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LIBYE Contre l’engrenage militaire Urgence d’une solution politique !

par Le MRAP

Publie le vendredi 1er juillet 2011 par Le MRAP - Open-Publishing

Le MRAP a, depuis le premier instant, manifesté sa pleine solidarité aux
mouvements populaires pour la démocratie, l’égalité et la justice
sociale en Libye, comme avant en Tunisie, en Égypte, ainsi que dans
l’ensemble de la région arabe.

Il a aussi condamné la dérive meurtrière du dictateur de la Jamahiriya
libyenne – prêt à tout pour se maintenir au pouvoir – et qui devra
répondre devant la Cour Pénale Internationale des crimes de guerre qu’il
aura commis.

Pour autant, le MRAP se doit de mettre en garde contre la grave et
dangereuse aventure guerrière menée aujourd’hui par les forces de
l’OTAN, tout particulièrement sous l’impulsion des gouvernements
français et britanniques, au nom de « la protection des populations
civiles libyennes » alors que l’alliance atlantique prépare actuellement
l’opinion publique à ce que les bombardements se poursuivent jusqu’en
septembre.

Il est clair que l’intervention militaire ne s’est pas limitée à la
stricte application de la résolution 1973 du Conseil de Sécurité des
Nations Unies visant à « la protection des populations et zones civiles,
et à assurer l’acheminement sans obstacle ni contretemps de l’aide
humanitaire et la sécurité du personnel humanitaire ». L’intervention
aérienne a causé de nouvelles victimes civiles. En Libye, comme
précédemment en Irak et en Afghanistan – malgré des contextes différents
 la mémoire nous impose de garder présentes à l’esprit les violations
graves des droits humains et, plus généralement des normes du droit
international : crimes de guerre ou crimes contre l’humanité.

Le silence complice de l’ensemble de la communauté internationale
concernant les massacres en Syrie – dont la situation géostratégique
particulière ne peut être confondue avec celle de la Libye – renvoie
directement à la vérité de l’intervention de l’OTAN en Libye où
l’escalade militaire a prouvé que la véritable préoccupation n’était pas
la « protection des civils » mais bien la défense d’ intérêts complexes
et multiples de la part de la coalition : contrôle des richesses
énergétiques de la Libye, intérêts géostratégiques au Moyen Orient en en
Afrique, crainte des conséquences du vent de liberté soufflant sur le
monde arabe....

Trois mois de bombardements intensifs, appuyés par des « conseillers »
au sol (non prévus dans la résolution onusienne), n’ont pas permis de
conférer une légitimité reconnue au Conseil National de Transition (CNT)
 , coalition d’éléments disparates aux intérêts divergents dont le point
commun est leur opposition déterminée au régime du « Guide » - mais où
les véritables démocrates ne sont qu’une minorité.

De hauts responsables militaires doutent d’une victoire des insurgés. La
mission d’experts, organisée à l’initiative du « Centre international de
recherche et d’études sur le terrorisme et d’aide aux victimes du
terrorisme » (CIRET-AVT) et du « Centre français de recherche sur le
renseignement » (CF2R) a rendu son rapport le 30 mai 2011. Cette mission
conclut : « Les puissances occidentales ont fait preuve d’un
aventurisme coupable en s’engageant dans cette crise, à moins qu’il ne
s’agisse d’un machiavélisme parfaitement cynique..L’intervention
occidentale est en train de créer plus de problèmes qu’elle n’en
résout. » Cette intervention a notamment voué à l’échec les démarches de
l’Union Africaine - il est vrai bien peu « démocratique » dans son
ensemble et manquant, de ce fait, de la crédibilité nécessaire pour
peser sur le processus - qui tentait, dans un premier temps, de trouver
une solution politique au conflit armé en Libye.

Le MRAP réitère avec force son appel à une solution politique négociée
sous les auspices des Nations-Unies et de la communauté internationale.
Une telle solution exige d’urgence, pour la sauvegarde du peuple libyen :
 l’arrêt des bombardements et des interventions de l’OTAN,
 l’engagement d’initiatives politiques pour l’établissement d’un
cessez-le-feu multilatéral, ouvrant la voix à une solution politique.

En attendant, la France se doit d’accueillir immédiatement les réfugiés
de Libye qui chercheraient refuge sur son territoire.

Plus généralement, le MRAP rappelle son choix fondamental du « devoir de
protection » contre le « droit d’ingérence ». Protéger ne peut être
bombarder, ce qui conduit irrémédiablement à provoquer d’autres victimes
civiles. Protéger impose de faire des droits humains fondamentaux –
qu’ils soit civils, politiques, économiques, sociaux ou culturels - une
priorité absolue et universelle, face aux intérêts des États.

Un tel choix impose en priorité de cesser toute vente d’armes à des
dictateurs et toute complaisance à leur égard, sans attendre que la
révolte des peuples ait rappelé haut et fort qu’il s’agissait bien là de
dictatures.

Paris, le 30 juin 2011