieux, un travail
que nous respectons, tout comme nous respectons celui des journalistes qui
sont nos compatriotes. Donc, je ne les rends pas responsables, je ne cherche
pas à qualifier leur travail. Je vise les intérêts qui sont derrière les
médias et derrière la campagne contre Cuba.
On a répété inlassablement sept mensonges dans le cadre de cette
campagne, à satiété, sept mensonges sur les prisons cubains, sur la réalité
carcérale, sur le traitement médical que reçoivent les prisonniers pour
mercenariat contre leur patrie.
1) « Les prisonniers sont au secret. ». Faux, archifaux !
2) « Ils sont dans des cellules murées ou au mitard », comme s’il
s’agissait de nos cinq patriotes aux USA qui eux, oui, ont connu le mitard
et même pendant dix-sept mois, en sous-vêtements, dans des cellules murées
et à la lumière artificielle pendant toute la journée. Il est faux que ça se
soit passé ici ! Il est faux qu’il s’agisse de cachots !
3) « Ils ont été tabassés et le sont encore. » Faux !
4) « Ils ne reçoivent pas de soins médicaux. » Faux, et je vais le
prouver ¡
5) « Ils ne peuvent voir leurs proches. » Faux !
6) « Ils ne sont pratiquement pas alimentés, ils meurent de faim,
d’inanition. » Faux ! Notre pays connaît des limitations en matière de
nourriture, mais c’est toute la population qui est concernée, par suite de
la guerre économique qu’il souffre depuis maintenant quarante-cinq ans et
par suite des difficultés supplémentaires découlant de la Période spéciale.
7) « Ils n’ont pas d’eau, et leurs conditions hygiéniques sont presque
incompatibles avec la vie. »
Nous sommes allés voir les autorités pénitentiaires, nous leur avons demandé
des informations. Et quand nous disons ici que ce sont de fieffés mensonges,
quand nous refusons cette présentation des faits parce que tendancieuse et
visant à discréditer le pays, c’est parce que nous sommes allés vérifier
tout ça et que nous avons interrogé nos compañeros dont l’humanisme est
apparu au grand jour - même si le reste des médias du monde n’en a pas dit
un mot - aux yeux de notre opinion publique lorsqu’ils sont venus à la
télévision expliquer comment ils assument leur responsabilité, comment ils
ont mis en place des programmes qui aspirent à éduquer et à réinsérer les
prisonniers à Cuba. Nous les avons interrogés, et l’information que je vous
donne est le résultat de ces entretiens et de ces visites.
Quelle est donc la vérité ? Je soutiens ici que les autorités
pénitentiaires cubaines respectent l’Ensemble de règles minima pour le
traitement des détenus, des Nations Unies, que notre pays les applique et
même parfois au-delà, et qu’elles constituent le manuel quotidien qui régit
le travail dans les prisons.
Je soutiens que les soixante-quinze mercenaires sont traités avec respect et
sans vexations.
Je soutiens qu’ils ne sont pas victimes de traitements cruels, inhumains et
dégradants.
Je soutiens que l’on respect leur intégrité physique et morale.
Je soutiens qu’ils sont traités comme des êtres humains.
Je soutiens qu’ils ne sont pas en butte à un esprit de vengeance pour le
fait d’être des adversaires, d’avoir contribué à la politique de l’ennemi de
leur peuple qui cherche à l’amener à la reddition par la faim et les
maladies.
Je soutiens que notre morale nous empêche de violer ces règles, une morale
qui remonte à la naissance de la Révolution, à l’armée guérillera qui
soignait d’abord avec ses propres médicaments les blessés ennemis, qui n’a
jamais assassiné un prisonnier, qui a toujours combattu en respectant
largement des règles qui ont été ensuite codifiées dans le droit
international humanitaire.
Une Révolution faite de morale, issue de la victoire sur une dictature
sanguinaire qui a bénéficié de la complicité des Etats-Unis jusqu’au dernier
moment n’aurait pas pu en imiter les méthodes.
Je soutiens que nous agissons avec rigueur, certes, mais aussi avec respect,
en étant intègres.
Je refuse le mensonge au nom d’un peuple que nul ne peut accuser de
fanatisme. Notre peuple ne permettrait jamais que nous agissions ainsi,
cesserait de croire en nous du jour où nous manquerions à cette éthique, à
cette parole. Je refuse donc cette campagne, et je vais vous en prouver la
fausseté.
Avant, je vais vous citer seize droits reconnus aux détenus, et que
quelqu’un me dise donc que c’est faux !

1) Aucun des soixante-quinze détenus ne dort à même le sol. Ils ont tous un
lit et un matelas, ce que les autorités correspondantes nous ont confirmé.
2) Ils ont tous accès à l’eau potable.
3) Ils reçoivent tous la presse.
4) Ils prennent le soleil dehors tous les jours. C’est un droit que nous
respectons, sauf en cas d’indiscipline, de conduite inappropriée, de
violation du règlement, comme dans n’importe quelle prison. Ce droit
concerne absolument tous les détenus à Cuba.
5) Ils reçoivent des autorités des articles d’hygiène personnelle, malgré
les limitations du pays.
6) Ils ont droit à l’uniforme réglementaire.
7) Ils peuvent regarder la télévision dans des salles communes.
8) Ils ont droit à une aide religieuse s’ils la demandent, et de fait ils la
demandent, sans entraves.
9) Ils reçoivent une alimentation suffisante, avec une moyenne journalière
de plus de 2 400 kilocalories, ce que prescrit l’Organisation mondiale de la
santé. C’est une alimentation qui souffre des mêmes limitations et des mêmes
problèmes que connaît le reste de la population cubaine, car c’est un
problème que notre pays n’est pas encore parvenu à régler malgré ses efforts
à cause, je l’ai dit, de la guerre économique qu’on nous livre et de la
Période spéciale. Mais que les détenus meurent de faim, qu’ils sont au bord
de l’inanition, un peu comme les prisonniers des camps de concentration
nazis en Europe, c’est un mensonge.
10) Ils reçoivent tous des soins médicaux gratuits d’un haut niveau
scientifique et humain, des médicaments gratuits et passent tous les examens
et toutes les analyses requis. C’est leur droit, indépendamment de leurs
idées et même de leur attitude, et je le prouverai.
11) Ils reçoivent tous des visites de leurs familles tous les trois mois.
C’est ce qui est prévu pour ce moment de leur séjour en prison.
12) Ils ont droit à des relations conjugales tous les cinq mois dans ce
qu’on appelle le pavillon conjugal dans des conditions d’intimité et de
respect. Vous ne verrez pas à Cuba ce qu’on a pu voir au cours de la table
ronde télévisée ici et dans le monde, où l’on voit des détenus aux
Etats-Unis ayant des relations sexuelles devant leurs enfants, cachés sous
une table, en pleine visite familiale. Tout le monde a vu ces séquences,
n’est-ce pas ? Rien de semblable ne se passe ici.
13) Chacun a droit à recevoir les aliments que leur apporte leur famille, en
plus de ceux de la prison.
14) Ils ont le droit de recevoir les livres que leur apporte leur famille.
15) Ils ont le droit d’envoyer et de recevoir du courrier avec leurs
familles et de faire des appels téléphoniques, à raison de cent minutes par
mois, là où c’est possible, bien entendu, parce qu’il y a encore des
endroits où les limitations matérielles de Cuba ne le permettent pas. Mais
c’est une exception.
16) Ils pourront en plus bénéficier du régime progressif prévu dans le
règlement, ce qui est un droit de chaque détenu en fonction de son attitude.
Cela constitue une amélioration de leur situation, du régime disciplinaire,
en fonction donc de leur conduite, de leur comportement et aussi de leur
temps de prison. Cela implique aussi des visites familiales plus rapprochées
et tous les autres droits, comme tout détenu à Cuba.

Je vous ai donné seize points. Maintenant, j’aimerais bien
savoir si cela va être publié, comme tout le contraire a été publié, ou si
l’on continuera de ressasser uniquement les versions inspirées de l’intérêt
des ennemis de Cuba.
J’ai aussi sous les yeux un article attribué à Colin Powell, le
secrétaire d’Etat nord-américain, et publié dans plusieurs journaux
latino-américains ces jours-ci.
J’ai ici La Nación, d’Argentine. Son titre : « Il faut se
solidariser avec ceux qui luttent pour la démocratie à Cuba. » Qu’un
représentant du gouvernement nord-américain parle de démocratie alors qu’il
est totalement discrédité par sa façon de la violer dans le monde, par sa
manière d’agir en marge des Nations Unies, de bafouer les institutions
internationales, c’est vraiment le comble !
Powell écrit donc : « Ces gens ont été arrêtés parce qu’ils ont
commis le crime de penser et d’agir d’une manière indépendante. » Deux
mensonges. D’abord, ce n’est pas pour penser qu’ils ont été détenus, mais
pour agir au service des Etats-Unis et d’en toucher de l’argent ; ensuite,
ils n’agissaient pas d’une manière indépendante, mais bel et bien sous les
instructions de l’administration nord-américaine et de la Section des
intérêts. Le secrétaire d’Etat n’est pas très bien informé.
Il affirme ensuite que c’étaient « des bibliothécaires et des
journalistes indépendants ». Je l’ai déjà dit. Des journalistes, il y en
avait deux ; indépendants, aucun. Ils dépendent de gouvernement
nord-américain dont ils reçoivent des instructions, des moyens et de
l’argent.
Quant aux « bibliothécaires indépendants », c’est risible.
L’idée qu’il puisse y avoir besoin de bibliothèques à Cuba, un pays qui en
compte presque quatre cents publiques, en plus d’une dans chacune de ses
quinze mille écoles est absolument farfelue ! Après avoir vu comment s’est
déroulée en janvier la dernière Foire du livre, l’idée que l’administration
nord-américaine puisse s’attacher à promouvoir des bibliothèques serait
risible s’il ne s’agissait tout simplement d’une ingérence et d’une partie
d’un plan subversif contre notre pays. Et puis, « des journalistes et des
bibliothécaires indépendants ». Fichtre, s’ils sont indépendants, alors nous
nous sommes des martiens !
Powell écrit ici que « ces hommes et femmes » - je l’ai dit, il
n’y a qu’une seule femme - « purgent leurs peines draconiennes dans des
conditions inhumaines » - écoutez bien ce qu’écrit le secrétaire d’Etat de
Bush - « et extrêmement insalubres, où les services médicaux sont totalement
inadéquats, si bien que plusieurs ont maintenant de graves problèmes de
santé. »
Est-ce que Colin Powell aurait-il oublié par hasard qu’il est le
secrétaire d’Etat d’un pays qui possède un véritable camp de concentration
sur la base navale de Guantánamo ? Il faut vraiment un sacré culot de parler
de la situation des autres quand on a une telle poutre dans l’oil ! Parce
qu’en plus de Guantánamo, quid des prisons en Irak ? Et des prisonniers aux
Etats-Unis qui ne savent toujours pas de quoi on les accuse ?
J’ai devant moi un article écrit par le journaliste Gordon
Thomas au sujet de ce qu’on appelle le camp Cropper, qui est une prison de
l’armée nord-américaine située aux alentours de l’aéroport international de
Bagdad. Le journaliste le qualifie de « goulag ».
Il écrit que « cette prison compte trois mille prisonniers
iraquiens », dont « aucun n’a encore été jugé ». Ils sont donc détenus
depuis un an sans savoir de quoi on les accuse, sans être passés devant un
juge, sans être passés devant un tribunal.
Selon Thomas, « ils vivent sous des tentes qui offrent peu de
protection contre le soleil ardent, par des températures de 50º.
Quatre-vingts personnes par tente, sur de petits matelas. Ils ont droit à
trois litres d’eau par jour pour se laver et se désaltérer. Par des
températures qui montent à midi jusqu’à 50º. »
« Chacun dispose d’une pelle à long manche pour creuser des
feuillées ». « Certains découvrent qu’ils ont creusé là où il en existait
déjà ; d’autre sont trop vieux ou trop faibles pour creuser assez profond,
environ un mètre. »
Selon Thomas, « Amnesty International a reçu des informations
selon lesquelles des détenus sont décédés dans ce camp, sous surveillance, à
cause des coups de crosse d’armes longues. »
« Les femmes dorment sous la tente, comme les hommes. Pas plus
que les hommes, elles n’ont pas le droit de laver leur lingerie, si bien que
certaines ont été touchées par des plaies très laides. On leur donne une
petite tasse de poudre contre les poux pour traiter les pires infections
corporelles. »
Croyez-vous vraiment que le ministre des affaires étrangères
d’un pays à la tête d’une prison pareille a l’autorité morale pour parler
des conditions pénitentiaires cubaines ? Ou dois-je alors croire que c’est
un problème d’ignorance et qu’il ne sait pas de quoi il parle ?
Ma conclusion personnelle est que Mr. Powell signe les articles
que lui rédige un quelconque scribouillard anticubain, sans avoir la moindre
idée de dont ils traitent. Peut-être est-il innocent, n’empêche que
l’article apparaît sous sa signature.
De toute façon, n’allez pas croire que l’article de Thomas est
paru dans un grand journal. Quelle blague ! Non, il est paru seulement dans
Rebelión, ce journal électronique alternatif. La grande presse, celle qui
publie tous les jours des choses sur les prisons cubaines, a jugé que ce que
je viens de vous lire au sujet du camp de concentration installé dans la
banlieue de Bagdad n’est pas une question importante. Nous ne sommes pas des
naïfs : les choses sont comme elles sont et non comme nous voudrions
qu’elles soient, mais ça ne veut pas dire que nous ne battons pas pour
qu’elles soient comme elles devraient être.
Je passe maintenant aux soins médicaux que reçoivent les
soixante-quinze détenus. Je dis et je le répète qu’ils bénéficient tous de
soins médicaux de haute qualité.
Et en guise d’exemple, je vais aborder ici deux cas qui ont fait
l’objet de la campagne la plus féroce. Tout d’abord, Oscar Espinosa Chepe,
dont je crois avoir dit que c’était un des mercenaires qui, selon les
factures, avait touché le plus d’argent.
On a dit et on ressasse qu’il a un cancer, qu’il a une cirrhose
hépatique, et que nous le maintenons pourtant dans des conditions cruelles,
sans assistance médicale.
J’ai donc invité ici le docteur Félix Báez Sarría, spécialiste
de médecine interne du premier degré à l’hôpital Carlos Juan Finlay, qui
s’occupe du détenu Oscar Espinosa Chepe, pour qu’il réponde à mes questions.
Je vous remercie, docteur Báez, d’avoir accepté de venir. Vous
êtes diplômé de médecine depuis quand ?
Félix Báez. Depuis 1995.
Felipe Pérez. Et comme spécialiste de médecine interne du
premier degré ?
Félix Báez. Depuis 2000.
Felipe Pérez. Parfait. Je te remercie, Félix, et te demande
pardon de t’avoir tiré de tes occupations, mais comme on met en doute ton
honnêteté de médecin et celle de tous les médecins cubains, je t’ai demandé
de faire cet effort qui n’a rien à voir avec tes occupations habituelles.
Tu es donc spécialiste de médecine interne du premier degré
depuis 2000.
Félix Báez. Exact.
Felipe Pérez. Et depuis quand exerces-tu à l’hôpital Carlos Juan
Finlay ?
Félix Báez. Depuis 1997.
Felipe Pérez. Sept ans, donc. Et depuis quand soignes-tu
Espinosa Chepe ?
Félix Báez. Depuis août 2003.
Felipe Pérez. Un peu moins d’un an, donc. De quoi souffre-t-il ?
De cancer ?
Félix Báez. Non, ministre, il ne souffre pas de cancer.
Felipe Pérez. De cirrhose hépatique, alors ?
Félix Báez. Non plus.
Felipe Pérez. De quoi souffre-t-il donc ?
Félix Báez. Il a attrapé la brucellose en 1983.
Felipe Pérez. En quoi consiste cette maladie ?
Félix Báez. C’est une maladie qui touche généralement le bétail
et qui peut parfois se transmettre à l’homme.
Felipe Pérez. C’est un parasite ?
Félix Báez. Non, c’est une bactérie qui peut vivre dans les
cellules de l’organisme.
Felipe Pérez. Et que provoque-t-elle ?
Félix Báez. Dans son cas, il souffre de granulomatose hépatique.
Felipe Pérez. Autrement dit, cette bactérie lui a provoqué une.
Une quoi ?
Félix Báez. Une granulomatose hépatique.
Felipe Pérez. A la suite d’une brucellose contractée en 1983.
Félix Báez. Exact. Un foie granuleux. La maladie est restée
stable depuis maintenant vingt ans, autrement dit la maladie n’a pas
progressé.
Felipe Pérez. Et quand elle progresse, que peut-elle provoquer ?
Félix Báez. La granulomatose hépatique par brucellose constitue
généralement une réaction de l’organisme à la brucella et ne progresse pas
comme cirrhose hépatique.
Felipe Pérez. Elle est donc restée stable pendant vingt ans.
Quel est son état de santé aujourd’hui ?
Félix Báez. Depuis août 2003, on lui a fait passer une série
d’examens de laboratoires et d’études par imagerie qui prouvent que sa
maladie est stabilisée.
Felipe Pérez. Quel genre d’examens ?
Félix Báez. Des études de la fonction hépatique, plus connues
par la population comme taux de transaminases, dont les valeurs restent
normales depuis août 2003.
Felipe Pérez. Ce qui veut dire ?
Félix Báez. Que le foie fonctionne normalement.
Felipe Pérez. On peut donc affirmer que son foie fonctionne
correctement ?
Félix Báez. On peut l’affirmer.
Felipe Pérez. A-t-il une cirrhose hépatique ?
Félix Báez. Il n’a pas de cirrhose hépatique.
Felipe Pérez. Comment peux-tu l’affirmer ?
Félix Báez. Pour plusieurs raisons. Du point de vue clinique, le
patient a pris du poids, il n’a aucun symptôme ni aucun signe d’insuffisance
hépatique ; ses examens de coagulation sont normaux, alors que très vite, en
quelques heures, en cas d’affection hépatique, le coagulogramme indique une
altération. En plus de l’augmentation de poids, le patient a des taux
d’hémoglobine oscillant entre 12 et 14 grammes.
Felipe Pérez. Entre 12 et 14.
Félix Báez. Le dernier examen, voilà moins de dix jours,
indiquait 15,2.
Felipe Pérez. Et s’il avait une cirrhose hépatique, comme le
saurait-on ?
Félix Báez. Du point de vue clinique, comme je vous le disais,
par toute une série de symptômes : perte de poids, anémie, saignement,
hypertension portale, autrement dit augmentation de la circulation au niveau
de l’abdomen, éventuellement des varices ou des varices de l’osophage qui
produisent un saignement digestif. Le patient ne présente aucun symptôme de
ce genre pour l’instant. Une endoscopie récente permet de constater une
gastroduodénite chronique, mais aucune affectation des veines oesophagiques
qui restent normales. Bref, le patient a un bon état de santé général.
Felipe Pérez. A-t-il perdu du poids cette année ?
Félix Báez. Non, au contraire, il en a pris. Il pèse
soixante-dix-sept kilos, et son taux de masse corporelle est de 26.
Autrement dit, un léger excédent de poids.
Felipe Pérez. Comment a-t-il évolué depuis que tu le traites. Tu
le vois tous les combien, et quel traitement médical lui procures-tu ?
Félix Báez. Je le vois généralement deux fois par semaine, plus
chaque fois qu’il le souhaite. A la moindre plainte, au moindre symptôme, je
viens consulter.
Felipe Pérez. Deux fois par semaine, donc.
Félix Báez. Oui, je l’examine sur place. Et chaque fois que j’estime qu’il
doit consulter un autre spécialiste, je le fais venir.
Felipe Pérez. Combien d’autres spécialistes l’ont-ils vu ?
Félix Báez. Le dermatologue, l’oto-rhino, le gastroentérologue, plusieurs
professeurs de chirurgie et d’hématologie.
Felipe Pérez. Tous des spécialistes ?
Félix Báez. Tous spécialistes.
Felipe Pérez. Tous diplômés ?
Félix Báez. Et beaucoup avec un titre de professeur.
Felipe Pérez. Bien, peux-tu me dire quelles analyses on lui a fait ?
Félix Báez. Une batterie de routine complète : hémogrammes, examen de la
fonction hépatique, coagolugrammes ; tests de brucella, pour savoir si la
brucellose est active, et tous les tests ont été négatifs ; des échographies
diagnostiques ; plus de cinq tomographies ; rayons X du thorax ; rayons X de
la région périnasale, et d’autres examens.
Felipe Pérez. Est-ce que vous n’avez pas fait ce qu’il faudrait faire à un
patient dans le même cas que lui à cause de ses positions politiques ou
parce que c’est un détenu ?
Félix Báez. Absolument pas, ministre. On lui a fait toutes les analyses
nécessaires.
Felipe Pérez. On lui a fait payer le traitement ?
Félix Báez. Tout est absolument gratuit.
Felipe Pérez. As-tu des contacts avec sa famille ?
Félix Báez. J’en ai.
Felipe Pérez. Avec qui ?
Félix Báez. Avec sa nièce qui est médecin intensiviste.
Felipe Pérez. Elle est donc médecin elle aussi. Et tu as une réunion avec
elle pour lui expliquer le cas de son oncle ?
Félix Báez. Exact.
Felipe Pérez. Qui d’autre as-tu vu ?
Félix Báez. Sa femme.
Felipe Pérez. Une seule fois ?
Félix Báez. Oui, une seule fois, et je lui ai expliqué la situation avec
tous les arguments médicaux.
Felipe Pérez. Y a-t-il un examen qu’on aurait dû lui faire et qu’on ne lui a
pas encore fait ?
Félix Báez. Il faut encore lui faire une laparoscopie à biopsie.
Felipe Pérez. Dans quel but ?
Félix Báez. Pour détecter le degré d’activité de la granulomatose,
indépendamment du fait que, du point de vue clinique, on le sait, il
n’existe aucun signe d’évolution vers la malignité.
Felipe Pérez. La laparoscopie à biopsie permettrait de confirmer ou
d’infirmer le diagnostic clinique, à savoir que la maladie ne dérive pas
vers la malignité.
Félix Báez. Oui, grâce à un échantillon du tissu. Ce n’est pas la même chose
de palper à la main que d’examiner le tissu au microscope.
Felipe Pérez. Et cet examen, vous ne l’avez pas encore fait ?
Félix Báez. Non, parce que le patient refuse catégoriquement.
Felipe Pérez. Et si le patient refuse ?
Félix Báez. On ne le lui fait pas. Nous avons pour coutume avec tous les
patients d’obtenir ce que nous appelons le « consentement informé » : la
patient est maître de sa personne et il décide ce qu’il fait de sa santé.
C’est une technique indolore, mais le patient doit être d’accord. A supposer
qu’un patient ne soit pas en état de décider de lui-même, alors on parle à
sa famille pour qu’elle prenne la décision.
Felipe Pérez. Autrement dit, vous ne le feriez jamais avec un patient
inconscient, par exemple, sans le consentement de la famille, même en cas
d’examen simple.
Félix Báez. Même dans ce cas.
Felipe Pérez. Vous ne lui avez toujours fait de laparoscopie parce que le
patient refuse et que vous respectez son droit. Est-ce exact ?
Félix Báez. Oui.
Felipe Pérez. Bien, je te remercie, docteur Félix Báez.
L’autre cas dont on parle beaucoup est celui de la détenue Marta Beatriz
Roque. J’ai donc invité le docteur Annette Álvarez Pérez, spécialiste de
médecine interne du premier degré à l’hôpital Carlos Juan Finlay, qui traite
cette patiente.
Docteur, vous êtes diplômé de médecine depuis quand ?
Annette Álvarez. Depuis 1992.
Felipe Pérez. Et comme spécialiste de premier degré ?
Annette Álvarez. Depuis 2000.
Felipe Pérez. Depuis quatre ans, donc. Et depuis exercez- vous dans cet
hôpital ?
Annette Álvarez. Depuis 1997.
Felipe Pérez. Depuis quand traitez-vous la détenue Marta Beatriz Roque ?
Annette Álvarez. Depuis juillet 2003.
Felipe Pérez. Depuis, donc, qu’elle est hospitalisée comme détenue à
l’hôpital Finlay. Là encore, je vous demande pardon, je sais que ce n’est
pas vos occupations habituelles, mais on dénigre à travers vous tous les
médecins cubains dont on met en doute la compétence technique et l’humanisme
C’est la raison pour laquelle je vous ai demandé de venir.
On dit que la patiente Marta Beatriz Roque souffre d’un cancer du sein et
d’une cardiopathie ischémique. Est-ce exact ?
Annette Álvarez. Elle ne souffre pas de cancer du sein, mais d’une dysplasie
mammaire qu’on traite à la vitamine E, à raison d’un comprimé par jour.
Felipe Pérez. Une dysplasie mammaire est une maladie maligne ?
Annette Álvarez. Ce n’est pas une maladie maligne.
Felipe Pérez. C’est un cancer du sein ?
Annette Álvarez. Ce n’est pas un cancer du sein.
Felipe Pérez. Ça peut dériver en un cancer du sein ?
Annette Álvarez. Non.
Felipe Pérez. C’est une affection courante chez les femmes ?
Annette Álvarez. Oui.
Felipe Pérez. Les femmes tendent à avoir des dysplasies à un certain âge ?
Annette Álvarez. C’est exact.
Felipe Pérez. Peut-on affirmer catégoriquement que la patiente Marta Beatriz
Roque Cabello n’est pas atteinte d’un cancer du sein ?
Annette Álvarez. Oui. Elle ne souffre pas d’un cancer du sein.
Felipe Pérez. La dysplasie se maintient-elle stable ? S’aggrave-t-elle ?
Annette Álvarez. Elle est stable. Il n’existe aucun symptôme ni aucun signe
d’aggravation. Les dernières échographies n’indiquent aucune aggravation.
Elle suit un cycle de vitamine E.
Felipe Pérez. La vitamine E est le traitement indiqué dans ce cas ?
Annette Álvarez. C’est le traitement indiqué.
Felipe Pérez. Prend-elle les comprimés ?
Annette Álvarez. Oui.
Felipe Pérez. Quelle dose ?
Annette Álvarez. Un comprimé de 400 milligrammes par jour.
Felipe Pérez. Qui les lui fournit ?
Annette Álvarez. L’hôpital, puisqu’elle est hospitalisée.
Felipe Pérez. Bien, la cardiopathie ischémique.De quoi s’agit-il exactement
à partir de vos examens ?
Annette Álvarez. Marta Beatriz est une patiente de cinquante-sept ans, qui
souffre d’hypertension depuis cinq ans.
Felipe Pérez. Elle était donc déjà hypertendue quand elle a été hospitalisée
voilà à peu près un an ?
Annette Álvarez. Oui. Mais elle suivait un traitement irrégulier à
l’énalapril, à raison de deux comprimés par jour.
Felipe Pérez. Traitement irrégulier, qu’est-ce à dire ?
Annette Álvarez. Qu’elle ne prenait pas les comprimés tous les jours.
Felipe Pérez. Avant son hospitalisation, donc.
Annette Álvarez. Nous l’avons reçue le 23 juillet aux urgences de l’hôpital,
elle se plaignait d’une forte douleur au thorax, qu’elle décrivait comme un
élancement, sans irradiation ailleurs dans le corps et sans aucun autre
symptôme. À l’examen clinique, on a constaté une tension élevée, si bien
qu’on a décidé de la laisser sous observation et de lui faire un
électrocardiogramme.
Celui-ci a permis de constater un bloc de branche gauche complet, si bien
que nous avons modifié notre diagnostic et décidé de la laisser en
observation. En effet, un pourcentage élevé de blocs de branche gauche est
d’origine ischémique, bien que la douleur que décrivait la patiente en
question n’ait pas été typique de l’ischémie coronaire. On a donc décidé de
l’hospitaliser dans une salle de soins intermédiaires, où elle a évolué
favorablement. La douleur thoracique a disparu, les électrocardiogrammes ont
continué de révéler le bloc de branche gauche complet. C’est compte tenu de
cette évolution favorable qu’on l’a emmenée à la salle des détenus de
l’hôpital Finlay.
Felipe Pérez. Dans cette salle, docteur, où dort-elle ?
Annette Álvarez. Dans une chambre qu’elle partage avec une autre patiente,
chacune dans son lit.
Felipe Pérez. A-t-elle une salle de bain ?
Annette Álvarez. Oui, dans la chambre.
Felipe Pérez. L’eau courante ?
Annette Álvarez. L’eau courante.
Felipe Pérez. 24 heures sur 24 ?
Annette Álvarez. Oui.
Felipe Pérez. Elle a la télévision.
Annette Álvarez. Elle a la télévision.
Felipe Pérez. Où ?
Annette Álvarez. Dans sa chambre.
Une fois dans cette salle, après une discussion entre spécialistes, nous
avons décidé, pour écarter la possibilité que ce soit une ischémie coronaire
de lui faire une échocardiographie de stress. Ce que nous avons fait.
Felipe Pérez. Où ?
Annette Álvarez. A l’hôpital Hermanos Ameijeiras.
Felipe Pérez. Qu’est-ce qu’une échocardiographie de stress, s’il vous plaît
 ?
Annette Álvarez. C’est une échographie du cour : la patiente est au repos,
mais on soumet le cour à un effort. Et cette échocardiographie a prouvé
qu’elle ne souffrait pas de cardiopathie ischémique.
Felipe Pérez. C’est le test définitif sur ce point ?
Annette Álvarez. Oui. De toute façon, l’idée avait été déjà écartée du point
de vue clinique, compte tenu des symptômes.
Felipe Pérez. C’est un test supplémentaire.
Annette Álvarez. Oui, c’est un examen qui nous aidait, parce que
l’électrocardiogramme antérieur nous avait fait un peu hésiter. Le teste
prouve donc qu’il n’existe pas de cardiopathie ischémique aiguë. Nous
pouvons maintenant l’affirmer catégoriquement. N’empêche que c’est une
patiente à risque, à cause de son excédent de poids, sa masse corporelle est
de 26. La patiente mesure 1,60 mètres et 70 kg. Ce qui indique un excédent
de poids.
Felipe Pérez. A-t-elle perdu du poids cette année ?
Annette Álvarez. Non.
Felipe Pérez. Elle en a pris ?
Annette Álvarez. Elle en a pris.
Felipe Pérez. Et c’est un facteur de risque.
Annette Álvarez. C’en est un. L’autre facteur de risque est son hypertension
avec répercussion cardiovasculaire, parce qu’elle a une cardiopathie
hypertensive et elle est en plus une patiente à diabète type II. Ce sont
toutes des maladies chroniques, contrôlées par traitement médical.
Felipe Pérez. Quel traitement lui avez-vous prescrit pour le diabète ?
Annette Álvarez. Elle suit un régime pour diabétique de 1 800 calories, plus
une formule basique de viande ; elle prend de la glibenclamide, un comprimé
de 5 mg au petit déjeuner. Elle avait commencé le traitement avec trois
comprimés par jour. Il se peut même que la semaine prochaine, nous passions
au seul régime alimentaire.
Felipe Pérez. Pourquoi ?
Annette Álvarez. Parce qu’elle est bien sous contrôle.
Felipe Pérez. Ça, c’est pour le diabète. Et le traitement pour la
cardiopathie hypertensive, cette hypertension ?
Annette Álvarez. Nous lui avons prescrit de l’aténolol 50 mg deux prises par
jour.
Felipe Pérez. Que peut-on dire de son état actuel ?
Annette Álvarez. Qu’elle est stable et totalement asymptomatique.
Felipe Pérez. La voyez-vous fréquemment ?
Annette Álvarez. Deux fois par semaine, et chaque fois qu’elle demande une
consultation intermédicale. Je suis son médecin de chevet, et je détermine
si d’autres spécialistes doivent la voir. C’est parfois elle qui nous
demande à voir un autre spécialiste.
Felipe Pérez. D’autres spécialistes sont venus l’examiner ? Lesquels ?
Annette Álvarez. La gynécologue, le chirurgien maxillo-facial, l’allergiste.
Felipe Pérez. Tous des spécialistes ?
Annette Álvarez. Tous spécialistes.
Felipe Pérez. Avez-vous eu des contacts avec la famille de la patiente ?
Annette Álvarez. Non.
Felipe Pérez. D’autres médecins en ont eu ?
Annette Álvarez. Oui, quand elle était en soins intermédiaires.
Felipe Pérez. Je vous remercie, docteur. Je vous fais de nouveau mes excuses
pour avoir dû vous enlever à vos occupations ordinaires. Je vous demande
pardon pour l’idée qu’on a fait courir que des patients à vos soins aient pu
être traités d’une manière cruelle et inhumaine, pour le fait qu’on ait mis
en doute que vous puissiez consacrer votre talent scientifique et tous vos
efforts humains à la protection d’une vie de patient, même si ceux-ci sont
des détenus, même si ceux-ci ont travaillé au service de la puissance qui
agresse leur peuple. Je vous remercie.

Je voudrais finalement vous montrer un choix de témoignages
obtenus par des journalistes cubains lors de conversations avec les proches.
J’en fournirai ensuite une copie à la presse.

(Première séquence de vidéo sur l’écran de la salle.)
Journaliste. Comment va votre frère ? Depuis quand ne le voyez-vous plus ¿
Teresa López Bañobre frère du détenu Marcelo López Bañobre). Je l’ai vu il y
a une quinzaine de jours. Il est venu chez nous, ici, ce sont les compañeros
qui s’en occupent qui nous l’ont amené. Il a reçu une permission, parce que
mon papa était en très mauvais état, et c’est moi-même qui leur ai demandé
cette faveur, si jamais ils pouvaient. [.] Et on lui a permis. Il est resté
environ une heure et demie.
Journaliste. Ici, à la maison ?
Teresa López Bañobre. Oui, ici, avec nous. Il va très bien, il
va très bien, il n’a jamais pesé autant. Mon frère a toujours été quelqu’un
de très maigre, et il pèse maintenant soixante kilos. Oui, soixante kilos,
alors qu’il n’avait jamais dépassé avant quarante-huit ou quarante-neuf
kilos. On le traite bien, il le reconnaît lui-même.
J’ai des lettres de lui où il dit qu’on ne l’offense pas, qu’on
ne le moleste, qu’on ne l’humilie pas, qu’on le traite avec beaucoup de
respect. Et, en plus qu’il le dit, lui, on peut le constater à son état
d’esprit, à son équilibre émotionnel.
[.] Bien entendu, il est détenu, il est privé de liberté, mais
il n’est pas mal, il n’est pas mal.
Journaliste. Vous le voyez souvent ? Combien de fois pouvez-vous
lui rendre visite en prison ?
Teresa López Bañobre. La fréquence des visites, c’est tous les
trois mois, environ trois heures. Elle dure parfois un peu plus.
Mais lui, en fait, il a eu la possibilité de nous voir presque
tous les mois, parce que, pour une raison ou une autre, un problème légal,
un problème de convocation, ma mère y est allé et on lui a donné quelques
minutes avec lui. A son anniversaire, ma maman est allé lui apporter des
cigarettes et elle restée encore un moment avec lui. En fait, il a calculé
qu’entre les visites conjugales et nos visites à nous, il a reçu des visites
tous les mois.
Journaliste. Il bénéficie du pavillon conjugal ?
Teresa López Bañobre. Oui, il en bénéficie.
[.] On lui fait une tomographie axiale, et une étude
neurologique. La tomographie, elle a eu lieu il y a deux semaines, quand il
venu ici, et tout était normal, mais on lui a recommandé de poursuivre les
examens neurologiques.
[.] Je pense que mon frère reconnaîtrait devant n’importe qui
qu’on ne l’a pas maltraité, qu’on ne l’a pas molesté, qu’on ne l’a pas
humilié, qu’on ne l’a pas frappé. Mon frère n’a pas été abandonné, il a été
traité respectueusement, avec des égards, et nous aussi.

(Nouvelle séquence de vidéo.)
Journaliste. Mireya, je voudrais savoir comment va votre fils, dans quelles
conditions il se trouve, comme va sa santé, comment on le traite.
Mireya Pentón Orozco (mère du détenu Léster González Pentón). Question santé
il va très bien, parce qu’il est jeune et qu’il n’est pas malade. On
s’occupe de lui, je ne peux pas dire le contraire, et ces derniers temps il
a même eu plusieurs permissions de sortie. On lui a fait faire un examen
médical, on s’est occupé d’un problème dentaire qu’il avait, on lui arraché
quelques dents en mauvais état en vue de lui faire un dentier. Il me dit
qu’il a attrapé une petite infection, mais que ce n’est pas grave, et qu’on
le traite à l’amoxicilline. Il faut maintenant attendre vingt-cinq jours
avant de lui faire la prothèse dentaire. Non, question santé, il va bien. [.
.]
Journaliste. Vous vous écrivez souvent ?
Mireya Pentón Orozco. Les lettres tardent parfois un peu, dans un sens comme
dans l’autre. Elles tardent, c’est le seul ennui. Mais on m’a dit que
c’était un problème du courrier en général. Parce que, quand un problème
comme ça se présente, je vais à la prison et j’exige une explication. Comme
maman, j’exige qu’on m’explique, et on m’a répondu que c’était un problème
de la poste.
Journaliste. Comment vous traite-t-on quand vous vous adressez aux autorités
de la prison ?
Mireya Pentón Orozco. Non, non, je n’ai pas de problèmes, je dois dire la
vérité. On me traite bien. Chaque fois que je demande une explication, on me
la donne.
Journaliste. Il bénéficie du pavillon conjugal ?
Mireya Pentón Orozco. Oui, tous les cinq mois, trois heures chaque fois.

(Nouvelle séquence de vidéo.)
Journaliste. Dulce María, avez-vous pu rendre visite à Carmelo ?
Dulce María Amador (femme du détenu Carmelo Martín Díaz Fernández). Oui. On
l’a arrêté le 19 mars 2003, et j’allais tous les mercredis à Villamarista où
je pouvais le voir pendant une heure. On parlait et je lui amenais de la
nourriture, du café, du jus, ce genre de choses.
Le procès a eu lieu le 4 avril, et il a été transféré à la prison de
Guanajay le 23. Dès qu’on l’a appris, le lendemain, on y est allé, sa fille
qui est médecin, et moi, et on nous a permis aussitôt de le voir, sans
préavis, sans nous annoncer, et on a parlé avec lui une heure.
Journaliste. Vous lui avez apporté quelque chose ?
Dulce María Amador. Oui, un repas, du jus, des affaires de toilette.
Journaliste. Vous avez passé tout ça sans mal ?
Dulce María Amador. Oui, sans mal. Je n’ai jamais eu aucun problème de ce
genre à Guanajay.
Depuis, je lui rends visite tous les trois mois. Le pavillon
conjugal, à Guanajay, c’est tous les quatre mois, pas comme à d’autres
endroits où c’est tous les cinq mois. Pavillon tous les quatre mois et
visite tous les trois mois.
(...)
Journaliste. Et que dit Carmelo du traitement médical ?
Dulce María Amador. Il n’a pas à se plaindre. À la dernière visite, qui a
duré deux heures, il m’a dit : « Dulce, je ne me sens pas mal, je suis très
bien, parce que les conditions de l’hôpital sont très bonnes ». Doris, sa
fille, est allé le voir à l’hôpital, et moi je suis resté à la visite avec
son gendre. Et Doris m’a raconté ensuite que tout était très propre, tout
bien en ordre, avec beaucoup d’hygiène, un bon traitement. Et lui m’a dit
qu’il se sent bien, malgré ses maladies, bien entendu, mais qu’il se sent
bien.
Journaliste. On lui permet d’avoir la bible ?
Dulce María Amador. Oui, il l’a avec lui.
Journaliste. Et quoi encore ?
Dulce María Amador. Il a sa bible depuis qu’il est à Villamarista. Je la lui
ai apporté la première semaine où j’y suis allé, le premier mercredi, c’est
le jour qui me revient, et je lui apporté La Palabra Nueva, une revue de
l’Eglise catholique, les imprimés qu’on lui donne chaque semaine, les cultes
Je vais au Cristo de Limpia, qui se trouve à Corrales, entre les rues Egido
et Monserrate, c’est son église, et j’y vais tous les dimanches, et tous les
imprimés, je les lui apporte. Non, je n’ai jamais eu d’ennuis pour ça.
D’ailleurs, il me les réclame.
(...)
Journaliste. Des livres, des revues d’un autre genre ?
Dulce María Amador. Des livres, des revues. En général, je lui apporte des
livres normaux, des éditions normales, certains de genre historique, parce
qu’il n’aime pas lire n’importe quoi. Oui, je lui amène beaucoup de livres,
pour qu’il se distraie, surtout de genre historique, c’est ça qu’il aime.

(Nouvelle séquence de vidéo.)
Journaliste. Gisela, avez-vous pu voir votre mari récemment ?
Gisela Delgado (femme du détenu Héctor Palacios). Je l’ai vu hier. Il est
hospitalisé à la salle de détenus de l’hôpital provincial de Pinar del Río,
parce qu’il a été opéré le 19 février de la vésicule, à cause de calculs.
(...)
Journaliste. Il a été opéré et il a reçu des soins, n’est-ce pas
 ?
Gisela Delgado. Bon, je crois que c’est le plus correct, pas vrai, c’est le
plus humain, la moindre des choses.
Journaliste. Et les soins médicaux ?
Gisela Delgado. Je n’ai pas à me plaindre, parce que c’était des médecins
civils, même si on savait que l’hôpital avait été occupé par la police, par
les troupes spéciales.
Journaliste. Mais parlez-moi des soins, vous me disiez que vous n’aviez pas
à vous plaindre.
Gisela Delgado. Le traitement médical a été bon, je crois, d’après ce que
j’ai vu chez les médecins, car j’ai pu leur parler, mais pas parce que la
police m’a aidée. Non, ce n’est pas comme ça. Je suis arrivé à Pinar del Río
et j’ai dû trouver toute seule l’endroit où vivait le médecin, parce que je
n’ai pas pu le rencontrer à l’hôpital. Et j’ai pu lui parler avant qu’il
l’opère.
Journaliste. Et qu’a dit le médecin ?
Gisela Delgado. Je l’ai surtout interrogé sur son état de santé. Nous ne
sommes des gens qui compromettent les autres avec nos idées. Je veux dire,
nous avons nos idées, et si tu me les demandes, je te les dis. J’ai surtout
interrogé le médecin sur son état de santé, s’il pouvait résister à
l’opération, quelles étaient les garanties de l’opération.
Journaliste. Et qu’a dit le médecin ?
Gisela Delgado. Il m’a dit que ce n’était pas un cas exceptionnel, qu’il
avait la vésicule pleine de calculs et qu’il fallait absolument l’opérer,
parce que c’était de très petits calculs qui risquaient de sortir et se
loger dans n’importe quel conduit.
Selon moi et selon mon mari, nous avons reçu un bon traitement de la part
des aides, des infirmières, des médecins.
Journaliste. Avez-vous demandé quelque chose de spécial au médecin quand
vous avez parlé avec lui.
Gisela Delgado. Nous savons qu’il existe à Cuba l’opération dite de
chirurgie non invasive, et qu’elle se fait aussi en province. Le médecin en
chef de la prison, le docteur Pozo, m’a dit qu’elle se faisait en province,
que ce n’était pas la peine d’aller à La Havane, et qu’on allait tenter de
le faire par chirurgie non invasive, et non à l’opération traditionnelle qui
implique d’inciser.
Journaliste. Donc, les médecins ont accepté la technique par les voies
naturelles.
Gisela Delgado. Oui, les médecins étaient des spécialistes de cette
technique, le docteur Dopico et le docteur Montes de Oca. Je leur ai parlé
quand ils sont sortis du bloc opératoire, et ils m’ont dit que tout s’était
très bien passé, que l’opération avait duré une heure et que Hector n’avait
aucune autre affection grave dans les organes, extérieurement. Selon eux, en
tant que chirurgiens, tout s’était bien passé.
Journaliste. Donc, il a reçu de bons soins, et vous-même et votre mari vous
en êtes reconnaissants.
Gisela Delgado. Je ne peux pas dire le contraire, parce que ces gens ont
travaillé avant tout d’une manière humaine, en bons professionnels, et le
rétablissement d’Héctor le prouve.

(Nouvelle séquence de vidéo.)
Journaliste. María Margarita, combien de fois avez-vous rendu visite à Edel
 ?
María M. Borges (femme du détenu Edel José García Díaz). Des visites, j’en
ai eu cinq.
Journaliste. Et vous avez eu droit au pavillon conjugal ?
María M. Borges. Oui, tous les cinq mois, selon le règlement, et les visites
tous les trois mois. Le pavillon, trois heures, et les visites, deux heures

Journaliste. Vous pouvez lui apporter de quoi manger ? On vous le permet ?
María M. Borges. Oui, jusqu’à présent, je n’ai jamais eu de difficultés à
faire passer ce que je lui apporte.
Journaliste. Et le traitement médical qu’il reçoit, il est bon ?
María M. Borges. Oui, le traitement médical qu’il a reçu a toujours été bon,
il ne s’est jamais plaint de l’attitude des médecins.
Journaliste. Et les médecins, comment vous traite-t-il, vous ?
María M. Borges. Jusqu’à présent, les médecins m’ont toujours expliqué les
choses. J’ai même rencontré la psychiatre qui s’occupe de lui à Santiago et
elle m’a bien informé de tout. Non, le traitement des médecins a été bon.
Journaliste. Qu’est-ce qu’on vous permet de lui amener ?
María M. Borges. Des aliments, des articles d’hygiène personnelle, ce que je
veux. Je n’ai jamais eu de problèmes.
Journaliste. S’est-il plaint à un moment donné de mauvais traitements ?
María M. Borges. Non, je ne l’ai jamais entendu se plaindre de mauvais
traitements. On le traite avec respect, tout comme moi. Il ne m’a jamais
parlé de quelque chose comme ça. Il se sent mal, bien entendu, parce qu’il
est incarcéré. Et il ne devrait pas l’être, selon moi, si vous voulez mon
avis. En tout cas, on le traite bien. Chaque fois que je me suis adressé au
chef de la prison pour une chose ou pour une autre, je n’ai jamais eu de
problèmes.
Journaliste. Et quand il a besoin d’un médicament, c’est toi qui
dois l’acheter ?
María M. Borges. Non, non, jusqu’à présent, tous les médicaments on les lui
fournit sur place.
Journaliste. Gratis ?
María M. Borges. Gratis. Je lui en ai apporté d’autres, qu’on m’a aussi
laissé passer.
Journaliste. Et on lui a fait d’autres traitements, d’autres examens
médicaux ?
María M. Borges. Oui, il me dit qu’on lui en fait constamment, des prises de
sang, le poids, la tension, le dentiste pour des obturations. C’est ce qu’il
m’a raconté.
Journaliste. Et vous, comment vous traite-t-on quand vous lui rendez visite
 ? Ou quand vous demandez à le voir.
María M. Borges. Non, je n’ai jamais demandé à le voir, je m’en tiens aux
visites tous les trois mois. On me traite bien. Quand j’ai eu des doutes sur
quelque chose, je l’ai fait savoir au chef de la prison. On me traite avec
respect, et moi je les traite avec respect.

(Nouvelle séquence de vidéo.)
Journaliste. Vous avez vu récemment votre mari ? Comment va-t-il ?
Ileana Marrero (femme du détenu Omar Rodríguez Saludes). Je l’ai vu
récemment, le 14 février, et il va bien. Dans la mesure du possible, bien
sûr. Sa santé est bonne, mais il est toujours détenu.
Journaliste. Vous pouvez le voir tous les combien ?
Ileana Marrero. Tous les trois mois.
Journaliste. Comment le traite-t-on en prison ?
Ileana Marrero. Son état d’esprit et sa santé vont très bien. On le traite
bien, respectueusement, il ne s’est rien passé de grave jusqu’à présent. Je
ne sais pas, on le traite bien, jusqu’à présent.
Journaliste. L’avez-vous trouvé torturé, physiquement dégradé ?
Ileana Marrero. Non, non, bien sûr que non.

(Nouvelle séquence de vidéo.)
Journaliste. Comment va votre mari, Beatriz ?
Beatriz del Carmen Pedroso (femme du détenu Julio César Gálvez Rodríguez).
Mon mari va bien, je vois en bonne forme. On l’a opéré de la vésicule, à
cause d’un calcul, et je le vois en bonne forme.
Journaliste. Il se rétablit bien ?
Beatriz del Carmen Pedroso. Oui, il a été opéré il y a quarante-huit heures,
et il se rétablit bien. On le nourrit bien, et son état d’esprit est bon.
L’hypertension a cédé, il est tranquille.
Journaliste. Depuis qu’il est détenu, vous avez pu le voir périodiquement ?
Beatriz del Carmen Pedroso. Oui, bien sûr, je peux lui rendre visite, lui
parler. Ce sont des visites très utiles, parce que nous avons pu échanger
des vues, des sentiments. La dernière fois, je n’ai même pas eu à lui
apporter des aliments ou des jus, parce qu’on lui garantit tout ici. Il est
bien nourri.
(Fin des séquences vidéo.)

Felipe Pérez. Nous allons remettre une copie de ces interviews à chaque
chaîne de télévision. Et nous allons remettre à la presse une transcription
de ces témoignages et le texte de la résolution nord-américaine sur Cuba.
Il me resterait juste deux questions à poser, en toute franchise et avec
tout mon respect.
Pourquoi personne n’a publié ou présenté des témoignages de ce genre ?
Pourquoi, pendant plus d’un an, jamais personne, jamais un seul média n’a pu
obtenir des témoignages de ce genre, comme ceux que les journalistes de la
télévision cubaine ont obtenus ? Ces gens-là étaient-ils donc inaccessibles
 ? Refusaient-ils de voir la presse ? Pourtant, on a vu paraître tous les
jours d’autres genres de témoignage dans la presse étrangère...
Je me demande, et je vous demande : pourquoi n’a-t-on jamais vu un
témoignage de ce genre ? Je ne dis pas que les autres ne paraissent pas,
ceux selon lesquels les détenus ne reçoivent pas de soins médicaux, qu’ils
croupissent dans des cachots. Je veux bien que ceux-là paraissent... Mais
pourquoi ces points de vue-ci ne paraissent-ils jamais ?
Je me le demande et je vous le demande. Non pour que vous me répondiez ici,
mais pour que, en votre for intérieur, sur l’oreiller qui porte conseil,
vous vous demandiez si Cuba a raison ou non de dire qu’il existe une
campagne, si Cuba a raison ou non de dire que les médias privés et obéissant
à des intérêts spécifiques, ceux qui ne sont pas amis de Cuba, sont avant
tout soucieux de présenter cette vision des choses manipulée.
Je ne demande pas pourquoi les médias ne sont pas favorables à Cuba, je ne
réclame pas ça, je ne réclame pas une couverture complaisante ni amicale :
je réclame tout bonnement une couverture objective et équilibrée, qui fasse
connaître les deux côtés de la médaille. Nos journalistes n’ont eu aucun mal
à rendre visite, la dépêche de presse à la main, aux familles des détenus
dont l’agence disait que c’étaient les plus graves. On m’a dit que certaines
n’ont pas voulu témoigner. C’est leur droit. Mais la question que je laisse
flotter dans l’air, c’est pourquoi nul n’a jamais dit un seul mot de ça en
un an. Qui l’interdit ? Je disculpe les correspondants, parce que je sais
qu’ils ne se prêteraient jamais à une manouvre où la vérité sortirait
écornée. Ma question est la suivante : pourquoi rien n’est jamais paru dans
ce sens ?
Ce n’est pas un reproche. C’est une prière en quête de la vérité.
Ma seconde question est la suivante : ce que je viens de vous dire sera-t-il
publié ? Ces témoignages vont-ils se voir, comme on a vu les autres sur les
chaînes de télévision à différents moments ? Ça dure dix-neuf minutes. Après
tous les débats que vous connaissez, ne vaudrait-il la peine de leur
consacrer de huit à dix minutes sur n’importe quelle chaîne du monde ? Ça se
fera-t-il ? Feront-elles la une ?
Je vais vous donner une transcription de ces témoignages en espagnol,
anglais et français pour qu’ils puissent faire demain la une d’un journal.
Ecrira-t-on des éditoriaux sur l’information que je viens de fournir ? C’est
une nouvelle question que je laisse dans l’air.
Je ne vais pas me plaindre du passé. Je demande si, dorénavant, on va
publier, on va faire connaître la vérité que présente Cuba. Parce que la
vérité doit être le nord qui oriente toutes les boussoles.
C’est la vérité qui a conduit la Révolution cubaine jusqu’ici et qui
continuera de la conduire jusqu’à la victoire sur le blocus et sur
l’agression déclenchée contre notre peuple.
Normalement, je réponds aux questions. Mais aujourd’hui, comme c’est moi qui
ai laissé des questions flotter dans l’air, je vous remercie d’être venus.
Je crois vous avoir donné assez d’informations et je vous remercie.
Modérateur. Merci, monsieur le ministre, de votre information.