Accueil > La construction de l’Unité Africaine vue par les communistes sud-africains

La construction de l’Unité Africaine vue par les communistes sud-africains

Publie le mercredi 3 février 2010 par Open-Publishing

La construction de l’Unité Africaine vue par les communistes Sud-Africains

Pour les 50 ans de la revue théorique du Parti Communiste Sud-Africain, the African Communist, un numéro spécial a réuni une série d’articles historiques rappelant la contribution du journal, et plus largement des communistes sud-africains aux luttes de libération nationale, anti-coloniales et anti-impérialistes, en Afrique du Sud et sur l’ensemble du continent.

Nous publions ici un des articles : The African Communist, l’Unité Africaine et l’Union Soviétique, que nous avons divisé en deux parties. Voici la première partie traitant de la manière dont les communistes sud-africains ont impulsé, encouragé mais aussi critiqué de manière constructive le processus d’unité africaine.

AC

Traduction et introduction AC pour http://solidarite-internationale-pc...

Essop Pahad rappelle ici le soutien constant apporté par African Communist à l’unification du continent et son engagement indéfectible aux côtés de l’Union Soviétique. Tout en se penchant sur les numéros de the African Communist en exil, l’auteur va se concentrer sur deux aspects d’une tradition riche, fière, inflexible ; pleine d’analyses finement écrites et sans compromissions, et de soutien sans faille au Marxisme-Léninisme, au Mouvement Communiste Mondial, aux mouvements de libération nationale, à la paix, à la démocratie et au progrès social. Ces deux aspects sont l’Unité Africaine, et l’Union Soviétique ainsi que les autres pays socialistes.

Depuis sa création, the African Communist a informé les révolutionnaires Africains des événements – commentés et analysés par ses soins – qui se déroulaient en Afrique du Sud, dans le continent et dans le monde. La couverture des tout derniers développements de la situation en Afrique était vaste, incisive et guidée par un soutien inconditionnel aux mouvements de libération nationale anti-coloniaux et anti-impérialistes, aux forces progressistes, en particulier celles guidées par la science du Marxisme-Léninisme, et par une critique tranchante de l’impérialisme et de sa tentative de déstabilisation du continent Africain. L’auteur citera de manière extensive des pages de the African Communist (AC) afin que les militants de notre mouvement puissent ressentir la structure, la saveur et le langage ainsi que la passion avec laquelle le SACP et l’AC ont dépeint la quête constante d’unité Africaine ainsi que les événements en Union Soviétique, dans les autres pays socialistes, et dans l’ensemble du mouvement communiste mondial.

Addis Adeba 1963 : la naissance de l’Organisation des Etats Africains

En dépit des vicissitudes et des tribulations, des divisions hargneuses, des conflits et des machinations impérialistes, l’Organisation de l’Unité Africaine (OUA) est restée le point de ralliement pour l’unité et la cohésion continentale. Dans ses pages, the African Communist est resté ferme et cohérent dans son soutien à l’Unité Africaine et a apporté sa contribution théorique et idéologique à la cause révolutionnaire en Afrique. Avec le temps, le langage a changé, la profondeur des analyses aussi, la couverture des expériences concrètes n’a pas toujours été constante, mais l’approche stratégique est restée d’une grande cohérence.

Dans un de ses premiers numéros (No.4, 1963), l’éditeur analysait le premier sommet historique des Etats Africains, qui s’est tenu à Addis Adeba en Mai 1963. C’est la conférence où Ben Bella, le leader Algérien, a électrifié la salle et a battu en brèche la complaisance et les petits compromis de certains leaders quand il a déclaré qu’il était plus important de « instaurer une banque du sang pour les combattants de la liberté que de mettre en place une Banque Pan-Africaine pour le développement »

Dans son dernier paragraphe, l’éditeur faisait remarquer : « 1963 et Addis Adeba, ont donc marqué une étape importante et historique sur la voie de l’unité Africaine. Mais elle a aussi montré que nous avions un long et difficile bout de chemin à parcourir avant d’atteindre notre but – et qu’il devrait passer par Salisbury, le Cap, Lourenco Marques et Luanda pour que nous en voyions la fin. »

Les trois phases dans la libération du continent Africain : anti-colonialisme, révolution sociale nationale puis socialisme continental

Dans son éditorial Turbulente Afrique (no 16, 1964), sont dégagées trois phases dans la libération de l’Afrique. La première phase est le moment anti-colonialiste, la seconde la révolution sociale et la troisième l’Unité Africaine et le Socialisme. A première vue, cette approche méthodologique semble trop schématique et méthodique. Mais, dans le même article, l’éditeur se révèle plus perspicace, non sans souffrir de quelque excès d’optimisme, quand il affirme : « Le cours de notre torrentielle rivière Liberté n’est pas calme, et ne peut pas l’être, et il ne peut pas non plus se conformer exactement au trajet que nous avions prévu pour elle à l’avance ; la réalité de la vie est toujours plus complexe, diversifiée et riche que ce que peut englober la vision de l’Homme d’Etat le plus clairvoyant. Les ’trois phases’ esquissées ci-dessus sont valides et correctes dans le cadre d’un plan d’action général ; elles ont révélé leur justesse dans tout le continent Africain, dans le cours des événements qui se déroulent sous nos yeux, dans l’histoire présente. Mais nos phases interagissent et fusionnent les unes avec les autres ; il n’existe pas de frontière étanche entre elles. Et le tempo des événements, l’ardeur de l’esprit révolutionnaire dans les masses, si longtemps réprimé, rend vite tout ’calendrier’ d’action pré-établi dépassé » (p 9)

10 ème anniversaire de l’OUA : lutter contre les tendances à la formation d’une bourgeoisie compradore

A l’occasion du 10ème Anniversaire de l’OUA, le journal a publié un article approfondi, perspicace et provoquant de Molefe Mini. L’auteur propose une analyse d’un certain nombre de pays qui ont essuyé de sérieux revers dans leur processus révolutionnaire. Pertinente peut-être pour les débats dans notre pays, sur le rapport entre personnalités du monde des affaires et hommes politiques, tout comme sur la corruption, est cette citation du grand révolutionnaire Égyptien et Africain Abdul Gamal Nasser. Dans le discours du 1er mai de 1966, Nasser a posé la question : « L’homme qui possède un million de livre, deux, trois, dix ou vingt millions, comment a-t-il obtenu tout cet argent ? » La réponse est : « Soit par le vol soit par l’exploitation. Par vol, j’entends commission. Il construit un immeuble et reçoit une commission ; il réalise une transaction et prend une commission... »

« Dans le second cas, c’est en s’appropriant ce qui a été produit par la sueur du peuple, des travailleurs. Il paie un quart de livre un travail qui mériterait une livre, se mettant ainsi les trois-quarts de livre dans la poche. C’est ce que nous entendons quand nous parlons d’exploitation du travailleur. Ainsi, ce processus implique à la fois le vol et l’exploitation. Nous avons vu cela dans notre société quand elle était une société féodale et capitaliste. Aujourd’hui, nous assistons à une transformation socialiste dans notre société, où tous les moyens de production sont entre les mains des travailleurs. »

La raison d’être des partis communistes : lutter pour défendre et approfondir les acquis de la révolution nationale-démocratique

Molefi place la classe ouvrière, même dans son état de confusion, avec les paysans, au centre même de la révolution national-démocratique. Il en appelle à la constitution d’une alliance stratégique ouvrière-paysanne.

Etant donné la croissance et l’influence des partis démocratiques-révolutionnaires dans un certain nombre de pays, une question se pose. Un Parti Marxiste-Léniniste est-il encore nécessaire ? Et s’il l’est encore, quelle devrait être son attitude et ses relations avec ces forces démocratiques et révolutionnaires qui ont conquis le pouvoir étatique ?

L’auteur est clair sur la necessité de « l’existence indépendante d’un parti prolétarien d’avant-garde. » En développant ce point il affirme : « Les Marxistes-Léninistes Africains sont confrontés à une tâche essentielle, celle d’aider à la formation et au renforcement des forces véritablement progressistes à travers le continent. La diffusion des idées communistes, pas seulement auprès de nos propres travailleurs mais aussi auprès de tous les travailleurs Africains, reste une tâche importante. Ce journal, désormais à sa quinzième année de publication ininterrompue, est devenu une arme dans la lutte Africaine pour le progrès et une véritable libération du continent. »

« L’Afrique entre dans une période d’intensification des conflits internes, de lutte pour la défense et la consolidation des acquis révolutionnaires dans ces pays qui ont choisi la voie du progrès et pour le succès de cette voie dans ces pays qui sont toujours sous le joug de la domination impérialiste. » (p 49-50)

20 ème anniversaire : le constat de la coexistence de tendances progressiste et réactionnaires au sein de l’OUA

Pour le 20ème anniversaire de l’OUA, A.Ngungunyane insiste sur le fait qu’il existe, au sein de l’OAU, deux tendances historiques contradictoires, une progressiste et une autre réactionnaire (No 94). C’est cette division qui a mené au sommet avorté de 1982. L’année suivante, les deux tendances se sont affrontés au 19ème sommet de l’OUA. A ce sommet où le Nigéria a joué un rôle majeur, le MPLA a été reconnu comme le gouvernement légitime de l’Angola. Cette décision a eu un impact profond et décisif sur la lutte en Namibie et dans notre pays.

Cet article contient une critique brève mais tranchante des régimes conservateurs réactionnaires Zaïrois, Égyptiens, Ivoiriens, Gabonais, Kenyans, Marocains et Soudanais. Ngungunyane conclut l’article ainsi : « La lutte suppose un effort pour maintenir l’OUA comme une alliance de forces pour la décolonisation du continent, pour l’approfondissement et l’extension du processus de transformation sociale en faveur des masses populaires, et pour l’alignement de l’Afrique du côté du mouvement mondial qui lutte pour mettre un terme à l’hégémonie impérialiste, pour la véritable indépendance des peuples, et pour la paix mondiale. L’unité des forces qui luttent pour ces objectifs reste un défi essentiel pour notre continent. »

« Le temps nous dira si, dans sa forme actuelle, l’Organisation de l’Unité Africaine est le vecteur organisationnel approprié pour la réalisation d’une unité anti-impérialiste pan-africaine. »

Du 25ème anniversaire à aujourd’hui : la contribution que pourrait apporter une Afrique du Sud socialiste à la libération et l’unité du continent

Le même message appelant à une OUA anti-impérialiste, progressiste, unie et solidaire, se retrouve dans un article de Jabulani Mkhatswa, à l’occasion du 25ème anniversaire de l’OUA (No 115). Faisant écho à l’éditorial de 1963, Jabulani écrit : « En réalité, toutes les énergies Africaines pourront être mieux concentrées si et quand le problème Namibien et Sud-Africain aura été résolu. Avec leurs richesses naturelles, une Namibie et une Afrique du Sud libres apporteront une formidable contribution au développement économique de l’Afrique dans son ensemble » (p.84)

L’Afrique du Sud et la Namibie sont désormais fières, libres et indépendantes. Comme cela était nécessaire, l’Union Africaine (UA) a été lancée à Durban. La plupart des questions, défis et difficultés de la révolution Africaine traités par The African Communist sont toujours d’actualité. Cela reste une tâche essentielle pour les forces révolutionnaires et progressistes sur notre continent que d’être à l’avant-garde pour défendre, promouvoir, et intensifier la lutte pour la démocratie nationale, l’unité de la classe ouvrière et de la paysannerie, des luttes anti-impérialistes constantes et résolues, et pour l’unité et la cohésion de l’Union Africaine.

Espérons que tôt ou tard, enfin plutôt tôt que tard, un chercheur, un universitaire ou un étudiant réalisera une analyse approfondie de l’approche théorique, idéologique, méthodologique et pratique adoptées par le SACP et de The African Communist vis-à-vis des événements socio-politiques et socio-économiques qui se sont déroulés sur notre continent. L’engagement, la passion et le soutien tout azimuts à un changement progressiste en Afrique sont un élément persistent et indispensable de notre héritage révolutionnaire, de nos obligations et devoirs en tant que révolutionnaires.

Intégralité de l’article sur le site de Solidarité-Internationale-PCF : http://solidarite-internationale-pc...