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Logement social : la Côte d’Azur échappe aux sanctions

Publie le samedi 27 septembre 2008 par Open-Publishing
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Des communes des Alpes-Maritimes et du Var, dont Nice et Toulon, ne bâtissent pas assez de HLM sans être pénalisées pas l’Etat.

Depuis mardi, la ville de Cannes, dans les Alpes-Maritimes, accueille le congrès national HLM. La ministre du Logement et de la Ville, Christine Boutin, doit en prononcer le discours de clôture ce jeudi. La tenue de cet événement dans l’un des départements les moins respectueux de la loi SRU -seules trois communes affichent plus de 20% de logements sociaux- ne manque pas d’une certaine ironie.

Christine Boutin en profitera-t-elle pour remonter les bretelles aux maires des nombreuses communes de la Côte d’Azur qui ne remplissent pas leurs obligations ? Dans quelques semaines, la ministre présentera sa loi sur le logement au Sénat, qui devrait revoir à la baisse les ambitions de la loi SRU.

En attendant, Christine Boutin a déclaré cet été qu’elle n’aurait « aucun état d’âme » pour « les communes récalcitrantes »…

A Nice et à Toulon, des « taux de réalisation de logement social » faiblards

Les villes de Nice et Toulon sont-elles récalcitrantes ? Christian Estrosi et Hubert Falco (UMP) doivent-ils se sentir visés ? Pour la période 2005-2007, Nice affiche un taux de réalisation de logement social de 51% et Toulon de 31%. Loin, très loin du seuil prévu par la loi.

D’ailleurs, dans le Var, 20 communes sur les 24 soumises à la loi SRU présentent des taux de réalisations faméliques. Dans les Alpes-Maritimes, elles sont 27 (sur 36 concernées) à ne pas avoir rempli leurs obligations. Sur la Côte d’Azur, le logement social ne semble pas faire partie des priorités des édiles.

Dans l’ordre des choses, toutes ces communes défaillantes devraient être sanctionnées, comme l’article 55 de loi SRU le prévoit. Aux préfets la charge d’évaluer les constats de carence, et de les faire appliquer (la pénalité de base est de 152 euros par logement social manquant, d’autres critères sont également pris en compte).

Des critères taillés sur mesure ?

Or, à la lecture du verbatim du Comité régional de l’habitat (CRH) qui s’est tenu le 18 juillet et dont Rue89 s’est procuré une copie, il apparaît que plusieurs villes de ces deux départements vont passer à travers les gouttes. Et parmi elles, ô surprise, Nice et Toulon.

Les préfectures départementales ont mis en place des critères pour justifier ces décisions. Dans les Alpes Maritimes par exemple, ne seront pas pénalisées les communes se situant au-dessus du seuil des 50% de réalisation de logements. C’est ainsi que des villes comme Antibes (79%), Cagnes/Mer (54%), Menton (51%) et donc Nice (51%) ne seront pas punies.

Pour Nice, Dominique Estrosi, adjointe au maire en charge du logement, par ailleurs présidente de Côte d’Azur Habitat, premier bailleur social des Alpes Maritimes, le confirme :

« J’ai été auditionnée par la commission départementale de l’habitat la semaine dernière. J’ai rappelé les problématiques auxquelles la ville de Nice est confrontée et présenté la politique volontariste que nous souhaitons mettre en oeuvre pour passer à la vitesse supérieure dans les trois prochaines années. Le préfet m’a confirmé qu’il ne prendrait pas d’arrêté de carence. »

« Il n’y a jamais eu de volonté de faire dans le social dans ces départements »

Dans le Var -taux moyen de logement social de 9%-, la ville de Toulon avec 31% de taux de réalisation, ne sera donc pas non plus pénalisée. Pour quels motifs ? La ville dirigée par le secrétaire d’Etat chargé de l’Aménagement du territoire »a déjà 14% de logements sociaux et doit réaliser un dossier Anru [Agence nationale de rénovation urbaine, ndlr] complexe en centre-ville ».

Un élu du conseil régional Paca (majorité PS) ironise :

« Cela fait trente ans que le centre de Toulon attend d’être rénové et aujourd’hui, on ressort l’argument pour permettre à la ville de ne pas payer ses carences. »

« La vérité, c’est qu’il n’y a jamais eu aucune volonté de faire dans le social dans ces départements. Et vous pensez que ne pas sanctionner ces villes va les motiver à en faire ! »

D’autres communes varoises sont également concernées par ces levées de sanctions, comme Saint-Raphaël (55%), Solliès-Pont (69%) ou encore La Crau (22%). Là, les critères d’exonération sont différents, mais tout aussi surprenants : « Les communes qui ont réalisé leur objectif sur la période 2002-2004 et qui n’ont pas réalisé les objectifs de la période 2005-2007 ne sont pas sanctionnées », indique le CRH.

Caroline Gadou, sous-préfet chargé de mission à la préfecture du Var pour le logement et la politique de la ville justifie cette façon de faire :

« Nous menons avec les communes un travail de dialogue et de concertation. Le constat de carence n’est pas le seul instrument que nous utilisons et on ne pourra pas tout régler avec des sanctions financières. »

« Nous portons donc un regard différent en fonction de la situation de chaque commune et des projets engagés. Il n’y a pas une application mécanique de l’article 55 de la loi SRU »

Pour les services de l’Etat, dans les deux départements concernés, il ne s’agit pas d’une politique du « deux poids deux mesures ». David Barjon, directeur adjoint à la Direction départementale de l’équipement dans les Alpes-Maritimes, détaille :

« Il y a, au niveau régional, une harmonisation. Mais qui dit harmonisation ne signifie pas uniformisation. Chaque département ayant ses spécificités, ses paradoxes à gérer. »

« Des contorsions avec les textes »

La lettre Urbapress Informations n’a pas exactement la même appréciation de la situation. Pour cette newsletter spécialisée dans les questions d’urbanisme, il s’agit là de « contorsions avec les textes », de « subterfuges » pour permettre notamment à Toulon et Nice, « deux communes symboles », de ne pas être blâmées :

« Ces tripatouillages avec l’esprit et la lettre de la loi SRU laisseront sans doute un goût amer aux maires des communes des départements voisins sanctionnés alors qu’ils ont pourtant fait des efforts. »

C’est le cas dans le Vaucluse ou les Bouches-du-Rhône, où des communes comme Les Pennes-Mirabeau par exemple, dont le taux de réalisation est pourtant de 97% pour la période 2005 et 2007, ont fait l’objet de proposition de constat de carence de la part du comité régional de l’habitat.

Du côté du ministère du Logement, on rappelle simplement « qu’il n’y a pas une application arbitraire de la loi et que c’est aux préfets de juger de la réalité et de la sincérité des situations. Même si, en dernier ressort, c’est la ministre qui tranchera ».

► A lire aussi : « Boutin préfère la France des propriétaires à celle des HLM »

Par Rémi Leroux | Rue89 | 25/09/2008 | 13H42

Messages

  • Nous avons quitté les Alpes-Maritimes faute de pouvoir nous loger décemment. On a l’impression que dans ce département clientéliste (comme d’alleurs dans le Var), l’objectif est d’attirer une population "à forte valeur ajoutée" et à l’inverse, de rejeter par tous les moyens ceux qui ne sont pas assez "couleur locale". De plus, pour obtenir une HLM vivable sur Nice, Cannes ou Grasse, il vaut mieux disposer d’un bon réseau, autrement c’est l’attente avec le dossier à refaire tous les ans et la promesse de se voir attribué un logement pourri dans une cité pourrie que l’on refusera, donnant ainsi à l’Office une bonne raison de ne rien proposer d’autre.

    Les offices HLM sont aujourd’hui aux mains de grosses multinationales, cela explique que certaines cités sont très mal entretenues (par des sociétés sous-traitantes) alors qu’avant il y avait une équipe de cantonniers salariés qui habitaient sur les lieux et connaissaient tout le monde, ainsi qu’un gardien salarié (retraité de la police ou de la gendarmerie) qui se chargeait d’aider à régler au mieux les petits différends entre locataires. A présent plus de gardien, plus de cantonnier, des déprédations, des sociétés de nettoyage en sous-traitance et d’énormes appels de charges qui, s’ajoutant à des loyers de moins en moins modérés, font qu’il n’est plus intéressant du tout de loger en HLM. 

    Pour en revenir à la côte d’azur, c’est une région de frime et d’arnaqueurs à la petite semaine où quand vous êtes pauvre, on vous le fait sentir à tout bout de champ. Nous avons vécu successivement à Nice, Cannes, Plan de Grasse, St Vallier, Gréolières et Caille, partout la même mentalité de faux nouveaux riches prodécuriers et profiteurs, le pognon et rien que le pognon, les 4X4, les petits proprios qui ont hérité, la spéculation sur des placards qualifiés de studettes, à côté de ça il n’y a rien de valable à faire de soi dans cette région le soir ou le week-end, alors on l’a quittée pour les Alpes-de Haute-Provence où c’est populaire et vivant, pas cher et sympa. Ici pas de barres ni de tours, les HLM sont de taille humaine, il y a un vrai brassage, sur la côte d’azur c’est que du ghetto, on stigmatise et on voit après ce que ça donne. Bref, depuis six mois on a l’impression d’être revenus à la vie.

    La côte d’azur il ne faut rien en espérer en dessous de 2500 euros de revenus mensuels. Les politicards roulent pour les retraités friqués, les classes moyennes aisées, les étrangers qui achètent de la pierre comme nous on achète un paquet de clopes. Les travailleurs, les petits retraités, les chômeurs, les pauvres ne les intéressent pas, ils les encombrent. Alors fuyons ces braves gens, puisque c’est ce qu’ils recherchent. Ils ont déjà du mal à trouver de la main d’oeuvre, ils n’en auront bientôt plus du tout.

    • La côte d’azur il ne faut rien en espérer en dessous de 2500 euros de revenus mensuels.

      80% de la population de la côte d’Azur gagne moins de 2200 euros par mois (cf les enquêtes de l’INSEE) dans une bande côtière où le logement est une énorme part des revenus.

      La Côte d’Azur est une monstruosité sociale bien camouflée derrière une réputation de fric. Seule une infime minorité spéculatrice, une étroite frange de petits patrons profite de l’économie de la spéculation et du tourisme.

      Le reste ce sont les affres galopantes des grandes villes méditerranéennes, Naples étant plus la destination réelle de ce type de développement que les fantasmes d’Estrosi, de la droite, de la bourgeoisie locale et de ceux qui viennent chercher un bronze-cul à l’abri du populo (fantasmes....).

      La question du logement c’est la question de la limite du droit de propriété, il faut des HLM pour l’écrasante majorité de la population, limiter le droit de propriété afin que , dans une premier temps, il ne soit pas qu’un droit à sépculation, un droit qui exclue et fait habiter dans des soupirails , transforment des studios en 3 pièces-placards.

      Sarko est pour la tolérance zero, sauf pour ses potes, sa rolex, ses émoluments....

      Les lois sur le logement social doivent être impératives et inflexibles, l’état se substituer à ceux qui récalcitrent en faisant du logement social dans les centres villes et les fronts de mer.

      Plus loin, ce n’est pas seulement le logement social qui pose problème sur la côte, c’est un fil qu’il faut tirer pour en démêler tout le tricot : Les transports et les liaisons sont de même logique que le logement social , malingres .

      C’est également un développement économique insoutenable qui n,e devrait pas exister : On ne fait pas d’une activité touristique et résidentielle l’activité principale d’une grande agglomération contingentée sévèrement par la nature (montagne, littoral, etc).

      Le tout tourisme ne nourrit pas la population qui va de San Remo à l’Esterel , il appauvrit, il ne permet pas le partage .

    • Tu as raison Copas, mais le problème ne date pas d’hier. C’est en refusant dans l’après-guerre l’implantation d’industries sur la côte, par peur de voir se développer une culture populaire (et le spectre du communisme !...), que Jean Médecin, le père de l’autre, a donné à cette région la vocation qui est devenue la sienne. Le tourisme, rien que le tourisme, rien d’autre que ce qui tourne autour du tourisme. De là vient pour une grande part la mentalité de frime des autochtones. L’argent facile né de la bulle immobilière n’a fait qu’aggraver les choses. Entre temps il y a eu des époques où se sont manifestées, de la part de la population, de vraies envies de voir les choses bouger. Il y a eu une gauche active sur Nice et sur Grasse, il y a eu des militants d’un charisme comme on n’ose même plus en rêver aujourd’hui (je pense à Virgile Barel et Charles Caressa) mais pour prendre l’exemple de Grasse, ville que je connais bien, la gauche, qui était bien implantée, a tout gâché par des pratiques de copinages qui sont allées verser de l’eau au moulin de la vieille droite locale (pistons administratifs, postes "à la carte" ou contre services rendus, petites planques fabriquées de toutes pièces, HLM à deux vitesses, les bas-quartiers pour les sans-grade, les cités sur les hauteurs, tranquilles avec vue sur la mer pour les copains des copains de ceux qui étaient aux manettes, directeurs d’école et de MJC, profs, responsables de la radio libre locale financée par la CGT...).

      Il y a dans cette région un tel esprit de magouille et une telle facilité à échapper à la justice (les réseaux sont puissants et influents) que je ne vois pas les choses évoluer avant longtemps. Il y a un constant vieillissement de l’électorat et par conséquent des élus, il y a des fiefs bien implantés dans l’arrière-pays notamment, qui eux aussi se maintiennent par la distribution de petits avantages, et la mise en place des communautés de communes n’a fait que renforcer un système déjà inébranlable.

      La côte d’azur est un véritable enfer social. Il n’y a qu’à voir l’état d’abandon où se trouvent des quartiers comme Bon-Voyage, les Moulins, l’Ariane sur Nice, la Blaquière sur Grasse, le Ranchito sur Cannes, pour ne prendre que ces exemples. Les jeunes n’ont rien, n’ont accès à rien, il y a une omniprésence de la flicaille, jusque dans les bureaux de la CAF ils emploient des vigiles. C’est dire le climat. Un bronze-cul pour zombies friqués, où le pauvre, où l’ouvrier, où le petit retraité n’a plus sa place. Dans ce cas il vaut mieux s’en aller, et je conseille vraiment à tous ceux qui en ont marre de galérer dans cette Sicile française de sauter le pas. Déjà, tu t’éloignes d’une petite centaine de kilomètres, tu vois le prix des loyers, des restaus, de la nourriture, tu commences à comprendre. Tu ressens un véritable contraste sitôt que tu passes Castellane. A Digne, à Manosque, à Gap tu as le soleil et c’est nettement plus cool et tellement plus vivant. Et en plus c’est resté beau. Le littoral de Menton à St Raph n’est plus qu’un chapelet de verrues, et l’arrière-pays une grande banlieue pour beaufs.

    • L’écrasante majorité de la population est populaire et à bas revenus.

      C’est l’aspect méconnu de la Côte pour ceux qui ne la voient qu’au travers de la télé et des magazines.

      Cette écrasante majorité ne partira pas et elle commence à être une bombe placée sous l’ensemble de cette agglomération. Les tensions vont continuer de s’accumuler.

      De + le tourisme, si il est le quasi-unique objet de préoccupation des municipalités de droite qui contrôlent en grande partie la côte ne nourrit pas cette population et cette politique économique quasi-tout-tourisme vient en percussion avec les autres centres qui amènent des richesses : Sophia-Antipolis, et Monaco (qui vient de franchir ses 47 000 salariés pour 25 à 30 000 habitants).

      Les industries dites à haute valeur ajoutée rapportent un fric énorme (même si les temps sont plus durs), des salaires + convenables et stables que ceux issus du tourisme, une infiniment moindre empreinte foncière (par rapport au fric rapporté), que le tout toutou.

      De + il faut porter un regard plus large englobant la partie italienne dite de la Riviera, qui a des échanges intenses avec la côte française, commence à installer des hypermarchés low cost , subit de plein fouet la contamination spéculative et l’augmentation des prix.

      Les soubresauts des installations sanitaires , hôpitaux et autres établissements de santé, sont confrontés également aux ravages des politiques sarko-chiraco-jospinistes qui ont eu lieu ses dernières 10 ans de démantèlement , de privatisation, d’alignement progressif sur des méthodes comptables à l’américaine et à l’anglaise (dont on connait le formidable succès en matière de santé publique et de couts) . Rien de particulier sauf que ça se fait dans un univers urbain, passé le front de mer, qui commence à être dévasté et à genoux.

      Tous les hôpitaux de la côte d’Azur sont menacés, soit par des licenciements, soit par des fermetures partielles ou totales, et la partie italienne subit les mêmes pressions, confrontée aux frères de lait ultra-libéraux de gauche ou de droite.

      On en finirait pas de lister une agglomération qui , à bien des égards, préfigure l’impasse du capitalisme ultra-libéral sur tous les segments d’une société : inégalités explosives, bétonnage, destruction de la nature, artificialisation de la nature, problèmes de logement de transport inextricables, orientation économique intenable sur tous les points....

      Des secousses sociales commencent à poindre (les batailles de la zone de lingostière, les grèves et manifs toujours imposantes à Monaco, la rebellion du CHU de Nice qui a fait reculer Estrosi, etc).

      La gauche semble peiner à donner un sens et cœur à l’ouvrage à ces balbutiements, enfermés qu’elle est dans une logique de développement demeurant sur une logique de tout-tourisme, demeurant sur une logique anti-décroissance, demeurant sur une logique qui renvoie systématiquement à des illusions électoralistes au travers d’alliances de plus en plus douteuses avec des parties de plus en plus conséquentes de la droite .

      Aider cette gauche évanescente à cesser de regarder vers les 20% qui tondent la côte et l’aider à se tourner vers les 80% populaires, éventuellement changer de gauche , du moins ne pas attendre les divas de la nomenclatura et des notables, appeler tous ceux qui se révoltent et ne se satisfont pas du règne égoïste et prédateur d’une bourgeoisie petite, pousser à l’unité contrôlée par les travailleurs en lutte, systématiquement dans les batailles sociales, préparer l’extension radicale de la démocratie sur le terrain économique, mettre en cause les choix de développement comme autant de revendications populaires, etc,

      etc,

      C’est à ça que j’appelle pour la Côte.

      Copas

    • Très très bien vu COPAS.Le "sudiste" que je suis te dit merci !

      Fraternellement LE REBOURSIER