Accueil > La Corée du nord défie le monde : test nucléaire ou bluff politique ?

La Corée du nord défie le monde : test nucléaire ou bluff politique ?

Publie le mercredi 11 octobre 2006 par Open-Publishing

de Anubi D’Avossa Lussurgiu traduit de l’italien par karl&rosa

Le monde s’est réveillé hier avec un plongeon soudain dans le passé : la Corée du nord a effectué à 3h36du matin, heure italienne, le test nucléaire annoncé ces derniers jours. Le test de puissance a été souterrain, des radiations en surface n’auraient pas été libérées. Le conditionnel est obligé, en effet les sources sont les sources officielles de Pyongyang.

Mais une confirmation internationale est venue des militaires russes, qui ont évalué l’engin qu’on a fait exploser entre 5 et 15 kilos tons, donc au maximum la moitié de la vieille bombe Usa larguée sur Nagasaki en 1945. Et différents sismomètres ont enregistré une secousse supérieure à 3 degrés Richter, dont l’épicentre est en territoire nord-coréen. Le soir, au contraire, tandis que le président George W.

Bush avait déjà invectivé contre le régime du "cher leader" Kim Jong Il, le fils de Kim Il Sung, les services d’intelligence états-uniens continuaient à mettre en doute le test en parlant d’une explosion "forte" mais d’une nature n’étant encore "pas claire". Et même les sismologues utilisent des formules prudentes qui diffèrent l’évaluation des causes réelles du phénomène enregistré.

En tout cas, le gouvernement de Pyongyang est arrivé à remettre au centre de l’attention la « question nord-coréenne ». De la façon apparemment la plus dramatique, c’est-à-dire en rendant à nouveau incandescent ce Trente-huitième Parallèle partageant les deux Corées depuis le conflit qui marqua le sommet de la « Guerre Froide » entre les vieux blocs dirigés par les Usa et l’Urss.

Et les paroles, les tons, les messages qui ont rebondi hier entre une chancellerie et l’autre dans la communauté internationale sont de guerre froide. Le moment choisi par la Corée du nord, si on y regarde bien, ne semble pas du tout fortuit : hier le Conseil de Sécurité de l’ONU se réunissait pour formaliser (comme il l’a fait ensuite par acclamation) la candidature à la charge de nouveau secrétaire général du sud-coréen Ban Ki Moon, actuellement ministre des Affaires étrangères de Séoul qui, à partir du 1er janvier 2007, à moins d’un exceptionnel rejet par l’Assemblée générale, va succéder à Kofi Annan.

Et toujours hier soir était prévue, précisément à Séoul, la visite d’Etat du nouveau premier ministre du Japon, Shinzo Abe, de retour du voyage à Pékin pendant lequel, même s’il avait été précédé par sa renommée méritée d’ultraconservateur nationaliste, il avait déjà essayé la voie de la détente en reconnaissant la « douleur infligée » par Tokyo aux « peuples asiatiques » dans la Deuxième Guerre Mondiale, une aulique périphrase pour nommer les crimes de guerre.

En somme, la Corée du nord a joué la nouvelle du test nucléaire sur un échiquier évidemment politique.

On explique ainsi la valeur relative des opinions sur la véracité du test même qui, bien que cela soit paradoxal, en effet saute aux yeux dans la rafale de réactions diplomatiques immédiates. A commencer par celle des Usa, même si elle est marquée par le déplacement des institutions toutes occupées à nourrir le bras de fer avec l’Iran sur son programme nucléaire. Une rafale qui de toute façon est suivie par les bordées escomptées de Séoul et de Tokyo, mais qui est précédée, aussi, par celle de la Chine même, préventive, dimanche.

Ce n’est pas un hasard si l’admonestation du Conseil de Sécurité tout entier, hier, a été immédiate : dans l’attente d’évaluer la proposition de résolution avancée par Washington, basée sur l’article 7 de la Charte des Nations Unies prévoyant, en cas extrême, l’usage de la force, discutée au Palais de Verre tard dans la nuit selon l’heure italienne.

Le président actuel du Conseil de Sécurité est l’ambassadeur nippon auprès de l’ONU, Kenzo Oshima : c’est lui qui a communiqué la « forte condamnation » de l’organisme et qui a invité péremptoirement Pyongyang à revenir à la table formelle de négociation sur le désarmement dans la péninsule de l’Extrême Orient. Pékin a réclamé à son tour, un cas sans précédents, « une action immédiate » du Conseil. Qui devient « décisive » dans la note nippone états-unienne née du coup de téléphone entre Bush et Abe. D’ailleurs la Russie, sous les projecteurs du meurtre Politkovskaya, a formulé la même « condamnation » mais en invoquant, à la différence des autres puissances, de la « retenue » de « tous les côtés ».

La réaction la plus intéressante et la plus éclairante, toutefois, semble celle de la Chine. On ne peut plus irritée, dès la veille du test et au lendemain de son annonce. D’autant plus qu’elle s’est exposée en première ligne, plus, presque seule jusqu’aujourd’hui, dans ce qui intéresse le plus Pyongyang, la collaboration économique. Et voila justement la question : depuis des années le régime de la Corée du nord joue la partie du « stop and go » dans les négociations du désarmement bilatéral coréen, jamais mis en route, pour arracher des contreparties avantageuses pour faire face à la tragique réalité interne. Il en va aussi de même pour la question nucléaire.

Il y a un an, précisément Pékin semblait courir débloquer la situation : en arrêtant des différends vieux de quelques décennies, Pékin avait conclu avec Pyongyang l’accord, qui vaut 3 milliards de dollars, pour la ligne transfrontalière de chemin de fer. Ensuite, des compagnies chinoises avaient signé des ententes pour des concessions minéralières et portuaires. Outre les aides directes, alimentaires. Augmentées à côté de celles en provenance même de la Corée du sud.

Mais ce sont les aides états-uniennes qui ont baissé verticalement,au fil des ans. Tandis qu’il n’y a eu aucune réponse aux revendications de Kim qui, justement à l’occasion de l’expulsion des organismes onusiens d’assistance du pays (après 10 ans de présence du Programme mondial de l’alimentation, un milliard et demi a été engagé), avait demandé le remplacement des aides « humanitaires » par des soutiens au développement. Une condition pour écarter les tares structurelles de l’économie industrielle et agricole, peut-être, mais certainement pour gérer l’état de besoin avec une plus grande marge d’autonomie politique. Aussi et surtout de la Chine elle-même.

Mais avec le coup d’hier la partie s’élargit et devient à risque : le risque de se superposer, surtout, à d’autres « dossiers » atomiques. Comme celui de l’Iran, d’un intérêt primaire pour l’Administration de guerre de Bush, en crise vers le « mid term ».

(mardi’ 10 octobre)

http://www.liberazione.it/notizia.asp?id=4020