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Affaire Polanski : un peu de rigueur dans un monde de brutes.
Publie le mercredi 30 septembre 2009 par Open-Publishing8 commentaires
de Damien Perrotin
L’affaire Polanski n’est qu’une banale affaire moeurs, tout comme l’affaire du collier n’était qu’une banale affaire d’escroquerie. Un homme d’âge mur se laisse aller avec une adolescente à peine pubère, échappe pour un temps à la justice puis se fait prendre après une longue cavale. Si l’individu en question n’avait pas été riche et célèbre, les journaux en aurait parlé. Il se trouve que c’est un cinéaste. Il se trouve surtout que la "profession" s’est mobilisée pour le défendre, et cela révèle, derrière le fait divers, un véritable problème de société.
D’abord regardons les faits. En 1977, Roman Polanski a invité chez lui Samantha Gailey, devenue depuis Samantha Geimer et âgée alors de 13 ans pour une séance de photographie. Il lui a fait boire du champagne et avalé du quaaludes, un sédatif aux effets à la fois euphorisants et aphrodisiaques. Il l’aurait ensuite violée, par les deux orifices. La version de Roman Polanski est, on s’en doute, légèrement différente, mais il ne nie pas les relations sexuelles. Dans tous les pays civilisés cela constitue un viol, et même un viol aggravé car la victime avait moins de quinze ans.
L’argument de la prescription ne tient pas en droit américain, pas plus qu’en droit français d’ailleurs. Roman Polanski a en effet plaidé coupable en 1977 en l’échange de la requalification du chef d’inculpation de viol en "relation sexuelle illicite avec un mineur". La mère de la victime avait accepté pour éviter à sa fille de devoir témoigner devant une cour. En droit Roman Polanski a donc déjà été jugé et reconnu coupable. Tout ce qu’il restait à faire c’était décider quelle peine il aurait à accomplir. On peut, bien sûr, trouver la procédure expéditive, mais rien n’obligeait Roman Polanski à l’accepter.
Certain ont fait remarquer que la victime n’était pas une oie blanche et que sa mère n’était pas un monument de responsabilité. C’est possible, mais outre le fait que cet argument ressemble au "elle m’a provoqué" de tous les cogneurs et violeurs de la planète, il est sans portée juridique. C’est au contraire le rôle de la loi de protéger ceux qui ne peuvent ou ne savent se défendre.
L’atmosphère quelque peu libérée qui régnait alors en matière de moeurs n’est pas non plus une excuse. Les artisans de la libération sexuelle ont toujours, et dés cette époque, exclu les pédophiles de leurs rangs et la NAMBLA – une organisation qui visait à légaliser la pédophilie homosexuelle – était persona non grata dans les manifestations homosexuelles. Roman Polanski, qui n’était plus un jeune homme, savait très bien que ce qu’il faisait était répréhensible, même dans le monde des hippies.
Le pardon de la victime, acheté, semble-t-il, à prix d’or, n’a par ailleurs, pas grande importance d’un point de vue juridique. On peut comprendre que Samantha Geimer ne souhaite pas se retrouver sous les feux de l’actualité, c’est d’ailleurs ce qui a poussé sa mère a accepter l’arrangement. Le problème c’est que ce n’est pas elle qui a engagé des poursuites, mais l’état de Californie. Nous ne sommes plus au temps des royaumes barbares où on pouvait échapper aux conséquences de ses actes en payant le "prix du sang". Ce sont désormais les pouvoir publics qui sont responsables, en Amérique comme en France, de l’administration de la justice, laquelle n’a rien à voir avec la vengeance.
En droit, donc, l’arrestation de Roman Polanski est pleinement justifiée. Il doit désormais être extradé et condamné – il s’est déjà reconnu coupable rappelez-vous. Sa seule chance d’échapper à sa peine est de plaider le vice de procédure. Il aura également à répondre de sa longue cavale, laquelle constitue en elle-même une infraction.
Ce qui est vraiment important dans cette affaire, ce n’est pas que Roman Polanski soit coupable – il l’est sans l’ombre d’un doute – mais que l’intelligentsia s’acharne à le défendre. Les arguments qu’avancent Bernard Kouchner, Frédéric Mitterand ou Bernard Henri Levy n’ont que peu d’intérêt. Ils n’ont aucune validité juridique mais cela n’a aucune importance car il ne servent qu’à donner un semblant de justification à ce qui n’est, au fond, qu’une mobilisation corporatiste.
Quand on écoute le ministre de la Culture ou le porte-parole de l’UMP, on a l’impression que pour eux il est moins grave de violer une adolescente de 13 ans que de télécharger des films illégalement. Ce n’est pas entièrement vrai. Leur véritable message, c’est qu’il est moins grave pour l’un d’entre eux de violer une adolescente de 13 ans que pour l’un d’entre nous de télécharger des films illégalement.
Qu’une grande part du monde intellectuel, de droite comme de gauche, les suive dans ce qu’il faut bien appeler une infamie, en dit long sur l’état d’esprit qui s’est développé chez certaines de nos "élites". Ce qu’elles disent, parfois explicitement, en soutenant Roman Polanski, c’est qu’on peut commettre n’importe quel crime – et nous ne parlons pas là d’un excès de vitesse ou d’un joint fumé entre deux petits fours – en toute impunité, pourvu que l’on soit un artiste.
Cette prétention n’est pas nouvelle. La noblesse d’ancien régime l’avait. C’est ainsi, par exemple que la comtesse Elizabeth Bathory a pu tuer et torturer des centaines de jeunes femmes sans recevoir d’autres châtiment qu’une assignation à domicile, il est vrai assez stricte, tandis que ses servantes, apparemment aussi coupables qu’elles étaient brûlées vives.
C’est le même message que nous adresse les défenseurs de Polanski : la revendication d’une justice de classe, voire même de caste, établie à leur seul avantage, et partant l’effacement de ce principe d’égalité devant la loi qui est sans doute la plus grande conquête des Lumières.
Cette bruyante revendication d’une égalité supérieure aux autres ne peut évidement que faire le jeux de l’extrême-droite. Si Daniel Cohn Bendit n’avait pas osé troubler le concert des protestations germanopratines, Le Pen se serait arrogé le monopole de la décence dans cette affaire, et ce d’autant plus facilement qu’on a du mal à lui donner tort lorsqu’il réclame la démission d’un ministre qui fait passer la solidarité de caste avant l’intérêt national, la justice et le simple bon sens.
Quant au silence de cette gauche qui reste envers et contre tout mon camps, il est assourdissant, à croire que même chez les trotskistes le seul rouge qui compte, c’est celui des tapis.
Spengler faisait autrefois remarquer que civilisations en déclin se reconnaissait au fossé grandissant qui s’y creusait entre l’élite et le reste de la population. Sans aller jusque là – les menaces qui pèsent sur notre monde sont d’une toute autre nature – force est de reconnaître que cette sécession des élites, ce reniement collectif de l’idéal républicain d’égalité et de responsabilité, marque une rupture dans notre démocratie. Cette rupture n’est ni de gauche ni de droite. Elle n’a rien à voire avec le capitalisme ou le libéralisme. Cela ne rend pas moins cette trahison des élites, comme l’appelait le regretté Cristopher Lasch moins détestable et moins dangereuse.
Messages
1. Affaire Polanski et faux ministres : un français insulté et en colère !!, 1er octobre 2009, 03:15
Sur le fond de cet excellent article, la question que je me pose est celle de savoir comment nous recrutons les hommes qui occupent les plus hautes fonctions d’état dans ce pays. Il me semble que pour rentrer dans la fonction public les candidats sont interrogés et recrutés sur leurs valeurs, sur leurs connaissances des fondements de la démocratie et des responsabilités qu’exigent certaines fonctions ou encore la connaissance des règles d’impartialité entre l’exécutif et le législatif.
L’évènement qui n’est plus l’arrestation de Polanski mais belle et bien la réaction d’une certaine élite, nous fournis aujourd’hui l’évidence d’un réel décalage entre ce qu’un homme d’état doit prôner et les combats qu’il mène en parallèle pour ses intérêts personnels ou ceux de sa caste. Mais cette fois-ci, les déclarations sont tellement déviantes ou déconnectées qu’ils ne pourront pas sortir de là sans en perdre leurs postes. Ça sent la démission à plein nez !!!!
Quel gouvernement voudrait de ça dans sa cour et voudrait les défendre...Sarkozy peut-être ???
Quels employés ou collègues vont vouloir les servir, les prendre en considération et encore travailler avec ???
Quels genre de population serait prête à les soutenir ???
Frédéric Mitterrand disait que Tous les français devraient soutenir Polanski, défendre Polanski contre cette arrestation.
De quels français il parle ??
DE QUEL DROIT, UN MINISTRE DE LA CULTURE PEUT PARLER AU NOM DE TOUS LES FRANÇAIS EN LES IMPLIQUANT EN FAVEUR DE LA PROTECTION D’UN VIOLEUR PÉDOPHILE EN CAVALE !!!
J’ESPÈRE QUE LES ÉLUS QUI REPRÉSENTENT LES VRAIS FRANÇAIS VONT RÉPARER CETTE INSULTE QUI ENTACHE NOTRE IDENTITÉ ET NOS VALEURS QUI SONT DÉFENDUES ICI.
2. Affaire Polanski : un peu de rigueur dans un monde de brutes., 1er octobre 2009, 10:37, par jeanmarc
Très bon article ; un complément sur ce passage :
"LE SILENCE DE CETTE GAUCHE......"
MG BUFFET sur Canal+
" Le fait d’être un grand cinéaste n’excuse pas le comportement que Romain Polanski a eu envers un enfant de 13 ans. Nous avons le droit de porter un jugement sur le fonctionnement de la justice américaine, mais je ne suis pas de celles et ceux qui disent que, parce que Romain Polanski est un grand cinéaste, nous pouvons excuser son acte. Je défends le droit des enfants et le droit des femmes en général et je n’aime pas le soutien que certains apportent à Romain Polanski. La justice doit être la même pour tous."
3. Affaire Polanski : un peu de rigueur dans un monde de brutes., 1er octobre 2009, 11:42, par momo11
Frédéric Mitterrand disait que Tous les français devraient soutenir Polanski, défendre Polanski contre cette arrestation. De quels français il parle ??
Ben de tous les pédophies que la mitt doit faire libérer des prisons française ,sans doute.Nous avons donc les élus et ministres que nous méritons,des merdes !momo11
4. Affaire Polanski : un peu de rigueur dans un monde de brutes., 1er octobre 2009, 14:29
Eh, l’"ami", ça n’est pas de la "culpabilité" ou pas de Polansky qu’on parle.
Ni même des faits.
Sa culpabilité il l’a reconnue, les faits aussi, il a été jugé pour ça, et condamné.
Que la justice américaine soit injuste, ça on le sait, y a suffisamment de gens en taule là-bas qui y sont pour bien moins que le viol d’une adolescente.
Mais l’attitude de l’Oligarchie française tu pense qu’elle est "juste" ???
Tu les a entendu gueuler pour Salah Hamouri, Léonard Peltier, J.M. Rouilland, et bien d’autres ?
Non ?
Alors Polansky, y en a rien à foutre. Qu’il aille en taule et de préférence dans une cellule collective. Les taulards du coin sauront lui rappeler de bons souvenirs. Ils adorent les "pointeurs" !!!
Et pour une fois que Buffet réagit à temps y a pas à gueuler après.
G.L.
1. Affaire Polanski : un peu de rigueur dans un monde de brutes., 1er octobre 2009, 15:44
euh, ni jugé, ni condamné !!!
il a fait une sorte de préventive (47 jours) avant le procès, pour expertise psy, pis il s’est barré quand le juge lui a dit qu’il pouvait lui coller 50 ans de prison...
Thom
5. le bal des faux-culs, 4 octobre 2009, 00:18, par baba cool
Cet acharnement 34 ans après les faits me sidère. La traitrise de la Suisse également. Cette affaire pue l’ordre moral à plein nez.
que Bellaciao s’y mette aussi est attristant. Qu’est-ce qui s’est passé pour que nous en arrivions là ? La crise est-elle tellement profonde que nous ayions déjà besoin de bouc émissaire ? ça augure mal de l’avenir.