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MAROC : Rapport annuel de l’AMDH sur la situation des droits humains au Maroc durant l’année 2004.

Publie le mardi 23 août 2005 par Open-Publishing

(Résumé du rapport annuel de l’AMDH)

Présentation :
Ce rapport, qui est présenté par l’AMDH sur la situation des droits de l’Homme au Maroc durant l’année 2004, est le dixième rapport de son genre.
Même s’il ne prétend pas couvrir toutes les violations du pays durant l’année 2004, il peut fournir une idée sur le respect de l’Etat marocain de ses engagements dans le domaine de la préservation des droits, des libertés, et de leur promotion.
L’aspect le plus inquiétant qui a été observé au niveau des droits civils et politiques réside, essentiellement, dans la continuité des violations dans le domaine du droit à la vie, de l’intégrité physique et de la sûreté personnelle, dans la mesure où l’AMDH a recensé trois cas de décès dans des centres de police.
De même, les services de l’Etat ont continué à recourir à l’enlèvement, et le phénomène des arrestations pour des motifs politiques a continué à sévir (31 cas de détenus politiques ont été recensés durant l’année 2004). Les normes internationales dans le domaine pénitentiaire et carcéral ne sont pas respectées, et le système judiciaire ne constitue toujours pas un pouvoir indépendant et efficace, afin de garantir la justice, l’égalité, l’équité et la souveraineté du droit.
Les libertés publiques connaissent une dégradation due à la répression par la force des manifestations pacifiques et aux limites imposées à la liberté de pensée et à la liberté d’expression.
Le droit à la libre circulation est aussi sujet à des violations et à des restrictions comme la privation et le non octroi des passeports, ou l’interdiction de quitter le territoire national : c’est ainsi que d’anciens détenus et exilés politiques sont soumis aux harcèlements et à des mesures arbitraires aux postes frontières.
Au niveau des droits socio-économiques et culturels, le Maroc demeure très mal classé, en référence aux rapports internationaux dans le domaine, aux indices du développement qui montrent clairement la dégradation de la situation de la majorité des citoyens et des citoyennes tant au niveau des carences en infrastructures de base comme l’eau potable, l’électricité, les routes et les établissements scolaires, qu’au niveau du chômage, des conditions précaires du travail, de la faiblesse des revenus et du pouvoir d’achat. Tous ces éléments et ces indices font que le Maroc est encore loin de réaliser les objectifs du millénaire pour le développement prévus pour 2015.
L’Etat tente de justifier les carences sociaux économiques en alléguant des contraintes financières et la nécessité de maintenir les équilibres macro-économiques ; en fait les raisons résident essentiellement dans le détournement et le pillage de l’argent public sans que l’Etat n’intervienne pour arrêter l’anarchie au niveau de la gestion, et sans qu’il manifeste une vraie volonté pour combattre l’impunité qui continue à sévir.
Le rapport de l’année 2004 a repris le plan des précédents rapports établis par l’AMDH ; ce plan, rappelons-le traite des droits civils et politiques, des droits économiques, sociaux et culturels et enfin de droits spécifiques.

I- LES DROITS CIVILS ET POLITIQUES :

1)Le droit à la vie :
Malgré les efforts que les autorités marocaines prétendent accomplir pour garantir et préserver les droits de l’Homme, les réclamations parvenues à l’AMDH cette année démontrent que les violations concernant l’atteinte au droit à la vie continuent à sévir. C’est ainsi que l’AMDH a enregistré cette année trois cas de décès dans les cellules ou les centres des autorités ; s’ajoutent à ces cas les décès dans les prisons et ceux consécutifs au manque de soins et à l’absence de mesures efficaces de protection contre la criminalité comme le cas des huit enfants dont on a retrouvé les dépouilles le 20 août 2004 à Taroudant ; c’est ainsi que durant quatre années des enfants ont été massacrés par un individu sans que les autorités n’entreprennent les investigations nécessaires et ne prennent en considération les plaintes des familles des enfants victimes.
Par ailleurs, les tribunaux marocains continuent de prononcer des peines de mort dans leurs sentences et leurs verdicts.

2)Le droit à la sûreté physique et personnelle et l’interdiction de la torture :
Les violations consistent dans les agressions auxquelles sont exposés les citoyens de la part des agents d’autorité ou des forces de l’ordre quand ces citoyens sont appréhendés par des patrouilles de police ou durant les interrogatoires ; par ailleurs, la répression brutale devient le lot quotidien des chômeurs et étudiants dans le but de les dissuader d’organiser des sit-in et des manifestations en vue de revendiquer leurs droits ; cette répression s’accomplit au vu et su de tout le 3)L’abus de pouvoir :
Les abus de pouvoir représentent des violations au sujet desquelles l’AMDH reçoit le plus grand nombre de réclamations ; elle consistent en général dans des humiliations auxquelles sont exposés les citoyens de la part des agents d’autorité, dans le refus de leur délivrer certains documents administratifs et également dans des arrestations arbitraires.
Les revendications de l’AMDH concernant ces droits se résument comme suit :
 Abolition de la peine de mort de la législation marocaine comme un premier pas urgent et transformation de cette mesure en des peines limitées d’emprisonnement.
 Cessation du recours à la torture et à la violence exercée par les forces de l’ordre, la gendarmerie, les gardiens des prisons ainsi que par les autres services de l’Etat et la proclamation urgente d’une législation condamnant la torture ; celle-ci doit être en conformité avec la convention internationale contre la torture
 Amendement de la procédure pénale et des conditions de la garde à vue dans le sens de garantir aux détenus la visite de leur avocat, d’assurer une surveillance des lieux de détention et de réduire la durée de la garde à vue.
 divulgation de la vérité entière sur les cas de décès dans les centres des autorités et engagement des poursuites judiciaires qui s’imposent.
 Ouverture d’une enquête sur les violations perpétrées dans le centre de la direction de la sécurité du territoire (DST) de Temara, et doter le parlement et le gouvernement de toutes les attributions et les compétences pour superviser et contrôler tous les services sécuritaires

4) l’incarcération et l’emprisonnement pour des motifs politiques,
Après l’amnistie de 2004, les instances officielles ont déclaré que ce dossier est clos à jamais ; au même moment les faits démentaient ces allégations ; ceci a amené le bureau central de l’AMDH à s’exprimer dans un communiqué daté du 18/01/2004 où il enregistre l’exclusion d’un certain nombre de détenus politiques de l’amnistie du mois de janvier 2004, ce qui laisse le dossier de l’emprisonnement pour des motifs politiques ouvert ; par ailleurs, l’AMDH a revendiqué la libération de tous les détenus politiques encore emprisonnés.
Dans sa délimitation de la définition du prisonnier politique, l’AMDH a écarté tout détenu ayant usé de la violence ou qui a fait appel à l’emploi de la violence, tout en exigeant le respect des normes juridiques vis à vis de ceux qui ont usé de la violence ou qui ont fait appel à son emploi ;l’AMDH a également réclamé la mise en oeuvre de conditions d’un procès juste et équitable.
En ce qui concerne le nombre des prisonniers politiques, l’AMDH a dénombré 31cas durant l’année 2004, tout en précisant qu’elle n’a pu réunir tous les renseignements sur des détenus Sahraouis ou ceux appartenant au mouvement Al Adl Walihssane.
Les principales revendications de l’AMDH dans ce domaine sont les suivants :
La libération de tous les prisonniers politiques pour mettre fin définitivement à ce dossier.
La révision des procès de ce qu’on a appelé Assalafia Aljihadia ou leur libération par une amnistie royale.
Un règlement juste définitif de la situation des détenus politique libérés.

5) L’enlèvement :
L’enlèvement a été considéré comme un crime grave à l’encontre des droits de l’Homme ; pour cette raison la communauté internationale l’a classé parmi les violations graves des droits de l’Homme comme elle a été unanime à s’y opposer en rédigeant la déclaration des Nations Unis pour la protection des personnes contre l’enlèvement forcé le 18/12/1992.
Les instances internationales qui travaillent dans le domaine des droits de l’Homme, et devant la persistance de ce phénomène, ont voulu rédiger une convention qui engage les nations à lutter efficacement contre l’enlèvement avec l’obligation et le devoir de rendre des comptes devant les commissions des droits de l’Homme aux Nations Unis.
Le Maroc a été parmi les pays qui ont connu le phénomène de l’enlèvement depuis 1956 même si le code pénal a prévu de lourdes sanctions à l’encontre de ses auteurs ; l’enlèvement a toujours visé les opposants politiques dans le but de les contraindre au silence, d’affaiblir l’opposition et de semer la terreur chez les citoyens et les citoyennes afin de les dissuader
d’ adhérer à des partis politiques ou à s’intéresser à l’intérêt public.
Cette pratique criminalisée, tant au niveau national qu’international, a connu une régression pendant les années 90 du siècle précédent, au point que les marocains ont cru qu’ils ne revivront plus l’expérience des années 50, 60, 70 et 80, mais les nouvelles donnes du 11 septembre aux Etats Unis ont contribué considérablement au retour à l’enlèvement. Au MAROC , la recrudescence des enlèvements a repris en 2002( plus précisément quand les autorités ont annoncé le démantèlement de ce qu’ils ont nommé la cellule dormante d’Elkaida).Les enlèvements ont persisté durant toute l’année pour s’étendre au réseau de ce qu’on a appelé Assalafia Al jihadia.
Les événements terroristes du 16 mai 2003 à Casablanca ont donné lieu à une recrudescence et à une aggravation de l’enlèvement ; des milliers de séquestrés qui ont été victimes de cette campagne ont déclaré avoir passé des périodes, plus ou moins longues, de détention illégale dans les centres de la direction de la sûreté du territoire (DST), et surtout dans son siège central à Temara, près de Rabat.
Et même si l’année 2004 qui est l’objet de ce rapport, a connu un recul du phénomène de l’enlèvement, les personnes poursuivies devant des tribunaux pendant cette année, en vertu de la loi de la lutte contre le terrorisme, ont déclaré avoir été enlevés, et torturés dans les centre de Temara de la DST ; parmi ces victimes il y’a des cas qui ont été recensés par l’AMDH en 2004 mais également des cas qui ne lui sont parvenus qu’en 2004. Tout en sachant que l’AMDH a régulièrement publié dans ses rapports précédents tous les cas d’enlèvement, dont elle a été avisée.

6) La situation des prisonniers dans les prisons :
a connu une dégradation considérable, liée d’une part aux problèmes et aux violations précédemment cités, et d’autre part à la situation des prisonniers qui ont été appelés Assalafia Aljihadida à la suite des événements terroristes du 16 mai 2003.

7) Système judiciaire et tribunaux :
après avoir rappelé l’importance de ces instances pour la garantie des droits et des libertés, le rapport a souligné la nécessité de leur indépendance, tant au niveau matériel que moral ;la necessité de les doter des moyens nécessaires, et de leur conférer des compétences constitutionnelles et juridiques, en conformité avec les traités internationaux des droits de l’Homme.
En faisant référence aux rapports des années 2000, 2001, 2003, cette partie du rapport tente d’abord d’attirer l’attention sur l’importance accordée par l’AMDH à ce domaine dans ses précédents congrès, et notamment le dernier.
En effet on doit souligner que le système judiciaire n’a connu aucune amélioration, et que toutes les insuffisances signalées dans les précédents rapports continuent d’exister à cause
d’obstacles multiples.
Le rapport a ainsi constaté que le domaine judiciaire n’est toujours pas indépendant ;qu’il reste toujours tributaire des intérêts de certaines catégories, tout en n’étant pas capable de réaliser l’équité et la justice.
L’AMDH a noté avec satisfaction la dissolution de la cour spéciale de justice et le transfert du projet de la haute cour devant le parlement malgré les lacunes qu’il comporte.
Mais l’AMDH a exprimé sa vive inquiétude face à la poursuite engagée contre deux juges pacqu’ils ont, tout simplement, exercé leur droit légitime à la liberté de pensée, et à la liberté d’expression sur les insuffisances du système judiciaire marocain et son manque d’indépendance.
D’autre part, tout en considérant l’avènement du nouveau code de la famille comme une relative avancée par rapport au code précédent, l’AMDH a dénoncé la faiblesse, l’incapacité et la lenteur qui caractérisent les instances judiciaires dans la mise en application de ce code
En même temps, le rapport a évoqué les procès de ce qui a été nommé " Assalafia Al jihadia "que ce soit durant la période de jugement à "la cour d’appel " ou durant l’emprisonnement des détenus.

8) Les libertés publiques :
En ce qui concerne les libertés publiques au Maroc durant l’année 2004, il a été rappelé que l’AMDH avait établi une analyse détaillée sur les libertés publiques au Maroc à travers le rapport parallèle, présenté devant la commission des droits de l’Homme à Genève le 25 octobre 2004, à l’occasion de la présentation du rapport du gouvernement marocain sur le respect du traité international sur les droits civils et politiques depuis l’année 1999.
En analysant les mécanismes de ce traité, le ministre de la justice avait déclaré dans son allocution du 15 Mars 2005 devant la commission des droits de l’Homme dans sa 61ème session à Genève que le Maroc a décidé d’adhérer au protocole facultatif annexé au traité, ce qui va contribuer à apporter d’autres dispositifs dans le domaine de la protection des droits de l’Homme au MAROC.
Si les rassemblements publics, les associations, la presse et les média sont des moyens qui facilitent aux individus et aux groupes l’exercice de la liberté d’expression, il n’en demeure pas moins qu’il faut préserver ce droit à l’exercice de cette liberté en respectant le droit des individus à s’exprimer ou à fonder leurs propres supports d’information.
Durant l’année 2004, l’AMDH a constaté plusieurs violations qui ont porté atteinte aux libertés publiques et qui s’ajoutent aux insuffisances des textes juridiques qui ont prévu des sanctions touchant la liberté individuelle comme dans les cas des infractions se rapportant à la liberté d’expression.
Le système judiciaire a été parmi les moyens utilisés pour réprimer la liberté d’expression, en statuant sur des dossiers concernant " l’offense du sacré ", contre des individus et des groupes dont l’unique but était de les ramener au silence et de restreindre leur liberté à s’exprimer, ce qui a amené l’AMDH à mettre en garde contre cette tendance dans plusieurs communiqués du bureau central, et notamment celui du 29/06/2004.
Ces violations présentaient des particularités parmi lesquelles on peut citer :
Ce sont des violations qui touchent des groupes humains appartenant à la même catégorie socioprofessionnelle déjà victime d’autres exactions socio-économiques( c’est ce qui a été observé pour certains groupes de protestataires)
Les violations qui touchent les libertés publiques sont étroitement liées à d’autres exactions comme le recours à la violence contre les groupes de protestataires (les chômeurs diplômés, les fonctionnaires, les non voyants ou les handicapés...) ce qui porte atteinte à leur intégrité physique, et à leur sécurité personnelle, suite aux violences, aux blessures....
Les responsables administratifs auxquels L’AMDH adresse ses réclamations et ses plaintes au sujet de ces violations, continuent de les ignorer ce qui contribue à les isoler par rapport aux préoccupations des citoyens comme si les exactions commises par les forces publique ne devraient pas être soumises aux requêtes et ne méritaient pas l’ouverture d’une enquête officielle !!Et, quel que soit l’argument pour justifier ce silence officiel, en ce qui concerne les exactions commises, cela peut être considéré comme un encouragement implicite à perpétuer et à poursuivre ces violations.
Concernant la liberté de fonder les associations, les violations qui sont parvenues à l’AMDH démontrent une grande marge d’interprétation chez autorités publiques qui reçoivent les dossiers légaux pour fonder les associations ou renouveler leurs structures. Ainsi, dans certaines provinces les autorités publiques exigent des associations des documents qui les surchargent, en réclamant également le fichier des antécédents judiciaires ce qui va à l’encontre de l’article 5 du dahir sur la création des associations, modifié le 23 juillet 2002 ; en effet, l’exigence de ce document peut être justifiée dans le cas des étrangers, étant donné que les autorités marocaines ne peuvent pas accéder à des données les concernant mais pour les citoyens marocains, les autorités peuvent accéder à leurs fichiers des antécédent à travers le numéro de la carte nationale. L’année 2004 a connu une large application erronée de l’article 5 dans les provinces du Maroc, et notamment par les autorités de La wilaya de Rabat.
Cette tendance peut être considérée comme une exacerbation des mesures oppressives contre les libertés publiques, au moment où l’on s’attendait à lever les anciens obstacles qui étaient l’objet de plusieurs critiques de la part des activistes des droits de l’Homme.

9) la liberté de circulation :
Le rapport considère la liberté de circulation parmi les droits essentiels institués par la déclaration internationale des droits de l’Homme dans les articles 13 et 14 ; ce droit est également stipulé dans l’article 12 du traité international des droits civils et politiques. L’AMDH a suivi depuis sa création les violations qui se rapportent à ce droit, en adressant des correspondances aux responsables, et en organisant des colloques, des campagnes et en soutenant les victimes de ces violations durant toutes les procédures et les démarches qu’ils entreprennent, y compris l’engagement d’une procédure judiciaire.
Grâce à ces efforts, il a été possible de réaliser certains acquis qui consistent dans l’obtention des passeports par des anciens disparus ou prisonniers politiques.
De même que l’association avait recensé dans son rapport annuel de 2003 plusieurs violations qui ont porté atteinte à ce droit, et elle a effectuée plusieurs démarches, et on peut noter que certains cas ont été réglés mais la majorité sont demeurés sans réponse.
Malgré les divers cas qui ont été réglés, et dont il a été question dans nos rapports précédents, et malgré l’avancée relative dans ce domaine, la liberté de circulation subit encore des contraintes qui résident dans les aspects suivants :
 le refus de délivrer les passeports
L’AMDH a reçu à ce sujet un nombre important de réclamations et, malgré les démarches entreprises par l’association, un seul cas a été résolu. Pour tous les autres cas, l’AMDH n’a reçu aucune réponse.
 Les mesures arbitraires de la police des frontières
Nous avons constaté durant l’année 2004 des mesures oppressives à l’encontre des anciens prisonniers politiques, des anciens exilés, et des activistes des droits de l’Homme. Ces tracasseries ont constituées un sujet de préoccupation majeure non seulement pour les associations des droits de l’Homme mais aussi pour l’instance Equité et Réconciliation ; c’est ainsi que des réunions ont eu lieu avec des responsables du ministère de l’intérieur, du ministère de la justice, auxquelles ont assistés les associations des droits de l’Homme ( Forum Marocain pour la Vérité et la Justice, l’OMDH, l’AMDH , des représentants des exilés, ainsi que l’IER) ; ces contacts ont abouti à l’ engagement officiel d’entreprendre des mesures pour supprimer toutes les données dans les postes frontaliers concernant les anciennes victimes de l’exil, de l’enlèvement ou de l’emprisonnement politique.
 La non délivrance des visas.
L’AMDH a également reçu des réclamations concernant des pratiques dégradantes auxquelles sont exposés des citoyens devant les chancelleries étrangères ainsi que les refus de délivrer des visas sans aucune justification valable.

10) Les violations graves des droits de l’Homme au Maroc
Depuis l’année 1956, le Maroc est passé par des périodes sombres qui se sont caractérisées par des violations flagrantes des droits de l’Homme, qualifiées d’exactions graves. Parmi ces violations graves on peut citer : les disparitions forcées, les arrestations arbitraires, les assassinats et la torture entraînant la mort ou des séquelles physiques et psychologiques permanentes, les exécutions hors de la loi, les procès injustes, l’exil et la déportation forcée, le bannissement et l’isolement... qui ont eu lieu lors des événements politiques et des manifestations sociales.... Ces violations constituent des crimes contre l’humanité.
Malgré les changements intervenus grâce au militantisme des victimes de la répression, des instances politiques et démocratiques, du mouvement des droits de l’Homme national et international, mais aussi grâce à l’évolution du contexte international de l’après " guerre froide" vers la fin des années 80 et qui a contribué à la libération des prisonniers politiques (mais pas de tous les prisonniers politiques), à la création du conseil consultatif des droits de l’Homme et du ministère des droits de l’Homme, et au retrait du Maroc de ses réserves sur certains articles des traités internationaux des droits de l’Homme etc., les violations se sont poursuivies jusqu’a présent. Ces violations graves des droits de l’Homme se sont même intensifiées après le 11 septembre 2001, et ont connu leur apogée avec les événements du 16 mai 2003, et l’adoption de la loi anti-terroriste. Les exactions qui ont été recensées à ce sujet, et qui sont en contradiction flagrante avec les traités des droits de l’Homme (la déclaration internationale des droits de l’Homme, la convention internationale des droits civils et politiques, l’accord contre la torture et toutes les formes de traitements inhumains et dégradants,....) sont comme suit :
Le non respect de la présomption d’innocence
Les arrestations arbitraires, et les enlèvements qui ont touché des centaines de victimes
Le dépassement de la durée fixée à la garde à vue et la falsification de la date de l’arrestation pour prolonger les interrogatoires
Les motifs des arrestations n’ont pas été communiqués aux suspects, ainsi que leurs droits comme le prévoit la loi.
Les interrogatoires ont eu lieu dans les centres de la direction de sécurité du territoire (DST) au lieu de ceux de la police judiciaire
Les familles des suspects n’ont pas été prévenues ; dans le cas des suicidaires du 16 mai 2003, les familles ont subi les arrestations et les enlèvements sans connaître les raisons
Les suspects ont été torturés et mal traités
L’atteinte au principe du droit à la défense
L’atteinte au principe des procès publics car les mesures draconiennes de sécurité ont privé même les familles de suivre la majorité des jugements

L’initiative qui a été prise par les anciennes victimes de la répression politique pour fonder "le forum pour la vérité et la justice", a poussé l’Etat marocain en 1999 à entreprendre des mesures afin de tourner la page du passé, et notamment la création de la commission indépendante pour indemniser les victimes des disparitions forcées et des arrestations arbitraires...
Pour sa part, L’AMDH a contribué à suivre et à recenser les violations, en soutenant les victimes ; elle a subi des pressions, voire ses militants ont été arrêtés, et ses activités ont été soumises aux pressions, à des campagnes de désinformation. En même temps, l’apport de l’AMDH a été capital dans l’organisation du colloque national sur les violations graves des droits de l’Homme au Maroc qui a abouti à la formation d’une commission de suivi, constituée de l’AMDH, de l’OMDH, et du FVJ. Parmi les résultats les plus importants, figurait l’élaboration d’une plate forme avancée sur la résolution des violations graves des droits de l’Homme au Maroc ;la plate forme comportait entre autres les revendications suivantes :
La révélation de la vérité concernant les violations graves des droits de l’Homme durant les dernières décennies
La reconnaissance par l’Etat de sa responsabilité, et la présentation d’excuses officielles et publiques
La réhabilitation de la société et la préservation de la mémoire
La réhabilitation des victimes, y compris la réparation du préjudice, et le dédommagement matériel et moral
Entreprendre des réformes judiciaires et institutionnelles afin d’éviter le retour à ces pratiques dans l’avenir
Devant l’ascension du militantisme des victimes, du mouvement des droits de l’Homme et des forces démocratiques, qui n’étaient pas convaincus par les mesures prises par l’Etat, ce dernier a procédé à la création de " l’instance équité et réconciliation". Mais même si le dossier des graves violations a été ouvert une nouvelle fois, le mouvement des droits de l’Homme n’y a pas été associé et ses recommandations n’ont pas été prises en considération, et notamment la constitution de la commission nationale pour la vérité. Par ailleurs, le mouvement des droits humains a enregistré le non respect des engagements, de nombreux points de discorde, l’absence d’indépendance de l’IER, et surtout la poursuite des violations, ce qui a laissé cette instance sans crédibilité.
Devant cette situation malsaine, l’AMDH proclame, que l’essentiel en ce qui concerne les violations graves des droits de l’Homme liées à la répression politique, réside dans la révélation de la vérité, toute la vérité avec toutes les implications qui en résultent comme la désignation des responsabilités individuelles et collectives, l’engagement de requêtes, l’abrogation de l’impunité ; l’AMDH reste déterminée à continuer de travailler avec ses alliés dans la commission de suivi des recommandations du colloque national sur les exactions graves, et d’accompagner de manière critique le travail de " l’instance équité et réconciliation". En même temps, elle demande en particulier le respect des engagements par l’IER comme ceux relatives aux séances d’écoute publiques qui devaient être transmises par la radio et la télévision pour associer l’opinion publique à ce dossier déterminant, avec impartialité et loin des demies mesures.
L’AMDH a constaté par ailleurs que les arrestations opérées dans le cadre de ce qui est appelé " Assalafia Aljihadia", se sont poursuivies dans le cadre de la lutte antiterroriste, avec toutes les violations graves qui les accompagnent comme l’absence de conditions d’un procès équitable, les peines lourdes et les verdicts injustes prononcés, dont ont été victimes un certain nombre d’individus, ce qui nécessite la révision de ces jugements. En même temps, l’AMDH confirme que cinq marocains qui étaient détenus dans la prison de Guantanamo ont été livrés aux autorités marocaines, qui les ont poursuivis devant la justice sans fournir des précisions sur d’autres marocains toujours captifs, ni sur les procédures nécessaires pour mettre fin à leur captivité...

II- LES DROITS ECONOMIQUES, SOCIAUX ET CULTURELS :

La seconde partie de ce rapport a été consacrée aux droits socio-économiques ; il a été rappelé notamment le classement du Maroc au 125ème rang en ce qui concerne l’indice du développement humain établi par le rapport mondial sur le développement humain de l’année 2004.
Cet indice prend en considération trois paramètres pour mesurer le niveau de développement de chaque pays :
 La durée de vie
 La formation
 Le revenu réel
Ce rapport est établi sur la base de données fournies par le programme des Nations unies au développement, sur les chiffres fournis par des secteurs gouvernementaux et sur ceux de recherches et d’ études entreprises par des experts.
Le classement du Maroc au 125ème rang confirme la dégradation de la situation socio-économique des citoyens et des citoyennes. Il ressort des données statistiques que, même si l’année 2004 a été la dernière année du plan gouvernemental pour la stratégie du développement humain et la lutte contre la pauvreté (2000-2004), la situation sociale a continué à se dégrader : le Maroc qui était classé au 117ème rang en 1997, se retrouve au 123ème rang en 2002, et au 126ème rang en 2003.
Plusieurs campagnes marocaines vivent dans l’isolement total sans infrastructures de base, comme l’eau potable, l’électricité, les routes et les établissementsscolaires bien que la population rurale représente plus de la moitié des habitants du Maroc, ce qui explique le taux élevé de la pauvreté dans les campagnes (70%).
Les aspects de la pauvreté et de la marginalisation se retrouvent également dans les zones urbaines qui connaissent une extension rapide. Aucune ville n’est épargnée par les quartiers marginalisés qui sont bâtis de manière anarchique et qui n’offrent pas les conditions d’une vie décente. Malgré leur proximité des centres urbains, ces quartiers souffrent d’un manque d’infrastructures nécessaires comme le réseau d’assainissement, les réseaux de l’électricité et de l’eau potable... ce manque d’infrastructures de base rend vulnérables les citoyennes et citoyens qui deviennent victimes d’ irrégularités et de pratiques illégales de la part des autorités locales ou de certains groupes d’intérêt.
En attendant la publication officielle du résultat du recensement national sur habitants et l’habitation de l’année 2004, les chiffres dont on dispose jusqu’à présent, et qui ont été actualisés démontrent que la pauvreté est en hausse constante, surtout dans le milieu rural où le taux des pauvres a doublé en l’espace de dix années.
La carte communale sur la répartition de la pauvreté qui a été établie par le haut commissariat à la planification en juin 2004, révèle des données très éloquentes :
Environ 6 millions d’habitants vivent dans une pauvreté totale, avec moins de 3923 dhs par an dans les villes et moins de 3037 dhs dans les campagnes.
Une large tranche de la population marocaine( 43% de la population totale), vit avec un revenu annuel de moins de 4500 dhs( 55% vit dans les campagnes, et 33% dans les villes). Plus de la moitié de cette catégorie de la population, selon les études les plus optimistes, vit dans une extrême pauvreté.
Ces chiffres démontrent de manière significative, la situation socioéconomique que l’AMDH suit à travers ses différentes sections, que ce soit à travers les usines qui ferment, les sit-in des chômeurs ou les marches des citoyens pour protester contre la marginalisation et les conditions précaires qu’ils endurent.
En même temps, le domaine social connaît de graves régressions. Le phénomène de l’analphabétisme demeure inquiétant sur le terrain, même si les chiffres montrent une apparente amélioration ; au moment où la lutte contre ce phénomène piétine, et connaît des insuffisances, des dizaines de milliers d’enfants ne peuvent pas accéder à la scolarisation, surtout dans le milieu rural, à cause de l’absence d’établissements scolaires ou à cause d’insuffisance de moyens. Par ailleurs, même si les chiffres officiels ont tendance à enregistrer une amélioration des inscriptions scolaires dans les campagnes, ils n’évoquent pas le phénomène de l’interruption de la scolarisation par les élèves, la surcharge des classes, et la qualité de l’enseignement.
En ce qui concerne le droit aux soins médicaux, il connaît une nette dégradation, et demeure loin des normes internationales dans ce domaine : en plus de la distribution déséquilibrée des cadres médicaux au niveau national( 44% des médecins se trouvent dans l’axe Casablanca-Rabat, avec un taux de 46 médecins spécialistes pour 100 mille habitants), le secteur de la santé connaît une dégradation qui réside dans plusieurs aspects :
L’accouchement et les mauvaises conditions où il se déroule pour le nourrisson et la mère.
La propagation des maladies infectieuses et contagieuses comme la méningite, le choléra, la tuberculose, l’hépatite, le sida..., dues au manque d’hygiène, à l’absence de l’éducation sanitaire, et à l’insuffisance des cadres et des moyens d’intervention d’urgence. Certains soins ou analyses médicales et radiologiques peuvent nécessiter des rendez vous qui durent des mois dans les CHU.

En général, les droits socio-économiques connaissent une dégradation à tous les niveaux : insuffisance du budget alloué à ce domaine social, mauvaise gestion, absence d’une stratégie qui répond aux besoins de la population et recul du pouvoir d’achat au point que les citoyens ne peuvent plus accéder à certains services sociaux.
Si le Maroc a été parmi les pays à s’engager à réaliser les objectifs du millénaire pour le développement dans la perspective de 2005, et qui consiste dans les aspects suivants :
1- Eradication de l’extrême pauvreté et de la famine.
2- Généralisation de l’enseignement
3- Consolidation de la parité et de l’égalité entre les sexes.
4- Abaissement du taux de mortalité chez les enfants
5- Amélioration de l’état de santé des mères.
6- Lutte contre le sida, la malaria, la tuberculose et d’autres maladies.
7- Préservation permanente de l’environnement.
8- Contribution à un partenariat mondial pour le développement.

les faits démontrent qu’il est impossible de réaliser ces objectifs dans la perspective de l’année 2005, au moment même où certains secteurs connaissent un net recul, et d’autres une amélioration quantitative aux dépens de la qualité.
Conclusion :
Tout en reconnaissant la dégradation de la situation socioéconomique, l’Etat marocain tente de se justifier en évoquant les équilibres macro-économiques, l’équilibre de la balance commerciale, la dette extérieure. Même si l’on concède que les raisons invoquées par l’Etat détiennent une importance, il n’en demeure pas moins que les véritables causes résident dans l’anarchie, la mauvaise gestion et le pillage et la dilapidation des deniers publics ; il suffit pour s’en convaincre de consulter les rapports établis par des organisations nationales et internationales comme TRANSPARENCY , l’ASSOCIATION POUR LA DEFENSE DES BIENS PUBLICS ...
Le discours sur la restructuration des établissements publics, la campagne d’assainissement, la mutation périodique des hauts fonctionnaires, demeurent des mesures formelles et insuffisantes en l’absence d’une politique claire et rigoureuse contre l’impunité et le pillage de l’argent public. En raison de leur caractère discriminatif et aléatoire les poursuites judiciaires à l’encontre de responsables inculpés dans des infractions économiques n’augurent en rien d’une politique ferme contre l’impunité.

III- LES DROITS SPECIFIQUES :

Les droits spécifiques concernent principalement les droits de la femme, de l’enfant, l’immigration et l’environnement.
1)les droits de la femme :
L’année 2004, a été marquée par les cinq aspects suivants :
La parution du nouveau code de la famille en février 2004.
La parution du nouveau code du travail, et sa mise en application
La persistance de la violence à l’égard des femmes.
La persistance de l’ETAT à ne pas ratifier la déclaration sur la nationalité de la femme mariée, et son obstination à émettre des réserves sur la déclaration contre toutes les formes de discrimination contre les femmes, en particulier certains articles.
L’exacerbation du chômage chez les femmes, et notamment parmi les diplômées ; ces dernières n’échappent pas à la violence exercée par les autorités publiques lors des manifestations.

Une année après la parution du nouveau code de la famille, les centres d’accueil des femmes victimes de la violence, les instances féminines et les associations des droits de l’Homme, ont constaté que certains aspects positifs de ce code ne sont toujours pas mis en application pour protéger la femme contre les discriminations au sein de la famille et de la société.
La parution du code du travail et sa mise en application juin 2004, et même s’il n’est pas conforme aux accords internationaux sur le travail, n’a pas été respecté par les employeurs.
Selon les rapports des syndicats, les réclamations dont dispose l’AMDH et d’autres instances, les employeurs refusent de se soumettre à cette loi dans leurs entreprises.
Même si la violence est toujours exercée contre les femmes, l’Etat marocain hésite toujours à prendre des mesures décisives dans ce domaine. On ne peut que déplorer l’absence d’une volonté politique, d’une vision claire et d’une véritable coordination avec la société civile pour mettre en œuvre un véritable plan de lutte contre la violence exercée contre les femmes.
Malgré les pressions exercées par les différentes associations féminines, et celles des droits de l’Homme pour rendre possible à la femme Marocaine, mariée à un étranger de pouvoir attribuer sa nationalité à ses enfants, plusieurs mères marocaines mariées à des étrangers, continuent de souffrir de l’absence de ce droit ; le MAROC se doit de ratifier l’accord sur la nationalité de la femme.
Malgré le chômage élevé chez les femmes en général, les femmes diplômées continuent de subir la violence et les assauts des forces de l’ordre lors des sit-in et des manifestations pour protester contre le chômage et la marginalisation, s’ajoutant ainsi à la discrimination sexiste dont souffrent les femmes à cause du recrutement favorisant les hommes.

2) Les droits de l’enfant :
En ce qui concerne les droits de l’enfant, L’AMDH a, depuis sa création le 24 juin 1979, accordé une importance particulière aux droits de l’enfant ; elle n’a pas cessé de déployer des efforts, seule ou avec l’appui de ses alliés dans les mouvements associatif et démocratique, afin d’amener l’Etat marocain à ratifier les accords sur les droits de l’enfant et d’harmoniser la loi marocaine avec les conventions internationales. En même temps, l’AMDH a essayé de diffuser la culture des droits de l’enfant, à travers ses différentes activités.
L’AMDH a également assisté les victimes des violations des droits de l’enfant à travers l’appui judiciaire (nomination d’avocats) ou en se proclamant partie civile, en publiant des rapports, et en offrant son soutien sur le plan médical, psychologique et social. Grâce au militantisme des associations des droits de l’Homme et du mouvement démocratique et féminin, l’année 2004 a connu des mesures positives au profit de l’enfant : comme l’âge du travail qui a été ramené à 15 ans, l’âge du mariage qui a été ramené à 18 ans, le nouveau code de la famille qui garantit des acquis favorables à l’enfant. Néanmoins, beaucoup d’enfants au Maroc sont privés de certains droits comme le droit à l’éducation, le droit à une vie décente, le droit à la culture et à la distraction. Malgré les dispositions législatives, les enfants sont exposés au travail intensif dans les usines, les fermes et les maisons. De même, le nombre d’enfants en difficulté ne cesse d’augmenter chaque année : en l’absence de centres d’accueil adaptés, ils deviennent victimes des pires violations comme la mendicité, l’analphabétisme, la consommation de la drogue ou les abus sexuels.
L’année 2004 a connu des crimes qui ont secoué l’opinion publique comme ceux de Taroudant, où 8 enfants ont été violés et décapités ; on a relevé également les cas de jeunes bonnes qui ont subi des tortures dans les maisons où elles travaillaient.
Les enfants subissent toutes les formes de privation, d’exploitation et de violence sexuelles, économiques et culturelles.

3) L’immigration clandestine :
En général, l’année 2004 a été marquée par une évolution qualitative et quantitative de l’immigration clandestine. Cette évolution traduit fortement l’inefficacité da la politique mise en œuvre par les ETATS marocain et espagnol pour lutter contre ce fléau.
L’approche sécuritaire, privilégiée par les deux rives, n’a pas seulement prouvé ses limites, mais elle a également favorisé la violation des accords internationaux relatifs aux droits de déplacement, d’exil, de nationalité, voire de la vie. Elle a encouragé également le recours des candidats à l’immigration à des méthodes illégales pour l’obtention de documents, sans pour autant nier la propagation de la falsification des papiers par les mafias de l’immigration.
En fait, le chômage et la marginalisation, en tant que phénomènes réels, constituent des facteurs majeurs favorisant l’immigration clandestine ; cette dernière commence, malheureusement, à intéresser les cadres, les fonctionnaires, les sportifs, et même les mineurs.
En vue de faire face à ce problème, qui ne cesse de prendre des dimensions considérables dans la région, les autorités marocaines ont fait de l’approche sécuritaire une réponse essentielle : mobilisation des ceintures de sécurité sur les deux rives, implantation des radars, etc. Tout ce dispositif sécuritaire a été réalisé avec le soutien du commissariat européen.
Parallèlement à ces efforts, purement sécuritaires, on souligne une absence totale des moyens destinés à sauver les vies des rescapés, ce qui a donné lieu à l’accroissement du nombre des morts et des disparus. Les statistiques suivantes sont assez éloquentes :
L’année 2001 : 120 entre morts et disparus.
L’année 2002 : 250 entre morts et disparus.
L’année 2003 : 400 entre morts et disparus.
L’année 2004 : 500 entre morts et disparus.
Quant au nombre d’arrestations, il a atteint 12255 cas.
La détérioration de la situation économique, caractérisée essentiellement, par les conséquences de la contrebande, la culture du cannabis, les problèmes de l’agriculture en général, prouvent que l’approche sécuritaire élaborée et adoptée par l’ETAT marocain a été vouée à l’échec.
Cette situation appelle donc à la nécessité de mettre en œuvre une politique de coopération réelle entre le Maroc et l’union européenne.
Parmi les données établies par le rapport sur ce même phénomène à l’est du Maroc, on trouve :
L’est du Maroc est un point de passage de l’immigration clandestine vers l’Europe, confirmé par les sources judiciaires, les documents et les données du terrain.
Et parmi les paradoxes et les remarques établis par le rapport, c’est que la majorité des immigrants des pays africains du sud du Sahara possèdent un niveau d’instruction satisfaisant.

Cette immigration peut être attribuée à différentes causes comme la fuite des conflits armés, l’instabilité intérieure, l’oppression, la tyrannie et la recherche des moyens de subsistance.
Les immigrants s’exposent aux périls et à la mort avant d’atteindre le Maroc, en marchant pendant des mois tout au long des lignes frontalières non surveillées avec l’Algérie, sans disposer ni de ressources ni d’aliments. Les immigrants vont s’établir au Maroc (quand ils réussissent à survivre à l’épuisement, à la famine, et à d’autres facteurs naturels et humains) dans des zones éloignées comme les forêts, sans disposer ni d’eau ni d’alimentation saine, et en survivant de la mendicité et des décharges, en l’absence des soins médicaux et dans des conditions psychologiques marquées par l’épuisement et la crainte d’être arrêtés par les autorités marocaines.
Dans les cas où ils sont arrêtés, leurs procès n’offrent pas les conditions d’un jugement équitable et juste durant les différentes étapes ; ils sont ensuite conduits aux frontières sans prendre en considération l’âge des trop jeunes, ni les conditions des femmes enceintes, abandonnés dans des conditions dégradantes sans ressources et exposés à tous les dangers. Dans la majorité des cas, ils vont recommencer leurs tentatives à l’immigration clandestine.
Q_ uel que soit le résultat de la tentative de l’immigration clandestine, la souffrance qui en résulte est infernale, et le Maroc demeure loin de l’application des accords internationaux qu’il a ratifié, surtout en l’absence quasi-totale d’une société civile active et solidaire.

4) l’environnement au Maroc.
Cette partie a pris comme point de départ, la notion d’une préservation durable de l’environnement, nécessaire pour un développement socioéconomique, et les accords ratifiés par le Maroc dans ce domaine. La dégradation de l’environnement au Maroc durant les dernières années n’est pas un simple obstacle devant le développement, mais elle est également à l’origine d’une perte de ressources considérables.
Les problèmes de l’environnement au Maroc sont nombreux et diversifiés, et se rapportent à tous les domaines : le patrimoine forestier, l’agriculture, la croissance démographique, l’absence de traitement des rejets, la pollution, le littoral...Les efforts déployés, tant au niveau institutionnel et juridique, que sur le plan de l’éducation et de l’information ne sont pas à la hauteur des attentes dans ce domaine. En même temps, il y’a l’insuffisance des moyens qui assurent la permanence et l’efficacité (des campagnes isolées et limitées) sans aucune coordination et sans mécanismes juridiques pratiques. En même temps, le rapport a fourni des chiffres concernant la situation actuelle et les problèmes qui en résultent :
Au niveau des ressources hydriques (urbain, industriel, et agricole, l’ensablement des barrages, et la salinité des nappes phréatiques)
Au niveau de l’érosion et de la désertification qui s’aggravent à cause de l’absence de mesures efficaces, d’une stratégie adéquate du gouvernement, et à cause de la pression démographique, et de la détérioration des pâturages, des forêts et de la salinité des terrains.
Au niveau de la pollution atmosphérique en abordant les causes et les conséquences.
Au niveau des rejets solides quelle que soit leur origine, domestique, industrielle ou médicale.
Au niveau de la désertification et de l’ensablement en abordant les causes, les dangers, et l’impuissance des pouvoirs publics face à ce phénomène.
Au niveau de la diversité écologique des milieux naturelles, et le non respect des accords ratifiés dans ce domaine par l’Etat.
Au niveau du littoral et des surfaces côtières, en évoquant la progression des constructions, la pollution des eaux, la surexploitation des ressources naturelles et la désertification.
La conclusion de cette partie met l’accent sur la nécessité de mécanismes de coordination, d’une approche réaliste et intégrée qui favorise la participation de tous les acteurs.

Conclusion :
Alors que l’AMDH espérait une amélioration de la situation des droits humains durant l’année 2004, elle n’a, malheureusement, enregistré que de graves violations aussi bien au niveau des droits civils et politiques qu’au niveau des droits économiques, sociaux et culturels.
Malgré ses déclarations répétées , ses engagements auprès des institutions internationales, l’ETAT marocain a violé plusieurs conventions sous prétexte de combattre le terrorisme et de maintenir la " paix sociale ". Les actions de l’ ETAT ont souvent été dictées par un souci sécuritaire au lieu du respect de la légalité et des droits humains. L’année 2004, n’a, par conséquent, pas rompu avec les pratiques antérieures.
Quelles sont les revendications de l’AMDH ? Elles demeurent les mêmes que par le passé :
Le respect de la légalité et du droit
L’harmonisation de la législation nationale avec les conventions internationales
L’application des textes de loi en vigueur
La lutte contre l’impunité en matière de crimes politiques et économiques
La liquidation juste et équitable du dossier des violations graves des droits humains conformément aux principes du droit international
La promotion d’une politique économique et sociale en conformité avec les pactes internationaux relatifs aux droits humains.
Il faut rappeler que l’AMDH reste persuadé que toute évolution passe nécessairement par l’établissement d’une constitution qui consacre la volonté populaire, qui instaure une véritable séparation des pouvoirs et qui a pour base le respect des droits humains tels que reconnus universellement.

P.S. _ Vous pouvez lire ce rapport sur le web de l’AMDH.
www.amdh.org

Repères :
AMDH (Assocaition Marocaine des Droits Humains) : ONG constituée en 1979 , Reconnue d’utilité publique,Vouée à la défense et la promotion des droits humains au Maroc,affiliée à la FIDH.
www.amdh.org.ma