Après les Antilles, l’océan Indien

OUTRE-MER

Après les Antilles, l’océan Indien
BERNARD DELATTRE

Mis en ligne le 06/03/2009

Appel à la grève générale reconductible contre "la vie chère" à l’île de La Réunion. Alors que le travail a repris en Guadeloupe et qu’un accord tarde en Martinique.
Le blog de notre correspondant à Paris
CORRESPONDANT PERMANENT à PARIS

Des milliers, voire, selon les sources, des dizaines de milliers de personnes ont manifesté jeudi contre "la vie chère" à La Réunion. Cette île de l’océan Indien, le plus peuplé (750000 habitants) des départements français d’outre-mer (DOM), cumule les plus mauvais indicateurs français : plus haut taux de chômage (24,2 pc), plus forte proportion de la population vivant sous le seuil de pauvreté (52 pc) et record national du nombre d’allocataires du revenu d’insertion (64000). Un collectif associatif et syndical a lancé un appel à une grève générale reconductible contre la vie chère et pour des hausses salariales.

Les manifestants réclament notamment une hausse de 200 euros des plus bas salaires, des allocations sociales minimales et des plus petites retraites. Ils revendiquent également une baisse des prix des produits de base. Dès jeudi, les Réunionnais, craignant des pénuries comme aux Antilles ces dernières semaines, se sont rué dans les magasins pour faire des stocks. Des barrages routiers ont été dressés par des jeunes encagoulés, qui ont répondu par des jets de pierres aux tirs de grenades lacrymogènes des forces de l’ordre.

"Ce n’est pas la peine d’envisager un blocage de plusieurs semaines", a estimé jeudi le secrétaire d’Etat à l’Outre-Mer, selon qui "les solutions gouvernementales sont là, et les revendications des manifestants leur correspondent parfaitement".

"Conflit lourd et profond"

Ces "solutions", ce sont les 165 mesures contenues dans l’accord signé jeudi à l’aube en Guadeloupe, après 44 jours de grève générale - mesures que le gouvernement est disposé à étendre à l’ensemble des DOM. Elles prévoient notamment une hausse de 200 euros des plus bas salaires, une baisse du prix des produits de base (pain, essence, eau, etc.) ou l’octroi aux familles modestes de 40 000 billets d’avion à prix réduit vers la métropole.

Mais aussi des dispositions axées sur le développement de l’île à plus long terme, comme un plan d’urgence pour l’insertion de 8 000 jeunes ou l’obligation pour les cantines scolaires de servir pour moitié aux écoliers des produits issus de l’agriculture locale. Et une concession symbolique, dans cette île où le courant autonomiste, voire indépendantiste, n’est pas mince : l’obligation d’un double fléchage linguistique, en français et en créole, dans les édifices publics.

Ce paquet guadeloupéen étendu aux autres DOM coûtera chaque année quelque 250 millions d’euros à l’Etat, prélevé sur l’effort annuel supplémentaire de 700 millions pour l’outre-mer annoncé dernièrement par Nicolas Sarkozy.

A Pointe-à-Pitre, les grévistes ont salué un accord historique. Et ont immédiatement appelé à la reprise du travail, après une grève qui fut la plus longue que la France ait connue depuis vingt ans. A Paris, l’on a salué la fin d’un "conflit social lourd, profond, qui vient de loin, qui consacre la crise du modèle politique de la départementalisation et la fin du modèle économique monopolistique".

Si le travail a repris et les magasins ont rouvert en Guadeloupe, tel n’est pas encore le cas en Martinique. L’île voisine est perturbée depuis un mois par une grève sur la même thématique de "la vie chère", et un accord en bonne et due forme s’y fait toujours attendre.

http://www.lalibre.be/actu/europe/article/486553/apres-les-antilles-l-ocean-indien.html