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Alternative au libéralisme : Pour une autre Europe vraiment sociale, écologique et démocratique.

Publie le lundi 6 mars 2006 par Open-Publishing

Alternative au libéralisme :
Pour une autre Europe vraiment sociale, écologique et démocratique.

par Christian Delarue anti/altermondialiste

Préalable introductif sur une certaine vision de l’Europe

 Un espace non circonscrit

Définir des frontières définitives à la construction européenne est impossible. La notion même de frontière naturelle est un artifice pour justifier a posteriori des découpages qui sont le fruit de l’histoire et des guerres. Il n’y a pas non plus de frontière culturelle ou religieuse, à moins de réduire l’Europe aux « démocraties occidentales » : l’histoire européenne est étroitement mêlée à celle du bassin méditerranéen. Les arguments avancés contre l’adhésion de la Turquie font ainsi référence à des critères inacceptables de type « civilisationnels » voire aux valeurs « judéo-chrétiennes ».

 Un espace de résistance pertinent

Si vu de haut (cf schéma dit de la coupe de Champagne) le Nord et plus riche que le Sud il plus exact de dire qu’il y a du sud dans le Nord comme il y a du Nord dans le Sud. Il en est de même au plan européen . Vu de haut, il existe de grandes différences de développement et de richesses entre Etats. Mais la vraie fracture qui traverse l’Union européenne est celle qui oppose les salariés et les patrons (PME et FMN), les peuples (salariés et paysans) et les élites économiques et politiques dirigeantes.

L’Union européenne constitue, d’ores et déjà, un embryon d’espace public continental. C’est ce qu’illustrent les euro-grèves, les forums sociaux . Si les rapports de forces sociaux demeurent pour une part importante inscrits dans des marchés du travail nationaux et cristallisés par des droits sociaux relevant des législations nationales, les stratégies de résistance à l’exploitation et à l’oppression opèrent dès à présent à plusieurs niveaux combinés : national, européen, et mondial. C’est ce qu’illustre la bataille sur la ratification du traité constitutionnel. Les rapports de forces spécifiques ont permis des victoires en Hollande et en France qui modifient la situation à l’échelle de l’Union tout entière.

Pour la préservation des équilibres environnementaux, pour la définition de politiques sociales, le développement de services publics, pour innover des politiques de co-développement avec les pays les plus pauvres, l’échelle européenne peut être un point d’appui.

I - Une logique libérale de construction à reprendre de fond en comble

Mais depuis 1957, l’Union européenne se construit à partir d’une logique profondément libérale, vecteur de la mondialisation capitaliste. L’Acte unique européen de 1986 et le traité de Maastrich de 1992 ont renforcé cette Europe néolibérale, porteuse de dégâts sociaux et environnementaux . Une Europe impérialiste qui renforce sa domination à l’encontre des pays ACP (Afrique, Caraïbe, Pacifique).

L’architecture européenne doit être remise sur ses pieds. Sa construction politique doit commencer par l’harmonisation des droits démocratiques et sociaux, seul moyen d’éviter la concurrence débridée de tous contre tous et les dumping sociaux et fiscaux. Tout autre fondement aboutit à consolider une forteresse impériale des riches contre les pauvres, à l’image de l’espace Schengen.

Le Parlement européen, bien qu’élu au suffrage universel, n’est pas doté d’un pouvoir réel. C’est une technostructure non élue, la Commission, qui prétend incarner l’intérêt général, dotée du droit d’initiative législative et des pleins pouvoirs en matière de concurrence. Et c’est le Conseil des chefs d’Etat qui tranche les grandes orientations. Les autres centres de pouvoir sont la Banque centrale et la Cour de Justice, sur la base de Traités négociés. La dénonciation des eurocrates ne doit pas masquer que les gouvernements nationaux ont le dernier mot.

En fait, l’opacité de cette construction vise à accentuer une subordination à des exécutifs non élus et dévoués à la défense des multinationales et des marchés. C’est ce système que le Traité constitutionnel veut entériner et c’est pourquoi nous le rejetons.

II - Pour une autre Europe

Dire non à la Constitution, c’est engager la possibilité d’une construction nouvelle.

 Une Europe sociale ce n’est pas la domination massive l’Europe du capital avec deux doigts d’économie sociale et solidaire telle que pratiquée par les mutuelles et les coopératives . Il s’agit d’harmoniser par le haut des acquis sociaux, d’étendre les droits syndicaux à l’échelle de tous les pays membres, de faire adopter des critères de convergence sociaux en matière de salaire (vers un salaire minimum européen), de protections sociales, d’emploi (pour une durée légale continentale), d’extension des protections légales contre les licenciements, la précarité. Une Europe vraiement sociale impulserait la réduction coordonnée du temps de travail, (32 heures) avec création d’emplois et sans flexibilité. Elle proposerait la création de services publics européens, en abolissant les directives centrées sur l’ouverture des marchés. Elle exigerait une réforme fiscale fortement redistributive et l’adoption d’un budget de l’Union. Dans cette Europe, la logique de la solidarité l’emporterait sur celle de la guerre de tous contre tous, le droit à l’existence sur le droit de propriété.

 Une Europe démocratique et égalitaire élargirait le principe d’élection et de décision à de nombreux champs ou la démocratie est exclue qu’il s’agisse de l’entreprise ou de la production . Elle établirait un principe de citoyenneté fondé sur le seul critère de résidence et le droit du sol. Elle reconnaîtrait à tous les résidents l’égalité de tous les droits civiques et sociaux, à commencer par le droit de vote et d’éligibilité. Elle assurerait l’égalité des sexes et la généralisation du droit à l’avortement libre et gratuit. Elle serait laïque, respectueuse de la liberté de culte, dans la stricte séparation de l’espace public et des communautés confessionnelles.

 Une Europe écologiste enclencherait un programme transitoire sérieux d’alterdéveloppement . Elle refuserait toute privatisation du vivant et l’instauration d’un marché mondial des droits à polluer. Elle soutiendrait un moratoire sur les OGM, et favoriserait l’agriculture biologique. Elle engagerait l’arrêt immédiat du nucléaire militaire et la reconversion programmée du nucléaire civil. Elle s’opposerait à la confiscation privée des ressources naturelles et des savoirs par le brevetage du vivant et la privatisation des savoirs.

 Une Europe solidaire et anti-impérialiste se prononcerait pour l’abolition de la dette des pays pauvres, pour innover des politiques de co-développement. Elle suspendrait le partenariat avec l’Etat d’Israël qui pourtant ne respecte pas les « droits de l’homme » alors que c’est une des clauses d’application des accords Euro-Med. Elle romprait avec la course aux armements et l’escalade des budgets militaires, elle engagerait la destruction de ses armes de destruction massive, œuvrerait pour le démantèlement de l’Otan et de ses bases et ouvrirait une négociation mondiale pour le désarmement.