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Le ministre de la guerre

Publie le vendredi 19 mai 2006 par Open-Publishing

de Gabriele Polo traduit de l’italien par karl&rosa

Lors de son dernier jour comme ministre, monsieur Antonio Martino s’en va à Nassiriya et assure que nos soldats "ne s’enfuiront pas" de là. Le louable refus de la lâcheté - mis sur le compte de tiers - a une double motivation : rassurer le gouverneur de la région, apeuré, et hypothéquer les décisions de son successeur.

Mais le choix du jour - le dernier du mandat ministériel - révèle aussi l’importance que la mission de guerre a eu pour le gouvernement sortant. Laquelle mission - assure Martino - sera de plus en plus de paix, comme le confirment les récents attentats et, de manière plus générale, le bulletin des morts que l’Irak nous expédie quotidiennement.

L’une des critiques les plus erronées que le centre-gauche a adressé au gouvernement sortant à été celle d’avoir œuvré principalement dans l’intérêt exclusif de Silvio Berlusconi : les lois sur mesure et peu d’autre. Erreur : les lois sur mesure, bien que bruyamment sales, n’ont été rien d’autre que le résumé privé d’une stratégie publique, qui au niveau international a fait de nous des sujets des Etats-Unis comme cela n’était jamais arrivé auparavant : en comparaison, Giulio Andreotti était un dangereux tiers-mondiste.

Dans ce contexte, l’envoi des troupes en Irak a été le geste le plus grave et symbolique, l’acceptation de la guerre comme instrument de politique internationale, le message politique le plus fort. C’est pourquoi Martino fait bien de conclure son ministère par cette visite en Irak et il est parfaitement cohérent avec lui-même quand il rassure le gouverneur local que nous y resterons. Le message contient une abondante queue vénéneuse administrée au gouvernement qui est en train de naître.

L’union s’était engagée en campagne électorale - poussée par la mobilisation de ceux qui ensuite ont voté pour elle - à retirer les soldats italiens de l’Irak. Mais en gardant toujours une certaine ambiguïté - en politique on prononce "dialectique interne" - sur le rapport entre l’Italie et les Etats-Unis en Irak. Une ambiguïté que Martino connaît bien et à laquelle il fait allusion quand il parle de "transformer la mission de surtout militaire à surtout civile". Ce que veut dire ce terme "civil" dans un pays en flammes personne ne le comprend, mais à coup sûr il prévoit l’ambiguïté ultérieure représentée par quelques centaines de militaires comme escorte qui devraient rester là à monter la garde de la mission italienne (éventuellement pétrolifère).

Le résultat de la reconversion changerait la dimension de la mission, mais il ne changerait pas sa nature : celle-ci est déterminée par le macro évènement initial - l’occupation de l’Irak - et par sa suite - un état de guerre permanente. Le jour où le gouvernement qui nous a promis de respecter l’article 11 de la Constitution est en train de naître, sans le vouloir c’est justement Silvio Berlusconi qui rappelle, en demandant à Prodi la garantie de la continuité en politique étrangère, que la guerre et son refus ne connaissent pas de demi-mesures, que les Italiens en Irak - quel que soit le métier qu’ils font - ne seront les bienvenus que quand le dernier soldat (américain) sera parti. Autrement il vaudrait mieux laisser monsieur Antonio Martino au ministère de la guerre.

http://www.ilmanifesto.it/Quotidiano-archivio/17-Maggio-2006/art25.html