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DU CONSENSUS ...OU COMMENT REGROUPER VEAUX, VACHES ET COCHONS

Publie le vendredi 15 décembre 2006 par Open-Publishing
3 commentaires

DU CONSENSUS …ou COMMENT REGROUPER VEAUX , VACHES ET COCHONS…

Chacun affectera comme il le souhaite ces différents vocables animaliers !

Nul ne met en doute l’intérêt du mouvement des collectifs antilibéraux ni le dynamisme qu’ils ont su créer au delà de la gauche après la victoire au référendum sur l’europe. Certes, il est plus facile de dire Non pour un référendum ; mais il n’y avait pas que ce Non tout seul, il y avait tout un travail d’analyse et un démontage des mécanismes de la mondialisation ultralibérale qui a été porté par tous ces collectifs du 29 mai si pluralistes et ouverts.

A l’occasion de ce combat, militants du mouvement social plus ou moins inorganisés et militants du PCF se sont retrouvés côte à côte et le mouvement s’est enrichi de ses différences. Le PCF a pu apporter sa richesse militante et son organisation logistique, les autres mouvances (syndicats, associations, petits partis, féministes, écologistes, minoritaires de la LCR ou du PSR, membres d’Attac, citoyens, très nombreux participants des 300000 antilibéraux altermondialistes du Larzac à l’été 2003) ont pu apporter une image plus diverse de la société et une capacité nouvelle d’analyses et de débats.

Suivant les endroits cette rencontre a pu revêtir différentes formes : création de Collectifs se réclamant de l’Appel des 200 et regroupant déjà toute la diversité du mouvement actuel ou bien entrée dans le combat de nombreux Comités citoyens de défense de la Sécu ou des services publics créés par le PCF en 2004.

Après la victoire du Non tous ces militants ont porté l’espoir d’une suite politique et, en tant que représentant de mon collectif d’Ardèche méridionale, j’ai assisté à la première réunion nationale des collectifs du 29 mai où les militants ont fortement exprimé cette volonté .

Mais la diversité extrême de toutes ces mouvances rendait difficile une organisation politique du mouvement en vue des élections françaises .Et je rejoins ici l’analyse de Danielle Bleitrach dans ces colonnes qui soulignait la nécessité des partis (structures organisés avec des adhérents et un système cohérent de valeurs et d’analyse) dans le combat politique .

Il a donc fallu les Appels à candidatures unitaires pour que la suite politique du 29 mai prenne corps . A défaut d’une structure commune ou d’une coalition de Partis les différents collectifs du 29 mai et les divers comités se sont changés en collectifs unitaires actuels dotés d’une coordination nationale (cuan)

Peut être aurait-il été pertinent de structurer davantage ces collectifs en se dotant de cartes de membres et de cotisations mais là on se heurte également à des difficultés théoriques (comment « gérer » les orgas, assos et partis) et stratégiques ou tactiques pour les partis et en particulier pour le plus puissant, le PCF ; On aurait pu imaginer aussi la création d’un sous groupe « antilibéral » pour les « individuels » mais qui aurait pu apparaître comme concurrençant les autres partis. Cela ne s’est pas fait.

Il a donc fallu adopter au CUAN un mode de fonctionnement permettant de conserver la dynamique et l’unité initiale : le double consensus . Certains sur ce site l’ont critiqué comme étant non démocratique, à l’image même du fonctionnement de l’UE –et en ce sens , à juste titre – Mais nous ne sommes pas un état qui va ensuite imposer des lois non démocratiquement établies à tout un peuple non consulté !

N’oublions pas que nous ne sommes en tant que collectifs qu’une structure informelle, sans membres répertoriés, sans règles d’appartenance précises, qu’une sorte de forum de propositions et donc que ce « machin » est bien délicat à conduire , d’autant plus que les rapports de force à l’intérieur y sont très inégaux. Et ce « machin » ne peut fonctionner que si chacun y met du sien d’où la règle du double consensus ; l’expérience du dernier week end en a bien montré et les difficultés et les limites. Mais dans l’immédiat nous n’avons pas d’autres alternatives pour éviter l’éclatement .

Nous sommes donc renvoyés à un nouveau tour de discussion dans les collectifs locaux …En dehors du miracle de Noël que pouvons nous en attendre ? Rien, si on pense que le PC veut lancer une OPA sur les collectifs… sauf si la certitude d’un éclatement ne l’amène à changer de position .

Mais je pense que la situation n’est pas aussi manichéenne que cela . Pour un militant communiste sincère et de bonne foi la candidature de MGB est le bon choix ; ce n’est qu’avec une vision extérieure au Parti que des obstacles sérieux apparaissent : choisir MGB ce serait apporter l’étiquette PC au mouvement et lui faire perdre ainsi ses principaux atouts que sont sa diversité, son ouverture et sa nouveauté et de très nombreux militants des collectifs ne pourraient l’accepter .

D’ailleurs si on examine les expressions des collectifs de façon plus attentive on constate que leurs choix sont essentiellement liés à la diversité relative de leur composition . Pour ce faire j‘ai examiné un échantillon représentatif de 65 collectifs sur une liste de 277 disponibles sur le site du cuan (par une méthode de balayage sur la liste rangée par départements) :

13% d’entre eux se déclarent « héritier » d’un collectif du 29 mai les précédant ; ils choisissent YS à 50%, CA à 25% et pour le quart restant ne se prononcent pas sur un nom

40% sont des collectifs comprenant un noyau PC fort (apparaissant dans la composition ou (et) dans le compte rendu de la séance- cette typologie étant attribuée avant la lecture du résultat des choix) ;ils choisissent alors MGB à 68%, CA à 12%, YS à 8% ; dans 8% des cas la première place de MGB se joue à très peu de voix entre CA ou YS .

47% ont des compositions reflétant assez bien le mouvement ; ils choisissent MGB à 13%, YS à 13%, CA à 30%, JB à 3% ;dans 27% des cas ils choisissent deux noms et ne se prononcent pas dans 14% des cas ; au total MGB est citée dans 20% des cas, YS dans 33% et CA dans 50%.

Ce sondage n’a bien évidemment qu’une valeur indicative , d’autant plus que les résultats bruts eux mêmes n’ont qu’une signification très relative compte tenu des remarques déjà faites sur la nature des collectifs .

La date de création des collectifs ne semble pas avoir une incidence sur les résultats ; toutefois, si on teste la valeur prédictive de la composition des collectifs sur les résultats parvenus après le 6 décembre il semble y avoir un certain durcissement des positions : on trouve 50% de collectifs « tendance PC »(au lieu de 40) donnant MGB à 60%, 40% de collectifs « équilibrés »(au lieu de 47)donnant YS à 75% , CA à 25% et 10% de collectifs issus du 29 mai donnant tout juste la préférence à YS devant MGB (afflux de nouveaux membres signalé le jour de la réunion).

Quels enseignements peut on tirer de tout cela ?

D’abord que toute polémique ou coup d’éclat est improductive et destructrice pour ce type de mouvement . Si nous voulons préserver une petite chance de réussite nous sommes condamnés à nous entendre , à rechercher des consensus de plus grand commun accord (ou désaccord minimal ?) et à éviter tout raidissement sur des rapports de force numériques dont on a vu à quel point ils ne peuvent représenter notre mouvement .

Ensuite que cette méthode du consensus est déjà largement à l’œuvre là où les collectifs sont le plus ouverts au mouvement social ; pour accélérer cette évolution il serait intéressant d’initier partout un véritable travail de coordination des collectifs locaux à l’échelle des circonscriptions avec une obligation de représentation de notre diversité et l’organisation d’événements permettant de « brasser » tout cela !

Enfin que notre mouvement doit se doter de structures plus opérationnelles : dans l’immédiat les collectifs locaux doivent au minimum se doter de cartes d’adhérent, d’une charte de membre et d’un financement par des cotisations et des souscriptions ; à court terme on peut imaginer une coordination nationale des collectifs avec des critères de représentativité qui réfléchirait à la structuration future nécessaire du collectif national : coalition , front antilibéral, nouveau parti antilibéral … ?

Jcc militant ardèchois

Ex prof de math, fils d’instit, petit fils de mineur cévenol mort à la mine.

Messages

  • La fable n’est-elle pas, adieu veau, vache cochons ... Le pot au lait de Pierrette n’est-il pas cassé ?...
    L’analyse partielle est très intéressante. Merci.
    A. Kolontaï

    • Le problème est que les membres des collectifs sont aujourd’hui en train d’attendre, impuissants, la décision du PCF. On est en train de faire la démonstration que le PC décide seul.
      Les non-PCF ne peuvent que dire "ne faites pas cela où je me barre" et les PCF savent que de toutes façon, ils feront campagne, seule la forme changera.
      Difficile de se sentir sur piéd d’égalité dans ces conditions. - André

    • Bonjour,

      J’ai trouvé très instructive l’analyse de jcc. Elle montre qu’une solution consensuelle aurait pu être proposée aux collectifs. J’avais noté dès cet été que la candidature de José ne prenait pas l’ampleur attendue. Et si j’ai une préférence pour Clémentine, la candidature du sage Salesse serait aussi une bonne solution. L’idéal étant un "ticket" Autain-Salesse : la fougue de la jeunesse et la sagesse de l’expérience réunies.

      Ce que dit André est à la fois vrai et faux : vrai dans la mesure ou rien ne se fera sans le PCF et que ce dernier en abuse, faux dans la mesure où la dynamique - même interrompue si le PC le décide ce week-end - ne s’étiolera pas.

      Je suis membre du PCF ; j’ai acquis la conviction que le calcul de la direction de mon parti consiste à prendre le risque de l’isolement pour donner une leçon au mouvement social : aucun débouché politique n’est possible sans donner un rôle dominant (ou central ou hégémonique) au parti communiste. Une majorité de ces dirigeants font fausse route mais ce ne serait pas la première fois. Il est donc vrai que beaucoup se joue au sein du PCF. Je regrette que ce soit dans le parti tel qu’il est aujourd’hui mais j’observe l’évolution rapide de l’opinion de nombreux adhérents, militants, élus, qui - comme je l’ai fait moi-même il n’y a pas si longtemps - décident de ne plus suivre mais de penser par eux-mêmes.

      Dans le même temps, je ne partage pas l’idée que si le rassemblement anti-libéral échoue sur le choix d’un-e candidat-e unitaire à la présidentielle, alors tout est foutu. La déception sera grande, les libéraux de droite et de gauche reviendront à la charge sur ce qui a motivé notre bataille contre le TCE et notre victoire du 29 mai. Tout cela est vrai. Mais nos échanges dans le cadre des collectifs nous ont tous enrichi. Nous sommes des milliers à avoir changé dans cette mobilisation. Comme nous sommes des milliers et des milliers à participer à des luttes connues ou non. Et nous savons que nous pouvons nous retrouver. Nous avons su le faire CONTRE le TCE. Nous avons l’expérience de ce qui peut nous faire échouer dans la conquête du pouvoir.

      Quoiqu’il advienne, nous sommes plus aguerris.

      gib