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Boutih : "Je veux plus qu’un poste de délégué à la diversité"

Publie le lundi 22 décembre 2008 par Open-Publishing

Propos recueillis par Marie-Christine TABET

Malek Boutih, ancien responsable de SOS Racisme et membre du bureau national du Parti socialiste, reconnaît qu’il aurait pu entrer en gouvernement, en lieu et place de Yazid Sabeg, en charge de la diversité. Mais il vise autre chose... comme par exemple la présidence de la Haute Autorité de lutte contre les discriminations et pour l’égalité des chances (Halde).

Avez-vous été contacté pour entrer au gouvernement ?

Il y a quelques semaines, j’ai eu des appels du pied, pas une démarche officielle. On sait que je suis un homme de dialogue, pas un sectaire. Sur certains sujets, il n’y a pas la vérité dans un camp et le diable dans l’autre. Des dossiers aussi complexes que l’intégration, l’échec scolaire ou la crise des banlieues méritent une fraternité républicaine.

Pourquoi avoir refusé ?

Pas par idéologie. Il y avait d’autres candidats très compétents. Yazid Sabeg fera très bien l’affaire. Il a beaucoup réfléchi à la question des élites. J’ai l’ambition - ce n’est pas un gros mot - de devenir l’un des principaux dirigeants du Parti socialiste et je me battrai pour cela. Je ne suis pas qu’un lieutenant. Que mes amis se rassurent, je n’ai pas pris la grosse tête mais je suis dans une période de mutation. L’élection de Barack Obama a changé la donne. Un noir est devenu président des Etats-Unis. Tout est désormais possible. Je veux plus qu’un poste de délégué à la diversité.

Le pari était trop risqué ?

J’ai pris plus de risques en refusant que si j’étais entré au gouvernement...

On dit que vous avez demandé la présidence de la Halde* au président...
Cela m’intéresse et je l’ai fait savoir. Le président veut des nominations à des postes importants. Je le prends au mot !

"Le jeu de la concurrence démocratique"

Ne redoutiez-vous pas de tomber dans un piège politique ?

Je ne pense pas que le président de la République milite en faveur de la diversité par esthétisme ou par opportunisme politique. Son discours de mercredi avait une portée historique. C’était un texte profond et important. La gauche est gênée ? Tant mieux, c’est le jeu de la concurrence démocratique. Je ne nie pas qu’il y ait chez lui du calcul ou de la stratégie électorale. Et alors ? Il a compris qu’il y avait un électorat sensible à ce type d’action.

Certains considèrent que les parcours de Rama Yade ou de Rachida Dati sont contre-productifs. Partagez-vous cette analyse ?

Absolument pas. Je ne partage pas la politique pénale défendue par Rachida Dati mais on ne lui pardonne rien ! Elle fait preuve de courage et de détermination. Contrairement à ce que pensent les élites parisiennes, dans les cités, elle est un modèle. Elle est à la tête d’un ministère régalien. Quand, comme moi, on est fils d’ouvrier, cela signifie quelque chose. Il y a des ministres totalement inexistants qui passent toujours à travers les gouttes. Je n’ai rien contre Bernard Laporte à titre personnel mais pourquoi ne jamais s’interroger sur l’action du ministre des Sports ? Quant à Rama Yade, je l’ai appelée cette semaine pour l’encourager. Elle est jeune et parfois inexpérimentée sur le terrain politique. Mais elle a faim, elle est intelligente, elle renouvelle le genre. J’ai trouvé les attaques de Bernard Kouchner indignes.

Etes-vous optimiste ?

Oui. Dans vingt ans, il y aura beaucoup de Rama, de Rachida et de Malek, partout dans la société. La classe politique actuelle fonctionne avec un logiciel des années 1980. C’est terminé.

Qu’attendez-vous du PS ?

Martine Aubry a su prendre dans son équipe des jeunes issus de la diversité. Mais il reste au Parti socialiste à faire ses preuves au niveau électoral. Cela n’a pas été le cas lors des régionales de 2004, des législatives de 2007 ni des dernières municipales. Ces candidats ont été sacrifiés, personne n’est venu tracter pour eux, aucun patron de fédération ne s’est mobilisé pour eux. Le PS ne gardera pas un département comme la Seine-Saint-Denis s’il n’est pas capable de se métisser à l’image de la société.

*Haute Autorité de lutte contre les discriminations et pour l’égalité des chances

http://www.lejdd.fr/cmc/politique/2...