Accueil > Naissance d’un syndicat SUD chez Office Depot. Encore une CGT qui vire chez (…)

Naissance d’un syndicat SUD chez Office Depot. Encore une CGT qui vire chez SUD !

Publie le lundi 5 mars 2007 par Open-Publishing
12 commentaires

CGT Magasin devient SUD Office Depot...pour des revendications collectives !

Après de nombreuses hésitations, la section CGT magasin Office Depot a décidé de rejoindre le syndicalisme autonome et l’Union Syndicale Solidaires qui fédère les différentes sections et syndicats SUD (SOLIDAIRES, UNITAIRES ET DEMOCRATIQUES). Notre affiliation au syndicat SUD va nous permettre de gagner en efficacité, souplesse de fonctionnement.

Les désaccords, le copinage, les adhesions de cadres "ex directeurs" et "louches" c’est le moins que l’on puisse dire, les compromissions de certains, les signatures "capitulardes" deviennent inacceptables et contraires aux interets moraux et matériels des employés des magasins. Cette situation va etre maintenant clarifiée et le nouveau syndicat SUD souhaite travailler avec l’ensemble des organisations syndicales présentes en magasin et au sein de la nouvelle UES.

Certains logos, tracts et nom de domaine devraient changer dans les prochains jours. Le délégué syndical Pierre Desvignes tient à remercier l’US commerce et Services CGT de Paris pour leur militantisme de terrain, notamment Stephane Fustec, Karl Ghazi et continuera de soutenir les dossiers "chauds" des militants parisiens SUD CGT et autres. Le syndicalisme français va changer et se démocratiser.

Déjà dans de nombreuses enseignes, des sections CGT rejoignent SUD ce qui pour notre nouvelle organisation syndicale est un atout considérable à l’aube des changements de règles de représentativité et une claque pour les partisans du syndicalisme d’accompagnement mou et "réformard". Comme d’autres, nous voilà plongés dans une nouvelle aventure syndicale

Oh MERDE il va falloir s’acrocher.

TRACT SUD MAGASIN FEVRIER 2007

http://ddata.over-blog.com/xxxyyy/0/40/79/44/sud-office-depot.doc

Messages

  • Bonjour,

    Bien-sûr ce "changement d’enseigne" syndical s’est traduit par des adhésions massives de salariés jusqu’à présent non syndiqués ? non ?

    Alors à quoi ça sert sinon à foutre le B...del.

    Ne pas se tromper : l’adversaire c’est le MEDEF pas la CGT.

    Kimble

    • La CGT n’est certes pas le MEDEF mais celui ci peut compter sur la CGT pour être un bon chien de garde à son service ,la CGT ne pourra plus cacher encore longtemps dans quel camp elle est , pas celui des salariés en tout cas ou si peu .de cheminot ,SUD

    • Bonjour,

      Et bien-sûr tu as des faits tangibles ( pas des élucubrations ) pour appuyer tes affirmations.

      Kimble

    • Souviens toi de Latifa Abed de MaxiLivre que la Fédé CGT à longtemps et souvent laissée seule ; et dans le dernier réglement la section seule est toute seule...

      Appareil endormi sur les "petites" luttes, et c’est pire la veille d’élection... Sauf pour Airbus quand même quand même

    • Méme a la CGT ils font les cons ! MGB tu ne tiens plus personne ? Olivier vas prendre les devant.
      ou va le sydicalisme ? comme le PCF il part en couille.

    • Bravo à Pierre et à ses camarades !
      Signé Bernard, CGT puis SUD MAXILIVRES quand il travaillait encore ! Tout ça ne m’étonne pas. Bonne chance à vous !

    • Salut Bernard,

      c’est Pierre. Chez nous CGT Office Depot = CFDT Maxi Livres. Je vais te faire parvenir de la doc, c’est chaud de chez chaud, incroyable. Mais je crois que je l’ai echappe de peu car la federation commerce comploté contre moi, je te dis pas ce qui se preparait...je me suis mis à dos l’UD 93 qui est l’union dept la plus puissante au sein de la CGT car finance par le dept 93 qui est tenu par des collectives territoriales majoritairement tenus par le parti que l’on connait. Une federale a pris le dossier en main d’Office Depot, elle est justement cooptée par l’UD93, pistonnée quoi, et lorsque ils ont appris mes sympatjies "gauchistes" je ne te dis pas le cirque, les coups bas et le proces stalinien. hallucinant ! en attendant la section surtout celle du siege n’est pas claire c’est le moins que l’on puisse dire, (enfin pas tous, mais disons les qql meneurs) mais ils sont couverts par de gros appareils internes à la CGT. L’US CGT m’a soutenu et protege je les remercie mais il est evident qu’à long terme cette situation ne pouvait perdurer et je prenais plus de risques à rester qu’à partir c’est clair ! ! En faite ils se servent de la CGT comme d’un paravent contestataire et souahitent à terme devenir les interlocuteurs privillegies de la direction, d’ou leur mefiance vis à vis de moi. Je ne sais pas si tu imagines mais l’un s’est vante d’avoir le soutien du PDG du groupe contre le representant du syndicat d’entreprise SOD. Depuis quand un PDG prefere t il soutenir la CGT contre le SOD ? Ca interpelle ? C’est une "CGT utile" et pour la direction une caution contestatairequi le moment voulu va nous faire un petit dns le dos et ce moment voulu s’appelle PSE. Tu verras l’histoireme donnera raison.

      Enfin "gauchiste" je ne sais pas ce que ça veut dire ? La cgt est progressiste apres tout , ah oui, mais vouloir travailler syndicalement et essayer d’en faire profiter les adherents les salaries et bien apres l’appareil, ça ne plait pas ? La verite c’est que la detresse des salaries c’est leur gagne pain à la fede, un peu comme ces apparatichks de l’ex URSS qui passaient leur vacances dans de somptueuses villas de la mere noire pendant que le peuple crevait de faim. Ils y tiennent à leur appareil, c’est leur jobs. Moi je m’e fiche ce qui m’interesse c’est le contenu et les idees.

    • Ca dépend des moments ! Cette remarque doit-être en priorité adressée à ceux qui foutent des bâtons dans les roues des militants qui crééaient un syndicalisme différent, démocratique, où le pouvoir reste à la base et non dans l’appareil, où le syndicat est au service des travailleurs et non l’inverse. où les statuts conservent le concept de lutte des classes. Un retour aux sources quoi. Louis, militant SUD-Rail.

  • Je reste fonctiérement convaincu qu’il ne devrait subsister qu’un seul syndicat pour tous les salariés. Or je constate qu’au fil des années il s’en créé.
    Au départ il y avait la CGT, puis les catos, il ne sont pas salariés pareil, créaient la cftc, puis la CIA finance une scission dans la CGT pour formerFO, puis divorce à la cftc et création de la CFDT, puis divorce à la CFDT et création de SUD (au moment de la réforme de la poste en 1990) très fortement soutenu par ......... !
    Et bien je reste fidèle àla CGT. IL y a des cégétistes qui font les c..... ?Et bien démocratiquement les salariés les changent. ça m’est arrivé et les salariés ont retrouvé espoir dans le syndicalisme et les victoires se sont succédées.
    Quant à SUD c’est pas mon adversaire, même si nous sommes le leur.
    Salut
    j c de la poste

  • cet article est particulièrement malsain, populiste.

    Que des militants CGT quittent parce qu’ils sont déçus par le soutien parfois compté de nos instances n’est pas une nouveauté : la CGT est une grosse machine, avec aussi de "gros défauts".

    Qu’il puisse y avoir des salauds à la CGT, des gens biens à SUD, non plus ! (et inversement : j’aurais beaucoup à raconter sur SUD dans ma boite, alliés avec les populo/fascistes locaux , adeptes de la "préférence locale", briseurs de grève, servant la soupe au patronat pour détruire la Sécu)

    Que des salariés, surtout dans une petite structure suivent les militants sincères s’ils changent de "crèmerie" : en quoi est-ce étonnant ?

    Et il faut se souvenir que la fédération commerce CGT est issue pour une bonne part de la fusion avec la CFDT (les "permanents" CFDT ont été "intégrés" sans autre forme dans l’appareil CGT : ça laisse des traces, pour prix de leur "ralliement")

    SUD est issu des "déçus" de la CFDT : historiquement, les ex "moutons noirs", dont Edmond Maire a fait la "purge", puis des cheminots de 95, puis des "tous ensemble", puis des opposants à la traitrise de 2003.

    Mais SUD travaille-t-il à l’unité des travailleurs ? J’en doute fort

    Cet "article" le démontre malheureusement une fois de plus : pourtant, moins de 4% des salariés du privé sont syndiqués. Combien à "Office" ? Combien de nouveaux syndiqués ?

    si c’est pour se disputer les maigres effectifs de syndiqués, c’est de la démagogie lamentable.

    SUD joue à ce petit jeu crapouilleux : fort dommage, mais pas nouveau

    Le "gauchisme" syndical est-il une maladie incurable ?

    P. Bardet

  • COMBIEN DE DOLLARS, OFFICE DEPOT - FIRME AMERICAINE - A PU VERSER A SUD ?
    Rappelez-vous, il y a 60 ans : la scission de 1947

    Ingérence syndicale
    AFL-CIO ou AFL-CIA ?
    par Paul Labarique

    Dès le début de la Guerre froide, les États-Unis se sont appliqués à neutraliser l’influence soviétique dans le mouvement syndical européen. S’appuyant sur l’AFL-CIO, une organisation qui tient plus de la corporation de branche que du syndicat de classe, la CIA a fait exploser la CGT française et a financé la dissidence de Force ouvrière. Puis, l’Agence a regroupé les centrales atlantistes européennes au sein d’une Confédération des syndicats libres. Le système a été ultérieurement étendu à l’Afrique et à l’Asie. L’opération a été dirigée par Irving Brown, responsable du réseau stay-behind en Europe.

    Après s’être alliés pour lutter contre les forces de l’Axe au cours de la Seconde Guerre mondiale, les États-Unis et l’URSS entrent, dès 1945, dans une lutte d’influence mondiale qualifiée, à partir de 1948, de « Guerre froide ». Les deux superpuissances évitent soigneusement l’affrontement militaire direct, mais développent un combat idéologique dans leurs zones d’influence et des guerres périphériques.

    Depuis l’effondrement de l’URSS, les réseaux pro-soviétiques appartiennent à l’Histoire. Ils sont de mieux en mieux connus, notamment grâce à l’ouverture des archives. Au contraire, les réseaux atlantistes n’ont pas disparu avec la fin de la Guerre froide. Ils ont été mis en sommeil par l’administration Bush père, puis réactivés par l’administration Bush fils. Nous avons entrepris de les décrire dans ces colonnes, non comme des souvenirs d’un passé révolu, mais comme des éléments explicatifs de la crise politique mondiale actuelle. Nous avons ainsi relaté la mise en place de réseaux d’ingérence, les stay-behind [1] et celle du soft-power de la Fondation nationale pour la démocratie (NED/CIA) [2]. Nous avons analysé de grandes opérations sectorielles comme le financement des intellectuels européens par la CIA [3]. Nous en venons aujourd’hui à la manipulation des syndicats.

    Convaincu que les démocraties occidentales sont menacées par le « péril communiste », dont l’un des relais serait naturellement le syndicalisme, les États-Unis mettent en place, dans le cadre du plan Marshall, un réseau de confédérations syndicales internationales, chargées de contrer l’influence communiste dans le monde du travail. En février 1945 se tient à Londres une conférence mondiale visant à réaliser l’unification du syndicalisme international, à l’initiative du Trades Union Congress (TUC) britannique. 53 organisations y sont présentes. L’American Federation of Labor (AFL), premier syndicat états-unien, boycotte la réunion pour protester contre la présence de représentants soviétiques. Le Congress of Industrial Organizations (CIO), son grand rival sur la scène syndicale états-unienne, tente de son côté de jouer un rôle de médiateur entre les membres de l’Internationale syndicale rouge (ISR), proche de Moscou, et la Fédération syndicale internationale (FSI), créée à Amsterdam en 1919 et qui refuse les syndicalistes soviétiques. Les deux courants devaient être rassemblés au sein d’une Fédération syndicale mondiale (FSM), qui naît effectivement à Paris en 1945. Mais le rapprochement échoue. La Confédération internationale des syndicats chrétiens (CISR) refuse de rejoindre la nouvelle structure, tout comme l’AFL, qui décide en octobre 1946 de rassembler tous les syndicats "libres" et installe à Bruxelles un bureau de correspondance avec à sa tête Irving Brown.

    Le plan Marshall achève de diviser la FSM naissante : le Secrétariat de la Fédération dénonce un plan « qui porte atteinte à l’indépendance des États européens », tandis que les syndicats britanniques organisent une conférence rassemblant des partisans du projet. Rapidement, la FSM se retrouve donc largement dominée par les centrales syndicales des pays socialistes : la CGT française et la CGIL italienne seront les deux seules organisations occidentales à y adhérer.

    Les efforts de Washington pour diviser les syndicats communistes et aider ceux qui refusent l’anticapitalisme et la domination de Moscou se font alors plus pressants. Trois hommes vont superviser le dispositif. Le premier est Jay Lovestone, alors directeur de la section internationale de l’American Federation of Labor. Ancien dirigeant du Parti communiste états-unien avant la Seconde Guerre mondiale, Lovestone a rompu avec l’URSS en 1929, après une rencontre avec Staline. Il lui avait en effet suggéré que les États-Unis offraient une configuration politique et sociale particulière, nécessitant une stratégie communiste adaptée. Se sentant menacé, il quitte Moscou en toute hâte et, de retour à New York, devient un anticommuniste militant. Il s’allie alors avec l’International Ladies Garment Workers Union, un important syndicat monté par des immigrés juifs et italiens qui tente également de limiter l’influence de ses militants communistes. Ceux-ci sont finalement écartés grâce aux efforts des « modérés » emmenés par David Dubinsky. À la même époque, Jay Lovestone noue une relation d’amitié avec le dirigeant de l’AFL, George Meany, également anticommuniste patenté. Pendant la Seconde Guerre mondiale, Lovestone travaille en collaboration étroite avec le Bureau des travailleurs de l’Office of Strategic Services (OSS, ancêtre de la CIA), dirigé par Arthur Goldberg, futur secrétaire au Travail de Kennedy et membre de la Cour Suprême. Il est notamment chargé d’organiser la résistance des ouvriers à l’Allemagne nazie en Europe et en Afrique du Nord. Au sortir de la guerre, il poursuit ses activités sur le terrain européen.

    Il est secondé en cela par Irving Brown, membre de l’AFL et adjoint pour l’Europe de Lovestone à partir de 1944. Né en 1911, Irving Brown devient un membre important de l’AFL dans les années 1930. Sa femme est alors la secrétaire de Jay Lovestone [4]. Son premier fait d’armes concerne la France. Allié stratégique de Washington du fait de sa puissance économique et démographique, mais aussi de sa situation géographique (sa frontière avec l’Allemagne, dont une moitié du pays est occupée par les troupes soviétiques, en font un partenaire privilégié en cas d’offensive de l’URSS), le pays connaît d’importantes turbulences sociales une fois l’état de grâce de la Libération disparu. Les grèves de Renault d’avril-mai 1947 font éclater l’accord de gouvernement entre le Parti communiste français, la SFIO et le MRP. Paul Ramadier révoque les ministres communistes, et plonge la vie politique dans une instabilité menaçante. D’autant que les difficultés économiques s’accumulent : pénurie de charbon et de denrées alimentaires, hausse des prix, provoquent des mouvements sociaux importants dans tout le pays. La CGT, premier syndicat du pays, est secouée par des dissensions internes entre ceux qui acceptent « le rôle dirigeant du PCF dans le mouvement ouvrier et ceux qui s’y opposent » [5]. Washington profite de l’occasion : la CIA aborde le secrétaire général de la CGT, Léon Jouhaux, à l’occasion de son voyage à l’ONU. Jouhaux accepte de provoquer la scission qui donnera naissance à Force ouvrière, en 1948, et affaiblira durablement le syndicalisme français. Une fois l’opération terminée, George Meany déclare au Press Club de Washington : « Je suis fier de vous dire, parce que nous pouvons nous permettre de le révéler maintenant, que c’est avec l’argent des ouvriers de Detroit et d’ailleurs qu’il nous a été possible d’opérer la scission très importante pour nous dans la CGT, en créant le syndicat ami Force ouvrière » [6]. Mais, en 1967, Thomas W. Braden, ancien directeur de la division internationale de la CIA, révèle sans ambages [7] qu’en réalité les fonds furent initialement fournis par l’International Ladies Garnment Union de David Dubinsky puis « quand ils manquèrent d’argent, il s’adressèrent à la CIA. Ainsi commencèrent les versements de fonds secrets aux syndicats libres qui, bientôt, s’étendirent à l’Italie. Sans ces versements, l’histoire de l’après-guerre aurait été différente » [8].

    Un groupe de militants anti-soviétiques joue un rôle central dans la scission : il s’agit de trotskistes récupérés par le stay-behind. Pendant la Seconde Guerre mondiale, après la rupture du Pacte germano-soviétique, ils avaient fait le choix, autour d’Henri Molinier, de lutte contre Staline en adhérant à l’ultra-collaborationniste Mouvement social révolutionnaire (MASR) d’Eugène Deloncle et Eugène Schueller [9]. Sous l’impulsion d’Irwing Brown, ils constituent en 1953 un nouveau parti, le MPPT, autour de Pierre Boussel-Lambert. Ces militants obtiennent bientôt des emplois dans des Caisses d’assurance-maladie et se consacrent à l’encadrement de FO.

    À la même époque, « la SFIO marseillaise a elle aussi profité des dollars de la CIA qui, par exemple, renflouent le journal Le Populaire, le quotidien socialiste à l’échelle nationale » [10]. Les activités d’Irving Brown sont en effet particulièrement visibles dans la région marseillaise, alors au c ?ur de la French connection qui gère à l’époque l’essentiel du trafic mondial d’héroïne. Ses financements viennent en général directement de la CIA, soit via l’attaché de l’ambassade états-unienne à Paris pour les questions syndicales, John Phillipsborn, soit via un compte en banque basé à Zürich au nom du président du Comité méditerranéen, Pierre Ferri-Pisani [11].

    Parallèlement à ces opérations ponctuelles, Irving Brown lance fin 1949 la Confédération internationale des syndicats libres (CISL / FTUC), qui refuse tout contact avec la Fédération syndicale mondiale, considérée comme trop proche de Moscou. La CISL regroupe une soixantaine de centrales, venues de 53 pays et représentant près de 50 millions de travailleurs. Par ailleurs se constitue une structure au sein de l’AFL, la Confédération des syndicats libres, financée à hauteur de 35 000 dollars par la maison-mère. Le président de cette organisation est Matthew Woll, David Dubinsky sert de trésorier et George Meany, secrétaire-trésorier de l’AFL, se charge de la coordination entre la jeune structure et la maison-mère [12]. L’initiative en direction des syndicats européens non-communistes va faire prendre une nouvelle ampleur à l’organisation. Et de nouveaux soutiens : à partir de 1950, la CIA finance la CISL à hauteur de 170 000 dollars par an. Avec un tel budget, la centrale syndicale peut financer largement le Centre international des syndicalistes libres en exil (CISLE / ICFTUE), qui tient son premier Congrès à Paris en octobre 1948 dans les locaux de Force Ouvrière, à peine remis de sa scission avec la CGT. L’organisation, présidée par F. Bialas et A. Skorodzki, est officiellement chargée d’accueillir des travailleurs immigrés et des organisations socialistes d’Europe de l’Est. Dans les faits, elle permet surtout de soutenir les groupes dissidents établis de l’autre côté du rideau de fer. Certains d’entre eux, non allemands, avaient rejoint les rangs des forces armées allemandes, voire de la Waffen SS, au cours de la Seconde guerre mondiale et ne pouvaient retourner dans leur pays d’origine une fois le conflit terminé. Ils constituent donc de solides appuis anti-communistes dans les pays où ils se trouvent réfugiés. Qu’ils aient réussi ou non à franchir à temps le rideau de fer, ils sont de toute façon accueillis à bras ouverts au sein du Centre international des syndicalistes libres en exil [13]. L’organisation édite une revue, Le Syndicaliste Exilé [14] et a accès aux ondes de Radio Free Europe et Radio Liberty, toutes deux financées ouvertement par la CIA. À la même époque, la CISL aide à l’organisation et au financement de la réunion fondatrice du Congrès pour la liberté de la culture à Berlin en 1950.

    La CIA finit tout de même par trouver les activités de Lovestone et Brown trop coûteuses. De 1950 à 1955, elle réduit donc ses financements et presse les deux hommes de réorganiser leurs activités d’une manière plus efficace. Ce sera fait en 1955 lorsque les deux principaux syndicats états-uniens actifs en Europe, l’AFL (représenté par Irving Brown) et le CIO (représenté par Victor Reuther) fusionnent pour donner naissance à l’AFL-CIO, avec la bénédiction d’Averell Harriman, nouvel administrateur du plan Marshall, et de son émissaire en Europe, Milton Katz. George Meany en prend la présidence. Les activités de la Confédération des syndicats libres cessent donc, pour être remplacées par des opérations de plus grande ampleur de la part de la nouvelle centrale syndicale unifiée. Celle-ci en profite pour décupler ses efforts d’« ingérence syndicale » à l’échelle de la planète. Irving Brown s’implique dans l’Afrique post-coloniale, tandis que d’autres militants tels que Richard Deverall et Harry Goldberg font de l’Asie leur terrain de prédilection. Serafino Romualdi, un socialiste d’origine italienne, agit pour sa part en Amérique latine [15].

    Les activités d’ingérence en Europe connaissent alors un coup d’arrêt dans le domaine syndical. Tout le département est réorganisé sous 1962, au moment où le président Kennedy crée l’US Agency for International Development (USAID), qui finance quasi-exclusivement cette branche d’activité de l’AFL-CIO. Une stratégie défendue devant le président Kennedy par Cord Myer, Arthur Goldberg, George Meany, Jay Lovestone, entre autres. La centrale syndicale états-unienne crée alors trois sous-structures semi-indépendantes. La principale est l’American Institute for Free Labor Development [16], qui vise à reprendre le contrôle des mouvements syndicaux en Amérique latine. Une initiative lancée dès la fin des années 1950 par Cord Meyer, et qui assura la formation de plus de 200 000 syndicalistes venus d’Amérique Latine au centre de Front Royal, en Virginie [17]. Les deux autres organismes sont l’African Labor College, dirigé par Irving Brown, et l’Asian-American-Free Labor Institute, qui voit le jour en 1968, au moment de la guerre du Vietnam. Le remaniement écarte donc l’Europe du champ d’action de l’AFL-CIO. Il permet en revanche l’émergence d’un nouvel outil d’ingérence dans les pays du Tiers monde, que l’on verra rapidement à l’ oeuvre lors du renversement de Sukarno en Indonésie, de Joao Goulart au Brésil, et de Salvador Allende au Chili.

    Paul Labarique


    [1] Voir la série d’enquêtes sur le stay-behind du 20 août, 27 août et 10 septembre 2001.

    [2] Voir « La nébuleuse de l’ingérence démocratique », Voltaire, 22 janvier 2004.

    [3] Voir « Quand la CIA finançait les intellectuels européens », par Denis Boneau, Voltaire, 27 novembre 2003.

    [4] D’après The Point Man : Irving Brown and the deadly post-1945 struggle for Europe and Africa, par Ben Rathbun, Minerva Press, 1996.

    [5] « CGT-FO, le grand schisme », par René Mouriaux, Le Monde, 13 avril 1998.

    [6] Cité dans E ? comme espionnage par Nicolas Fournier et Edmond Legrand, Éditions Alain Moreau, 1978

    [7] « I’am Glad the CIA is Immoral » par Thomas W. Braden, Saturday Evening Post, 20 mai 1967

    [8] Cité dans D ? comme Drogue, par Alain Jaubert, Éditions Alain Moreau, 1973.

    [9] Le MSR est alors un parti au sein du RNP de Marcel Déat avec lequel il vient de fusionner. Voir « L’histoire secrète de L’Oréal » par Thierry Meyssan, Voltaire, 3 mars 2004.

    [10] Ibid.

    [11] Le Comité méditerranéen est l’organisme au sein duquel Irving Brown mène ses activités autour de la région marseillaise. Il finance par exemple des briseurs de grève lors de la grève des dockers de Marseille, qui cherchaient à empêcher le débarquement de matériel militaire destiné aux troupes états-uniennes stationnées en France.

    [12] « The Origins of CIA Financing of AFL Programs », par Anthony Carew, CovertAction Quaterly, été 1999.

    [13] « The International Centre of Free Trade Unionists in Exile », par Peter E. Newell, Lobster, juin 1996.

    [14] En janvier 1964, Roger Louet, président de Force ouvrière, accepte la direction du journal. « The International Centre of Free Trade Unionists in Exile », op.cit.

    [15] « Plumbers and Presidents : Labor Sources for Diplomatic Historians », par Edmund F. Wehre, University of Maryland at College Park.

    [16] L’ American Institute for Free Labor Development était financé par un large panel comprenant les entreprises états-uniennes les plus importantes telles que Rockefeller, ITT, Kennecott, Coca Cola, IBM, Pfizer International, Standard Oil, Shell Petroleum, Pan American World Airways. Toutes persuadées, selon le président de l’AIFLD, George Meany, qu’il était « dans l’intérêt des États-Unis d’aider au développement de syndicats libres en Amérique Latine ». Le président du Conseil d’administration n’est autre que J. Peter Grace, également président de la W.R. Grace Corporation.

    [17] The Rise and Decline of the CIA, par John Ranelagh, Simon & Schuster, 1987.