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On ne peut pas civiliser le capitalisme (Alain Krivine)

Publie le samedi 8 décembre 2007 par Open-Publishing
14 commentaires

Intervention d’Alain Krivine au débat sur l’avenir de la gauche, qui a eut lieu au Théâtre du rond-point, avec François Rebsamen, Manuel Valls, Zaki Laïdi, Henri Weber et Bruno Julliard.

Alain Krivine :

Puisque j’ai accepté ce débat avec des dirigeants socialistes, je précise tout de suite que, pour moi, l’adversaire n’est pas le PS mais Sarkozy, la droite et le Medef. Si aujourd’hui on a des désaccords, c’est sur la façon de combattre Sarkozy, la droite et le Medef. Pour la grande masse des gens, il y a aujourd’hui un brouillard total : ils ne voient plus la différence entre la gauche et la droite. D’ailleurs, les millions de gens qui votent pour le PS ne le font pas ou plus par adhésion, mais d’abord pour battre la droite. Très franchement, qu’est-ce qui oppose aujourd’hui le PS à Nicolas Sarkozy ? Est-ce un débat de fond ou un débat de forme ? On voit le résultat : il y a un dégradé - ce n’est qu’un dégradé - entre les positions de François Hollande, par exemple, et celles de Jean-Marie Bockel (secrétaire d’Etat chargé de la francophonie et de la coopération) et Bernard Kouchner qui sont entrés au gouvernement.

Enfin, on est pris dans un bouleversement de toute la gauche européenne. Avant la mondialisation, les sociaux-démocrates pouvaient faire des réformes, petites certes, mais des réformes. Avec la mondialisation capitaliste et la pression de la concurrence, les patrons ne laissent quasiment plus de miettes. Du coup, les sociaux-démocrates se sont totalement adaptés au libéralisme. Cela a commencé avec les Blair ou Schröder. A cet égard, le Parti socialiste français a pris du retard. Mais il est en train de le rattraper. C’est inquiétant et cela explique le développement d’un nouveau mouvement social et d’une gauche radicale.

J’entends que vous voulez rénover le PS et je m’en félicite. C’est votre boulot. Mais le problème c’est : pour faire quoi ? Quand j’entends dire que rénover le PS, c’est enfin accepter les lois du marché comme si c’était acquis, eh bien non ! Pour moi, c’est peut être très "archéo" mais ce n’est pas acquis. Je pense qu’on ne peut pas civiliser le capitalisme. Quel but on se donne ? Est-ce que oui ou non on pense qu’on vit aujourd’hui dans une société qui a des formes de barbarie et où le droit au travail, le droit à la santé, le droit au logement sont remis en cause ? 7 millions de personnes pauvres en dessous de 650 euros par mois, 3 millions de personnes mal logées ou certains sans logis... Voilà le climat dans lequel on est aujourd’hui.

D’où la première question que je vous pose : peut-on résorber cela par des mesures concrètes qui impliquent une nouvelle répartition des richesses ? La deuxième question est celle des moyens : toutes les grandes réformes en France, celles du Front populaire, celles de la Libération, celles de 68, la victoire sur le CPE, ne sont jamais venues directement des parlementaires. C’est parce que des millions de gens sont descendus dans la rue, ont fait la grève générale, vous ont botté les fesses.

Répondez à ces questions.

http://www.lcr-rouge.org/article.php3?id_article=6789

Messages

  • Et ils ont dit quoi les Vall, Rebsamen et autre Julliard, tous à un moment ou à un autre d’accord avec l’excité de l’élysée et sa dérive extrème-droitière ? Ils se vautrent eux-mêmes dans le capitalisme, alors pourquoi cesseraient-ils de l’accompagner ? Il n’y a plus rien à attendre de ces gens là depuis très longtemps alors cessont de croire qu’ils puissent être de gauche. Leur parti c’est le PSUMP (prononcez "psoump" comme le préconise le Plan B) et rien d’autre.
    Mister H

    • Peut être ne peut on rien "attendre de ces gens là" mais des militants et electeurs socialistes
      et c’est à eux qu’il faut parler.Il faut unir dans la lutte et pour ce faire ne rejeter personne à
      gauche.Dans le combat pour les règimes spéciaux s’il n’y avait eu que des électeurs de la gauche "radicale" le porcentage de grèviste aurait été à quelle auteur ?Le rassemblement des
      victimes du capitalisme ne se fera pas par le rejet d’une parti d’entre eux.Pour être bref il
      faut ramener le PS à gauche avec ceux qui le composent et ceux qui le soutiennent,ce ne sera ni
      facile ni rapide.JP

    • La refondation,reconstruction d’un Parti Communiste passe par des propositions qui PARLENT AUX DECUS DU "SOCIALISME".Beaucoup de gens ,à la base,sont sincères et ne demandent qu’à rejoindre un parti qui correspondrait à leurs aspirations.À nous de ne pas les décevoir.

      François Pellarin

  • Ramener le PS à gauche. Il en est question despuis 1984, après le choix de Mitterrand et du PS pour accompagner le capitalisme.

    Résultat, il est de plus en plus à droite. Quelle différence sur le fond entrre l’UMP et le PS sur les dernières revendications : retraites, europe, etc..?

    Daniel Dauphiné.

  • C’est certain, on ne peut civiliser le capitalisme, on doit seulement le liquider.

    Quant au PS, il y a beaucoup de militants qui n’osent pas encore en partir, prisonniers de l’espoir qu’ils ont de le voir virer à gauche. C’est eux qu’il faut convaincre, et eux encore qu’il ne faut pas assimiler à la direction SocDem du parti. Essayons peut-être, toutes & tous, de ne jamais insulter les militants & sympathisants socialistes lorsque nous critiquons le Parti du même nom ?

    G.B.

    • tu a entièrement raison GB , car je crois qu’au PS ils y en a beaucoup, qui ne vont pas tarder a quitter la barque, avec l’amer sentiment d’ avoir été trompés.

      Lolita

    • D’accord avec vous, je ne confond jamais les caciques et ceux qui continuent quand même à croire et à oeuvrer pour un parti vraiment socialiste. Cependant il va bien falloir un jour qu’ils prennent consience qu’aucun de leurs dirigeants actuels n’est autre chose qu’un serviteur fidéle du capitalisme et que tout est fait par les médias et autres pouvoirs pour que ne demeure en France qu’un bipartisme à l’anglo-saxonne, où la seule réelle différence entre la droite et la gauche se situe dans la dialectqiue. Exemple : une nationalisation pour Raffarin, Juppé ou Villepin se nomme ouverture de capital chez Jospin, Fabius, Royal. Alors même si je ne les rejette pas il faudrait quand même qu’ils ouvrent un minimum les yeux et les oreilles (ils en ont eux l’occasion avec la dernière prestation télévisuelle et nombriliste de la Madonne du Poitou toute occupée à son auto-promotion) les supporters de base du PS, car la fidélité à quand même des limites !
      Mister H

    • GB et les autres amis :

      quand j’ai quitté le PS pour le PCf je me suis fait insulter par des militants socialistes à ne pas savoir qu’en faire ( j’ai gardé la collection de mails...) : complice des crimes de staline, antisémite, sang sur les mains etc j’ai tout eu.
      PAr ailleurs je me permets de vous rappeler que plsu de 50 % des militants du PS sont des élus.SI vous croyez qu’avec ça on change, ben pas moi. On a d’ailleurs aujourdh’ui quasiment le même problème au PCF... Bref.

      Alors ne pas faire d’amalgame ok mais c’es t pas avec les militants (la plupart de ceux que je connais et qui en ont eu ras le bol sont déjà partis et donc sont des "ex" militants !) mais avec les électeurs ou les citoyens qui se reconnaissent dans les valeurs du socialisme et PAS dans le "PS"

      fraternellement
      LA Louve

    • Je me souviens de tes témoignages lorsque tu as quitté le PS, effectivement...
      Des militants du PS t’ont insultée, je te crois totalement, mais même s’ils furent nombreux, tous ne l’ont pas fait.
      En imaginant que 80% des militants socialistes t’ont insultée, il en reste encore un bon nombre qui ne l’ont pas fait.

      Il doit donc subsister parmi eux quelques-uns qui sont "corrects" tout de même, non ? :)

      Par ailleurs, entre les "militants" et les "sympathisants / électeurs", nous oublions peut-être les "adhérents", qui, eux, ne sont pas non plus à mettre dans le même sac que les organes dirigeants du PS*.

      * Je suis Socialiste (au sens communiste du terme ;)), le PS ne l’est pas, lui.

      G.B.

  • Certes il y a des différences entre l’adhérent socialiste de base et la direction du PS. Néanmoins il faut arrêter de croire qu’il y a un abîme entre la base et le sommet. Quand on milite sur le terrain, on voit bien que les militants PS sont désormais pour la plupart, socialement, issus de la petite bourgeoisie de gauche et des couches moyennes (enseignants, pour les plus mal payés, médecins ou cadres supérieurs etc.), voire de la "vraie" bourgeoisie, rarement des couches populaires. Mes collègues se réclamant du PS assument sans problème les positions de leur direction, ils se sentent en phase.

    A une époque, le PS était le pôle réformiste du mouvement ouvrier. Cette époque est révolue. Le PS n’a plus grand rapport avec le mouvement ouvrier. Les classes populaires votent aujourd’hui en partie Sarkozy, après avoir voté Le Pen ou s’être massivement abstenue. Elles ne se reconnaissent spontanément dans aucun parti. Tout est à reconstruire.

    Et j’ai plus confiance, pour mener à bien cette reconstruction, dans l’apparition d’un nouveau parti anticapitaliste (cf l’initiative de la LCR) que dans la "drague" (ou disons : l’indulgence vis à vis) du PS pour soi-disant ne pas se couper de la base socialiste. C’est plutôt en recréant une dynamique 100% à gauche, un espoir d’alternative à ce système, que l’on attirera les électeurs PS et ses militants authentiquement de gauche.

    Chico

  • Pourquoi s’étonner encore que ce qui à animé le PS durant toute son histoire et qui l’anime encore c’est anticommunisme ! Ce parti a passé plus de temps a combattre le PCF qu’a combattre la droite et le patronat et cela se verifie depuis 1920 . Les Blum , Mollet , Mitterand et maintenant Royal n’ont jamais mené une politique de gauche( Les avancées sociales de 1936 sont uniquement dues au mouvement social qui a accompagné la victoire du front populaire ) , ils sont au service du capital . Nous devons maintenant revoir nos alliances sinon le PCF est mort ! André 07

    • Je trouve cette discussion d’une très grande qualité. Il y a de vrais arguments pour réfléchir sur le rapport avec le PS aujourd’hui.

      C’est vrai qu’il y a encore 10 ans je faisais cette différence entre le militant de base et la direction du PS. Seulement les tests se sont multipliés, et aujourd’hui le PS ne se ditingue vraiment plus de la droite (c’est juste la forme des attaques qui le gêne, pas le fond).

      Avant je pensais que le PS était de gauche, car même si sa tête était de droite, sa base était tout de même de gauche (une histoire de comptes à rendre). Or, la multiplication des trahisons ces dernières années, notamment contre les plus "faibles", les attaqué(e)s par cette société capitaliste, ont fait que ce peuple de gauche a été laminé, et qu’on le veuille ou non, avec le soutien du PS.

      Un moment, il faut choisir son camp...

      Que signifie le PS dans ma banlieue ? Dans mon travail ? Dans mon rapport à la police ? Dans mon droit à me loger ? A étudier ? ...

      Où était sa base toutes ces dernières années où j’ai lutté ? Quand ma précarité m’asphyxiait ?

      Pour moi l’essentiel de la base du PS, comme celle du PC ou de la LCR même, elle n’est pas organisée. Et c’est vers elle qu’il faut concentrer notre énergie...

      Et nos derniers camarades de gauche échoués encore au PS seront sans doute là s’il se passe quelquechose... Je n’en doute pas un seul instant. Sûrement que Hollande sera pas loin non plus, histoire de voir s’il y a récupérer un p’tit chouia de voix... :-)

      Non, vraiment se tourner vers les partis n’est pas l’essentiel pour construire un autre futur, ce qui se passe dans le mouvement social depuis une dizaine d’années devraient nous instruire davantage...

      Fraternellement

      Renardiere