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PETITE VUE PANORAMIQUE DU CHAMP DE BATAILLE

Publie le lundi 6 novembre 2006 par Open-Publishing
2 commentaires

Il y a une image qui me hante. Le corps de ces deux femmes palestiniennes s’effondrant sous les balles anonymes de tireurs israéliens à Beit Hanoun dans la bande de Gaza. Je me fous totalement des sinistres prétextes avancés par les assassins et relayés d’abondance par leurs thuriféraires occidentaux : "Elles faisaient rempart de leur corps"... "il y avait des hommes déguisés en femme parmi elles"... Conneries ! Regardez cette vidéo et vous constaterez par vous-mêmes.

Je me rappelle le film de Spielberg, La Liste de Schindler, je crois. On y voyait un SS très beau, très bien fait de sa personne, abattant de sa fenêtre à la carabine, sans autre motif que sa propre folie, le prisonnier (ou la prisonnière, je ne sais plus) d’un camp nazi. Même impression d’écœurement glauque. De celles qui vous retournent le ventre quand vous constatez que les êtres humains ne s’appartiennent plus.

Et c’est ce qui se passe actuellement. Les êtres humains ne s’appartiennent plus. Tout témoigne de l’emballement sauvage et suicidaire d’une civilisation humaine à bout de souffle. Le navire prend l’eau de toute part.

Survolons les titres de la presse de ce 6 novembre 2006 : le conflit du Moyen-Orient ; les méfaits du réchauffement de la planète ; la mise à sac des réserves naturelles maritimes ; la fragilisation énergétique symbolisée par cette gigantesque panne électrique touchant 10 millions d’Européens en une seule soirée ; la fuite éperdue et impuissante vers le tout sécuritaire et le répressif (bientôt une nouvelle loi par agression !) ; l’exaltation infantile par des candidats aux Présidentielles de valeurs auxquelles plus personne n’accorde le moindre crédit, surtout pas ceux qui les prônent... Trouvez donc un seul élément positif, une seule lueur d’espérance dans ce fatras ! La "baisse du chômage" claironnée par nos gouvernants ? Pff !

S’il n’y avait que dans la presse. Ce matin, nous les salariés avons reçu de notre grande entreprise le document suivant. Et il y a quelques temps, je dînais avec des amis très bien de leur personne qui revenaient de Londres. Ils étaient encore sous le choc d’avoir dû, comme tous les passagers de l’aéroport, enlever leurs chaussures et la ceinture de leur pantalon, avant de se voir délestés de leur tubes dentifrice et autres flacons diverses. Signes grand-guignolesques d’un monde occidental si serein et paisible qu’il contraint ses ouailles à errer chaussettes à l’air et pantalon en souffrance dans les aéroports !

Pourquoi nous est-il toujours si difficile d’admettre les évidences qui heurtent notre entendement ? Jadis, personne ne voulut immédiatement entendre les témoignages des rescapés de l’holocauste nazi. Et les appelés de la guerre d’Algérie furent contraints au silence. Devant l’insupportable, nous perdons pied, aveuglés de terreur et de haine, ou pétrifiés par l’angoisse et l’effarement. Nous nous accrochons à quelques branches pour ne pas sombrer. En fermant les écoutilles, et en attendant que le cataclysme s’éloigne de lui-même, peut-être...

....................

Après ce sombre tableau, peut-on entrevoir quelques espoirs de renverser la situation ?

La seule chose dont je suis persuadé, c’est que rien ne s’arrangera dans le contexte de l’organisation néo-libérale actuelle. Les bouleversements qui suivent leur fameuse mondialisation aboutiront à l’effet inverse de celui escompter. Conflits exacerbés, paupérisation galopante, drames humains et tragédies naturelles. La spirale de la chute est déjà entamée.

Le mirage de la croissance régénératrice est une supercherie. Il y a belle lurette que la seule utilité de la croissance est d’alimenter quelques comptes en banques opaques, tellement déjà pleins qu’ils n’ont plus ni sens, ni utilité.

En vérité, la machine est devenue folle. Et les prétendus maîtres du monde, obnubilés par le délire de leur logique économique absurde, ne contrôlent plus rien de rien. Sans doute la raison pour laquelle, devenus enragés, ils en arrivent à faire tirer au jugé sur un groupe de femmes désarmées, ou à laisser croupir une bonne partie de leurs propres populations dans des ghettos murés sur eux-mêmes (banlieues, ghettos de la pauvreté, de la précarité ...)

Changer de monde ? En l’état actuel du monde en question, et compte-tenu des forces qui le composent, tout laisse à penser qu’il faudra attendre une déflagration planétaire (crise sociale, politique ou économique, guerre ...) pour que la communauté humaine soit amenée à une remise à plat des données. Et se trouver contraint par la force des choses de rebâtir un monde sur des décombres fumants est hautement périlleux.

Mais, m’objectera-t-on, on assiste à une prise de conscience politique dans certains pays. Des forces de rupture avec la logique néo-libérale sont portées au pouvoir par les électeurs. En Amérique latine, par exemple. Les altermondialistes savent aussi à l’occasion montrer leur puissance. C’est exact, on ne peut négliger cet élément. Je pense même que l’on doit s’engager résolument dans cette direction. Que c’est là notre seule chance.

Mais restons un peu lucide. Si les États-Unis ne s’étaient pas embourbés aussi stupidement en Irak et en Afghanistan, je ne donnerais pas cher de la peau de ces régimes de gauche émergeant au Venezuela, en Bolivie ou même au Brésil. Il suffit de se rappeler quelle fut la brutalité de la réaction des cow-boys au temps du Chili d’Allende ou dans le Nicaragua sandiniste première version.

Si d’aventure, lors des prochaines Présidentielles françaises, le ou la candidate de la gauche sociale parvenait au pouvoir, il ne faudrait certainement pas s’attendre à ce que les puissances néo-libérales et leurs alliés sur place consentent à lui ouvrir une voie royale (bon, "royale" n’est peut-être pas le terme approprié ici !) Bien au contraire, ces puissances ne reculeront devant rien pour entraver le fonctionnement de ce nouveau pouvoir. Pour être clair, ici comme ailleurs, je crains que la seule action politique ne suffise à un renversement de la situation internationale.

Je dirais que la déflagration annoncée plus haut me paraît désormais inévitable. Mais que ses effets dévastateurs ne pourront être amoindris et corrigés que par une mobilisation résolue de la gauche sociale internationale.

À condition toutefois qu’elle ne cède pas aux cris de victoires intempestifs, aux idolâtries aveugles. Et aussi au fait qu’elle surmonte ses divisions. Il est grand temps de prendre conscience de la situation, d’en finir avec ces mesquines obstinations partisanes et ces chamailleries d’un autre âge que l’on voit encore fleurir au fil des commentaires sur nos sites préférés. C’est beaucoup demandé ? On verra.

Messages

  • Mais restons un peu lucide. Si les États-Unis ne s’étaient pas embourbés aussi stupidement en Irak et en Afghanistan, je ne donnerais pas cher de la peau de ces régimes de gauche émergeant au Venezuela, en Bolivie ou même au Brésil. Il suffit de se rappeler quelle fut la brutalité de la réaction des cow-boys au temps du Chili d’Allende ou dans le Nicaragua sandiniste première version.

    Salut Yéti. Le ton général de ton article est bien sympatique mais je ne peux pas etre d’accord avec le paragraphe que je recopie.
    Les rapprochement historiques n’ont pas de sens : "si les USA ne s’était pas embourbés" ... parce que peut-etre que précisément une des causes des tragiques bourbiers irakiens et afghans vient de l’isolement de plus en plus manifeste (contrairement aux lieux communs) des USA dans le monde. C’est aussi cet isolement qui ne permet plus aux USA de faire la loi exactement comme ils le voudraient dans leur pré carré....
    En plus je ne crois pas que la chute de Allende ou celle heureusement moins tragique de Ortega V1 au Nicaragua était inéluctable. Peut-etre qu’Allende a sous estimé la réaction et a commis une erreur en refusant d’armer le peuple. Peut-etre Ortega a fait preuve de légèreté en acceptant les conditions d’une élection présidentielle sous influence US face à Violetta Chamoro en 90 ?

    et ... on l’oublie mais un petit pays résiste encore et toujours à l’Empire dans l’indifference totale des démocrates de la "communauté internationale", vous avez deviné lequel, bien sûr. Pensez vous que c’est par sympathie envers les cubains que les yankee n’ont pas déjà déposés Castro ? Outre la difficulté de l’opération, n’est ce pas aussi la crainte, eût égards au prestige de la Révolution cubaine (insoupçonnable pour nous qui sommes habitués à "l’information" signée Robert Ménard, Libération ou Le Monde), d’un formidable retour de baton dans toute l’amérique latine (et peut-etre au delà) trop préjudiciable aux intérets économiques ?

    Et a contrario, si on veut bien lever le nez de notre nombril et cessez de juger le monde à travers un prisme tout imprégné de "valeurs occidentales" on s’apercevra que les mouvements de libération nationales et de résistance au rouleau compresseur libéral ne sont pas isolés mais tissent des liens de plus en plus tenus. Castro, Chavez, Morales bien sûr, mais aussi n’en déplaise aux bobos de Libé, Nassrallah et même peut-être Ahmadinejad représentent, pour beaucoup des déshérités dans le monde l’espoir d’une construction de sociètés non basée uniquement sur l’individualisme et le mercantilisme. Ils représentent la Résistance, l’indépendance nationale, le respect des cultures.

    Par contre il est vrai que de telles evolutions se font attendre chez nous !

    Jips

  • Cher Yéti,
    Je comprends parfaitement que tu sois hors de tes gonds et tu n’es pas le seul. Merci pour cette remise à l’heure de nos pendules. J’approuve pleinement ton vivifiant article. Bravo.
    Les menteurs et manipulateurs sont en effet au pouvoir, pourrissent notre environnement et les citoyens. Le mensonge est roi dans tout média confondu. Les mots n’ont plus grande signification, les morts non plus d’ailleurs. Le tout dans un silence complice ASSOURDISSANT.
    Les criminels de guerre sont devenus des "démocrates"... Les nazis ont fait des émules, la preuve.
    Les grandes gueules de la "philosophie" du sérail aux abonnés absents.
    A gerber et pourtant la lutte continue !
    Amicalement
    Tzigane