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La femme qui pousse

Publie le samedi 25 juillet 2009 par Open-Publishing

de m. pour O.P.A

Je suis jeune et je pointe mon nez depuis quelque temps hors du gîte.

J’observe les pères, ébahie des réseaux de communication, ébahie des surfaces sensibles parcourues, ébahie des liens noués, des interférences, ébahie des fils conducteurs dispersés reliant tout à tout, moi à vous, vous à vous, vous à eux, et cetera.

Par ma bouche se déversent des flots de tragédies, des flots de sang rouge-vif, des écueils où l’homme, titubant, crève sans rage.

Sommes-nous tombés au combat ?

Demain, ils viendront dans vos maisons et vous demanderont de les suivre, bien gentiment, sans faire de vague.

Vous regarderez votre épouse, vos enfants et vous vous lèverez, je veux dire vous vous lèverez tous, sans discuter.

Sans discuter de rien, de savoir si c’est normal ou pas qu’on vous demande de suivre quelqu’un que vous n’avez jamais vu mais qui visiblement vous connaît très bien, sans discuter du pourquoi vous en êtes arrivés là, du comment cela a pu vous arriver à vous et à ce moment-là, sans discuter de rien.

Mon nom ne vous dirait rien parce que je l’ai prononcé peu de fois et jamais devant vous.

Si j’allais au-devant, dresser la table, paver les routes et pendre, aux poutres de notre maison, le gui de la réconciliation et de l’amour.

Sommes-nous tombés au combat ?

Mon ventre s’arrondira jusqu’à la délivrance, et ce jour où il me faudra porter à la lumière l’hors-moi, toute l’histoire du monde commencera de nouveau : une peau lisse, un teint rose, des mains si petites encore, les sens ouverts.

Ta voix devrait me parler plus souvent.

Il me semble parfois l’entendre ou la deviner, et je me sens moins seule d’imaginer tes rancœurs et ton indignation, ton utopie.

Ta voix est unique.

A qui la donnes-tu ?

Si j’ai la morve au nez, c’est pour sonder les égouts de nos êtres.

Je ne suis pas venue pour lancer le mauvais oeil mais pour crever celui-ci, sans état d’âme.

Je ne veux me désenrager de rien, garder la main sur le côté et ne céder qu’à l’apparence.

Je veux bouillir.

Ma parole vaut engagement.

Je suis jeune et je ris maintenant à gorge déployée.

Je ris, mais je suis plus éveillée encore que ne l’était ma mère.

m. pour O.P.A

 http://www.myspace.com/orchestrepoetique

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