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Des élections sans enjeux majeurs
Depuis deux mois les Comoriens vivent une effervescence électorale jugée cruciale pour la stabilité institutionnelle et nationale. Une première bataillée est livrée le 6 décembre sans réel vainqueur. Le risque d’une implosion sociopolitique court toujours, car la coutume empêche que les vaincus reconnaissent leur défaite. On se demande si ces élections ont-elles des véritable enjeux.
Cette problématique peut paraître aux yeux d’une large partie de l’opinion moins pertinente, car toute compétition porte sur des enjeux. Il revient alors de bien cerner les différentes offres, les argumentations véhiculées d’une part et d’autre dans ces élections afin de dégager les options possibles qui en découleront. L’opposition au pouvoir fédéral participant bon gré mal gré aux élections crie au « complot institutionnel » organisé par ce dernier pour se maintenir en prorogeant le mandat de l’actuel président au détriment de la présidence tournante, « gage de stabilité nationale » au grand dam des « Mohéliens ». Cette thèse n’est pas certes infondée, car il est prévu dans la nouvelle constitution que le congrès réuni arbitrera l’harmonisation des élections des exécutives, fédérale et insulaires. Nul doute qu’une victoire du pouvoir fédéral entrainera la prorogation du mandat de l’actuel président.
. L’opposition est tout à fait dans son droit de résister à la tentation du pouvoir fédéral. Sa participation aux élections est d’ailleurs avant tout un acte démocratique, quand bien même, ayant l’expérience des différents régimes successifs, elle reste dubitative sur la ténue des élections irréprochables. Elle a d’ailleurs dénoncé un premier tour gangrené de corruption en faveur du pouvoir fédéral qui semble mieux parti pour le second tour. Mais rien pas n’est pas encore joué. Tout reste ouvert, quand bien même il est de coutume qu’au second tour on pratique le clientélisme à fond la caisse, arroser les deniers récalcitrants.
Une victoire possible de l’opposition pourra certes gêner les ambitions du régime fédéral, mais n’exclura pas toute possible prolongation du mandat de l’actuel président. Elle empêchera toute prorogation du mandant de l’actuel président. Mais la réalité pourrait rattraper la politique et influencer les institutions. Celles-ci exigeraient le respect de l’échéance du mandat de l’actuel président, des élections devraient se tenir dans le délai approprié. Vu la situation économique du pays qui n’est pas en mesure d’organiser la moindre élection sans financement international, la souveraineté et la démocratie comorienne sont bancales. Il n’est pas certain que ceux qui ont financé ces élections seront disposés dans six mois à faire de même pour les présidentielles. Le problème de leur financement n’entraînerait pas une situation de fait accompli qui profiterait à l’actuel président ?
Des tensions politiques seront certainement vives, mais les politiciens comoriens vont devoir encore prendre leur mal en patience, car ils en sont comptables de cette situation indigne d’un État dit indépendant. Le pays risque d’en payer cher, car ses démons, l’insécurité et le séparatisme pourraient se réveiller. Pour épargner le pays de toute mésaventure, les politiciens devraient s’inspirer de la coutume, le consensus, qui mettrait en veilleuse les institutions. Un gouvernement transitoire d’union nationale à sa tête l’actuel président serait nécessaire. Il aurait comme mission de préparer les élections présidentielles à une date qui conviendrait tout le monde, les politiciens et les bailleurs de fonds. Le président Sambi tirerait alors son épingle du jeu, quand bien les siens seraient réduits.
En dépit des promesses de tous genres faites aux citoyens comoriens, ces élections n’auront pas une incidence dans leur vie quotidienne oh combien déplorable. Elles permettront simplement le pays d’avoir un Parlement dont les prérogatives sur l’amélioration des conditions socioéconomiques du pays sont limitées. Cela n’est cependant pas la faute de la représentation nationale, mais elle relève des institutions de la République qui est moins parlementaire, c’est-à-dire présidentielle. La seule élection qui vaut alors est les présidentielles. Mais faire des promesses lors des législatives est purement démagogique. Cependant l’actuelle constitution, avec la présidence tournante à laquelle une majorité de l’opinion politique s’accroche, limite la dynamique patriotique et démocratique. Elle aurait d’ailleurs entraîné une réorganisation de l’espace public avec la création des deux ou trois pôles qui permettraient moderniser le débat politique. Il n’y a pas actuellement de véritables clivages politiques, si bien qu’on se perd dans la terminologie employée.
Le peuple comorien n’attend donc rien de ces élections car leurs enjeux sont purement politiciens.
Djoumoi Ali Madi