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Moeurs des "nouveaux français"

Publie le vendredi 26 mai 2006 par Open-Publishing
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Moeurs des "nouveaux français"
Christian DELARUE

La premiere partie n’est qu’une note résumant un chapitre d’un ouvrage pour la commission Genre d’ ATTAC ; la seconde la retranscription d’un débat ancien entre militants du MRAP et de NPNS (Ni pute ni soumise).

I. - « Femmes, mœurs et homosexualité »

Tel est le titre du chapitre 4 du livre « Français comme les autres ? Enquête sur les citoyens d’origine maghrébine, africaine et turque » publié aux éditions « Nouveaux débats » et écrit par Sylvain BROUARA et Vincent TIBERJ chercheurs au CEVIPOF.

*Les auteurs posent d’abord les questions suivantes : Ces citoyens « nouveaux français » sont-ils plus conservateurs en matière de mœurs et notamment à l’égard des femmes que les autres français ? S’agit-il de familles laxistes à l’égard de leurs enfants ? Thème des parents « dépassés ».

* De façon générale on constate d’une part une évolution vers une société moins autoritaire, plus respectueuse de l’individu dans sa différence mais d’autre part l’émergence d’un besoin d’un retour aux valeurs traditionnelles notamment discipline et autorité .

* De façon plus détaillée il est constaté que le niveau d’autoritarisme des français issus de l’immigration africaine et turque semble plutôt faible (indice peine de mort). Mais une moindre permissivité apparaît sur trois questions : l’homosexualité, la séparation des sexes dans les piscines et l’interdictions des relations sexuelles avant le mariage. L’homophobie est deux fois plus répandue chez les nouveaux français mais la tolérance vis à vis de l’homosexualité n’a progressé que récemment dans la société française.

En matière de mœurs sexuelles, la proportion de conservateurs fait plus que doubler parmi les français issus de l’immigration ; cependant il est abusif de penser qu’ils sont tous conservateurs ; tout comme on ne peut considérer que tous les Français sont permissifs. Les jeunes hommes français sont moins libéraux que les jeunes femmes françaises.

* La culture religieuse permet d’expliquer ces différences.

Les sans religions sont plus permissifs. Le niveau d’intolérance apparaît chez les croyants et monte avec la pratique religieuse, surtout pour les musulmans pratiquants . 70% des musulmans fréquentant les mosquée sont conservateurs . Et l’éloignement du moment de l’immigration n’atténue pas le niveau d’intolérance. L’éxogamie est largement rejetée mais le mariage mixte d’un fils plus toléré que celui d’une fille avec un non-musulman.

Les conservateurs musulmans sont pour le port du voile en opposition aux deux versant cités de la critique : oppression de la femme et laïcité.

 musulmans pratiquants : voile et femme : 90 ; voile et laïcité : 70

 musulmans peu ou pas pratiquants : voile et femme : 62 ; voile et laïcité : 65

 autres religions (toujours chez les conservateurs) voile et femme : 36 ; voile et laïcité 31

Les modérés musulmans pratiquants sont aussi pour le foulard : 60 alors que le chiffre autre religion ou sans religion est de 27 sur argument « femme » et 21 sur argument « laïcité » et souvent pour des raisons de « multiculturalisme ».

II. - Sexisme et jeunes filles immigrées : Eléments pour un débat.

(note prises suite à un échange "MRAP et NPNS" - 2004)

* Nous refusons de stigmatiser "le garçon arabe" en tant que tel et de considérer que la culture dite "arabe" (ce qui suppose une unicité de ladite culture alors qu’elle est traversée par diverses idéologies) serait sexiste par essence et les hommes dits "arabes" sexistes" par nature . (cf. "Le scandale des tournantes" de L Mucchielli) . Nous savons que la violence sexiste est partout, dans tous les milieux sociaux .
Pour autant nous pouvons dénoncer comme eux les violences sexistes dans les quartiers pauvres et abandonnés de la République. Le fait d’être arabe ou musulman ne saurait être prétexte pour le silence sur ce point (cf. Josette TRAT contre N Guénif-Souilamas).

* Plus particulièrement, nous pouvons être amené à dénoncer une autre pratique de masse à savoir, le contrôle de la sexualité des filles notamment sur le principe de la virginité . C’est ce que fait aussi l’association NPNS . Mais la façon dont nous aurons à faire cette dénonciation sera sans doute différente. Ce contrôle se fait sur les filles et pas sur les garçons. Il y a là certes une discrimination choquante et critiquable . Mais le fait de l’attribuer à la religion musulmane, voire à la "culture arabe" peut poser problème au MRAP . Pour ma part, je refuse de mettre cela sur la "culture arabe", un mot valise trop englobant . L’attribution à la religion musulmane est plus correcte mais là encore attention de ne pas la montrer comme unique et faire de cette religion un ensemble réactionnaire par nature . Je préconise l’emploi, si besoin est, du terme d’excès réactionnaire du religieux musulman. Il s’agit alors de préciser qu’il existe bien une interprétation réactionnaire et sexiste de cette religion ; cette interprétation donne lieu à des normes condamnables . En fait comme de nombreuses religions ont adopté une pratique discriminatoire à la fois sexiste et patriarcale. On pourrait à l’occasion le relater.

* Concernant le fait de l’émancipation des jeunes filles immigrées . C’est plus implicitement qu’explicitement que nous approuvons cette émancipation. Elles ne sont jamais évoquées sur nos listes de débat . Ces jeunes filles émancipées des règles sexistes et patriarcales sont pourtant objet de critiques des indigènes " anti bounty " (*). Elles feraient le jeu de la société dominante et cautionnerait le racisme dominant . Rien moins.

Cette problématique pose questions .Tout d’abord, doit-on considérer que ces jeunes filles émancipées sont totalement en rupture avec LA culture d’origine de leur famille ou doit-on plutôt considérer qu’une même famille immigrée est l’objet d’une "culture mixte", non figée. Cela relève du débat de spécialistes mais la tendance va vers le mixage des cultures.

A un niveau intermédiaire remarquons que ces familles n’échappent pas aux débats idéologiques contemporains et que les jeunes filles adoptent de plus en plus des principes et des pratiques d’émancipation. Cela pose certes souvent des problèmes et génère des conflits dans les familles . Nous avons tendance à ignorer ces effets (parce que nous sommes "blancs", disons car nous faisons parti de la société dominante) . Soit.

Mais doit-on pour autant rester neutre afin d’éviter la "manipulation raciste", celle qui à l’occasion stigmatise le "garçon arabe" ? Pire, faut-il les nommer "beurettes émancipées" pour mieux les stigmatiser sous l’étiquette de bounty ? Faut-il refuser l’idée de "l’intégration réussie" sous prétexte d’un possible discours assimilationiste/raciste sous jacent ?

Ne peut-on penser que l’idée de jeunes filles immigrée assumant une identité musulmane positive - lorsque c’est le cas - est plus à défendre qu’à stigmatiser. Ce n’est pas principalement au MRAP de faire cela . Mais par solidarité nous sommes du coté de l’émancipation.

Christian Delarue - MRAP

* bounty = friandise au chocolat et à la noix de coco, gâteau blanc à l’intérieur et noir à l’extérieur. La formule souligne pour ceux qui l’utilisent une solidarité mais aussi la stigmatisation d’une trahison " des individus de couleurs qui se comportent comme des blancs ". Ils sont dit anti-bounty car ils défendent la culture d’origine y compris le port du voile et mêmes les pratiques sexistes plus graves . La défense de la culture d’origine n’est pas critiquable en soi mais dans toute culture des critiques sont à mener et des droits sont à défendre.

Messages

  • Rapports hommes/femmes et islam :
    pudeur et concupiscence ou égalité et réciprocité

    Les "modernes" interprétes de l’islam (qui dégage le sens au-dela du texte ) semblent bien à lire le texte ci-dessous plus hypocrite encore que les "classiques" (ceux qui s’en tiennent à la lettre du texte) : le voile islamique peut être enlevé disent-ils... mais il faut pouvoir conserver d’une autre manière sa signification profonde (pudeur, concupiscence, etc...).

    Avec de telles théologies qui entérinent dans la fatalité l’agression sexuelle et sexiste de certains hommes l’égalité hommes-femmes n’est pas pour demain. Le désir et la séduction va donc rester de l’ordre du mal avec - côté femmes - comme modèle la "mère" sexuellement neutre et - côté hommes - les comportements dominateurs et violents conçus comme inamendables .

    Avec de telles théologies, les femmes se voient assignées au devoir de non provocation et au respect de la sobriété vestimentaire . Si un élément sexualisé ou érotisé apparait alors on retrouve le modèle de la prostituée, de la sphère du défaut de respect aussi bien chez la femme que chez l’homme . Le cercle infernal de la différence homme/femme est reproduit . Le sexualisé - et tout peut l’être - doit être caché . La femme doit disparaitre sous la "personne" neutre pour que le respect soit possible . Le "non voilage", au sens large du terme, empêche donc la "paix entre les sexes" . Quand sortira-t-on de ce cercle ?

    Pour appuyer le propos et renforcer le maintien de cette distinction on fera appel à la publicité criticable et souvent justement critiquée des corps de femmes dans l’espace publique occidental. Et on confondra dans la foulée la représentation marchande et publicitaire avec les rapports hommes-femmes réels au sein desquels il s’agit de tenir ensemble séduction, sexualisation et respect.

    Un enjeu : tenir ensemble d’une part séduction, sexualisation et d’autre part respect et réciprocité.

    Pour les hommes et les femmes en recherche de rapports d’égalité et de réciprocité (dans des relations sexuelles librement consenties), l’enfermement des femmes contraintes durablement à se cacher des hommes non seulement "concupiscents" (sic) mais potentiellement violeur est inadmissible . Le combat à mener n’est pas contre la concupiscence et pour la pudeur mais contre le modèle dual "mère"-prostitué ou respectable-méprisable ou neutre-sexy. De ce point de vue le slogan "ni pute ni soumise" est ambigu.

    Cette théologie qui n’est pas le propre de l’islam - il faut le répéter - a d’autres inconvénients : le garçon n’a pas de question à se poser . Quelle signification de cette séduction (pour moi ou pour elle), quel comportement quand X m’attire (question du regard) , quel comportement avec celles que je juge moins attirante ? ect.

    Des personnes de mentalité laique peuvent aussi partager cette idéologie de la neutralité corporelle mais ce n’est en général pas systèmatisé comme dans les doctrines religieuses. Ce qui ouvre à des souplesses de comportements en fonction des situations.

    Malgré tout, l’islam, comme les autres religions, est divers . Il existe aussi des musulman(e)s qui se sont dégagés de ce fatras idéologique . Cette certitude (la diversité de l’islam) et le fait de pouvoir rencontrer des arabes musulmanes étant aussi laiques marxiste et libres constituent deux obstacles qui empêchent d’être islamophobe au sens de camouflage raciste... mais cela n’empêche pas la critique des courants réactionnaires. Heureusement !

    Christian Delarue MRAP

    Site oumma.com : Interview exceptionnelle du Théologien Mohsen Ismaïl qui s’exprime sur le port du voile, le mariage forcée, le divorce ...

    Détenteur d’un doctorat en sciences islamiques de la prestigieuse université religieuse de la Zitouna en Tunisie, Mohsen Ismaël est partisan du renouvellement d’une théologie fondée sur une lecture finalisée du corpus Coranique qui serait en conformité avec le caractère inédit d’une présence musulmane dans un Etat non musulman. Les compétence de ce jeune théologien ont amené le ministère de l’Intérieur à le consulter parmi d’autres personnalités en novembre 1999 dans le cadre du dossier sur la représentation des musulmans de France. Loin du discours traditionnel axé sur le rappel au respect de la norme, Mohsen Ismaël dont les positions rencontrent un écho certain auprès des jeunes, s’exprime sans ambages sur certains sujets qui concernent les femmes au premier chef.

    L’absence d’une théologie clairement établie sur la présence islamique dans un Etat qui ne l’est pas suscite auprès des jeunes des interrogations sur l’authenticité de leur foi qui demeurent sans réponse. Parmi ces interrogations figurent notamment le port du voile. Au-delà de l’aspect polémique que provoque ce sujet, que peut-on en dire d’un point de vue théologique ?

    D’un point de vue théologique, le texte coranique est clair quant à la prescription du voile : « Dis à tes épouses, à tes filles, aux femmes des croyants, de ramener sur elle leur voile ; elles en seront plus vite reconnues et éviteront d’être offensées » ( Coran ; XXXIII, 28 ). Cette recommandation n’a aucune originalité car elle figure aussi bien dans l’ancien testament (Genèse 24, 65) que dans le nouveau testament ( Saint Paul, Ier Epître aux Corinthiens, chapitre 11 verset 4-16). Le sens profond de cette recommandation est l’appel à la pudeur et au respect d’une certaine moralité dans la société. Cet appel coranique, qui vient consolider ce qui a été déjà prescrit dans la Bible et dans l’Evangile, constitue une évolution incontestable et un rappel au respect de la femme dans une société où l’on considérait la naissance d’une fille comme une malédiction. « Et lorsqu’on annonce à l’un d’eux la naissance d’une fille, son visage s’assombrit et une rage profonde l’envahit. Il se cache des gens à cause du malheur qu’on lui a annoncé. Doit-il la garder malgré la honte ou l’enfouira-t-il dans la terre ? Combien est mauvais leur jugement ! » ( Coran ; XVI, 58-59 ). Si on inscrit la prescription du port du voile dans ce contexte de perceptions dépréciative et humiliante du statut de la femme, on ne peut que souligner l’évolution considérable initiée par le Coran au sein d’une société patriarcale. Le texte coranique doit toujours être lu à la lumière du présent, puisque la révélation n’a pas transcendé la mentalité de l’époque. Une lecture finalisée du texte est donc exigée.

    Justement, quelle lecture peut-on faire de ce verset aujourd’hui ?

    Une lecture qui nous appelle à suivre le mouvement du texte. Ce qui va à contre sens d’une lecture littérale qui figerait toute interprétation du texte Coranique. Les jurisconsultes musulmans de l’époque classique ont toujours étudié ce qu’ils appelaient (’Illat al-tashrî’), c’est-à-dire, la finalité de la législation. Si on suit la même démarche concernant le port du voile, on parvient à la conclusion suivante que la finalité essentielle de ce verset repose sur un appel à la pudeur et au respect d’autrui. Cet objectif n’implique pas obligatoirement le port du voile. Une attitude convenable, conjuguée à une bonne instruction suffiront à respecter l’esprit de ce verset. Nous pouvons aisément affirmer que les filles non voilées sont autant pudiques que les autres et que l’islam n’a jamais exigé une tenue vestimentaire particulière pour les musulmans. A ceux qui continuent de considérer que le port du voile contribue à protéger la femme du regard concupiscent de l’homme, je propose d’inverser les rôles. En effet, l’homme lui-même peut susciter le désir chez une femme. Il n’est pas pour autant tenu de revêtir un vêtement spécial qui le protègerait du regard de la femme.

    .../... site ouma.com

  • Pourquoi tant de précautions ! Je viens d’une famille catholique pratiquante et je peux vous affirmer que la place assignée aux femmes n’est ontologiquement guère différente de celle assignée aux femmes par l’Islam. Je crois que ce "sexisme" est une "communauté culturelle" des religions monothéistes (il faut bien qu’il y en ait une) et l’évolution favorable des droits des femmes dans nos sociétés occidentales tient aussi à notre émancipation par rapport à l’institution religieuse (car il y a bien des chrétiens pour désormais s’accomoder de leur croyance et d’une certaine libération des moeurs sans que cela les gêne et sans que cela leur paraisse une contradiction majeure, après tout pour un croyant Dieu seul est juge, pas les hommes). Alors là, la grande découverte qu’il y a pas mal de conservateurs et même de réactionnaires parmi les musulmans pratiquants ne me surprend guère. c’est pour l’ancienne catholique que je suis rien moins qu’une révélation. les pratiquants, les dévots de toutes les religions sont conservateurs question moeurs. Cessez de croire que c’est de l’islmophobie que de le dire, c’est la réalité du fait religieux et l’Islam ne fait pas exception.