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Intermittents : les promesses lancées par le ministre de la Culture à Cannes seront difficiles àtenir

Publie le jeudi 20 mai 2004 par Open-Publishing

Intermittents : RDV sur la corde raide

Par Bruno MASI

Après les heurts entre la police et des intermittents au cinéma Le Star à
Cannes samedi, le ministre de la Culture, Renaud Donnedieu de Vabres, s’est invité
dimanche à la conférence de presse du Comité de suivi de la réforme de
l’assurance chômage. Une salve de questions des syndicalistes et représentants de la
coordination a eu raison de sa volonté de laisser planer le doute. Le
ministre a lâché ce que lui-même et son prédécesseur, Jean-Jacques Aillagon,
s’étaient refusés à exprimer : le retour aux dispositions antérieures pour l’ouverture
des droits au chômage des intermittents, soit 507 heures sur douze mois
(contre onze selon la nouvelle convention entrée en vigueur le 1er janvier) et la
mise en place d’un calendrier de « discussions » entre les partenaires sociaux,
l’Etat et l’Unedic. Renaud Donnedieu de Vabres s’est par ailleurs dit soutenu
par Jean-Pierre Raffarin. Pourtant, aucune des mesures qu’il a annoncées ne
semble avoir réellement reçu l’aval de Matignon.

Silence. La CGT et l’ensemble des professionnels et élus qui réclamaient la
suspension de la convention signée le 27 juin 2003 ont salué, unanimes, ce pas
vers « une sortie de crise ». En revanche, silence du côté du Medef et de la
CFDT. Sans doute briefés par le gouvernement, les deux principaux gestionnaires
de l’Unedic n’ont pas jugé bon de jeter de l’huile sur le feu avant la fin du
festival cannois. Il n’y a eu que la CFE-CGC (également signataire du
protocole) pour donner le ton, dès lundi, dans un communiqué cinglant : « Il
n’appartient pas à l’Etat d’imposer quelque obligation que ce soit aux partenaires
sociaux. Monsieur Donnedieu de Vabres assumera seul les conséquences de ses
décisions sur le budget de son ministère. Quant au fait de nous imposer dans les dix
jours de renégocier une convention conçue pour durer jusqu’à fin 2005, il sort
de son rôle et de ses attributions. Nous ne sommes pas à ses ordres. » En fait,
tant que ce retour aux dispositions antérieures est pris en charge par le
fonds spécifique et provisoire dont le ministre a annoncé la création le 5 mai,
les partenaires sociaux ont de bonnes raisons de rester discrets. En revanche,
ils devraient s’exprimer la semaine prochaine sur les contours de ces
« discussions » que le ministre verrait bien programmées avant l’été.

« Recalés ». C’est désormais sur le montant de l’indemnisation des « recalés »
(sortis du système depuis le début de l’année) que portent les principales
interrogations. Impossible aujourd’hui d’en connaître l’ampleur : le nouveau
système est dans une phase transitoire, et tous les allocataires ne sont pas logés à
la même enseigne. L’Unedic aurait évalué à 20 millions d’euros les économies
générées cette année par le nouveau protocole d’assurance chômage. Cette somme
a servi de repère à Renaud Donnedieu de Vabres pour abonder une première fois
le fonds spécifique. Au ministère, on pense que l’addition définitive ne
dépassera pas cette estimation. Ou plutôt on prie pour que cela ne soit pas le cas
 : si la somme à débourser s’avérait plus importante (on parlerait de 250
millions d’euros au ministère de la Cohésion sociale de Jean-Louis Borloo), Renaud
Donnedieu de Vabres serait contraint à un bel exercice de gymnastique
politique.

Contenir la pression des intermittents décidés à le prendre au mot, contrer
les partenaires sociaux qui ne bougeront pas d’un pouce, et obtenir des crédits
supplémentaires de Bercy, sans pouvoir compter sur Matignon : il n’est pas
sûr que le ministre de la Culture ait tiré la bonne carte.

http://www.liberation.fr/page.php?Article=207066&AG