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Les syndicalistes en Algérie plaident eux-mêmes devant les tribunaux !

Publie le vendredi 12 juin 2009 par Open-Publishing

Dans un communiqué rendu public mardi passé, le Conseil National des Enseignants du Supérieur (CNES), principal syndicat des enseignants du supérieur algérien, nous apprend que les représentants de la section locale de l’Université d’Oran étaient dans l’obligation de "plaider" eux-mêmes devant la juge chargée de l’affaire les opposant au recteur de cette université.

Cela s’est passé dimanche dernier (07 juin), lorsque la magistrate chargée de l’affaire avait donné à M. CHOUICHA et M. MEKKAOUI, tous deux membres du bureau syndical de l’Université d’Oran, la possibilité de "plaider", sans la présence de leur avocat.

Les syndicalistes ont été obligés de vivre cette "mésaventure" non pas parce qu’ils étaient à court d’argent, nécessaire pour couvrir les honoraires de tout avocat, sinon parce qu’ils n’avaient pas été avertis à temps. En fait, "l’avis à comparaître" leur est parvenu quelques minutes avant l’audience où les juges du tribunal administratif devaient trancher sur l’arrêt ou non de la grève, déclenchée quelques jours auparavant, au niveau de la Faculté où ils enseignent (Faculté d’Architecture).

Selon notre source, l’administration de l’Université d’Oran a usé de ce subterfuge dans le clair but les démunir de toute possibilité de défense. D’après elle, l’université aurait fait exprès de ne pas charger l’huissier de justice dans les délais. "Bien que l’affaire fût enrôlée la veille c’est-à-dire le 06-06-2009 pour une audience prévue le 07-06-2009 à 11h la convocation ne leur fût adressée que le jour même vers 10h 30mn" , explique d’ailleurs le communiqué.

Une fois sur les lieux, les syndicalistes n’avaient logiquement pas pu fournir le mémoire exigé par la procédure dans les affaires similaires. Ce qui les amena à faire le travail d’avocat et à le rédiger, avec les moyens qui leur sont propres (stylos à billes et feuilles volantes), dans « un café proche du Tribunal ». Là aussi, et pour la deuxième fois ils sont arrivés un peu « tard » pour déposer l’écrit. C’est à ce moment, qu’ils étaient autorisés à plaider verbalement leur cause mais hélas pour eux, la manoeuvre de l’administration universitaire a bien marché puisque la sentence fût l’arrêt de la grève.

Le texte du communiqué dénonce aussi l’acharnement judiciaire sans précédant dont fait preuve l’administration rectorale qui en est, toujours selon ce document, à sa quatrième plainte contre le CNES.

Avec cet énième recours à la justice le bilan de l’Algérie en matière de répression antisyndicale ne peut que s’alourdir. Les organisations internationales reprochent souvent à ce pays son obstruction à la syndicalisation dans le secteur public. En 2008, la Confédération Syndicale Internationale dans son Rapport annuel des violations des droits syndicaux, rappelait les lourdes peines qui étaient requises en 2007 contre deux autres leaders du syndicat des professeurs universitaires. M. AÏSSAT KAMEL et M. LARABI MOHAND étaient poursuivis pour « entrave à la liberté de travail » lors d’une grève initiée par le CNES. Une peine de deux ans de prison et une lourde amende ont été requises contre eux.