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Feedback sur DSK et la justice

Publie le lundi 15 décembre 2008 par Open-Publishing

de Chien Guevara

Le 15 janvier 2003, Alain Belot, à qui on reprochait d’avoir transmis en 1999 à Dominique Strauss-Kahn, alors ministre de l’Economie, la vidéo de Jean-Claude Méry, l’ancien trésorier occulte du RPR, est condamné à quatre mois de prison avec sursis et 7.500 euros d’amende pour violation du secret professionnel.

Retour sur l’affaire ...

Dominique Strauss-Kahn détenait l’original de la vidéo

de Jérôme Dupuis et Jean-Marie Pontaut

Dominique Strauss-Kahn a détenu l’original de la fameuse cassette-testament de l’homme d’affaires proche du RPR, Jean-Claude Méry, longtemps avant qu’elle soit révélée par Le Monde. C’est la stupéfiante déclaration faite à la police judiciaire et aux juges Riberolles et Brisset-Foucault par Me Alain Belot, placé en garde à vue vendredi 22 septembre au soir.

C’est cet avocat fiscaliste qui avait mis en relation Jean-Claude Méry et le producteur Arnaud Hamelin, en 1996, pour enregistrer la confession du financier qui a mis en cause Jacques Chirac. Me Belot avait d’ailleurs assisté à l’enregistrement et récupéré l’original ainsi que des copies de la cassette. Après avoir tout d’abord affirmé qu’il avait détruit l’original, pressé par les policiers et les magistrats et craignant d’être incarcéré, l’avocat a fini par révéler le destin de cette cassette. Une terrible bombe politique.

Me Belot, proche depuis plusieurs années de Dominique Strauss-Kahn, a, dans un premier temps, remis un des doubles de la cassette au ministre des Finances, à l’été 1998. Puis, il aurait confié l’original à DSK, en avril 1999. En échange, l’avocat aurait réclamé un arrangement fiscal pour l’un de ses célèbres clients, Karl Lagerfeld. Le créateur de mode était en effet sous le coup d’un faramineux redressement fiscal estimé à 300 millions de francs. L’administration fiscale aurait finalement transigé à 50 millions. Me Belot, au passage, aurait perçu trois millions de francs d’honoraires.

Mais l’hallucinant récit de l’avocat ne s’arrête pas là. Au moment de la sortie, jeudi 21 septembre, de la confession de Jean-Claude Méry dans Le Monde, DSK reprend contact avec Alain Belot. Il lui demande de passer en urgence à son bureau de conseiller régional d’Ile-de-France. Là, l’ancien ministre des Finances prie instamment l’avocat de ne jamais révéler qu’il a détenu l’original de cette encombrante cassette.

Poursuivant ses confidences aux policiers, Alain Belot explique qu’il avait évoqué cette affaire avec plusieurs personnes de son entourage. Interrogée aussitôt par les enquêteurs, une proche de l’avocat a confirmé le récit de Me Belot.

Ces révélations, si elles sont confirmées, soulèvent pour le moins un certain nombre de questions. Pourquoi DSK a-t-il accepté une copie puis l’original de cette cassette ? Que comptait-il en faire ? Pourquoi ne l’a-t-il pas transmis au procureur de la République ? En effet, l’article 40 du code pénal oblige tout haut fonctionnaire à dénoncer des faits délictueux dont il a connaissance. D’autant qu’à l’époque, Jean-Claude Méry, décédé en juin 1999, était toujours vivant. Les juges et notamment Eric Halphen, chargé du dossier de l’Office HLM, auraient pu l’entendre sur ses révélations. Enfin, les récentes consignes de silence de DSK à Alain Belot mettent l’ancien ministre dans une situation délicate.

Bien évidemment, ces révélations de Me Belot ne remettent pas en cause le contenu du témoignage vidéo de Jean-Claude Méry. Peut-être le producteur Arnaud Hamelin n’a-t-il d’ailleurs jamais su quelle utilisation avait été faite de la cassette qu’il a tournée. Reste évidemment en suspens la question de la manipulation politique.

(lexpress.fr)

Le testament de Jean-Claude Méry, financier occulte du RPR

Des sanctions judiciaires contre notre grand patron du FMI ???

Ce document est exceptionnel. Un homme parle, longuement. Jean-Claude Méry fut lun des financiers occultes du RPR, collectant largent versé par les entreprises. Mis en examen en 1994, il est mort en 1999 sans avoir parlé. Mais trois ans avant, il avait enregistré une confession sur une bande vidéo " pour le cas où il [lui] arriverait quelque chose ". Cest le contenu de cette bande que nous publions, avec les réactions des principaux mis en cause L ES images semblent sortir d’un de ces thrillers politiques dont raffolent les Américains. Face à une caméra fixe, un homme raconte son histoire, livre ses secrets. Il est assis dans un canapé, porte une chemise blanche, des bretelles, une cravate rouge. Il tient dans ses mains une liasse de feuilles qu’il ne regarde presque jamais. Il parle longuement, nettement. Ses hésitations sont rares. Il arbore un indéfinissable sourire et brandit, parfois, la menace : " Pour ceux qui, un jour, si malheur est, doivent lire cette bande... " Jean-Claude Méry est mort au printemps 1999. Promoteur et homme d’affaires, ancien membre du comité central du RPR, il était alors mis en examen depuis près de cinq ans dans l’enquête du juge Eric Halphen sur les marchés publics des HLM de la Ville de Paris. Il avait passé cinq mois et dix jours en prison, sans cesser de contester avoir joué, pour le parti gaulliste, le rôle d’un collecteur de fonds occultes dans la capitale - ce rôle qui, en son temps, lui avait valu un surnom : " Méry de Paris ", des relations haut placées, puis, à partir du mois de septembre 1994, une cascade d’ennuis. Lorsque la nouvelle de son décès fut rendue publique, le 11 juin 1999, chacun considéra qu’il avait emporté avec lui ses secrets. C’était faux.

Le 24 mai 1996, soit trois ans avant sa mort, Jean-Claude Méry avait enregistré, sur bande vidéo, un long récit en forme de confession. " Pour le cas où il m’arriverait quelque chose ", avait-il dit au producteur de télévision Arnaud Hamelin. Contacté par un ami commun, ce dernier avait accepté, sans vraiment savoir de quoi il retournait, de filmer ce témoignage brûlant et d’en rester l’unique dépositaire. Avant de le quitter, Jean-Claude Méry lui avait donné ses " instructions " : mettre la bande en lieu sûr et attendre ( lire ci-contre l’entretien avec M. Hamelin). Il n’eut plus jamais de nouvelles de lui.

Dans les semaines qui suivirent cet enregistrement, l’ancien promoteur fit savoir à quelques-uns de ses interlocuteurs, dans le monde politique et ailleurs, qu’il avait " fait une bande ". C’était pour lui une sorte d’assurance, estime M. Hamelin, peut-être aussi une monnaie d’échange. On lui avait fait des " promesses ", avant et pendant son séjour en prison. Il voulait qu’elles soient tenues. Nul ne sait jusqu’où le message fut transmis. Hormis les deux hommes, nul ne savait, jusqu’à ce jour, ce que la cassette contenait : la description d’un système - celui du trucage des marchés publics parisiens - et le circuit de financement politique qu’il alimentait. Une organisation conçue et mise en place à l’époque où Jacques Chirac était maire de Paris. " C’est uniquement aux ordres de M. Chirac que nous travaillions ", affirme Jean-Claude Méry dans son témoignage. Mais sans volonté d’exclusive : à en croire le " collecteur " du RPR, d’autres partis politiques ont profité des " commissions " versées dans l’ombre des grands contrats : " Chaque fois qu’il y a à manger pour tout le monde, dit-il, on distribuera à tout le monde. " Ses révélations, toutefois, visent essentiellement le parti du chef de l’Etat. S’il se présente lui-même comme le maître d’oeuvre des attributions de marchés dans la capitale et du versement des commissions par les entreprises retenues, Jean-Claude Méry décrit l’ancien directeur du cabinet de M. Chirac à l’Hôtel de Ville, Michel Roussin, comme l’intendant de ce système. Celui-ci, assure-t-il, disposait à la fois de la haute main sur les recrutements d’amis politiques par des sociétés privées et sur les filières helvétiques par lesquelles transitaient les sommes collectées au profit du RPR. Le temps fort de ce témoignage inédit est une scène que l’ancien financier occulte situe sous la première cohabitation, dans le bureau de M. Roussin à l’hôtel Matignon, " le jour du décès du père de M. Georges Pérol [ancien directeur de l’office HLM de Paris] " - soit le 5 octobre 1986. Jean-Claude Méry raconte lui avoir remis " 5 millions de francs en argent liquide ", " en présence de Jacques Chirac ".

Document exceptionnel, la confession en images de Jean-Claude Méry l’est autant par son contenu que par sa nature. Dans cette longue déclaration (une heure d’enregistrement), l’ancien promoteur peut avoir mêlé le vrai au faux, le détail " arrangé " aux confidences authentiques. Anticipant cette réserve, il déclare lui-même, face à la caméra, n’avoir décidé de se faire enregistrer que pour " dire la vérité ". Mais il n’est plus là pour porter lui-même ses accusations, pour répondre à ceux qui le contrediraient - et sans doute ne manqueront-ils pas. Ceux-là objecteront que jamais, devant le juge Halphen, qui l’interrogea pourtant à de nombreuses reprises, il n’était allé aussi loin. A cette question-là aussi, il apporte par avance une réponse : " Une fois que j’aurai parlé au juge, je n’aurais plus d’arme ".

Dès les premières heures de l’enquête du juge Halphen, pourtant, à l’été 1994, le promoteur était présenté, dans Le Canard enchaîné, comme le " collecteur de fonds " du mouvement chiraquien, personnage influent à la Mairie de Paris, dissimulant à peine les fonctions qu’était censée masquer sa plaque de " consultant ". Partie d’une dénonciation fiscale contre un entrepreneur familier des cercles gaullistes, Francis Poullain, dans le contexte d’affrontement qui préludait à l’élection présidentielle de 1995, entre partisans de Jacques Chirac et d’Edouard Balladur, la procédure devait conduire rapidement à l’interpellation de Jean-Claude Méry. Elle devait ensuite entraîner la mise en examen de deux anciens ministres et barons chiraquiens, Robert Pandraud et Michel Roussin. Encore l’accusation contre le second ne tenait-elle alors que sur deux témoins et sur une inscription dans l’agenda de Jean-Claude Méry - " M. R., 260 000 " -, d’où le juge tirait une conviction : une somme d’argent liquide avait été remise au directeur du cabinet du maire. Un an plus tard, les deux témoignages ne tenaient plus, et le juge Halphen accordait un non-lieu à M. Roussin ( Le Monde daté 17-18 décembre 1995).

L’enquête entrait alors dans une longue période d’incertitudes dont elle n’est jamais véritablement sortie, parasitée par les conséquences de l’affaire Schuller-Maréchal, à la fin de 1994, puis par les fausses pistes distillées par un ou plusieurs " corbeaux ". Certes, une cinquantaine de chefs d’entreprise ont été mis en examen, ainsi que les principaux dirigeants de l’office HLM de la capitale au début des années 90, et jusqu’à l’actuel maire (RPR) de Paris, Jean Tiberi, le 28 juin 1999. Mais le juge Halphen, au terme d’une instruction officiellement clôturée le 28 octobre 1999, n’est pas parvenu à démontrer formellement l’existence d’un système de financement parallèle du RPR ( Le Monde du 30 octobre 1999).

Même la découverte, en Suisse, dès 1995, d’une société-écran panaméenne (Farco Enterprise) dont l’ayant-droit était Jean-Claude Méry, et qui disposait d’un compte dans une banque de Genève ne s’est pas avérée suffisante. Les enquêteurs y ont retrouvé la trace de virements effectués par la Lyonnaise des eaux, en 1992, à l’époque où l’une de ses filiales obtenait une part du fructueux marché des ascenseurs de l’office HLM de Paris. " Je n’ai jamais récolté directement de l’argent pour le RPR ; comme je l’ai toujours dit, j’incitais les entreprises à financer le RPR, ce n’est pas la même chose ", déclarait Jean-Claude Méry sur procès-verbal, le 23 octobre 1995. A Genève, le gestionnaire du compte Farco avait, pour sa part, indiqué : " La société Farco a été créée à la fin de 1990 pour les besoins de M. Méry. Nous savions qu’il était membre de l’appareil du RPR. Il avait probablement besoin de cette société pour faire du financement politique. " Ces propos, recueillis à la faveur d’une commission rogatoire en Suisse, avaient été reproduits dans Le Monde du 14 mai 1996. Dix jours plus tard, l’ancien homme-clé des finances secrètes du RPR s’installait face à la caméra d’Arnaud Hamelin et racontait son histoire...