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La Lettre de Liaisons n° 170 du 22 mars2006
Le courage, c’est de chercher la vérité et de la dire. Jean Jaurès.
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Pourquoi ils ont appelé au 28 et pas au 23.
La poussée nationale de la jeunesse, soutenue et montrant la voie à toute la classe ouvrière, a terrifié les puissants et imposé l’unité aux organisations syndicales et aux partis de gauche. Samedi soir, ils avaient différé leur décision quant aux suites de l’action mais l’annonce d’une intersyndicale le lundi 20 était perçue et présentée dans tout le pays comme un ultimatum au gouvernement. L’ultimatum de la classe ouvrière et de la jeunesse, à travers leurs organisations, contre un gouvernement pourri, illégitime, minoritaire, corrompu et divisé.
Nul doute que si, sur cet élan, les organisations avaient, comme le leur demandait la délégation permanente de la coordination nationale, élue la veille à Dijon et reconnue par l’UNEF, reçue par l’intersyndicale lundi, appelé lundi soir à la grève générale interprofessionnelle avec montée sur Paris pour manifester en direction de l’Assemblée nationale le jeudi 23, nous aurions gagné.
Chirac, Villepin, Sarkozy, seraient à terre, et la question de la chute du gouvernement, d’élections anticipées, de l’organisation des comités de grèves et des assemblées générales serait en train de se poser dans tout le pays.
Voila pourquoi les directions des organisations n’ont pas fait cela, mais ont appelé au 28, sans écrire ni "grève générale" ni "grève interprofessionnelle" ni même "tous en grève".
Après l’ "ultimatum", elles ont offert un bail au gouvernement, un bail à Chirac, De Villepin et Sarkozy, un bail au CPE et au CNE.
Dans ce délai, le gouvernement aux abois tente de reprendre haleine. Avec deux fers aux feux : d’une part, la répression et la provocation, d’autre part, les grandes manoeuvres qui se ramènent d’ailleurs à peu de choses. Ainsi De Villepin rappelle, ce qui est déjà dans la loi dite de l’ "égalité des chances", que le délai de deux ans d’un CPE peut être ramené à un an par des accords conventionnels de branche : c’est naturellement un piège, pour que des fédérations syndicales cautionnent le CPE. Et des secteurs du MEDEF ont "reconnu" que donner le motif du licenciement serait "pédagogique" ("petit con, voici quel est le motif de ton licenciement" ...).
Le danger principal, c’est que les jeunes soient exposés tous seuls à des provocations, des agressions policières comme samedi à Paris et dans toute la France, et des débordements.
La montée sur Paris, pour manifester vers l’Assemblée nationale, de milliers d"étudiants et de lycéens, se produira demain jeudi. A Lyon, à Clermont-Ferrand, dans d’autres villes, ils ont demandé ou vont demander des trains. Lourde responsabilité que celles des dirigeants des fédérations de cheminots, CGT en tête, dont l’avis contre toute action ce jour là, au motif des élections professionnelles à la SNCF, a été utilisé par les dirigeants CGT dans les intersyndicales pour s’opposer à cette montée . Nul doute que les cheminots, d’ailleurs appelés à la grève le 28, auraient été prêts le 23 -et que les élections professionnelles n’en auraient pas souffert, au contraire !
C’est une poussée vers la manifestation centrale contre le gouvernement, le pouvoir, l’Assemblée minoritaire qui a voté la loi infâme sur l’ "égalité des chances", qui va se produire. Il faut contribuer au maximum à son succès. La place des salariés, par centaines de milliers, à l’appel de leurs organisations, était là, et ce ne sont pas eux qui n’ont pas voulu, ils seraient venus : ce sont les dirigeants.
Officiellement c’est cette fois-ci la CFDT qui ne voulait pas d’une grève générale, ce qui n’est pas un scoop. Soyons clairs : sans que cela ne diminue en rien ce qu’on peut penser de Chérèque, il fait ici partie de la stratégie de Thibault et Mailly, qui pouvaient appeler sans son accord -ce qui est vivant dans la CFDT aurait d’ailleurs suivi.
Mais la force de la jeunesse augmente encore. Les lycéens dans tout le pays sont en train de s’"y mettre en force, et commencent à s’organiser, à tenir AG et coordinations. Les "adultes" les soutiennent et les protègent. Une dislocation dans la répression de la manifestation vers l’Assemblée nationale voulu jeudi par de nombreuses AG étudiantes et par la coordination, malgré un mandat confus (voir documents ci-dessous) doit être évitée, mais le mouvement a la force de surmonter ces obstacles en comprenant de mieux en mieux, à chaque étape, à quoi il a affaire et en en tirant une seule conclusion pratique : organisons-nous, élisons nos délégués, contrôlons-les.
L’article de Renaud ci-dessous est bien illustratif de cette force.
Le combat pour la grève générale le 28.
La classe ouvrière tient à l’unité de ses organisations sur le mot d’ordre de retrait du CPE -et du CNE. La coordination étudiante n’est naturellement pas la direction de la classe ouvrière ; il est déjà important que ce comité national de délégués ait imposé sa reconnaissance aux organisations syndicales.
Dans ces conditions, la classe ouvrière, qui était prête au combat le jeudi 23, est prête à y aller le mardi 28.
En s’appuyant sur la montée sur Paris du jeudi 23, il faut réussir la grève générale le 28.
La bataille pour cela passe par des assemblées générales dans les lycéens, collèges, centres d’apprentissage, entreprises, sites industriels. Au plan national les organisations syndicales n’ont pas voulu écrire "grève générale". Mais dans les départements, les unions locales et les fédérations, il est possible d’appeler réellement à la grève.
Les responsables disent souvent "on ne peut pas appeler à la grève comme ça dans la privé". C’est exact : pour appeler à la grève dans le privé, il faut prendre ses responsabilités. Il faut commencer par aller sur les sites, en groupes unitaires, et il ne faut pas commencer par dire "des arrêts de travail" et autres gré-grèves flexibles. La grève dans le privé, dans les boites de taille moyenne, il faut maintenant expliquer que c’est tous ensemble, pas les délégués plus les RTT, mais tous les ateliers et tous les bureaux. Et dans les PME, boite par boite, c’est impossible, c’est donc Tous ensemble, par zones et par bassin. C’est pas facile ? On sait, mais il faut s’y mettre !
Le 28 il faut des assemblées générales dans les entreprises, les établissements, le matin, avant les manifs, et, après les manifs, des assemblées-débats et des intersyndicales élargies avec les délégués des assemblées réunies sur les lieux de travail.
De larges couches de la jeunesse et de la classe ouvrière ont espéré et cru à la montée le 23. Elles ont vu à l’oeuvre leurs mauvais généraux. Une seule conclusion : non pas mettre les syndicats sur la touche, c’est impossible et dangereux, mais s’en saisir et construire nous mettre notre force, souffler notre forge et battre le fer quand il est chaud : assemblées de travailleurs ! Elections de délégués avec les syndicats !
Messages
1. > Lettre de Liaisons, 23 mars 2006, 07:59
D’accord pour le droit de grève mais pas d’accord que la pression des grévistes violente la liberté de ceux qui veulent travailler