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Lettre à Alain Juppé
par Jean-Claude Lefort
Publie le vendredi 11 novembre 2011 par Jean-Claude Lefort - Open-PublishingParis, le 7 novembre 2011
M. Alain Juppé
Ministre d’Etat
Ministre des Affaires étrangères
37, quai d’Orsay
75007 Paris
Monsieur le Ministre d’Etat,
Début juillet 2011, des centaines de personnes munies de leurs billets pour Tel-Aviv, étaient empêchées d’embarquer à bord d’avions de plusieurs compagnies aériennes, notamment à Roissy, alors qu’elles affirmaient délibérément vouloir se rendre en Palestine en passant par le seul point d’accès possible pour cela, l’aéroport de Ben-Gourion.
Le quai d’Orsay publiait le 7 juillet une déclaration assurant que : « La France reste par ailleurs attachée à la liberté de circulation vers et en Cisjordanie, comme dans le reste des Territoires palestiniens, qui doivent notamment être accessibles aux visiteurs étrangers. »
Du fait de la situation de l’occupation militaire israélienne de la Palestine et des dommages multiples et brutaux causés qui en résultent, il n’y a pas d’aéroport palestinien. Plus exactement : il n’y a plus d’aéroport palestinien puisque le seul qui existait à Gaza, inauguré en 1998, a été détruit par les forces armées israéliennes en décembre 2001 et janvier 2002.
Cet aéroport de Gaza avait été financé par l’Union européenne. Le Maroc y avait apporté une large contribution, notamment au niveau architectural. Il avait alors une capacité d’accueil de 750.000 passagers par an. Une compagnie aérienne palestinienne, « Air Palestine », prévoyait un large développement, notamment en matière de transport de marchandises. Elle est désormais, dormante, basée à El-Arish en Egypte.
Cette destruction avait entraîné l’adoption, le 13 mars 2002, d’une résolution du Conseil de « l’Organisation de l’aviation civile internationale » (OACI), qui regroupait alors 187 Etats membres, cette organisation étant, rappelons-le, une institution onusienne.
Le Conseil de l’OACI condamnait alors « énergiquement la destruction de l’aéroport international de Gaza et de ses installations de navigation aérienne. » Il demandait « instamment à Israël de se conformer aux buts et objectifs de la Convention de Chicago ». Il réclamait « énergiquement à Israël de prendre les mesures nécessaires pour remettre en état l’aéroport international de Gaza de manière qu’il puisse rouvrir dès que possible. »
C’était en mars 2002 et aujourd’hui cet aéroport de Gaza, territoire aujourd’hui soumis par ailleurs à un blocus illégal, n’est toujours pas reconstruit. Et il n’y a pas d’accès aérien possible en Palestine – ce que permettrait, il est bon de le noter, l’existence d’un Etat palestinien reconnu à l’Onu dans ses frontières de 1967.
Tout cela aboutit aujourd’hui à ce que les personnes qui veulent se rendre, par voie aérienne, en Palestine doivent nécessairement passer, en transit, par l’aéroport international Ben-Gourion de Tel-Aviv, sachant que Gaza est en plus bloquée.
« La France reste attachée à la liberté de circulation vers et en Cisjordanie, comme dans le reste des Territoires palestiniens, qui doivent notamment être accessibles aux visiteurs étrangers. » déclarait le Quai, comme indiqué au début de cette lettre, en juillet dernier.
Aussi, au-delà de cette affirmation, je souhaite savoir qu’elles sont les mesures qui ont été prises et les négociations qui ont été engagées avec les autorités israéliennes afin de mettre un terme à cette situation qui voit de nombreux visiteurs désireux d’aller en Palestine être bloqués ou refoulés à Tel-Aviv ?
Quelles exigences a fait valoir la France pour assurer la liberté de circulation pour aller en Cisjordanie et Gaza ?
J’attire votre attention sur le fait que si des mesures effectives ne sont pas prises les incidents risquent de se multiplier et les expulsions arbitraires de citoyens français également.
Car des mesures doivent être prises. Si Tel-Aviv est, en effet, sous souveraineté incontestable d’Israël, ce pays ne peut cependant pas se soustraire des conséquences des actes qu’il a commis et qui ont été condamnés par les institutions onusiennes – actes qu’il n’a toujours pas réparés.
Il contraint de la sorte les visiteurs à passer par Israël pour aller en Palestine par voie aérienne. Il doit en être tiré les conséquences qui s’imposent.
Dans l’attente de réponses claires et surtout d’actions notoires de notre pays sur ce sujet très sensible,
Je vous prie de croire, Monsieur le Ministre d’Etat, en l’expression de mes salutations les plus distinguées.
Jean-Claude Lefort
Président de l’AFPS