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AFRIQUE DU SUD - Les travailleurs noirs s’estiment lésés par les Chinois
Publie le vendredi 4 juillet 2008 par Open-PublishingUn jugement récent permet aux Chinois d’Afrique du Sud d’être assimilés à la communauté noire et de bénéficier à ce titre des mêmes mesures de discrimination positive. Les organisations noires s’insurgent.
Les entreprises et les organisations professionnelles noires viennent d’annoncer qu’en l’absence de réaction du gouvernement, elles feraient appel d’une décision de justice visant à assimiler les Sud-Africains d’origine chinoise à des Noirs. Il s’agit notamment des National African Federated Chambers of Commerce (NAFCOC, ou fédération des chambres de commerce nationales africaines), de l’Association for the Advancement of Black Accountants of SA (Association pour l‘avancement des comptables noirs d’Afrique du Sud), du Black Management Forum, de la Black Lawyers Association (BLA, association des avocats noirs).
Ces organisations ont qualifié la décision prise récemment par la juge de la Haute Cour de Pretoria, Cynthia Pretorius, de "surprenante, irrationnelle, creuse, opportuniste et inexplicable" : "Nous, les entreprises et les organisations professionnelles noires, rejetons ce jugement tant sur le fond que sur la forme. […] A notre avis, il remet en cause une lecture historique, depuis longtemps admise, de la lutte pour la démocratie en Afrique du Sud."
Pour elles, les Africains, gens de couleur et Indiens, doivent être les principaux bénéficiaires de la politique du ’Black Economic Empowerment’ [politique de discrimination positive en faveur de l’emploi des Noirs], qui se fondait sur une analyse socio-économique approfondie en prenant en compte la difficulté d’accéder à une éducation de qualité, le manque de perspectives économiques et de mauvaises conditions de vie.
"En tant que partie intégrante de la communauté économique sud-africaine, nous sommes scandalisés par ce jugement. Toute une population, essentiellement noire, a été victime de discrimination. Nous, les Noirs, nous devons veiller jalousement à ne pas oublier le fait historique que nous avons été spoliés et avons souffert de l’apartheid", martèle Sandile Zungu, président de Zungu Investments Company.
Pour Busani Mabunda, le représentant de la BLA, il est impossible de fermer les yeux sur la décision de justice. "Le gouvernement a failli à son devoir, et il est indispensable qu’un débat sérieux ait lieu."
Les adversaires de la mesure reprochent au gouvernement, en particulier au ministère du Travail et à celui du Commerce et de l’Industrie, de ne pas avoir consulté les personnes directement touchées, ni s’être opposé à la demande soumise devant les tribunaux par les représentants de la "communauté chinoise". Ils ont chargé leurs avocats d’étudier le jugement "de manière à explorer les différentes voies de recours juridiques", notamment la possibilité de faire appel.
En droit, rappelle la BLA, toute partie concernée par un jugement a le droit de réagir et de faire appel si le gouvernement ne souhaite pas agir. Le président de la NAFCOC, Buhle Mthethwa, avait demandé par écrit un entretien avec des représentants des deux ministères concernés. "La juge, déplore Dupree Vilakazi, du National Black Business Caucus, ne s’est pas trop investie dans l’affaire. Mais je ne lui en veux pas parce qu’elle n’avait jamais vécu dans une township, ni souffert du régime de l’Apartheid, contrairement à moi."
Luphert Chilwane