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Le « sarkozysme littéraire » en débat
Publie le mercredi 12 septembre 2007 par Open-Publishing1 commentaire
Le « sarkozysme littéraire » en débat
Le roman de Yasmina Reza sur le président français est-il un objet littéraire ou journalistique ? (le temps, quot. suisse)
Eléonore Sulser
Mercredi 12 septembre 2007
Grosse vente de cette rentrée littéraire, qui répond à un marketing soigné, « L’Aube le soir ou la nuit », de la dramaturge Yasmina Reza sur Nicolas Sarkozy en campagne (lire LT du 23.08.2007), fait débat. Journalisme amélioré ou véritable œuvre littéraire ? Panégyrique ou portrait véridique ? La presse est partagée.
L’écrivain suit en première classe, tandis que « les journalistes sont au fond du convoi », lance Arnaud Viviant, critique caustique du Masque et la plume, qui n’a guère aimé l’exercice. Mais, dit-il surFrance Inter, Yasmina Reza n’en distingue pas mieux la vérité : L’Aube le soir ou la nuit, c’est l’« écriture Photoshop » : « Je rectifie la vérité par l’écriture. »
La nature de cet objet littéraire intrigue la presse anglo-saxonne, qui s’étonne de ne pas y retrouver de grands enjeux. The Economistestime que « l’exercice n’est ni strictement politique ni purement littéraire. [...] Il y a peu de dates et de faits, peu de références idéologiques, ou au contexte politique ou économique de la France durant cette campagne pour l’élection présidentielle ». Même réflexion dans le New York Times, qui citeune interview de Yasmina Reza au Nouvel Observateur : « Je ne cherche par la vérité qui, dans mon travail, n’existe pas. » « Voilà qui explique peut-être pourquoi on n’y trouve pas de réflexion sur la substance - l’économie stagnante de la France ; ses problèmes avec l’emploi et l’immigration par exemple. »
öPour l’entourage politique de Nicolas Sarkozy, pas de doute : ce livre est une œuvre littéraire, comme en témoigne Le Point. Yasmina Reza « met dans le monde politique une dimension métaphysique, en ce sens qu’elle regarde l’action politique par rapport à la mort, à l’éternité, à la vie humaine, à toutes ces choses qui nous dépassent », confie Patrick Devedjian, conquis comme beaucoup d’autres par « cette petite femme à l’élégance recherchée, toujours aux aguets, qui couvre ses cahiers noirs de notes frénétiques, et porte des gants ». Seul Le Parisien, citant un « habitué du Château », laisse entendre que d’aucuns auraient bien voulu plus d’engagement : « A l’Elysée, il y a eu une petite déception pour certains [...] par rapport à la matière dont Yasmina disposait... »
öLe Figarodéfend aussi l’option littéraire : « Parce qu’un an défile en moins de 200pages, L’Aubele soir ou la nuit ne prétend pas être un récit de la campagne présidentielle. De nombreux livres de journalistes l’ont déjà racontée en détail, avec une approche plus strictement politique. » Le Mondepenche aussi pour la littérature, mais souligne les difficultés de l’entreprise : « L’écriture, le style, la petite musique des mots de Yasmina Reza sont là » mais, « premier problème : trouver la bonne distance par rapport à son sujet. S’y tenir ou pas. » Puis - second problème - « définir son projet littéraire. [...] Reza n’est pas journaliste : ce n’est ni un journal de campagne à proprement parler, encore que ça y ressemble quand même beaucoup, ni une enquête. Ni un pamphlet. »
Libérations’en sort en classant le livre dans le genre « bien défini » de « l’historiographie des Grands ». Le journal invite perfidement à comparer : « Descendons les marches : Louis XI eut Commynes ; Louis XIV, Racine ; de Gaulle, Mauriac. Nicolas Sarkozy a Yasmina Reza. » Yasmina Reza revendique son regard d’écrivain, mais l’exercice est vain, juge Libé : « Elle appartient à cette catégorie d’écrivains qui croient que tout est neuf du moment qu’ils l’écrivent. Mais, sous le filet d’anecdotes, du bon journalisme qui caractérise bien son vide énergétique, le Sarkozy qu’elle dévoile est conforme au personnage trop commenté. »
Quant au Point, dans un formidable article sur l’effet « donut » ou « trou noir » que le personnage de Nicolas Sarkozy aurait sur les écrits qui le concernent, il résout le débat en annonçant carrément l’avènement d’un genre nouveau : le « sarkozysme littéraire » : « Un petit monument littéraire à la gloire d’un président en devenir, qui adorera, c’est certain, se voir en ce beau miroir, qui, jusque dans la forme, lui ressemble. Oui, c’est ça. Malin, speedé, zappé, brillant, facile, exercice d’observation autant que d’admiration, L’Aube le soir ou la nuit est un événement parce qu’il marque un avènement : celui du sarkozysme en littérature. »
Le Masque et la plume. Emission de radio de France Inter présentée par Jérôme Garcin le dimanche, de 20h10 à 21h. Elle est dédiée à la critique de livres, de pièces de théâtre ou de films. Créée le 13 novembre 1955.
The Economist. Véritable institution de la presse britannique, fondée en 1843, c’est la bible de tous ceux qui s’intéressent à l’actualité internationale. Ouvertement libéral, il se situe à l’« extrême centre ». Imprimé dans six pays, il réalise 83% de ses ventes à l’extérieur du Royaume-Uni. Tirage : 1009760 ex.
The New York Times. Avec 1000 journalistes, 29 bureaux à l’étranger et plus de 80 Prix Pulitzer, c’est de loin le premier quotidien des Etats-Unis, dans lequel on peut lire « all the news that’s fit to print ». Tirage : 1160000 ex.
Le Nouvel Observateur. Hebdomadaire français d’information générale, proche de la gauche. Tirage : 540000 ex.
Le Point. Hebdomadaire français d’information générale, à la ligne éditoriale de centre droit, publié depuis 1972. Tirage : 365000 ex.
Le Parisien. Journal régional français. Premier quotidien sur Paris et Ile-de-France, il est décliné dans les régions sous la forme d’une édition nationale intitulée « Aujourd’hui en France ». Tirage : 502 689 ex.
Le Figaro. Le doyen des quotidiens parisiens, créé en 1826. C’est le grand journal de la droite. Ses pages internationales sont parmi les meilleures en France. Tirage : 360000 ex.
Le Monde. Deuxième quotidien généraliste français, intellectuel et de référence internationale. Tirage : 312265 ex.
Libération. Quotidien de la gauche française, qui a traversé une grave crise financière en 2006. Tirage : 127229 ex.
Messages
1. Le « sarkozysme littéraire » en débat , 13 septembre 2007, 10:17
On se croirait dans une monarchie absolue avec tous les courtisans qui cirent les pompes du monarque et qui écrivent à l’infini pour sa gloire, certains qu’en flattant sa vanité il fera le nécessaire pour que leur livre se vende bien . On a vu cela au Maroc du temps de Hassan II.
Opportunisme et veulerie de certains écrivains sans scrupules . Inquiétant pour la France