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Cuba : la vérité sur « l’embargo »

Publie le mercredi 25 octobre 2006 par Open-Publishing
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« Provoquer la faim, le désespoir, le renversement du gouvernement cubain » Département d’Etat des Etats-Unis, 6 avril 1960

Ricardo Alarcon, Président de l’Assemblée Nationale de Cuba

Sous peu, l’Assemblée Générale des Nations Unies adoptera, pratiquement à l’unanimité, une nouvelle résolution, la 15è, qui condamne le blocus de Cuba que Washington tente de décrire comme un simple « embargo ». Une fois de plus, le gouvernement des Etats-Unis tentera, en vain, de justifier sa politique

Cela fait un demi siècle qu’ils font la même chose, cachant la vérité derrière leurs manigances et leurs mensonges.

Néanmoins, la vérité se trouve dans des documents que Washington a maintenus secrets jusqu’en 1991. Plus qu’un embargo ou un blocus, c’est, en réalité, un acte de « guerre économique » comme l’a dit le Secrétaire d’Etat, Christian Herter, en 1959. Une guerre économique qui a commencé avec le triomphe de la Révolution, en janvier 1959, et qui, en réalité, se poursuit aujourd’hui, une guerre qui a toujours eu le même but : provoquer la faim, la misère, le désespoir parmi les Cubains.

Le dictateur Batista et sa bande ont pillé le Trésor de la République, et lorsqu’ils se sont enfuis de Cuba , en janvier de cette même année, ils ont emporté plus de 424 millions de dollars qui se sont retrouvés aux Etats-Unis et qui constituent aujourd’hui la base financière d’une maffia que la presse étasunienne qualifie souvent de « chefs d’entreprises qui ont réussi » de Miami.

La situation était très difficile pour Cuba et Washington le savait. Le Département d’Etat la décrivait de la manière suivante en février 1959 : « la sérieuse menace pour la stabilité du peso cubain qui découle du fait qu’après le départ de Batista du pays, la conclusion est que les réserves du pays en devises sont épuisées », une chose qui va « mettre à l’épreuve la capacité de diriger de n’importe lequel de ses meilleurs leaders. » La Banque Centrale de Cuba a envoyé une équipe de spécialistes à Washington pour concerter un petit emprunt qui aurait pu rendre la crise moins aigue. Le Conseil de Sécurité Nationale a analysé la question le 12 février 1959. La décision a été très claire : ils ont écouté les Cubains, mais ils ne leur ont absolument rien offert. Ils ne leur ont accordé aucun crédit, ils n’ont même pas promis d’analyser la question. Il va sans dire que pas un seul centime de l’argent volé n’a été rendu au peuple cubain. Ce pillage des réserves des banques cubaines qui constitue un acte flagrant d’agression, a eu lieu bien avant que le pays ne prenne quelque mesure révolutionnaire que ce soit - la première a été la Loi de Réforme agraire adoptée le 17 mai de cette année-là.

Le 26 mars 1959, le Conseil de Sécurité Nationale a aussi analysé la situation cubaine. Au cours de cette réunion, le Directeur de la CIA, Allen Dulles, a signalé : « Il est fort possible que le Congrès des Etats-Unis fasse quelque chose qui puisse affecter la vente du sucre cubain aux Etats-Unis. » Priver Cuba de sa principale source de devises, les exportations de sucre vers le marché étasunien, devait se transformer en un thème récurrent des réunions secrètes qui avaient lieu à Washington, vraiment bien longtemps avant que ne s’établissent les relations avec l’Union Soviétique et que ne soit proclamé le caractère socialiste de la Révolution. Ils ont fait cela lorsque la canne à sucre était cultivée sur de grandes étendues et le sucre fabriqué dans des raffineries - nombre d’entre elles étaient la propriété des Etats-Unis - qui n’avaient pas été nationalisées et qui se trouvaient encore aux mains de l’oligarchie et d’entreprises étrangères. Les hauts fonctionnaires étasuniens étaient conscients des conséquences qu’auraient de telles mesures. Un rapport du Département d’Etat reconnaissait : « Si Cuba était privée du privilège que représente le quota de ventes (sur le marché étasunien), l’industrie sucrière subirait une chute abrupte et accélérée, cela provoquerait une généralisation encore plus grande du chômage. Par conséquent, les grandes masses de travailleurs se retrouveraient sans travail et commenceraient à souffrir de la faim. » Mais ils ne se référaient pas seulement au sucre, « si nous devions couper aux Cubains les fournitures de combustible, l’effet serait dévastateur pour eux en un mois ou six semaines ». Personne n’a dit à Washington qu’il avait été trompé. Ils savaient que les mesures prises contre la Révolution provoqueraient la douleur et des souffrances à tout le peuple de Cuba. Ils l’ont fait de manière préméditée et en toute connaissance de cause, transformant intentionnellement l’acte de génocide en un instrument politique destiné à causer des souffrances.

Une analyse de ce même Département d’Etat, datée du 6 avril 1960 et contresignée par le Secrétaire d’Etat adjoint, Roby Rubottom, nous offre une preuve sans appel de cette politique. Cette analyse assurait que : « La majorité des Cubains appuient Castro. Le seul moyen de lui aliéner cet appui interne est de provoquer le mécontentement et le découragement issus de l’insatisfaction et des difficultés économiques. » Elle poursuivait en signalant qu’il fallait mettre en oeuvre rapidement tous les moyens possibles pour saper l’économie de Cuba. « Cela devrait être le résultat d’une décision qui doit donner lieu à une ligne d’action, en même temps que, de la manière la plus habile et la plus discrète possible, les choses avancent au maximum en refusant à Cuba l’argent et les produits, de manière à ce que le salaire brut et le salaire réel diminuent, afin de provoquer la faim, le désespoir et de renverser le gouvernement ». Remarquez qu’ils signalent eux-mêmes qu’ils doivent agir « de la manière la plus habile et discrète possible », attitude qui va de pair avec une conduite criminelle et pas avec n’importe quel délit, mais bien un délit qui a été condamné de manière spécifique par l’humanité : le crime de génocide clairement défini par la Convention de Genève en 1948 comme une tentative de causer un dommage partiel ou total à un groupe humain.

Qu’est cela si ce n’est justement une tentative de provoquer la faim et le désespoir chez les Cubains ? C’est probablement l’acte de génocide le plus prolongé de l’histoire. Il a commencé avant que la majorité des Cubains qui vivent actuellement ne soient nés, ce qui signifie qu’ils ont passé toute leur vie sous le blocus.

Dans peu de temps, l’humanité le condamnera de nouveau à l’unanimité. Une fois de plus, le gouvernement des Etats-Unis fera étalage de son arrogance et ignorera superbement l’exigence du monde entier.

Quand cela finira-t-il ?

Source : inSurGente

NB : Toutes les citations sont tirées des documents officiels rassemblés dans le livre publié par le Département d’Etat sous le titre : Relations extérieures des,Etats-Unis, 1958-1960, Tome VI, Cuba.

http://vdedaj.club.fr/spip/article....

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