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26 avril Paris CDG : témoignage d’un blacklisté pour avoir aidé un expulsé

Publie le mercredi 21 mai 2008 par Open-Publishing
2 commentaires

Message de Serge N FOSSO :

Bonjour à tous,

Je vous envoie ce message de Mons en Belgique. J’y suis arrivé hier 26
avril 2008 peu après minuit et après avoir été expulsé violemment du vol
de SN Bruxelles Air Lines à destination de Kinshassa via Douala et gardé
en cellule à l’aéroport de Bruxelles de 11:00 à 22:00 sans manger, ni
boire et sans pouvoir contacter ma famille.

Petit compte rendu :

Nous sommes le 26.04.2008, je me rends au Cameroun pour mes vacances. Je
pars de Clichy à 5:30 en taxi pour CDG1. Je pars de Paris à7:40 pour
Bruxelles avec un vol SN Bruxelles Air Lines et doit prendre la
correspondance pour Douala à 10:40 à l’aéroport de Bruxelles.

Lors de mon entrée dans l’avion entre 10:00 et 10:45, je suis bien
accueilli par les hôtesses, je vais rejoindre mon siège, le N° 41H qui
se trouve vers le fond de l’avion, à 5 ou 6 rangées de mon siège.
Lorsque j’y arrive, il y a au fond de l’engin à la dernière rangée des
hommes habillés en tenue grise et qui essayent de maîtriser un homme de
couleur noire. Celui-ci se débat et crie : « Au secours, laissez moi, je
ne veux pas partir ». Les hommes en gris essaient de l’empêcher de parler
en l’étouffant. Le jeune homme se débat comme il peut et continue de
crier car il y a sur lui 4 colosses en gris. D’autres policiers en
civile ont établis un périmètre de sécurité et personne ne peut aller
vers le lieu du drame qui se déroule sous nos yeux.

Je me rends compte que c’est une expulsion, l’homme que l’on expulse est
toujours maîtrisé et étouffé et pousse des cris que l’on n’entend plus bien.

Je me souviens alors de Semira Adamu, une jeune nigériane qui était
morte en septembre 1998, il y a 10 ans lors d’une expulsion similaire à
celle qui se déroule sous mes yeux dans un avion Sabena. Que dois-je
faire ? Rester sans rien dire comme les autres ? Agir ?

En tant que militant des droits de l’homme et des étrangers, je me lève,
interpelle l’hôtesse la plus proche de moi proteste en lui disant
fermement et à voix haute que ceci est un vol commercial et que je ne
saurais voyager dans ces conditions. D’autres passagers jusque là restés
calmes se lèvent et protestent à leur tour. Je filme comme d’autres
passagers la scène avec mon appareil photo. Devant cette protestation
générale, les hommes en gris quittent l’avion avec leur passager.
Quelques minutes plus tard, des policiers montent dans l’avion, trois
personnes sont désignées par les policiers en civil, je suis parmi
elles. Les policiers nous demandent de quitter l’avion, lorsque je pose
la question pourquoi, ils se jettent sur moi, menottes aux mains, coups
par ci par là, je saigne, je suis trainé dans les couloirs de l’avion et
puis dans les escaliers avant d’être jeter dans un fourgon de la police
sans mes 2 valises en soute et ma petite valise de cabine. J’ai
quelques bobos sur le visage et les mains blessées par les menottes. De
ce fourgon, je remarque qu’une policière a mon appareil photo dans la
main et visionne certainement mon petit film de la scène de l’avion. Une
dure et longue journée commence pour moi sous les insultes et les
maltraitances des policiers qui m’emmènent au cachot de l’aéroport de
Bruxelles. A 13:35 la police nous libère, nous sommes 2 à ce moment un
autre camerounais qui était dans la bande des trois expulsés et moi. Je
n’ai plus vu le troisième, un homme de couleur blanche.

Au moment de notre libération, la police nous informe que nous ne
voyagerons plus pendant les six prochain mois avec la compagnie SN
Bruxelles Air Lines. A la question de savoir comment nous allons faire
pour nous rendre au Cameroun, la police nous renvoie vers la compagnie.

Avec mon compagnon d’infortune, nous nous y rendons. Nous demandons à
rencontrer l’un des responsables de la compagnie, on nous indique que le
responsable de la sécurité de la compagnie arrivera bientôt. Nous
patientons, j’ai une pensée pour ma petite fille qui m’attend à Douala
avec impatience et enthousiasme et qui certainement sera très déçue de
ne pas me voir. Je suis en colère, très en colère.

La responsable de sécurité de la compagnie arrive et nous informe que
nous avons tous les 2 étés fichés dans la liste noire (pas blanche) de
la compagnie et ne pourrons plus voyager avec elle pendant les 6
prochains mois. Je lui demande alors comment nous faisons dans ce cas
pour arriver à Douala. Elle m’indique que c’est à nous de voir et que la
compagnie ne nous remboursera pas. Après ces mots, ma colère monte, mon
ton aussi, je signale a cette dame que je n’ai pas de problème si je ne
voyageais plus jamais avec SN Bruxelles Air Line, mais que je souhaite
rentrer à Paris et surtout me faire rembourser car la compagnie n’a pas
rempli son contrat. Mon ton est haut mais courtois les passants nous
regardent, la dame appelle la police qui vient et me ramène cette fois
seul au cachot. J’y resterais jusqu’à 22:00 sans manger, ni boire et ni
contacter ma famille.

Mon neveu qui habite Mons est contacté et arrive avec son épouse entre
21:00 et 22:00. Les policiers m’informent de leur présence et
m’indiquent que je suis libre de rentrer avec eux. Je leur dis que je ne
comprends pas pourquoi j’ai été en cellule toute la journée dans ces
conditions et que je ne souhaite pas la quitter avant qu’une solution ne
soit trouvée à mon problème : partir à douala ou rentrer sur Paris et
être remboursé. Des explications se font de part et d’autres, les
policiers souhaitent que je quitte la cellule et moi je souhaite y
rester, ce qui visiblement ne les satisfait pas. Les policiers décident
donc de me sortir de la cellule par la force, me remettent mes affaires,
je refuse de les prendre. L’un d’entre eux me menace, me tient par le
cou et me pousse hors de leurs bureaux et me balance mes affaires sur la
figure, je m’en vais sans les ramasser. Mon neveu et son épouse me
rejoignent je suis une fois de plus en colère, très en colère de tout ce
qui se passent. Je leurs demande de rentrer à la maison, ils refusent
évidemment.

L’épouse de mon neveu va voir l’un des policiers qui lui donne mes
affaires et des informations sur les démarches que je devrais faire.
Elle revient avec mes affaires, il y manque mes lunettes de soleil Ray
Ban et en plus la vidéo de la scène dans l’avion a été effacée de mon
appareil photo, sûrement par les policiers qui m’ont interpellé. Une
preuve vient d’être détruite, heureusement pas toutes car d’autres
passagers ont filmé la scène. Je suis toujours en colère, très en
colère, je pense à ma petite fille pour qui j’ai exceptionnellement pris
mes congés, je suis en colère parce que ces derniers jours ont été
éprouvants professionnellement, physiquement et moralement. Je suis en
colère, très en colère parce que je suis du genre calme, courtois et
surtout pas violent. Or toute cette journée, j’ai été traité avec mépris
et violence parce que j’ai été un moment la bouche d’un malheur qui
n’avait point de bouche, parce qu’en protestant dans l’avion, je suis
allé au secours d’un être humain qui était maltraité et qui demandait du
secours.

Je suis en colère parce que je suis fatigué et que je souhaitais prendre
quelques semaines de repos et aller passer du temps avec ma petite
fille. Je ne sais pas quand et comment je me rendrai au Cameroun. Je ne
sais pas au moment où je vous écris où sont mes valises.

Avec patience mon neveu et son épouse m’ont convaincu de les accompagner
chez eux à Mons. Nous avons demandé une attestation indiquant que
j’étais en cellule de 11:00 à 22:00, le policier de faction a eu la
gentillesse de m’en donner une en Néerlandais. Nous sommes arrivés à
Mons peu après minuit. J’avais des douleurs partout, sur le visage, les
bras, les doigts au dos et une très grosse faim, j’ai mangé sans appétit
et je suis allé me coucher.

Ce matin, je suis un peu plus calme, j’ai encore quelques douleurs aux
doigts, aux bras et au visage. Je vais me rendre à Bruxelles pour me
faire signifier officiellement que je suis sur la liste NOIRE de la
compagnie, que je ne voyagerai plus avec cette compagnie et que je ne
serai pas remboursé. J’espère également retrouver mes valises dans
l’état où je les avais confiés à la compagnie. Une autre dure journée va
commencer, comment se terminera-t-elle ? Je n’en sais pas grand-chose
pour le moment.

Je peux simplement préjuger qu’elle ne sera pas facile car je ne compte
pas laisser passer cette histoire sans réagir. Je vais faire un appel à
témoins et engager une action contre SN Bruxelles Air lines. On en
reparlera.
Serge N FOSSO
+33-6.26.71.03.85

http://www.sergefossomaverite.blogs...

Merci encore de le diffuser !!
BAV !

Brussels Airlines... Flying your way !

Et j’ai lu dans la presse ce matin que l’africain qu’ils essayaient
d’expulser s’est suicidé dans le centre ferme hier...

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