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Dans 100 jours, le SMSI se tiendra à Genève

Publie le jeudi 4 septembre 2003 par Open-Publishing

Bonjour,

Aujourd’hui 1 septembre, nous entrons dans les 100
jours qui nous séparent du "Sommet Mondial de la
Société de l’Information" qui se tiendra à Genève en décembre,
sous l’égide de l’ONU.

Alors qu’elle a été bien silencieuse durant les deux ans
qui viennent de s’écouler, la presse et les faiseurs
d’opinion au service de l’industrie, vont maintenant se
réveiller pour clamer haut et fort les louanges du SMSI.

Pourtant, celles et ceux qui souhaitent voir émerger une
société qui utilise les tehcnologies de l’information pour
améliorer les relations humaines et promouvoir l’égalité,
la justice et les droits de l’Homme partout dans le monde
ont des soucis à se faire.

La nouvelle version de la "Déclaration" des Etats, qui a été
établie en juillet, est en réalité un brouet indigeste,
qui mélange allégrement des utopies "grand coeur et bon marché"
et l’imposition de règles strictes d’organisation d’un
commerce de l’information qui protège les intérêts des
transnationales du Nord.

Côté utopie, la mode se porte en e- : il suffit de placer
ce préfixe devant chaque activités pour la voir ressurgir
toute neuve, porteuse d’espoir et comble de l’ironie,
débarrassées des conflits, des manques de financements publics,
des processus d’exclusion qui sont pourtant la marque des
dernières décennies.

Avec l’e-éducation, plus de problèmes de scolarité, c’est
comme si les Plans d’Ajustement Structurel du FMI (qui ont
réduit les dépenses publiques pour l’école dans tous les pays
en voie de développement) n’avaient jamais existés ; chaque
élève pourra avoir accès à toute la connaissance du monde :
pourquoi payer les professeurs ?.

Avec l’e-commerce, c’est comme si chacun avait sa place, qu’on
recommençait la spirale de la saine émulation d’une concurrence
renouvelée ; comme si les monopoles, l’exploitation du Sud et la
gadgetisation de la planète n’avaient jamais existé.

Avec l’e-gouvernement, plus de poblèmes d’opposition, de
conflits, de visions différentes d’un monde à construire :
chacun s’exprime, et les dirigeants n’en font qu’à leur tête.
Tiens, un peu comme à l’image de ce SMSI lui-même.

Quant aux e-droits-del’Homme, c’est bien simple, c’est même pas
la peine d’en parler. On a ainsi vu les Etats-Unis combattre
toute mention renvoyant aux Pactes sur les droits éonomiques et
sociaux et sur les droits culturels. Il est clair qu’on ne
produira pas un texte international qui pourrait ouvrir de
nouvelles approches des Droits de l’Homme, intégrant les
opportunités techniques et limitant les dangers potentiels de
suivi et de traçage des individus et de contrôle de
l’information, qui résultent des "technologies de l’information
et de la communication". Le "droit de la communication" n’est
pas à l’ordre du jour : le seul droit de l’homme électronique,
c’est le marché, le marché, le marché.

Car côté organisation de la suprématie du marché, le document
des Nations-Unies va assez loin. Il renvoie sans cesse à l’OMC
pour tout ce qui pose problème ; il refuse de promouvoir les
"logiciels libres" sous la pression de la Chambre de Commerce
internationale ; il refuse de parler dans ce contexte de la
Propriété intellectuelle, qui sera débattue à l’OMPI (Office
Mondial de la Porpriété Intellectuelle). Bref une société de
l’information qui assume que les échanges d’informations sont
des contrats privés, qui relèvent d’instances dédiées au
commerce, et non d’une ré-organisation, de l’échelle locale à
l’échelle mondiale, des relations entre les citoyens du monde,
les Etats et les industries.

Mots ronflants, petite pensée : on a encore cent jours pour
subir les assauts de l’e-paradis auto-proclammé des vendeurs au
sourire ultra-brite... et donc cent jours pour organiser un
autre débat, d’autres propositions, d’autres projets pour que
les technologies de l’information s’intègrent dans le combat
millénaire pour refuser l’exploitation et l’oppression et
promouvoir une société où chaque homme, chaque femme et chaque
enfant puisse jouir de la Paix, d’un toit et de repas en
quantités suffisante, puisse bénéficier de l’éducation et de
l’accès aux ressources de connaissance du monde entier,
notamment dans le domaine de la santé.

La Paix, un terme qui est complètement absent de la déclaration
des Etats pour le SMSI. Faut dire qu’à l’heure de la crise de
l’ONU, c’est certainement pas un problème majeur du 21ème siècle
que les technologies de l’information pourraient aider à
résoudre.

Hervé Le Crosnier