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ATTAC France : sortie de crise ?
Publie le lundi 11 septembre 2006 par Open-Publishing4 commentaires
ATTAC France : Sortie de crise ?
version actualisée in fine
9 septembre 2006
Que l’on soit convaincu de fraude lors des dernières élections du CA en juin 2006 ou que l’on évoque plus pudiquement ou plus prudemment des « anomalies » ATTAC ne saurait aborder son avenir sans examen de son passé afin d’inventer une solution viable à sa crise.
Une présentation minimale s’impose : Je suis délégué d’une organisation cofondatrice d’ATTAC, le MRAP (Mouvement contre le Racisme et l’Amitié entre les Peuples). Je suis aussi altermondialiste convaincu (plusieurs interventions sur ce thème et des articles dans Différences revue du MRAP). Je suis aussi un fondateur actif dans un comité local, celui de Rennes, ce qui est assez rare.
Avant les AG de Rennes, j’étais « non aligné » tout comme mon comité rennais d’appartenance. Depuis Rennes pendant l’été 2006, j’ai été élu non siégeant .
Je souhaite participer à remettre sur pieds ATTAC, une association « à nulle autre pareille », avec tous donc sans exclusion. Et « du pire peut naître un bien ».
J’aborde successivement trois grands points :
1 - La montée en puissance de la crise d’ATTAC
2 - L’acmée : 2005- 2006
3 - Pistes pour une résolution de la crise
1. - LA MONTEE EN PUISSANCE DE LA CRISE D’ATTAC
I - Le débat qui a fait suite à Larzac 2003
1) Jacques NIKONOFF écrit en septembre un article dans Le Monde
2) Comprendre pourquoi certains « alters » s’en prennent au stand du PS :
– ATTAC critique le socialibéralisme comme variante du libéralisme
– Le drame des années Jospin après les années Mitterrand
– L’échec du « printemps 2003 » : Ces contestataires se souviennent du socialibéralisme de la CFDT et de la « sagesse » d’une partie de la CGT (l’aile Jean-Christophe Le Duigou qui soutiendra aussi le Oui au TCE)
– Le PS et même la « gauche plurielle » symbolise ce socialibéralisme honni
– Un appel dit Ramulaud « pour une alternative à gauche » - PAG - de juillet 2003 confirme cette analyse et propose une perspective.
3) Un débat mal engagé ou « l’art de s’en prendre au PS avec les précisions utiles » :
– Le PS n’est pas l’intégralité du parti : une fraction reste à gauche qui critique comme nous l’appareil socialibéral. (Lire Filoche and co.)
– Les militants du stand du PS sur le Larzac étaient des camarades altermondialistes : Et alors ? Ce n’est pas eux qui étaient agressés mais le parti qu’ils défendent .
– Il n’était pas utile de démonter ce stand . Certes . Nul n’a défendu l’utilité de cette opération.
– Pour autant le rôle d’ ATTAC n’est pas de défendre le PS et de stigmatiser « ceux d’en bas » qui souffrent du social-libéralisme
II - 2004 ou « le coup d’état » manqué des listes 100% Alter :
une « initiative »
– mal engagée en interne : l’opération d’un quarteron de militants a été menée en catimini sans information de l’organisation, ni des adhérents individuels ni des adhérents organisationnels . Ici apparaît pour la première fois, à ma connaissance, le déficit démocratique d’ATTAC. La méthode du consensus a également été déficitaire.
– mal engagée en externe : à l’égard des forces politiques et sociales déjà pleinement engagées dans la recomposition politique - ce qui allait devenir les CCAG - et des forces politiques de gauches potentiellement partenaires à savoir la fraction gauche des Verts et du PS plus le PCF et la LCR (le PT et LO n’étant pas traditionnellement candidates à ce genre de recomposition).
III - La « Nouvelle dynamique » d’ ATTAC ou l’élargissement problématique du champ de compétence d’ ATTAC
– de la taxe Tobin à la lutte contre la financiarisation du monde ;
– de l’AGCS à la tendance à la marchandisation des services ;
– de l’appropriation publique et citoyenne à l’alter-démocratie
– L’alterdéveloppement ou la liaison du social et de l’écologie
– Etc.. (voir site)
–
– La question de l’élargissement du champ de compétence d’ ATTAC a rebondi en 2005 sur celle des statuts à modifier mais seulement une minorité d’adhérents s’est emparée de ce débat.
– Nous sommes de facto une association de transformation transnationale et globale du monde au profit des citoyens et des peuples.
2. - L’ACMEE : 2005- 2006
Cette période de crise exacerbée part de du soir du 29 mai et n’est pas terminée.
I - Entre le 29 mai et l’AG de décembre 2005 à La Roche sur Foron
1) La question du style de direction (ré)apparait :
La contribution des trois vices-présidents
L’intervention de Thomas COUTROT à l’université d’été d’ATTAC 2005
La prise de position de Susan GEORGE avant les élections réclamant des élus de soutien face au clan Nikonoff.
Une confirmation ? Le CA d’ATTAC comme lieu d’affrontement particulièrement virulent.
2) Le pendant à la question du style de direction :
Les pro Nikonoff accusent eux le « style » de détermination du choix des membres fondateurs valablement candidats à l’élection du CA. Il fustige plus exactement la méthode bureaucratique et secrète de présentation des candidats sur une liste bloquée et ils demandent l’ouverture du choix des candidats « membres fondateurs ».
3) Derrière l’affrontement se profile en fait plusieurs conceptions d’ATTAC :
A) Les conceptions organisationnelles concevables, possibles :
a) L’option proto-parti : Il s’agit de conformer ATTAC en quasi-parti pour qu’il puisse intervenir dans les élections françaises sans cependant. Comme pour la création de la liste politique « 100% Alter », la solution « proto-partidaire » suppose de se séparer des syndicats car ils doivent maintenir leur indépendance à l’égard du patronat mais aussi du gouvernement. La stigmatisation des « fondateurs » vise essentiellement les syndicats accusés de modérer les exigences du mouvement.
Pour les « proto-parti » le Manifeste d’ATTAC doit servir principalement voire exclusivement lors des prochaines élections. C’est un outil de combat contre les libéraux et sociaux-libéraux.
b) L’option mouvementiste : « L’enfouissement » dans les forums et dans le mouvement social avec une ATTAC strictement mouvementiste donc sans position propre voire sans apparition propre car focalisée sur ce qui « bouge », sur les mouvements sociaux , sur les processus - l’altermondialisation - mais oublieuse des buts de l’altermondialisme.
Le Manifeste doit rester ouvert, ne pas trancher certaines questions qui font débat et ne pas ressembler à un programme politique. Le terme même du Manifeste fait problème par sa proximité avec le manifeste communiste et les manifestes des partis politiques
c) L’option altermondialiste : ATTAC se constitue en mouvement critique orienté vers un but et porte constamment les exigences nécessaires à la réalisation de ce but : l’autre monde que nous voulons (mais aussi l’autre Europe et l’autre France). Il ne s’interdit pas d’intervenir ici et maintenant dans les futurs élections françaises mais son champ d’action et ses perspectives historiques ne sauraient se limiter à l’ici et maintenant.
Pour les altermondialistes, le Manifeste d’ATTAC doit contenir de réelles ruptures dans tous les champs de l’existence humaine, économique, sociale, écologique, culturelle. L’alternative se porte avec toutes les composantes du mouvement social, les syndicats, les associations voir les partis politiques dans un cadre unitaire mais aussi contre ces acteurs politiques lorsqu’ils s’inscrivent dans la vision du monde dite de la « fin de l’histoire »
B) Deux conceptions organisationnelles pour une seule orientation ?
C’est la thèse notamment défendue par Jean-Marie HARRIBEY à l’université d’été de 2005 : Il n’y aurait qu’une orientation globale avec certes quelques inflexions ici ou là mais deux conceptions de l’organisation qui la porte avec d’un côté les proto-parti (Nikonoff-Cassen ) de l’autre les mouvementistes (SusanGeorge, Gus Massiah ; G Azam).
La préparation de l’AG de La Roche sur Foron n’a pas permis la vérification pratique de cette hypothèse. Il était prévu un seul texte d’orientation mais avec des « fenêtres » d’expression des désaccords sur tel ou tel point particulier. Cette préconisation qui mettait en exergue à la fois une armature commune et des points de divergences n’a pas trouvé d’application.
L’histoire montre que cet abandon est dommageable notamment en rapport avec la solution « rennaise » des deux textes porteuse de forts risques de clivage. Le choix de sortie de crise des adhérents présents à Rennes se comprend fort bien - pouvoir choisir clairement - mais la solution est plus risquée que celle qui devait être pratiquée avant La Roche sur Foron.
II - De l’AG de La Roche à aujourd’hui
(de décembre 2005 à septembre 2006)
1) La question posée par l’AG de La Roche sur Foron de décembre 2005 est :
Comment dégage-t-on une orientation dans ATTAC ? Le consensus suffit-il ? Faut-il un texte d’orientation à « fenêtres » ? La solution semblait pencher vers une combinaison des « deux : consensus » d’une part pour l’armature commune du texte d’orientation et d’autre part une présence des fenêtres pour la mise en évidence des différences de conception dans l’orientation et dans la composition ou la « nature » d’ ATTAC. Le texte final monolithique a été beaucoup critiqué.
2) La crise éclate à Rennes lors des AG des 17 et 18 juin 2006 : « l’appel du 18 juin »
– Sur la question de la fraude : Les mauvaises conditions du dépouillement étaient avérées mais sans doute pas connues de l’ensemble du mouvement. La question de la fraude apparaît donc à de Rennes avec 1 la publication des résultats, 2 l’intervention de Bernard CASSEN devant 300 adhérents décrivant combien il était aisé de tricher lors des dépouillement et 3 les premières analyses statistiques qui montrent à l’aide de tableaux des anomalies surprenantes. Pour certains il y a eu fraude, pour d’autres non. Les partisans de la fraude refusent de siéger au CA. Des groupes de discussion se forment entre élus siégeant et élus non siégeant, le tout hors de la plupart des adhérents qui restent en attente et ignorent les raisons de cette division.
– « L’appel du 18 juin » : La crise de direction sous-estimée apparaît alors violemment et heurte la base du mouvement qui dans un sursaut méritoire décide par un appel à une clarification sur des orientations. L’exigence première est bien de savoir les divergences d’orientation entre les deux fractions opposées de la direction.
3) La guerre des camps : De Rennes à l’Université d’été de Poitiers
De nouvelles élections doivent intervenir pour élire un nouveau CA sur cette base de deux orientations. ;
La question de la fraude a agitée l’association durant tout l’été. La bataille a fait rage autour des analyses statistiques. Deux menaces de procès sont intervenues ; l’une contre Thomas COUTROT est en cours d’exécution.
Finalement c’est le rapport de René PASSET (site ATTAC) publié la veille de l’université d’été qui va peser sur la très forte probabilité de la fraude qui va être à l’origine d’une commission exécutive mixte paritaire.
III - LA RESOLUTION DE LA CRISE ?
I. - « Du pire peut naître un bien »
1) L’apparition d’une troisième voie
La question s’est posée d’une réelle troisième voie, notamment par rapport à l’existence des fondateurs. Comme délégué du MRAP, et comme membre soucieux de sauver ATTAC, je suis intéressé de près par cette initiative pour peu que la place des fondateurs me paraisse correcte. Je suis en contact avec Henri Racine, l’un de ses initiateurs. Régine TASSI membre du CA a soutenu leur texte. La réélection du CA se fera donc sur la base de trois textes d’orientation
2) Nécessité du « lâcher prise »
La question de la fraude n’est pas restée clandestine. La presse en a abondamment parlé. Il faut donc opérer un grand changement, fondé sur l’abandon réciproque du combat interne. Il faut « lâcher prise. » Pour le noyau directionnel il faudra l’intervention de « casques bleus ». Pour le reste du mouvement, nous pouvons rester ensemble car il n’y a pas « une organisation qui a fraudé » et qui serait pestiféré. Pour autant, la fraude est chose grave et le mouvement ne saurait la banaliser. Mais la présomption d’innocence s’impose. De plus si la fraude est avérée, nul ne sait qui a fraudé. Enfin il n’y a pas d’un côté des saints et de l’autre des immoraux. La chute est concevable pour tous et chacun, il convient de tout faire pour l’éviter. Cela exige une certaine discipline et d’intégrer cette dimension éthique dans notre activité et orientation.
La conflictualité au sein de l’exécutif et du Conseil d’Administration est telle qu’elle tend désormais à s’étendre à l’ensemble de l’association et qu’elle risque de nuire à l’ensemble du mouvement donc au combat qu’elle mène contre le néolibéralisme.
Deux solutions ne semblent pas partagée donc ne portent pas. Il s’agit d’une part de la démission de tout le CA (B Cassen) ou d’autre part la solution de la disparition du noyau directionnel en conflit dur perpétuel ce qui signifie effacement simultané des trios de chaque camp : JN BC MD et SG GM PK . Aucune de ces solutions n’est acceptée par l’autre camp.
Il reste donc l’abandon du conflit sous pression des « non-alignés » et des comités locaux. Chacun des camps en présence abandonne ses armes : les statistiques sur la fraude d’un côté, la mise en procès de Thomas COUTROT de l’autre côté. Le refus des exclusions au Conseil scientifique comme au CA.
II. - La solution altermondialiste :
« marchons sur les deux jambes »
1) - Les activités propres d’ATTAC :
– contre la financiarisation du monde ;
– contre l’AGCS et l’OMC, pour la défense et réhabilitation des services publics hors logique marchande ;
– pour l’appropriation publique et citoyenne et l’alter-démocratie
– Le « Manifeste » d’ ATTAC a ajouté des thématiques : Les ruptures doivent intégrer 12 secteurs d’intervention..
2) - Les activités unitaires sont de deux sortes :
– au sein de collectifs
– aux contours variables avec des syndicats de salariés et de paysans, des associations et des partis le cas échéant :
– Exemple :
en 2003 pour la défense et promotion de la Sécurité sociale et des retraites et contre la décentralisation-féodalisation,
en 2004 pour la santé contre la réforme Douste-Blazy ;
en 2005 contre le projet de traité constitutionnel européen dans les collectifs pour une autre Europe (collectifs du 29 mai) ;
en 2006 avec la participation de comités locaux aux luttes contre le CPE et aux luttes de défense des sans-papiers.
– au sein des forum :
ATTAC participe à la construction des FSM, FSE, FSL et autres forum respectant la Charte de Porto Alègre.
Cette participation est offensive et critique car l’altermondialisation comme processus fait converger des forces qui ne se sont pas clairement dégagées du socialibéralisme. Or l’altermondialisme lui ne s’inscrit pas dans « la fin de l’histoire », il veut un autre monde.
Christian DELARUE
Secrétaire national du MRAP
Membre élu du CA d’ATTAC et du groupe "Migrations" du Conseil scientifique
Messages
1. > ATTAC France : sortie de crise ?, 11 septembre 2006, 09:41
pas mal, ton analyse presque exhaustive
mais tout oublie, une chose, pourtant essentielle,
l’absence de vision politique globale (holistique, oserais-je) d’attac,
la meilleure preuve : les attentats du 11 septembre, ce coup d’état mondial visant particulièrement la montee en puissance du mouvement alter. La pseudo "chasse aux terroristes" a amené ds ses bagages :
– les lois sécuritaires, y compris sous le navrant Jospin (LSK)
– une collaboration secrete, mais parfaite entre nos services secrets et les sévices états-uniens...en plein paris !
– le pucage des animaux et bientot des humains, les passeports magnétiques
– Les nanotechnologies qui ne sont que du nanoflicage
– La mise à l’index de toutes les solutions alternatives concretes au libéralisme (attaque de la bio, confiscation du vivant, interdictions des hvb (biocarburants)...
– La mise en scene médiatique de "crises alimentaires et sanitaires" à répétition pour affoler les peuples et vendre des vaccins à l’aluminium et les sales médocs de nos amis de la chimie lourde
et j’en passe, la liste est trop longue...
Mis à part sur les ogm et depuis peu le nucléaire, L’irak et le référendum (mais là c’est votre fond de commerce...) attac a été aux abonnés absents sur tous ces sujets. Alors que le mouvement alter etait le principal visé, "il a fait comme si", (serré les fesses...) ne s’est pas positionné et est passé largement a coté des enjeux majeurs des 5 dernieres années. Les alter avaient la main à seatle, il l’ont perdu de facto depuis, le capitalisme peu respirer, vous n’avez toujours pas compris !
Et si on est pas passé loin avec les ogm, c’est que les faucheurs se sont autoorganisés et affranchis des directions...
navré,
sousmarinvert
Lire sur bella http://bellaciao.org/fr/?page=article&id_article=33759
ex d’attac et des verts
dis pas que je suis un anti...
2. > ATTAC France : sortie de crise ?, 11 septembre 2006, 14:36
à Christian DELARUE...
Tu as signé la contribution"Pour une ATTAC altermondialiste et démocratique".... et maintenant tu sembles appuyer la 3eme contribution "pour sortir de cette crise de direction par le haut " de Régine Tassi.
Il faudrait être clair...et ne pas mettre ses oeufs dans tous les paniers....
Pour ma part , simple militant de base d’un comité local-et à l’écoute de nombreux adhérents et militants écoeurés mais ayant la volonté de préserver l’outil ATTAC, la 3eme contribution me semble la plus juste. F.A.
1. > ATTAC France : sortie de crise ?, 12 septembre 2006, 10:24
A ce militant anonyme que le besoin d’un "bon père" amène à croire, avec une crédulité touchante, qu’Attac pourrait encore vivre en dehors des préceptes d’éthique et de morale publique qui sont les siens.
La 3ème contribution est celle des dirigeants qui ont amené ton association à cette faillite morale dont tu souffres à juste titre.
Comme tous ces enfants battus ou enfants d’alcooliques, tu leur trouves encore et toujours LA légitimité de la création et de la filiation.
La différence est pourtant fondamentale ici, si les parents boivent, les enfants ne trinquent pas, tout simplement parcequ’ils sont adultes et prennent en charge la santé de leurs vieux parents en leur faisant suivre une cure de désintoxication, ici la désintoxication du pouvoir !
Heureusement, Attac ne compte pas que des militants à tête d’autruche comme toi, et il est bien possible que très prochainement les auteurs de la déchéance éthique et morale d’Attac soient fermement éconduits. Heureusement !
C.E.
2. > ATTAC France : sortie de crise ?, 12 septembre 2006, 18:49
ATTAC PROTO-PARTI ?
ATTAC est-il un proto-parti ? Je ne pense pas. C’est évidemment discutable. Précision : Proto-parti n’est pas une injure, juste une notion aux contours flous.
Dans le texte " ATTAC France : sortie de crise ? " (publié sur Bellaciao) je distingue trois types de configurations concevables dans ATTAC avec les habitus qui vont avec - proto-parti, mouvementisme, altermondialisme - à partir d’une articulation entre conception de l’organisation et orientation adoptée et même conception du Manifeste. La réalité d’ ATTAC n’entre peut-être dans aucun de ces types.
Qu’est-ce qu’un proto-parti ? Une organisation qui ressemble à un parti mais qui n’en ai pas une.Il lui manque au moins un élément essentiel.
1 . - De quelques proto-partis.
– Les groupes PAG sont des proto-partis.
PAG , c’est l’Appel pour une Alternative à gauche de juillet 2003. Après les luttes sociales de mai et juin 2003 plusieurs appels sont intervenus. J’ai participé à celui initié par Yves SALESSE chez Ramulaud dénommé "Pour une Alternative à Gauche". A Rennes, à l’initiative de Sylvie LARUE et quelques ami(e)s nous avons créé dès juillet 2003 un groupe PAG comme dans d’autres villes : Rouen, Lyon ; Clermont... Il n’était pas question de se présenter aux élections mais il était clair que nous engagions une démarche politique contre le libéralisme et le socialibéralisme sur la base de ce texte. L’idée était de rassembler largement en articulant mouvement social et intervention politique.
– Les groupes CCAG - convergences citoyennes pour une alternative de gauche - sont-ils des proto-partis ?
Les convergences citoyennes pour une alternative de gauche se sont constitués en novembre 2004. Alain Bertho, Pierre Zarka, Pierre Cour-Salies et bien d’autres (1) participèrent à la formation de cet outil politique. Un proto-parti ? Sans doute. Pour autant les principes constitutifs de la dynamique de ces convergences CCAG soulignait l’importance des mouvements sociaux, des associations des citoyens et du pluralisme interne.
2. - Discussion des éléments pour une définition ATTAC comme proto-parti.
A) L’argumentaire de JMC
J’emprunte ici au texte "Altermondialisme : un prolongement ou une rupture ?" par Jean-Michel Coulomb qui pose un certain nombre de distinctions favorable à un altermondialisme de réseau pour ne pas être proto-parti. Je ne partage pas toutes ses options mais son texte a le mérite de poser les questions utiles.
a) Une rupture sur le rapport au Pouvoir
Le premier item qui s’impose de ce bilan d’un siècle de lutte est celui du rapport à construire entre Pouvoir et Contre‑pouvoir.
Alors que le Mouvement Social s’est toujours trouvé instrumentalisé par le Politique, mis dans sa dépendance, que le Contre‑pouvoir a toujours été réduit par le Pouvoir quand celui-ci était investi ou conquis, c’est au contraire une pratique d’autonomie du Mouvement Social, des contre-pouvoirs, qu’il s’agit de construire et de préserver. Cet item dans lequel beaucoup d’entre nous aujourd’hui se reconnaissent (mais pas tous, voir l’épisode des liste 100% altermondialiste) ne répond pas seulement à la période (disqualification du Politique, compréhension des rapports de force et des tâches qui en découlent (éducation populaire)) : il est stratégique, consubstantiel au projet de changer la vie.
.../...
Dire ceci ne signifie nullement que le Mouvement Social doive se situer dans un splendide isolement par rapport au Politique et s’en désintéresser. Ce dont il est question ici, c’est de ne cesser de construire et d’entretenir un rapport de force entre Pouvoir et Contre‑pouvoir, un rapport de force qui impose au Politique de reprendre en charge les nécessités, propositions et exigences qui émergent du Mouvement Social.
b) Une rupture sur la notion d’Alternative
Deuxième item. L’altermondialisme doit-il concevoir une Alternative ou bien « se contenter » d’avancer des éléments d’alternative ?
Chercher à concevoir et à s’unifier sur un système « clefs en main », unitaire, totalisant, ou bien « simplement » juxtaposer de façon plurielle, sans souci de cohérence a priori des « grains de sable » (dont certains sont des revendications vis à vis du Pouvoir, d’autres des pratiques concrètes de vie alternative à mettre en œuvre dès maintenant (commerce équitable, SEL, AMAP, économies sociales et solidaires)) ?
Poser la question c’est - nous semble-t-il au vu de la composition et des pratiques du mouvement altermondialiste - y répondre : une grande partie de notre force, c’est notre unité dans la multiplicité des approches, des propositions et des pratiques concrètes de construction d’un autre monde, le respect mutuel que nous avons les uns des autres au-delà de ces différences (expressions des aspects de la « vie »).
Et qui déciderait ? En « vertu » de quoi ? De quelle « Vérité » ? Edictée de quelle place, de quelle perspective (sociologique (Marx), psychologique (Freud, Nietzsche), et même physiologique (Spinoza, Nietzsche) ? S’il est une chose que l’Histoire nous a appris, c’est bien qu’il convient d’allier à la plus grande détermination une certaine modestie.
Et cet item est à mettre en relation avec l’item précédent : dès lors que serait déterminée une Alternative en tant que système unitaire, le législatif (donc le Politique) tendrait à apparaître comme l’unique tâche, à tout le moins la tâche fondamentale, et l’on retomberait inéluctablement dans le schéma d’action du siècle et demi passé, dans l’instrumentalisation du Mouvement Social par le Politique avec toutes ses conséquences éminemment négatives du point de vue de la lutte : c’est aussi parce que l’on ne veut pas retomber dans les travers anciens qu’il est important de ne pas proclamer une Alternative.
.../...
Le terme « altermondialisme » trouve ici une première justification, sa parfaite adéquation à ce que nous cherchons à construire : ce n’est pas tant la présence du terme « mondialisation » qui est intéressante que l’affirmation qu’un autre monde est possible, ou plutôt - le terme « alter » devant être décliné dans toute son étendue - la conjugaison de cette formule au pluriel de la « vie » : d’autres mondes sont possibles !
c) Une rupture sur la conception du Mouvement Social
Un troisième item, de façon corollaire, s’impose. Alors que, dans le paradigme du siècle et demi passé, le changement du monde était pour l’essentiel pensé en tant qu’aboutissement d’un long processus dont le terme était (de façon idéaliste, la maladie de l’Occident) défini en tant qu’a priori, l’altermondialisme compose son projet de pratiques d’alternative à mettre partout en œuvre « ici et maintenant » (commerce équitable, SEL, économies sociales et solidaires) et d’éléments d’alternative « grains de sable » - c’est à dire susceptibles de faire bifurquer, transmuter le système - à faire passer (par acte législatif) aussi vite que possible.
Alors que la pertinence de toute action et de toute mesure était soumise au critérium de ce but/terme lointain, l’altermondialisme reconnaît le Mouvement Social dans sa diversité : les expérimentions, plurielles, y compris sur un même thème, éventuellement concurrentes, tendent toutes à jouir, au yeux de tous (même de ceux qui sont sceptiques), de la légitimité, mêmes les plus « exotiques », même les plus « émergentes ».
Le terme « altermondialisme » trouve ici sa deuxième pertinence : l’autre monde, ou plutôt les autres mondes dialoguent, se juxtaposent, se confrontent.
Maintenant si possible. Ce qui n’est pas sans conséquence sur les évolutions individuelles : autant que faire se peut, à notre échelle personnelle, nous cherchons à mettre nos attitudes, voire, si possible, nos parcours de vie en cohérence avec nos idées alternatives à la mondialisation libérale.
d) Quelle structuration pour le Mouvement altermondialiste ?
Le mouvement altermondialiste n’est pas une Internationale au sens classique du terme, avec un « centre » porteur de LA ligne politique, du « la », c’est plutôt une myriade de mouvements.
Non pas un centre, une ligne unique, mais, pour reprendre l’expression zapatiste, une intergalactique.
Non pas un cadre, une structure pour une recherche effrénée du pouvoir en son sein, vecteur obligé de tout objectif d’une conquête du Pouvoir, mais une topologie favorable aux affirmations interactives de différentes façons de voir et de faire.
Sa topologie n’est pas la pyramide, mais le réseau. Sa ligne de force n’est pas la verticalité, c’est l’horizontalité. Le réseau.
B) Mon désaccord avec JMC
Je dis ici brièvement - mais j’y reviendrais - mon désaccord avec JMC sur l’ensemble de la présentation qui pourtant m’a aidé à réfléchir ma position articulant mouvement et but sans être proto-parti.
Mon désaccord principal tient à "autres mondes" au pluriel car le but disparait et l’on tombe dans le "mouvementisme", le "bougisme" sans alternative réelle. Par ailleurs la distinction entre verticalité et horizontalité a sa pertinence mais ne doit pas être absolutisée. Enfin la question du pouvoir dans les entreprises comme dans la société n’est pas abordée autrement que par référence aux conceptions social-démocrates ou léninistes écartées rapidement comme définitivement mauvaises. Il cède ici à la "fin de l’histoire" au profit des pratiques sociales plurielles, des processus variés, des alternatives qui ne semblent jamais converger vers une alternative. Donc on reste dans ce monde. Au moins idéologiquement. Il ne s’agit pas pour moi d’une dynamique altermondialiste tendue vers un autre monde, une autre europe, une autre France.
Christian DELARUE
(1)Quelles convergences citoyennes pour une alternative de gauche ? Interpellation de la démarche....
Induit par Gérard Miller
avec Claire Villiers, Mouloud Aounit, Hamida Ben Sadia, Raymond Vasselon, Bernard Floris, Malika Zédiri, François Labroille, Bernard Loche, Monique Dental, Etienne Adam, Bénédicte Goussault, Roger Dubien, Michel Cahen, Marietou Diarra, Alex legros, Jean Paul Duparc, Jacques Perreux, Jo Rossignol, Tarek ben Hiba, Françoise Diehlmann, François Meyroune, Martine Toulotte, Michel Fiant, Alain Bertho, Pierre Zarka, Clément Aumeunier, Maryvonne Loiseau, François Simon, Michel Dupont, Marylène Cahouet, Clémentine Autain, Dominique Noguères, Jean Brafman, Christian Delarue, M’Baireh Lisette ...
: http://anpag.org/article.php3?id_article=20