Accueil > La défaite, chacun-e son tour ? Ou la victoire toute-s ensemble !
La défaite, chacun-e son tour ? Ou la victoire toute-s ensemble !
Publie le samedi 3 juillet 2004 par Open-Publishing2 commentaires
Visiblement, on serait bien en peine de trouver satisfaction dans
l’attitude des instances syndicales confédérales, face à l’opération
généralisée de démolition des services publics. Après l’éducation l’année dernière, l’explosion de la précarité à la Poste sans autres réponse que des mouvements en ordre dispersé, c’est EDF-GDF que le gouvernement tente de liquider, en tentant de briser toute résistance efficace, c’est-à-dire celle qui s’attaque au portefeuille des actionnaires et des patrons.
Ce gouvernement de combat au service des intérêts du patronat s’attaque à un gros morceau : celui d’un des derniers bastions syndicaux, avec un poids incontournable de la CGT, une base encore très combative.
Cette base n’a pas hésité, comme nous l’avons vu dans la lettre d’avril,
à se donner les moyens de la construction d’une mobilisation, face à une relative mollesse des fédérations syndicales au regard de l’enjeu
historique : la privatisation de l’énergie. Elle n’a pas hésité, à
recourir à l’action directe, qui plus est d’une manière intelligente en
ce sens qu’elle portait un vrai projet de classe : coupure chez les
patrons et politiciens, sur les sites industriels, remise de compte aux
familles démunies, passage d’usagers au tarif de nuit.
La fédération CGT a d’ailleurs suivi sa base, de même que FO et SUD, dans un premier temps, au moins en terme de discours, mais sans se donner les moyens d’une grève totale, et surtout - dimension confédérale oblige- d’un élargissement interprofessionnel, à minima dans les services publics. Les réactions gouvernementales, qu’il s’agisse de répression ou de démagogie, à ces actions, ont montré à quel point leur généralisation faisait peur à l’Etat, mais également au patronat.
On a ainsi vu un Seillières étaler son arrogance de classe, en nous
expliquant ce qu’une grève devrait être et ne pas être, en nous parlant
de cette légalité bourgeoise, ce leurre qu’il bafoue en plus jour après
jour. On n’a jamais vu autant de ministres réactionnaires nous faire de
grand discours sur le service public. Nul doute qu’ils puissent être aux
abois face au « mauvais » exemple que pourraient donner les agent-e-s
d’EDF aux autres salarié-e-s.
Quant à nous, anarcho-syndicalistes, cet exemple, encore trop rare, ne
saurait que nous réjouir : un retour à l’action directe et à la lutte de
classe, plutôt que l’illusion de la pétition aux politiciens qui de toute
façon, à droite, sont bien décidés à faire passer le projet, et à gauche,
l’ont mis en place à l’échelle européenne en entérinant le traité de Nice
qui prévoyait la privatisation du secteur de l’énergie.
Mais, au moment où nous écrivons ces lignes, il semble que la direction fédérale CGT, poussée par la confédération, soit sur le point de lâcher sa base : elle ne parle déjà plus de retrait du changement de statut mais de maintien des parts étatiques dans une société par action. Inféodation aux logiques politiques : ne pas aller trop loin pour laisser les partis se présenter comme "seule alternative" et "voie de recours" crédible, une fois les syndicats mis à genoux ?
Effets « collatéraux » d’un accord en sous main pour conserver le CE et
sa manne financière, en terme de permanents et de ressources, contre une participation à la liquidation d’EDF-GDF comme service public ?
Incapacité à prendre la mesure de l’enjeu historique qui risque de
devenir un Waterloo pour le mouvement syndical, avec son lot d’amertume et de désyndicalisation ? Défaitisme par avance ?
Sans doute un peu de tout ça.
Mais une chose est sure, c’est que la bureaucratie CGT fait une grossière erreur en mettant en avant sa conservation plutôt que la défense des intérêts des travailleurs-euses.
D’une part parce que c’est tout le syndicalisme qui risque d’en pâtir :
accumuler défaite sur défaite (retraite, sécu, service publics) mine la
crédibilité du projet syndicaliste auprès de nombreux-ses salarié-e-s.
D’autre part parce que, sans s’en apercevoir, elle y joue sa peau (mais
ça, à la rigueur, nous n’en avons que faire) : une fois le syndicalisme
combatif liquidé, quel intérêt pour le patronat d’entretenir les coûteux
rouages de la cogestion syndicale ?
Mais surtout et enfin parce que ne pas donner un coup d’arrêt à cette
logique de casse sociale, c’est donner les coudées franches à l’Etat et
aux patrons pour continuer sur leur lancée. Et pourtant, les pistes
existent. Une mobilisation interpro, un mouvement d’ampleur est plus que jamais à l’ordre du jour : la poste, l’éducation, la santé, EDF, la SNCF, tous sont sous le coup d’une privatisation en cours ou en voie de mise en place. A côté de cela, le privé voit les mauvais coups pleuvoir : des délocalisations (STM à Rennes, par exemple, sous les matraques et les gaz des CRS et des vigiles), des plans sociaux.
Alors, quant est-ce qu’on s’y met, tous et toutes ensemble, pour leur
dire stop, en les prenant au seul endroit où ça les touche : le
portefeuille et la bonne marche d’une économie qui nous broie ? On peut effectivement attendre longtemps que les bureaucraties confédérales prennent la mesure des enjeux. Alors ?
Alors :
– poser la question de la démocratie syndicale qui accentue cette
déconnection entre base et instances !
– constituer et coordonner des équipes syndicales actives pour taper du
point sur la table dans les fédérations et les confédérations.
– s’organiser entre syndicalistes de classe.
– se donner, en cas de blocage, nos propres moyens d’une mobilisation
interpro et intersyndicale, sans esprit de chapelle, en constituant des
collectifs intersyndicaux et interpros sur ces questions, pour échanger
l’information et se coordonner à la base.
– demander des comptes aux mandaté-e-s, comme commencent à le faire un certain nombre de section syndicales CGT-EDF-GDF, pour que les décisions de congrès et la volonté des salarié-es soient respectées, dans l’intérêt des travailleur-ses.
Et gare à la revanche, quant nous nous y mettrons toutes et tous ENSEMBLE plutôt qu’en nous faisant tondre un-e par un-e
Sam
Lettre des militant-e-s syndicalistes libertaires
Ce texte est extrait de la Lettre des militant-e-s syndicalistes
libertaires du mois de juillet 2004
Cette lettre est un outil d’échange d’informations et de réflexions qui
s’adresse à tous les militant(e)s syndicalistes, anarcho-syndicalistes ou syndicalistes révolutionnaires, anarchistes ou "sympathisants"
libertaires. Les militants qui animent cette Lettre entendent agir dans
une logique pluraliste et dans le respect intégral des choix
organisationnels de chacun. Autrement dit, la Lettre des militant(e)s
syndicalistes libertaires s’interdit toute exclusive ainsi que tout
prosélytisme en faveur de telle ou telle organisation syndicale en
particulier. Elle peut ainsi constituer un Lien solide entre des
camarades / sympathisants libertaires, impliqués dans diverses
organisations syndicales : CFDT, CGT, CGT-FO, CNT, Confédération Paysanne, FEN, FSU, PAS, SUD SOLIDAIRES, UNEF, syndicats de chômeurs etc.
Son but est :
1) La circulation d’informations utiles à nos activités syndicales
respectives
2) La diffusion des idées, critiques et propositions anarchistes dans les
milieux militants syndicalistes,
3) Organiser des échanges de pratiques et permettre de coordonner
l’action des militant(e)s syndicalistes libertaires durant les luttes et
mouvements sociaux.
http://perso.wanadoo.fr/lettre-msl/
lettremsl(a)wanadoo.fr
Messages
1. > La défaite, chacun-e son tour ? Ou la victoire toute-s ensemble !, 3 juillet 2004, 21:00
EDF, la CGT se dégonfle : vers la crise ?
www.legrandsoir.info/article.php3 ?id_article=1665
2. > La défaite, chacun-e son tour ? Ou la victoire toute-s ensemble !, 5 juillet 2004, 08:42
1) La CGT réclame toujours le retrait du projet de loi :
Entretien Frédéric Imbrecht Huma 1 juillet
extrait du communiqué du 29 juin
« L’OBJECTIF RESTE LE RETRAIT DU PROJET DE LOI
La Fédération Nationale des Mines et de l’Energie CGT est solidaire de l’ensemble des salariés qui luttent pour l’objectif commun du retrait du projet de loi modifiant le statut d’EDF – Gaz de France.
Nous avons dénoncé hier l’acte isolé qui a perturbé le trafic SNCF en gare St Lazare.
La fédération entend poursuivre les actions sous toutes les formes, coupures de courant incluses, qui ne portent pas préjudice aux usagers. »
2) à propos des coupures de courant :
sectionner les câbles d’un poste d’alimentation, c’est du sabotage irresponsable, voire une provocation !
couper le courant dans une gare n’est certainement pas la façon la plus adéquate de rallier l’opinion des travailleurs qui se rendent au boulot !
couper le courant chez un député, un sénateur, chez Raffarin, chez Seilleires, dans une usine qui licencie et/ou délocalise est autrement plus symbolique, et sympathique aux yeux de tous
Alors, oui aux coupures ciblées systématiques, aux baisses de production « calibrées »
3) opérations "Robin des Bois" et "Vitale" : rétablir le courant chez les chom’du, distribuer fratuitement l’électricité aux hôpitaux c’est démonter ce que pourrait être le service public
4) information et mobilisation des usagers : pour avoir distribué plusieurs tracts, l’appel à réferendum, des pétitions contre la privatisation, des appels à manifester avec les salariés d’EDF/GDF dans ma boite -la Sécu-, je n’ai pas eu l’impression de mobiliser les foules. Que dire aussi des manifs, où ceux qui n’étaient pas d’EDF/GDF se comptaient sur les doigts de la main...
A propos de la représentativité syndicale , des assemblées générales et de la lutte :
– il est de bon ton de dire que la CGT ne serait pas représentative. Je remarque que la CGT fait plus de 50% des voix à EDF/GDF. Autre chose est de se syndiquer à la CGT !
– à mon sens, seuls les syndiqués peuvent décider ensemble de l’orientation du syndicat. Les prétentions des « assemblées générales », souvent téléguidées par quelques maîtres de la parole (souvent LCR ou LO) , d’imposer leurs « décisions » n’ont, elles aucune légitimité. On pourrait se poser la question de savoir pourquoi ces « meneurs délégués auto-proclamés » ne sont en général pas syndiqués, et quand ils le sont, quelle conception ont-ils de l’indépendance syndicale
– à propos de la lutte, je suis un farouche partisan de la grève. Pour autant, elle ne se décrète pas , encore moins si elle se veut générale ! Combien d’intervenants ont déposé un préavis de grève dans leur boite pour défendre le service public EDF/GDF ? (pour nous, nous ne l’avons pas fait, après en avoir débattu dans le syndicat et constaté l’absence totale de mobilisation sur des problèmes interprofessionnels)
Alors maintenant, c’est au tour de la sécu de passer à la moulinette !
Pour qui se fait des illusions sur la mobilisation actuelle, en voici une belle illustration. Le 5 juin, appel à manifester à Lille des syndicats CGT, FO, SUD (G10) UNSA, CFTC, CFDT (sur ses mots d’ordre). Résultat, à tout casser 3000 personnes dans la rue ! Moins de 200 de SUD, pas plus de FO, ni de CFDT. Les militants CNT étaient plus nombreux que ceux de l’UNSA.
Et pour la CFTC, comptez-les vous même sur la photo jointe.
De mon organisme de Sécu (1000 personnes de la région de Lille), nous étions une dizaine (pas un de SUD, ni FO ) !
Alors, les « incantations » à la grève générale dans ces conditions sont suicidaires, si on n’arrive pas à mobiliser plus.
Autre illustration d’un double langage , le 6 mai lors d’une grève à laquelle la CGT, FO, et SUD appelaient (aucun tract SUD distribué, encore moins envoyé dans les services extérieurs …) pas un délégué SUD en grève ! comme l’an passé sur les retraites ! Alors, SUD CRAM a beau jeu de dénoncer l’impuissance de la CGT !
Alors, tous en grève ? Pourquoi pas ? Et vous ? Que les donneurs de leçon « révolutionnaires » se bougent le cul !
Etes vous prêts à des actions illégales ? si oui, êtes vous prêts à subir la répression ? êtes vous prêts à subir un procès pénal qui dure des années (pour avoir été condamné pour une action militante, que je revendique et je continue, je sais ce que ça signifie) ?
En attendant, si on construisait la lutte ?
Pas d’ambiguïté, je partage assez largement l’analyse ci-dessus !
Salutations syndicales
Patrice Bardet, délégué syndical (élu et révocable par les syndiqué-e-s) Ufict-CGT