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Amérique du Sud : la doctrine Bush

Publie le jeudi 6 mars 2008 par Open-Publishing
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Les États-Unis, qui ont pourvu l’information qui a permis d’assassiner le leader des FARC, sont le seul soutien d’Uribe au milieu de la condamnation mondiale pour la violation de la souveraineté. L’Équateur et le Venezuela ont déplacé des troupes vers la frontière et l’Organisation des Etats Américains a convoqué une réunion d’urgence.

Des négociateurs français ont été avisés quelques heures avant qu’ils ne se réuniront pas avec Reyes dans les heures suivantes. Uribe avait donné des garanties pour qu’ils traitent de la libération des otages. Seul Washington a soutenu le président colombien. (...)

Entre des annonces de mobilisation de troupes vénézuéliennes et équatoriennes à la frontière avec la Colombie, le gouvernement de ce pays a dit qu’il ne mobilisera pas ses forces -qui sont déjà déployées de toute façon sur tout son territoire-, mais il a lancé une dure attaque dure aux présidents du Venezuela et d’Équateur pour "connivence" avec la guérilla des FARC. Sur le président colombien, Alvaro Uribe, s’est abattue une bordée de critiques des gouvernements du monde entier pour la violation de la souveraineté territoriale équatorienne tandis que dans le même temps il faisait appel à la "sagesse" et au dialogue. (...)

De manière silencieuse, bien qu’en total accord avec Uribe, le président Sarkozy avait trois envoyés personnels en Colombie, depuis octobre dernier, dans une pénible négociation avec Reyes pour obtenir la libération de la franco-colombienne et ex-candidate présidentielle Ingrid Betancourt. Les trois négociateurs français étaient installés dans une zone proche de celle où l’attaque s’est produite. Le mois dernier, un autre envoyé personnel de Sarkozy avait maintenu une réunion avec le Commissaire pour la Paix, Luis Carlos Restrepo, qui fait partie du gouvernement de Uribe. À ce qu’il semble, samedi, les trois négociateurs se trouvaient à 200 kilomètres de la zone de l’attaque et se dirigeaient vers une réunion avec Reyes quand ils ont reçu appelé de Restrepo. Le Commissaire pour la Paix les a prévenu de ne pas s’approcher du point de rencontre dans les heures suivantes.

Avec une plus ou moins grande emphase, toutes les expressions internationales ont répudié l’intervention militaire ordonnée par Uribe. Les positions sont allées de la dureté du président vénézuélien Hugo Chávez, qui l’a accusé de "assassin" et de "mafieux", jusqu’à celle du mandataire du Pérou, Alan García, qui a appelé au dialogue mais a précisé qu’il n’était pas possible de ne pas critiquer la violation de la souveraineté territoriale équatorienne. Le seul soutien franc dans le forum mondial est provenu du gouvernement nord-américain. D’abord c’était le porte-parole du Conseil National de la Sécurité Gordon Johndroe, qui a exprimé sa surprise "pour l’étrange réaction du président Chávez". Et plus tard, une déclaration officielle du département d’État disait :" Nous soutenons le gouvernement de la Colombie dans son combat contre les organisations terroristes qui menacent la stabilité et la démocratie ".

Le soutien de l’administration nord-américaine, qui a été hier une mouche blanche dans les réactions mondiales, s’est mieux compris quand peu après le directeur national de la police colombienne, Oscar Naranjo général, a révélé dans une conférence de presse, que la localisation de Reyes a été possible grâce à une information proportionnée par la CIA. Selon Naranjo, l’agence nord-américaine avait détecté un téléphone cellulaire que Reyes utilisait sporadiquement. Le chef policier a souligné que l’information a été délivrée aux forces colombiennes environ dix jours avant samedi. Il confirmait de cette façon que l’opération avait quelques jours de préparation, tandis que se développait y compris la la négociation des français avec les FARC et qu’il ne s’agit pas d’une réaction défensive comme l’a argué le gouvernement colombien dans un premier temps.

Dans cette mer de contradictions, le ministre de la défense colombien, Juan Manuel Santos, exprimait sa surprise pour les réactions "changeantes" de Correa. Il a raconté que samedi Uribe a expliqué à Correa ce qui était arrivé et que le mandataire équatorien avait réagi de manière tranquille, lui demandant seulement, de s’excuser. "Mais dimanche, après les déclarations du président Chávez, Correa a changé." Samedi, Uribe avait dit à Correa que cela avait été une réaction défensive et que ses soldats avaient involontairement pénétré en territoire équatorien, poursuivant les guerrilleros qui les avaient attaqués. Dimanche, Correa a été informé que les guerrilleros dormaient quand leur campement a été bombardé et après de brèves consultations avec d’autres gouvernements il en est arrivé à la conclusion que l’attaque était planifiée depuis longtemps. Uribe avait menti et lui avait caché durant tout ce temps quil préparait une incursion sur le territoire de l’Équateur. À la furie de Correa pour la violation territoriale s’est ajouté la tromperie du mandataire voisin.

En un peu plus d’une heure, le gouvernement colombien a retourné sa position et est passé de l’excuse à une attaque féroce contre la Correa et Chávez, les accusant de "connivence" avec la guérilla. (...)

Entre-temps, les chancelleries sud-américaines développaient une activité fiévreuse. Le président Lula da Silva du Brésil et la présidente Cristina Kirchner d’Argentine ont parlé chacun de leur côté avec Uribe et Correa. Les deux gouvernements ont condamné la violation territoriale réalisée par la Colombie, mais ils faisaient des efforts pour éviter un échelonnement d’agressions qui pouvait dériver en un affrontement guerrier. Correa avait sollicité une réunion urgente de l’Organisation des Etats Américains (OEA) pour discuter de la crise mais les Etats Unis essayaient de dilater sa convocation. Finalement les chancelleries sud-américaines, surtout celles d’Argentine, Brésil et Chili ont obtenu qu’Insulza la réalisation aujourd’hui de la réunion. Il semble difficile pour la Colombie d’insister aujourd’hui avec sa dénonciation des contacts de l’Équateur et du Venezuela avec la guérilla, parce que plusieurs de ces gouvernements ont aussi participé aux négociations, tout comme les français, les espagnols et les Suisses. Et la thèse inspirée par le président George Bush, suivant laquelle la guerre contre le terrorisme n’a ni frontières ni lois, n’a pas non plus de soutien dans la région. De plus, Uribe y arrivera avec de mauvais antécédents parce qu’il a aussi trompé beaucoup des gouvernements qui seront là.

Luis Bruschtein, Pagina/12 (Argentine), 04 mars 2008.

http://www.pagina12.com.ar/diario/elpais/1-100096-2008-03-04.html

Messages

  • bonjour,

    merci d’avoir traduit cet article plein de verités, ces precisions qui relativisent la “puissance” US :

    La position des USA dans le monde : le pessimisme abyssal des Américains

    Date de publication : 06/03/2008 - Rubrique : Bloc-Notes

    Il y a une étonnante symétrie dans l’évolution du sentiment des Américains vis-à-vis de la position de leur pays dans le monde, depuis 2001 (et l’arrivée de GW Bush). Les pessimistes et les optimistes se sont exactement inversés.

    Il s’agit d’un sondage Galup portant sur 1.007 personnes, qui est effectué régulièrement et dont les résultats de janvier sont publiés chaque année. La question posée est la suivante : « On the whole, would you say that you are satisfied or dissatisfied with the position of the United States in the world today ? »

    Les réponses sont les suivantes, entre janvier 2001 et janvier 2008, montrant ce renversement symétrique :

    • Janvier 2001 : 30% d’“insatisfaits” et 67% de “satisfaits”.

    • Janvier 2008 : 68% d’“insatisfaits” et 30% de “satisfaits”.

    C’est de loin le plus fort pourcentage d’insatisfaction de l’histoire de ce sondage, et un résultat très significatif parce que l’érosion est régulière depuis 2001. Le pourcentage d’insatisfaction record précédent était de 44% durant la guerre du Vietnam. Ce points le plus bas a été dépassé pour la première fois en novembre 2004 (42%), avec un léger rebond en janvier 2005 (48%) qui est le dernier point où les “satisfaits” (51%) étaient supérieurs aux “insatisfaits” ; puis la poursuite de la tendance avec un rapport négatif (43% de “satisfaits” en janvier 2006 contre 54% d’“insatisfaits”, 37% en janvier 2007 contre 61%, 30% en janvier 2008 contre 68%).......................

    http://www.dedefensa.org/article.php?art_id=4958