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Maroc : un directeur de journal condamné à 1 an de prison ferme
Publie le jeudi 15 octobre 2009 par Open-PublishingLa pression monte encore d’un cran au Maroc. Le Makhzen, qui a déclenché il y a quelques semaine une nouvelle campagne de répression arbitraire à l’encontre de tout symptôme de "contestation" (médias, société civile), a condamné aujourd’hui le directeur de l’hebdomadaire arabophone Al Michaal à un an de prison ferme et 10 000DH d’amende. Idriss Chahtane a été reconnu coupable par le tribunal de Rabat de "délit de publication malintentionnée d’une fausse information, d’allégations et faits non véridiques". il a été mis sous écrou à l’issue du procès.
Deux journalistes du même journal, Rachid Mhamid et Mustapha Hirane, ont eux écopé d’une peine de trois mois de prison ferme et d’une amende de 5000DH chacun. Ils sont les auteurs de l’article incriminé ("Al Michaâl dévoile les raisons du communiqué du Palais au sujet de la maladie du roi qui a inquiété l’opinion publique"), au sujet de la maladie dont a souffert Mohammed VI fin août.
Un communiqué officiel du Palais Royal avait indiqué que le roi du Maroc était victime d’une obscure "infection au rotavirus", sans donner plus de précision. Quelques journaux arabophones ont tenté d’en savoir plus et se sont renseignés sur cette maladie. le quotidien Al Ayam a été le premier a sortir un article intitulé ""L’énigme de l’annonce, pour la première fois, par le palais d’un malaise de santé dont le souverain a été victime". Puis Al Michaal a sorti son article cité plus haut et Al Jarida Al Oula un troisième intitulé "la maladie du roi reporte les causeries religieuses et son déplacement à Casablanca".
Branle-bas de combat dans les hautes sphères makhzéniennes, le parquet demande une enquête, les directeurs de publication et journalistes sont arrêtés et interrogés pendant plusieurs jours. Aujourd’hui, trois journalistes marocains se retrouvent donc en prison, ce qui n’était pas arrivé depuis des années. Vive le "Maroc nouveau" démocratique...
Un autre procès est attendu lundi 19 octobre à Casablanca, celui du directeur du quotidien Akhbar Al Youm et du caricaturiste Khalid Gueddar, poursuivis pour "injure au drapeau national" après la publication fin septembre d’une caricature du cousin de Mohammed VI, le prince Moulay Ismail, pour le mariage de ce dernier avec une Allemande. Une moitié d’étoile de David sur fond de drapeau marocain et un bras tendu du prince avaient choqué en haut lieu...
Les bureaux du journal ont été arbitrairement fermé par le ministère de l’Intérieur, sans aucune décision de justice. Le recours intenté en référé par le journal a été rejetée hier par le tribunal administratif. Le procureur avait demandé que le tribunal se déclare "non-compétent"...
En prononçant aujourd’hui dans le procès Al Michaal une peine aussi lourde, la "justice" marocaine, ou plutôt ses commanditaires, entendent bien montrer aux journalistes marocains qu’il ne faut pas s’amuser avec le Makhzen - la MAP est là pour eux -et qu’il ne sera toléré aucun dépassement des fameuses lignes rouges que sont le Roi, l’Islam, et le Sahara. Le Makhzen sent que les médias grignotent peu à peu du terrain sur la liberté d’expression, mondialisation et nouvelles technologies obligent. Complétement dépassé, il choisit donc l’option qu’il connait le mieux et qu’il pratique avec grâce : taper le plus fort.