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Les droits et devoirs des chômeurs

Publie le jeudi 12 juin 2008 par Open-Publishing
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Les droits et devoirs des chômeurs reposeront sur la notion d’"offre raisonnable d’emploi"

Réuni comme chaque mercredi à l’Elysée, le conseil des ministres a adopté hier le „projet de loi relatif aux droits et devoirs des demandeurs d’emploi“, fixant en particulier les conditions dans lesquelles un chômeur peut refuser un nouveau travail.

De notre correspondant Bernard Brigouleix, Paris

C’est autour de ce concept d’„offre raisonnable d’emploi“ que s’était cristallisée, ces temps derniers, la controverse entre gouvernement et syndicats, en marge de la polémique qui bat actuellement son plein sur un autre sujet très sensible : le maintien théorique, mais le quasi démantèlement de fait, du régime des 35 heures hebdomadaires de travail.

Après la fusion de l’Agence nationale pour l’emploi (ANPE), qui aide déjà les chômeurs à retrouver du travail, au moins en principe, et de l’Unedic, l’organisme qui assure le suivi et le paiement des indemnités de chômage, le demandeur d’emploi devra définir avec son conseiller un „projet personnalisé“ destiné à le réinsérer dans la vie professionnelle, projet qui „devra être réactualisé périodiquement.“

La nouveauté réside donc surtout dans cette „offre raisonnable d’emploi“ que le chômeur ne pourra pas durablement refuser, dans certaines conditions. L’adjectif „raisonnable“ a été ajouté pour bien montrer qu’il ne s’agit pas, au moins officiellement, de contraindre un demandeur d’emploi a accepter n’importe quelle fonction, fût-elle très inférieure en responsabilités ou en salaire à ses activités antérieures, pour dégonfler les statistiques du chômage (déjà infiniment sujettes à caution puisque tout demandeur d’emploi de plus de 55 ans en est exclu au nom d’une „préretraite“ qu’il n’a en général aucunement demandée).

Cette „offre raisonnable“ doit ainsi tenir compte de la formation du demandeur, de ses qualifications, de son expérience professionnelle, de sa situation familiale et personnelle et aussi ... géographique. Car la petite chronique triste du chômage à la française fourmille de cas qui prêteraient à sourire dans d’autres circonstances, comme celui, authentique, de cet ingénieur au chômage à qui l’on avait récemment proposé un remplacement saisonnier dans l’horticulture de deux heures par semaine en Corse, pour un total de 96 euros bruts par mois, alors qu’il habite le Nord de l’Hexagone ...

Un système dégressif

Ces cas, certes anecdotiques mais non pas rarissimes, ne devraient plus se présenter avec le nouveau dispositif. Mais une sorte de système dégressif des droits du chômeur est prévu.

Ainsi, après trois mois d’indemnisation, il ne pourra plus refuser une offre équivalent à 95 pour cent de son ancien salaire – ce qui n’est évidemment jamais un problème, en pratique, puisque les indemnités de chômage, quoique assez généreuses en France, sont loin de représenter un tel pourcentage.

Après six mois, il ne s’agira plus que de 85 pour cent, avec au plus une heure de trajet entre le domicile et le lieu de travail, ou 30 kilomètres. Après un an, tout salaire équivalent à l’allocation de chômage sera jugé bon à prendre, y compris pour un chômeur déjà arrivé en fin de droits, et qui ne touche donc plus que la très modeste „allocation spécifique de solidarité“.

D’autre part, les conditions de „radiation de la liste des demandeurs d’emploi“, en fait de la perte des allocations de chômage, sont elles aussi clarifiées, mais durcies. Elles vont du refus de répondre à une convocation ou de suivre une action de formation à la fausse déclaration, en passant – et c’est évidemment là que le projet gouvernemental était très surveillé – par „deux refus successifs de répondre favorablement à une offre raisonnable d’emploi.“

Il est vrai que c’est le Conseil d’Etat qui devra préciser les conditions de telles radiations, et surtout leur durée, car le contestataire qui accepterait finalement de se plier à la procédure prévue par l’administration, et/ou de prendre un nouvel emploi défini par ces fameuses „offres raisonnables“, pourrait être réintégré dans ses droits après un petit délai punitif ...

Le gouvernement entend donc, par ce texte, donner satisfaction à cette partie de l’opinion qui, parce qu’elle est elle-même à l’abri du problème (ou croit l’être ...), critique volontiers la „paresse“ des chômeurs, et ressent leur indemnisation, en tout cas lorsqu’elle se prolonge, comme une sorte d’encouragement public au désoeuvrement. Il compte aussi stimuler ceux des chômeurs, bien moins nombreux que ne le disent certains mais non pas inexistants, qui ne sont qu’assez mollement demandeurs d’un nouvel emploi, et se sont installés dans le très relatif confort d’un certain assistanat.

 http://www.tageblatt.lu/edition/art...

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