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AMBIGUITE DU MODE DE DESIGNATION DANS LES COLLECTIFS LOCAUX

Publie le lundi 27 novembre 2006 par Open-Publishing
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L’exemple du Collectif de Vence

Témoignage de Richard Loiret ( Collectif de Vence ), membre fondateur du Collectif pour l’Ecodéveloppement et des Verts Alter Ekolo, signataires nationaux de l’Appel.

Nous pressentions pour beaucoup que l’ambigüité du mode de désignation unitaire aux présidentielles (la « Méthode de discussion de la candidature commune ... ») allait montrer toutes ses limites lors de sa mise en œuvre au sein des collectifs locaux. Voilà qui est fait. La réunion du collectif local de Vence a parfaitement témoigné, ce mardi 21 novembre, du début d’un processus qui peut mener, si on n’y prend garde, à un blocage général de la machine unitaire lors de la réunion nationale des 9 et 10 décembre.

une suite d’événements, qu’il est important de décrire, a attesté localement du processus en marche :

Alors que cet été, lors d’une réunion conviviale, nous annoncions communément, les Verts Alter Ekolo et le PCF de Vence (les deux seuls mouvements du collectif national représentés à Vence), la création du collectif vençois, la machine a commencé à gripper lorsqu’il fut question de faire un communiqué commun. Le responsable local du PCF refusait, à un texte qu’il avait pensé tout seul, que je rajoute sobrement à son titre la mention « antiproductiviste » à la suite de la mention « antilibéral ». Mention qui, comme chacune sait, nous caractérise principalement, nous-mêmes et José Bové.

J’ai donc refusé de cosigner le « communiqué commun », qui ne fut donc que le simple communiqué « unilatéral » d’un des membres d’un collectif supposé unitaire. Du coup, probablement par mesure de rétorsion, je ne fus associé ni aux discussions, ni aux décisions préalables à la mise en place du collectif local et de ses réunions publiques. Je fus à peine averti la veille au soir de sa première réunion « publique », à laquelle nous n’avons donc pas pu nous rendre du fait d’un agenda déjà rempli, notamment par la réunion du collectif départemental du 06.

Ce 21 novembre était la deuxième réunion « publique » du collectif. J’insiste sur ce terme « publique » car, à notre arrivée dans la salle, 10 mn avant l’heure, était déjà en place un bureau de vote très officiel, avec urne et bulletins préimprimés au nom de tous les candidats nationaux. C’était impeccable et parfaitement organisé sauf, et c’est quand même gênant, que le deuxième membre de ce collectif « unitaire » (je me répète volontairement), avait été absent de l’ensemble de la chaîne de décision. Et notamment des réunions privées forcément préalables à la réunion publique officielle. Il a en effet obligatoirement fallu plusieurs réunions unilatérales des représentants majoritaires unilatéraux du collectif, et donc de la cellule locale du PCF, pour organiser ce bureau de vote. Résultat final : Alors même que le collectif national avait élaboré une méthode dite du double consensus qui partait du local, nous nous retrouvions, représentants de la seconde force associée au collectif local, comme de simples auditeurs mis au pied du mur d’une procédure de vote majoritaire, forcément non consensuelle, de la décision de laquelle nous n’avions même pas participé « consensuellement ». Bref, au prétexte de son caractère démocratique (un vote parfaitement organisé, avec scrutateurs, etc..), ce fut en réalité un véritable déni de décision consensuelle, voir au minimum commune. Déni de consensus que bien évidemment, les 3 membres présents d’Alter Ekolo ont refusé de cautionner en refusant de voter. Ceci bien après que pendant près d’un quart d’heure j’eus exposé à la salle tous les motifs de notre décision, notamment ce problème de la méthode. Ce d’ailleurs sans que, et c’est là très caractéristique de l’absence structurelle de consensus dans les collectifs, mon argumentaire ait un quelconque effet sur une salle très majoritairement et à priori acquise au PCF.

Morale nationale de cette histoire locale : nous voici, en cette période cruciale de notre rassemblement, confrontés à une difficulté très importante qui nous met face à nos contradictions. La mise en œuvre irréalisable, confirmée par les faits locaux, de deux modes de décision inconciliables : le vote majoritaire et la décision consensuelle. Confrontation inévitable sur laquelle la « méthode nationale de discussion locale de la candidature ... » s’est bien gardé de mettre le doigt, tout en la donnant en pâture à l’interprétation locale.

Nous lisons en effet dans le texte national : « Là où ne se dégagera pas un choix commun, il sera sans doute nécessaire de mesurer, de façon loyale et incontestable, l’importance respective des opinions défendues au sein du collectif. Une mesure quantitative sera alors utile pour dégager une tendance ... »

Alors même que son objectif initial désigné était de dégager un double « consensus », je m’interroge grandement sur la mise en œuvre du consensus proposée par ce texte :

On parle de consensus en page 3 pour passer en page 5 au dégagement clair d’un choix « commun ». Ce qui est loin d’avoir le même sens pratique.
On passe ensuite une ligne plus loin du choix commun au vote quantitatif, c’est-à-dire majoritaire.

Cette légèreté du passage suggéré entre deux modes de décision radicalement contradictoires m’interroge notamment quant au type de langue de bois utilisé. Quand arrêtera t-on de jouer les autruches, y compris au collectif national ? Qui donc ignore et ignorait que, en terme de « militants de base d’un parti » (j’exclus donc de fait les membres d’ATTAC et du mouvement altermondialiste un peu trop absents de nos collectifs), les militants du PCF étaient considérablement plus nombreux que ceux des Alternatifs, de la LCR minoritaire, des Verts Alter Ekolo, etc..., même réunis ensemble. Qu’il lui suffisait donc d’investir les collectifs de base sur un simple mot d’ordre interne pour en prendre illico le contrôle.

Que veut-on représenter dans ce collectif national ?

Le nombre et l’étendue des militants du Non ? Il lui faudrait alors un représentant de chaque couche de cette société civile qui a participé du vote, si besoin en allant le chercher, y compris en dehors de la gauche.
Ou alors ces partis et mouvements plutôt nationaux qui, regroupant sous le mot d’ordre antilibéral leurs % déjà réalisés dans les élections antérieures, via un candidat symbolique de leur unité, auront tout d’abord une chance de faire ensemble plus que séparément et plus que les libéraux de tous bords, au prorata du vote sur le TCE... Puis ensuite, et ensuite seulement une chance de battre la droite ?

Dans le premier cas, le vote majoritaire aurait probablement un sens, mais à la condition expresse que la totalité de ces couches de la société civile qui ont participé au Non soit représentée, y compris ces 300.000 militants altermondialistes, d’Attac et d’ailleurs, qui étaient présents à Millau et sur le plateau du Larzac en cet été 2003. _ Quitte, comme je l’ai déjà dit, à aller les chercher.

Dans le second cas, le vote, militant par militant, n’a plus aucun sens. Serait-il d’un parti, le candidat unitaire doit représenter « quantitativement », non pas l’ensemble des militants des partis participants mais l’ensemble, si ce n’est plus, des corps électoraux de ces mêmes partis lors des échéances antérieures, et « qualitativement » l’ensemble des batailles politiques « spécifiques » ayant participé du Non, y compris celle de l’altermondialisme.

C’est ainsi, il me semble, que les porte paroles nationaux n’ont pas été désignés au prorata du nombre de militants potentiellement présents dans les collectifs. Leur représentation est avant tout « symbolique » de leur existence « qualitative » (leur pluralité) dans le débat public qui a accompagné le non au référendum.

Faudrait-il au final que ce candidat soit élu par les seuls porte paroles nationaux, les seuls à représenter la pluralité du rassemblement ? Voir par un collège élargi strictement représentatif de cette pluralité ? Il me semble dans tous les cas que nous participons en ce moment d’une grande illusion collective, à savoir qu’il suffirait de rassembler les partis et mouvements à la gauche de la gauche pour obtenir une stricte représentation (un modèle réduit) du Non de gauche. Nous avons oublié dans cette dimension une très grande majorité silencieuse participant du Non que je nomme pour ma part le « sud de la gauche » (Attac, altermondialistes, ruraux oubliés, etc...).

R. Loiret

Messages

    • Manque d’imagination.
      Le vote, c’est plus simple, plus indiscutable (et encore de moins en moins), mais c’est très difficile de sauvegarder l’unité d’un groupe après que les uns aient vaincu les autres.
      Au mieux on fait semblant, au pire on continue à s’empailler, ou encore on attend sa "revanche".
      Mais bien sûr, avec un autre procédé, pas encore bien rodé, pas encore codifié, pas bien compris des militants, c’est normal qu’on cafouille.

  • ""Nous lisons en effet dans le texte national : « Là où ne se dégagera pas un choix commun, il sera sans doute nécessaire de mesurer, de façon loyale et incontestable, l’importance respective des opinions défendues au sein du collectif. Une mesure quantitative sera alors utile pour dégager une tendance ... »

    Comme cela fait des semaines , que certains passent leur temps à détruire le consensus possible en essayant d’eliminer par tous les moyens la représentante du PCF , en utilisant la contrevérité , le mensonge , la petite magouille politicienne , "retenez moi ou je m’en vais ", il ne reste plus que la solution du vote , et si les altermondialistes pensent peser 200 à 300 000 voix , ils n’ont qu’a les rassembler dans les comités !
    A Toulouse , les Alters n’ont qu’un souci , imposer la candidature du Dr SIMON , dans la quatrieme circonscription pour les législatives à venir . En dehors de cela , rien , pas de prise de résponsabilités dans le collectif , aucun travail d’organisation ni de militantisme , laissons les communistes faire le boulot .
    Alors , puisque seul le vote peut trancher , votons ,et nous verrons qui respecte ou ne respecte pas le résultat .
    Claude de Toulouse .

  • Ce témoignage estintéressant, il montre comment naît un malentendu
    Des gens très divers , des partis, des fractions de partis se sont mis d’accord sur une statégie, sur une ébauche de contrat-programme, sur la base de l’antilibéralisme ; la charte commence par s’intéresser aux problèmes des bas salaires, des retraites, des minima sociaux, elle prévoit les rentrées correspondantes ; mais si on ajoute l’ANTIPRODUCTIVISME, on casse tout le programme ; on ne peut pas promettre tout et son contraire.
    L’antiproductivisme, je suis d’accord, je le souhaite, mais il faut y aller tout doux et étudier les conséquences ; de même pour l’énergie atomique civile ; un référendum départagera les partisants des 2 options et d’ici-là, nous aurons des explications à la télé (je parle comme si nous allions gagner)
    On s’est mis d’accord sur un minimum, il est cohérent ; ne rajoutons pas ce qui risque d’être contradictoire