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PARTIR DES CONTRADICTIONS REELLES DES TRAVAILLEURS ET AVANCER

Publie le samedi 22 septembre 2007 par Open-Publishing
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Le capitalisme néolibéral va plus loin que le capitalisme fordiste : crise de rentabilité oblige il ne veut payer que la force de travail effective et performante à moindre prix. C’est une logique mondiale. Mais le dire ainsi ne fait pas avancer les luttes collectives même avec des arguments solides à l’appui. Car souvent nous n’avons pas les mêmes lectures. Et les médias ne développent pas ces problématiques.

Partons alors d’une expérience partagée d’un salarié pas trop jeune ayant une expérience de l’évolution des conditions de travail en France. Il sait peu ou prou que le patronat ne voudrait payer que la force de travail "en travail effectif" et qui plus est "performante". Le patronat non seulement ne veut plus de salaire différé, de salaire socialisé mais il veut mettre une pointeuse derrière chaque travailleur pour décompter le temps non travaillé ou le temps insuffisamment travailler. Il veut la quantité et la qualité le tout en payant le moins possible. Il y a certes sans doute un patronat dur et un moins dur - éternel débat - mais dans l’ensemble le patronat en veut toujours plus !

 I - ALLER PLUS LOIN : PASSER DE L’EXPERIENCE VECUE DES RAPPORTS SOCIAUX AUX LOGIQUES QUI LES RENDENT ANTAGONIQUES.

L’exploitation, nous sommes là au coeur de la logique du capital. La résistance à l’explopitation ayant cédé du terrain, une telle logique a pénétré au sein d’une sphère à priori éloigné de la concurrence et de la logique guerrière du capital. Une telle logique a pénétré dans les administrations depuis 20 ans, pas que dans la fonction publique territoriale fragilisée par un statut moins protecteur mais aussi la fonction publique d’Etat. Merci le PS, merci les juristes dit "de la crise du service public, merci les hauts fonctionnaires en charge de rapports pour la modernisation des services publics.

Le misérabilisme, c’est croire qu’il n’y a que les chômeurs et les précaires qui subissent sévèrement les politiques de flexibilisation et de marchandisation de la force de travail et en conséquence ne proposer - comme les ultralibéraux et les sociolibéraux - que des mesures minimales de « filet de protection ». Les autres, les « inclus », n’auraient pas à se plaindre. Mieux ils seraient « privilégiés ». Le patronat abonde par intérêt évident dans cette division entre « exclus » et « inclus », entre salariés du privé et salariés du public. A ne voir que les différences de catégories on fait l’impasse sur les dynamiques communes qui sont à la racine de ces processus de désaffiliation et d’exploitation de la force de travail. Ces dynamiques négatives sont pour certaines vieilles comme le capitalisme mais d’autres sont relativement récentes : elles se sont particulièrement développées depuis plus de 20 ans.

Il est exact que le statut du fonctionnaire a permis d’extraire (beaucoup plus que le code du travail pour le privé) la force de travail de son statut de vulgaire marchandise. Mais alors nous devrions en être heureux et promouvoir tant que faire se peut ce modèle relativement « civilisé » de protection à l’ensemble des travailleurs salariés. Cette dynamique positive a existé. Elle est aujourd’hui à contre-courant.

Le service public et le statut des fonctionnaires que nous avons connu en France depuis 1946 a formé un « modèle social » progressiste qui a longtemps servi d’étalon aux travailleurs du privé pour améliorer leur conditions de travail. Le service public travaillait à la satisfaction des besoins sociaux de la population hors référence marchande et les fonctionnaires disposaient d’un statut permettant des conditions de travail relativement « civilisées ». Sans doute ne faut-il pas porter au pinacle ni le service public - qui rapidement a pu être perverti par les logiques marchandes -, ni le statut des fonctionnaires – qui n’a jamais intégré les résidents étrangers durablement installés sur le territoire. Face au bloc soviétique le capital devait lâcher des concessions mais pas question de changer radicalement de logique !

Toujours est-il que cette époque est révolue. D’abord les socialistes des années 83 oublièrent les rapports sociaux antagoniques entre le capital et le travail pour faire l’apologie de l’entreprise-communauté. Dans le même temps de nombreux juristes universitaires se mirent à dénigrer les services publics (ils parlèrent de « crise du service public »). Dans la foulée des hommes politiques de gauche comme de droite ainsi que de haut fonctionnaires se mirent à « moderniser » l’Etat. La modernisation s’effectue, on le sait, toujours dans le même sens : moins de fonctionnaires, moins de garanties statutaires, plus de contractualisation, plus de « souplesses », plus d’objectifs de rentabilité et de performance, et surtout plus d’individualisation. En 25 ans le public a largement copié le privé. Pour autant, pour les dirigeants politiques à la botte du MEDEF cela ne saurait suffire : il faut aller toujours plus loin dans le sens de la dégradation des conditions de travail. Et ce qui sert de modèle c’est désormais les secteurs les plus flexibles, les plus soumis, les plus exploités. Car la rentabilité du capital investi oblige de plus en plus à la formation d’une force de travail soumise.

Et trop de soumission génère de la tristesse, de la mal-vie… La rentabilité économique est le nouveau fétiche devant qui les humains doivent s’agenouiller sans discuter. Beaucoup en crèvent et celles et ceux qui supportent mieux la charge un temps ne sont pas dupes même si certains se gaussent et en profitent pour vendre plus cher leur capacité de travail. La guerre interne à l’entreprise est mondiale et féroce. Elle produit le gonflement de l’armée de réserve qui sert si bien à la mise en concurrence des travailleurs salarié et la dégradation générale des conditions de travail et de vie.

 QUE FAIRE ?

 Résister à l’exploitation !

Résister à l’exploitation (vous savez la plus-value relative, absolue, etc..du vieux Karl) consiste à travailler à son rythme, tranquillement simplement pour participer à la production sociale de l’existence le tout en exigeant fermement un salaire correct qui ne diminue pas mais qui augmente avec les années. Au-delà de cette résistance, la philosophie qui veut que tout un chacun peut et doit participer à sa façon selon sa qualification à la production sociale de l’existence implique qu’une réduction du temps de travail hebdomadaire sans perte de salaire soit enclenchée pour embaucher les chômeurs. Le destin des uns est lié au destin des autres. Pas de guerre interne au salariat !

Un tel comportement n’est pas aisé à appliquer dans toutes les situations. Il importe de tisser des liens de solidarité fondés sur cette base, sur cette base exclusive car bien souvent d’autres considérants entrent en jeux qui vont vous mettre en porte-à-faux de cette philosophie. D’aucuns prennet pour base l’aspiration profonde des travailleurs à travailler correctement et efficacement. Mais cette aspiration est constamment manipulée avec efficacité par le patronat pour tirer la productivité vers le haut, pour intensifier le travail.. La prudence s’impose donc dans les discussions sur "partir des aspirations". J’observe d’ailleurs que les formations de la CGT qui prenaient jadis pour base l’aspiration des travailleurs contre la logique du capital n’est plus enseigné.

 Se syndiquer, adhérer à ATTAC !

Il importe aussi de se syndiquer. Soyez conséquent, dans la mesure du possible n’adhérez pas à un syndicat qui ignore ce qu’est l’exploitation de la force de travail. Le syndicat c’est aussi bien souvent un lieu de solidarité réel qui vous surprendra si vous n’avez écouté jusqu’à présent que des propos dévalorisants. Le syndicat c’est aussi vous-même.

Tout ne relève pas d’une logique interne à votre entreprise. Les rapports sociaux fondamentaux entre le capital et le travail ne disparaissent pas en sortant du travail. Le MEDEF se combat aussi hors du travail, simplement car vous n’êtes plus sous contrat, soumis et subordonné aux ordres du patron.

D’autres questions surgissent : quels droits des femmes ? quels droits des migrants ? quelle production durable ? quelle participation des citoyens aux principaux choix de production ? quelle place pour les services publics ? etc.

 Enfin, devenir communiste !

Mais il y a mille communismes ! Pour paraphraser Marx, le communisme c’est le mouvement réel qui vise à abolir l’ordre existant pour en créer un autre. Il y a donc au moins deux choses présentes à la racine du communisme comme mouvement (au-delà de la question l’adhésion à un parti "communiste") c’est la lutte "contre" (le capitalisme) qui surgit quasi naturellement mais aussi et la lutte "pour" . Pour l’alterdémocratie, pour le socialisme. Le communisme n’est pas un mouvement sans but, ce serait du mouvementisme, dit autrement : de l’altermondialisation et pas de l’altermondialisme .

La lutte de classe consciente des communistes rassemblés collectivement pour la déterminer comme projet (ce qui suppose ici une organisation collective) ne tourne pas en rond pour sa propre pérennité, avec des avancées (limitées) et des reculs (prévisibles). Cette lutte de classe vise un autre monde possible et nécessaire. Elles fait des choix stratégiques entre programme maximal (la visée communiste) et programme minimal (la politique de la "feuille de paye"). Pas l’aménagement de l’existant. Et pas de lutte sans débat car nul n’a la vérité révélé.

Christian DELARUE
syndicaliste CGT Finances
Militant altermondialiste (membre du CA d’ATTAC France)

1 De la libération laborale sur :
http://www.passerellesud.org
http://www.local.attac.org/35/DE-LA-LIBERATION-LABORALE

2 La réforme de la notation dans les administrations ; Du chacun pour soi à l’aggravation des conditions de travail

Texte écrit en 2005 sur Bellaciao :
https://bellaciao.org/fr//?page=article&id_article=31219
 http://www.local.attac.org/35/4-LA-...

3 La mise en concurrence des compétences ou les dévoiements de la reconnaissance libérale
http://www.france.attac.org/spip.php?article6574

4 Pour un statut comme "bien commun" du salariat résident
 http://www.local.attac.org/35/2-POU...

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