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Le Pérou tangue entre la gauche et une femme de droite
Publie le dimanche 9 avril 2006 par Open-Publishingsamedi 8 avril 2006, 8h58
Le Pérou tangue entre la gauche et une femme de droite
LIMA (Reuters) - Un nationaliste radical, un ancien président de gauche et une ancienne parlementaire conservatrice seront en lice sont les principaux candidats à la présidentielle péruvienne de dimanche. Tous promettent d’en finir avec la pauvreté endémique qui frappe le pays.
Aucun des candidats ne semblant à même de l’emporter dès le premier tour, un second tour devrait être organisé en mai pour départager les deux candidats arrivés en tête.
Le favori du premier tour, le nationaliste Ollanta Humala, 43 ans, promet une "révolution" en faveur des pauvres. Cet ancien colonel issu d’une famille connue pour ses positions ultra-nationalistes est crédité par les derniers sondages en date de 29 à 31% des suffrages.
Accusé d’atteintes aux droits de l’homme alors qu’il menait la lutte contre les rebelles maoïstes du Sentier lumineux dans les années 1980 et 90, il avait tenté en 2000 un coup de force contre l’ancien président Alberto Fujimori, qui avait tourné à l’échec.
Considéré comme un franc-tireur sur la scène politique, Humala, qui entend placer l’industrie minière entre les mains de l’Etat, s’est dégagé du lot des autres candidats à la fin 2005 en surgissant en tête dans les sondages. Entre autres promesses électorales, il compte dénoncer l’accord de libre échange liant le Pérou aux Etats-Unis et veut légaliser la production de feuilles de coca, utilisées pour fabriquer la cocaïne dont le Pérou est le deuxième producteur mondial.
Détesté par les classes aisées, il séduit une bonne partie des pauvres, indignés par la croissance économique impressionnante qui ne profite qu’à une élite d’origine européenne établie sur la côte Pacifique.
"Nous formons un peuple sans travail ni avenir, dont les jeunes rejoignent les files d’attente devant les ambassades afin de quitter le pays, dont les ressources naturelles sont contrôlées par des compagnies étrangères. Nous en avons assez !", a-t-il lancé lors d’un rassemblement politique à Lima.
Sa victoire au second tour ancrerait un peu plus l’Amérique du Sud à gauche, dans la foulée du Venezuela, du Brésil, de l’Argentine et de l’Uruguay, et, plus récemment encore, avec l’élection au Chili de la socialiste Michelle Bachelet.
GARCIA OU FLORES AU SECOND TOUR ?
Celle qui faisait la course en tête voici quelques mois encore, la conservatrice Lourdes Flores, n’arrive plus qu’en deuxième position dans les sondages, juste devant l’ancien président Alan Garcia, homme de gauche qui avait dirigé à la fin des années 1980 un Pérou en pleine déroute économique.
Si elle parvenait à se faire élire, Flores, qui a 46 ans, deviendrait la première présidente du Pérou. En 2001, elle était donnée en tête par les sondages mais s’était retrouvée troisième et avait échoué au second tour. Cette fois-ci, les sondages prédisent qu’elle l’emporterait lors d’un second tour, mais il faut pour cela qu’elle distance au premier un Garcia qui la talonne.
Chouchou du monde des affaires, elle est la seule candidate en vue à représenter le centre droit. L’essentiel de son soutien électoral vient de la capitale Lima, et au total, elle est créditée de 25 à 26% des intentions de vote au premier tour.
Ses partisans estiment que le Pérou a besoin d’être dirigé par une femme honnête comme cette avocate d’ascendance européenne, après les affaires de corruption qui ont marqué le mandat du président Alejandro Toledo et celui de son prédécesseur Alberto Fujimori.
Mais cette célibataire sans enfant a du mal à "passer" dans un pays fier son patrimoine indien : "Comment peut-elle diriger le Pérou si elle n’a pas été mère ?", s’interroge une infirmière de 33 ans, qui ajoute : "Nos problèmes ne sont manifestement pas les siens".
Garcia, qui présida le Pérou de 1985 à 1990 et qui laissa un Pérou en pleine hyper-inflation, confronté à la guérilla du Sentier lumineux, pourrait se retrouver au second tour. Pour l’heure, les sondages prévoient qu’il obtiendra un peu moins d’un quart des suffrages dimanche. Agé de 56 ans, cet avocat a entamé la semaine dernière une tournée dans dix villes pour redorer son blason et assurer à qui veut l’entendre qu’il a tiré les leçons de son expérience, laquelle l’aurait rendu plus prudent en matière de finances et de fiscalité. Il jouit d’importants soutiens dans le nord du pays et chez les jeunes. C’est qu’il a une revanche à prendre : en 2001, la présidence lui avait échappé de peu face à Toledo.