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Ils rigolent de mon gilet / C’est l’heure de l’mettre
par Hdm
Publie le vendredi 23 novembre 2018 par Hdm - Open-Publishing« Teu rigoles de min gilet ? »
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C’est de cette façon que l’homme moqué, de par chez nous (classe ouvrière, France septentrionale, au fond du couloir), interpelle son moqueur. Et l’expression elle-même (« Tu rigoles de mon gilet ? »), par le mystère de son origine sans doute pittoresque, entraîne le sourire chez les deux interlocuteurs.
C’est que par chez nous, la moquerie est une seconde nature, et l’autodérision une pratique à maîtriser pour vivre en société. C’est une façon de s’aimer, avec la pudeur de l’humour.
C’est une façon aussi de remettre à leur place ceux qui voudraient sortir du rang. Rien n’est plus moqué que celui qui fait des mnoules (des manières). Celui qui veut ressembler à ceux d’en haut…
Ceux d’en haut ne rient pas, ils ricanent. Quand ils moquent, c’est la masse qu’ils visent, le tout-venant, et pourquoi pas - mais avec mépris. Un mépris de classe. Plus que tout, au-delà du comique : ils se prennent au sérieux.
Ce même air sérieux qui nous dit que nous coûtons trop cher, que nous ne sommes rien, qu’il suffit de traverser la rue, d’avoir une Rolex et un beau costume, cette arrogance que les braves gens d’en bas ne peuvent pas comprendre tant elle est étrangère à leurs mœurs, ce cynisme qui est l’habit obligé du profit, voilà ce qui, au-delà de toutes nos contradictions, nous fait nous lever.
Il s’agit là d’une expression profonde de la lutte de classe. En rire avec le mépris du bourgeois serait particulièrement suspect à nos yeux. Pour le reste, on s’occupera des erreurs des nôtres et de leurs fautes, mais pas avec les armes de l’ennemi, qui ne sont tournées que contre nous.
Même si c’est pas à ton goût, c’est nos gilets et c’est l’heure de l’mettre !