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Oskar Lafontaine veut créer un nouveau parti, à gauche du SPD

Publie le samedi 28 mai 2005 par Open-Publishing

de Georges Marion

Depuis longtemps, déjà, il en parlait et, à plusieurs reprises, il menaça même de le faire. Mardi 24 mai, il a fini par sauter le pas : après trente-neuf ans de services parfois très contestés, Oskar Lafontaine, 61 ans, a claqué la porte du Parti social-démocrate (SPD). Président du SPD et ministre des finances, il avait démissionné en bloc de toutes ses fonctions en 1999, quelques mois seulement après l’arrivée au pouvoir de la gauche, en raison de désaccords avec le chancelier Schröder, notamment sur sa politique économique. Pour ses proches et les militants de base, ce départ a été ressenti comme une désertion. On ne lui a pas pardonné.

C’est dans le journal populaire Bild, où il tient une chronique hebdomadaire, qu’Oskar Lafontaine a fait connaître sa décision. "J’ai toujours dit que je partirais si le SPD allait aux élections avec l’Agenda 2010 et Hartz IV [ les programmes de réformes sociales lancés par Gerhard Schröder]" , a-t-il affirmé. M. Lafontaine souhaite un regroupement politique qui rassemble les néocommunistes du PDS et les déçus du SPD, dont certains viennent de créer une "Alternative pour le travail et la justice sociale" (WASG). Cette WASG a obtenu 2 % aux élections de Rhénanie-du-Nord-Westphalie. Le PDS, implanté surtout dans les régions de l’ex-Allemagne de l’Est, est crédité de 5 % au niveau fédéral dans les sondages.

ÉLECTIONS ANTICIPÉES

La décision de M. Lafontaine de quitter le parti intervient après l’annonce d’élections anticipées qui risquent d’être fatales au SPD en septembre. La gauche de l’échiquier politique allemand estime qu’elle peut en profiter pour faire une percée. Pour la première fois depuis longtemps, les électeurs déçus du SPD, convaincus que leur parti n’a aujourd’hui aucune chance contre le courant conservateur, pourraient voter "inutile" et envoyer au Bundestag une liste alternative plus proche de leurs convictions.

C’est dans cette perspective que se place Oskar Lafontaine qui, depuis des mois, a pris langue avec Gregor Gysi, l’ancien chef du PDS, tentant de rallier néocommunistes, gauche du SPD, altermondialistes et autres militants du mouvement social.

Avec Oskar Lafontaine, le SPD perd un homme qui fut longtemps considéré comme l’un de ses dirigeants les plus difficiles, mais aussi les plus prometteurs. Né à Sarrelouis en 1943, fils d’un boulanger mort au front, comme le père de Gerhard Schröder, Oskar Lafontaine, ancien élève des jésuites, était entré au SPD en 1966, alors qu’il était encore étudiant en physique.

Son ascension, en Sarre, puis au niveau national, sera régulière, à peine interrompue lorsqu’en 1990, alors qu’il est candidat du SPD à la chancellerie, une dérangée mentale le blesse d’un coup de couteau qui lui coûte presque la vie. En cette année de réunification allemande, dont il s’était méfiée, il n’a aucune chance contre Helmut Kohl. Cinq ans plus tard, en 1995, il prend la présidence du parti. Mais il doit s’effacer devant Gerhard Schröder comme candidat à la chancellerie en 1998. Le tandem qu’il forme avec ce dernier pour ramener le SPD au pouvoir après seize années de règne de Helmut Kohl ne résistera pas longtemps.

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