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Opinion - Le désarroi d’une gouvernance

Publie le mercredi 11 novembre 2009 par Open-Publishing

Le 15 septembre dernier, le conseiller du souverain Mohamed Moatassim aurait réuni autour de lui un certain nombre de chefs de partis politiques pour les inciter à contrer l’attaque tous azimuts dont le pays ferait l’objet...

Selon un des participants à cette rencontre, M. Moatassim aurait affirmé que des « mains étrangères » étaient derrière les récents événements qu’a connus le pays, tels l’action du mouvement « MALI », animée par des jeunes réclamant l’abrogation de l’article 222 du Code pénal, les événements du samedi noir de Sidi Ifni, de l’intifada de Sefrou, de ceux de nos provinces sahariennes. Plus encore, ces « forces occultes » seraient derrière les mouvements de christianisation et de « chiisation » rampants que connaîtrait le royaume chérifien. Il en serait de même pour les « orgies » sexuelles auxquelles se livreraient les membres de l’association « Kif kif ». Notre con…seiller aurait dû ajouter les musiciens disciples de Satan et les derniers adorateurs des arbres, des pierres et de Mère nature. Marocains, Marocaines toutes les forces du mal se sont liguées contre votre « country ».

Lutte contre l’extrémisme

C’est pour cette raison qu’il aurait demandé aux partis politiques de prendre leurs responsabilités, d’encadrer et de motiver et pourquoi pas de formater leurs ouailles (faut-il encore qu’ils en aient), pour affronter la prolifération de ces mouvements dont le but est d’extirper l’esprit de tolérance qui règne dans le pays et alimenterait les mouvements extrémistes. Ce qui aurait pour conséquence de porter atteinte au con….sen...sus national nécessaire : la lutte menée contre l’extrémisme au Maroc. Les propos du conseiller du roi ne sont pas tombés dans l’oreille d’un sourd. Et ce fut haro sur le baudet. Certains ont été jusqu’à « excommunier » les membres de l’association « MALI », déclarant qu’ils n’étaient pas des « leurs ». A ceux-là, il y a lieu de répondre qu’ils ne sont pas des nôtres car ils portent atteinte à la liberté individuelle de tout un chacun et à son libre arbitre. Signalons, tout d’abord, que ces « propos » du conseiller n’ont pas été démentis par une quelconque source officielle et que M. Moatassim a opté pour un silence assourdissant. Or, chacun sait qui ne dit mot consent. En fait, ces propos sont tout simplement troublants, voir relèvent d’un délire paranoïaque, centré sur un seul thème (les thèmes possibles sont : jalousie, préjudice, complot, érotomanie, etc.). Délire qui obéit à une logique dont il est très difficile d’en déterminer la nature et les méandres. Dans le cas qui nous intéresse, les thèmes sont le complot et la jalousie car, comment ne pas comploter et jalouser « le plus beau pays du monde » ! Ce n’est que par ce « délire paranoïaque » que l’on peut faire la jonction entre les événements d’Ifni (de l’avis même d’une commission parlementaire aux conclusions pour le moins contestables, ont pour origine des causes socio-économiques et qui a exclu toute intervention étrangère) et ceux de Sefrou, lesquels n’ont pour autres raisons que l’abandon dont souffre cette ville et les difficultés aussi diverses que multiples dont elle pâtit. Ce n’est que par ce « délire paranoïaque » que l’on peut établir le lien entre l’association « Kif kif » et « MALI », menée par des jeunes. Il ne s’agit ni d’adolescents désœuvrés, ni de « chmakria ». Ils jouissent, dans leur quasi majorité, d’un niveau universitaire. Donc conscients et engagés politiquement.

Ces jeunes ont voulu, par leur acte, non se remplir la panse mais dénoncer l’hypocrisie qui règne dans le pays et la grande schizophrénie qui agite une grande partie de ce peuple tiraillé ente un modernisme en trompe-l’œil et des traditions ancestrales et conservatrices. Ce sont ces non-dits que ces jeunes ont dévoilé et ce sont ces tabous qu’ils ont fait tomber. Leur geste rejoint le refus de cette journaliste soudanaise qui a accepté de continuer à porter un pantalon et de se faire condamner à 40 coups de fouets en vertu de l’article 152 du Code pénal soudanais qui prohibe le port d’un pantalon chez la femme.

Quant à la christianisation et la « chiisation » des Marocains et des Marocaines, elles relèvent des fantasmes de certains dirigeants. Cela relève de l’impossible. Le royaume est musulman depuis plus de 15 siècles. Quinze siècles auraient-ils été gommés du jour au lendemain ? On nous prend vraiment pour des c… Ce « délire paranoïaque », réel ou feint, laisserait tout simplement penser que les responsables ont,0 soit perdu les pédales, soit qu’ils paniquent. Ils font penser à un noyé qui veut s’accrocher à une bouée -ici à des partis- qui n’existent pratiquement plus. Preuve en sont les 70% d’électeurs qui ont déserté les urnes lors des dernières élections législatives car ils ne se reconnaissent plus dans ces partis. Et optant pour de tels subterfuges, M. Moatassim et ses com… pères semblent avoir opté pour une fuite en avant, laquelle ne fait plus désormais que sourire. Un triste sourire qui témoigne, dès lors, d’une gouvernance en errance.

Le Journal Hebdomadaire