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Au pays de G.W.Bush

Publie le samedi 1er novembre 2003 par Open-Publishing

Irak

" Nous avons des intérêts et des positions légitimes
concernant les questions examinées par le Congrès "

( Riley Bechtel, PDG de la société Bechtel )

Les entreprises américaines qui se sont vu attribuer -sans appel d’offres- pour huit milliards de dollars (6,9 milliards d’euros) de contrats de reconstruction en Irak et en Afghanistan ont largement financé la campagne électorale de George W. Bush et sont étroitement liées aux milieux politiques et militaires, selon une étude publiée jeudi.
Le Centre pour l’intégrité publique (SPI), une organisation basée à Washington et qui enquête, avec des journalistes et chercheurs, sur les intérêts particuliers et l’éthique du gouvernement, montre que la plupart des dix plus gros contrats sont allés à des sociétés employant d’anciens haut responsables du gouvernement ou dont l’exécutif est très proche des membres du Congrès, voire des agences qui attribuent les contrats.
Les quelque 70 sociétés et entrepreneurs individuels étudiés ont ainsi financé la campagne de George W. Bush en 2000 à hauteur de plus de 500.000 dollars, soit plus qu’ils n’ont donné à tout autre homme politique ces 12 dernières années.
L’enquête fait aussi apparaître que les dix principales entreprises ont versé un total de 11 millions de dollars aux partis politiques, candidats et comités d’action depuis 1990, et que les 14 sociétés ayant remporté des contrats à la fois en Irak et en Afghanistan ont versé plus de 23 millions de dollars sur la même période.
Au moment des attributions, les agences gouvernementales américaines avaient argué de l’urgence de la situation pour justifier l’absence d’appels d’offres. Pour le directeur du SPI, Charles Lewis, le fait qu’"aucune agence n’ait supervisé ce processus au nom du gouvernement (...) montre combien ce système est susceptible (de favoriser) le gaspillage, l’escroquerie et le copinage".
"Incorrect", rétorque Edward Fox, administrateur adjoint de l’Agence américaine pour le développement international (USAID), qui souligne que l’examen général (...) réalisé à la requête présentée le 14 avril par l’administrateur d’USAID Andrew Natsios, a établi que tous les contrats en Irak avaient été conclus dans le respect" des lois fédérales.
Les questions demeurent, notamment lorsque l’on se penche sur le cas d’Halliburton, dont la filiale KBR a obtenu un contrat de plus de 2,3 milliards de dollars (1,97 milliard d’euros) pour aider l’armée américaine et remettre en état de marche l’industrie pétrolière irakienne. Or le vice-président Dick Cheney dirigeait ce groupe jusqu’à ce qu’il démissionne en 2000 pour se lancer dans la présidentielle avec George W. Bush.
Le PDG d’Halliburton, Dave Lesar, s’indigne de ces soupçons qui, selon lui, portent "moins sur (son entreprise) que sur les questions de politique extérieure". "En tant que société exceptionnellement qualifiée pour répondre à cette mission difficile, nous concentrons toute notre énergie en cette période cruciale pour le Moyen-Orient. Nous servons l’armée depuis plus de 50 ans et n’avons nullement l’intention de faire marche arrière maintenant", prévient-il.
Quant à Bechtel, numéro un américain de la construction et de l’ingénierie et bénéficiaire du deuxième plus gros contrat en Irak (1 milliard de dollars/854,9 millions d’euros), il revendique son implication politique mais assure qu’il "n’escompte pas recevoir de faveurs politiques ou de contrats gouvernementaux grâce à ces contributions".
"Nous nous engageons dans le processus politique, comme la plupart des sociétés aux Etats-Unis", écrit Bechtel sur son site Internet, "Nous avons des intérêts et des positions légitimes concernant les questions examinées par le Congrès et nous les exprimons de diverses manières, y compris en soutenant les élus qui soutiennent ces positions." Reste que le PDG, Riley Bechtel, a été nommé cette année au Conseil des exportations du président Bush, qui aide le chef de la Maison Blanche sur les programmes destinés à rendre plus performant le commerce américain.
Selon le Centre pour l’intégrité publique, les dons des bénéficiaires des contrats s’élèvent à un total de 12,7 millions de dollars pour les républicains actuellement au pouvoir, contre 7,1 millions pour les démocrates. Avec WASHINGTON (AP)