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CHIRAC ET LE CODE DU TRAVAIL, la grande esbroufe

Publie le jeudi 6 avril 2006 par Open-Publishing
2 commentaires

de Richard Abauzit, ancien inspecteur du travail

1/ Je joue la montre :

Je légalise le C.P.E, mais si vous reprenez le travail et arrêtez de manifester, le CPE sera modifié... plus tard (après "un examen approfondi avec les partenaires sociaux", vient-on d’apprendre) par une nouvelle loi par les députés, les mêmes qui ne pouvaient être saisis par une deuxième lecture pour le modifier ou le retirer...

2/ Je vous vends 2 C.P.E pour le prix d’1 :

1 an de période d’essai au lieu de deux, c’est à dire en fait 365 C.D.D d’un jour au lieu de 730, puisqu’on peut être licencié tous les jours et sans motif. Mais comme le patron peut, avec le même salarié jeune, lui faire un autre C.P.E (après un délai de deux mois), cela fait toujours deux ans. Et plus, puisqu’on peut repartir avec un C.P.E avec un autre employeur.

3/ Je vous rassure, le jeune aura droit à une explication sur son licenciement

Là le magicien Chirac se fait boni-menteur !

Le jeune « aura droit à une explication ». Le MEDEF avait depuis plusieurs semaines soufflé l’entourloupe.

► D’abord le jeune aura droit à une explication : cela signifie qu’il faudra qu’il la demande. Aujourd’hui, pour licencier un salarié en C.D.I ou rompre un C.D.D, et même pour prononcer une sanction moindre que le licenciement, l’employeur a obligation de convoquer à un entretien préalable le salarié (qui a alors droit à être accompagné par un témoin - délégué du personnel ou conseiller du salarié en cas de licenciement envisagé, personne au choix du salarié appartenant au personnel de l’entreprise en cas de sanction) et de lui donner le motif. (articles L.122-14, L.122-14-1, L.122-14-2, L.122-41 du Code du travail)

► Ensuite, le jeune, s’il l’a demandé, aura une explication : en termes plus clairs un entretien au cours duquel le patron devrait lui dire pourquoi il le licencie. Il n’a pas été dit qu’il y aurait un témoin. Quoiqu’il en soit, si le jeune veut contester aux prud’hommes le motif de son licenciement, il dira : « le patron m’a dit que.. ». Parole contre parole, du vent en droit, les prud’hommes jugent uniquement sur ce qui est aujourd’hui obligatoire : le motif écrit sur la lettre de licenciement qui doit être notifié par envoi en recommandé avec avis de réception. Et, en cas de doute, ce doute aujourd’hui « profite au salarié » (article L.112-13 et L.122-14-3 du Code du travail) mais ce bénéfice du doute a été retiré pour le C.P.E !! (l’article L.122-13 ne s’applique pas). Ajoutons que les procédures de licenciement pour motif économique ne s’appliquent pas non plus en cas de C.P.E ! (article L.321-1 à L.321-17 du Code du travail).

Par exemple, si l’employeur modifie le contrat, cette modification ne pourra plus être considérée (en cas de refus du jeune), comme un licenciement pour motif économique. Un dernier, pour la route : l’article L.122-14-7 du Code du travail ne s’applique pas au C.P.E et c’est cet article qui interdit de passer outre les protections particulières applicables à certains salariés (maternité, accidentés du travail, représentants du personnel)...

L’objectif visé par les contrats C.P.E et C.N.E (lequel s’applique depuis le 2/08/05 à tous les salariés, y compris les jeunes, dans toutes les entreprises de moins de 20 salariés) étant précisément de pouvoir licencier sans motif, il fallait - face au refus de la grande majorité du peuple- trouver un moyen de le faire tout en disant qu’on ne le fait pas.

Hier soir, en regardant bien, on aurait pu voir un MEDEF ventriloque s’agiter derrière les lunettes de la marionnette qui nous sert de Président.

Post scriptum : à chaque « crise », les gouvernements proposent de revoir le fonctionnement des universités. Et les tentatives sont toujours les mêmes :

1/ sélection à l’entrée des universités (bonjour Devaquet) - et Chirac a parlé de maintenir l’excellence des universités...

2/ privatiser toujours plus les universités et les faire fonctionner dans l’intérêt immédiat des seules entreprise locales - et Chirac a parlé de renforcer les liens des universités avec l’ « emploi » ...

Messages

  • Merci, vous venez de résumer les politiques menées depuis 1982 à l’encontre des engagements pris auprès des électeurs, surtout les salariés, ce que nos bourgeois droite et PS appellent "l’art de gouverner" qui pourrait tuer toute démoccratie. Je ne réponds plus de la "sagesse" du Peuple français vis à vis de ces trahisons. Union des Menteurs Professionnels qui sont aussi des tricheurs et des voleurs.

    • Ce n’est pas 1 an de période d’essai mais 1 an de période de consolidation, ce qui n’est pas du tout pareil. La période d’essai du CPE dure 1 mois, comme toutes les périodes d’essai de tous les contrats d’embauche. Mais la période de consolidation (qui devait être de 2 ans au départ, mais de 1 an finalement).

      Durant la période d’essai (1 mois) : l’employé-e, tout comme l’employeuse/eur, peut rompre le contrat.

      Durant la période de consolidation (1 an) : l’employeuse/eur est la seule personne apte à décider à tout moment de mettre fin au contrat. Si l’employé-e s’y essaie, c’est alors comme la rupture d’un CDD : l’employé-e, qui est alors est considéré-e comme ayant démissioné, perd ses droits et peut être attaqué-e en justice par la/le patron-ne pour rupture de contrat.

      En gros, la période d’essai de l’employé-e et de l’employeuse/eur dure 1 mois, mais la période d’essai de l’employé-e (celle qui permet à l’employeuse/eur de se raviser à son sujet) dure 12 mois de plus !

      Bilba.