Accueil > Palestine demain

Palestine demain

Publie le jeudi 13 janvier 2005 par Open-Publishing


de ZVI SCHULDINER

L’euphorie internationale des dernières semaines a atteint son comble avec le triomphe électoral d’Abu Mazen, maintenant héritier officiel du président Arafat. Et dans les prochaines heures va s’ajouter à cela la formation d’un nouveau gouvernement en Israël. Le processus électoral dans le cadre de l’Autorité nationale palestinienne s’est déroulé dans les territoires occupés par Israël, même si dans les derniers jours les soldats israéliens se sont retirés de la plupart des villes palestiniennes. Pour nombre de Palestiniens le processus électoral a été important en soi, parce qu’il a signifié le retour à des pratiques démocratiques qui semblaient oubliées. Le résultat était couru d’avance, mais après des années de souffrances et sous un système autocratique palestinien, opprimé à son tour par la domination de l’occupation israélienne, le processus semble ouvrir de nouveaux horizons politiques et réveille pour cette raison de nouveaux espoirs quant à la reconstruction du tissu démocratique de la société palestinienne.

Les élections dans les territoires palestiniens sont très différentes des "élections libres" en Irak. L’occupation israélienne n’est pas arrivée à atteindre le cœur du système politique palestinien et pour l’essentiel les occupés gardent une autonomie et des pratiques qui les placent dans une position très différente du monde arabe en général.

L’élection d’Abu Mazen ne signifie pas que les négociations de paix sont imminentes. Les commentateurs qui croient que le processus a changé font une erreur fondamentale : la mort du président Arafat ouvre réellement un chapitre nouveau dans l’histoire de la région mais il est juste de préciser que le problème de la paix n’est pas lié aux fautes ou à la politique d’Arafat.

Pour l’essentiel, le problème était, est et sera le problème de l’occupation militaire israélienne.

En un certain sens les élections palestiniennes nous éloignent du cœur du problème et nous font oublier quels sont ses éléments essentiels. Le terrorisme, criminel et condamnable, ou les déclarations d’Arafat, intelligentes, erronées ou stupides, n’étaient rien d’autre que le résultat inévitable et nécessaire de l’occupation.

Ces dernières années l’occupation s’est faite plus cruelle et violente. Les Israéliens n’ont été pas les seuls à payer le prix du terrorisme, des milliers de morts palestiniens ont payé eux aussi le prix du terrorisme d’état israélien.

L’occupation n’a pas seulement signifié la mort, l’invalidité, des milliers de blessés : l’occupation signifie la destruction systématique de la société palestinienne, de ses institutions politiques, de son économie, l’élimination des faibles "forces de l’ordre" qui, malgré leur effectif de 60 000, n’étaient rien d’autre qu’un fantôme à la valeur purement économique.

L’occupation signifie des champs rasés, un chômage énorme, faim et misère, des maisons détruites et un grand Mur de Haine qui au nom de la guerre au terrorisme alimente plus de haine et un esprit de vengeance dans les cœurs de 3 millions de Palestiniens entassés dans la grande prison de l’occupation.
Est-ce que, peut-être, Abu Mazen peut diriger le peuple palestinien sans reprendre quelques-unes des revendications basilaires, essentielles, élémentaires d’un peuple sous occupation ? Dans l’immédiat, il est prévisible que le nouveau leader palestinien se concentrera sur quelques objectifs propres à une période de transition. Libération des prisonniers et un retrait probable d’Israël aux frontières du début de cette deuxième Intifada seront les objectifs immédiats. Mais le problème demeure : une véritable paix ne passe que par le retrait aux frontières de 1967, au minimum.

Le gouvernement israélien qui va prêter serment dans les prochaines heures jouera dans les prochains mois la partie du retrait unilatéral de la bande de Gaza. A la démagogie d’ "un homme de paix" comme Sharon va s’unir aujourd’hui la rhétorique trompeuse d’un Peres, qui continue à être illusionné par ses propres mots et par la proximité du pouvoir.

Cela fera partie d’un conflit sérieux dans la société israélienne et aura un effet symbolique positif s’il amène réellement à l’évacuation des colons israéliens, mais il est loin d’être un programme de paix. Pire encore : si les affrontements que l’extrême droite est en train de préparer prennent de la force, cela pourra mettre fin plusieurs années durant à un véritable processus de paix.

Il s’agit de deux gouvernements nouveaux, la présence internationale au Moyen Orient est aujourd’hui plus forte, mais tout cela risque d’être un jpyeux festival où l’on oublie les paramètres essentiels du conflit et la nécessité d’arriver à une paix négociée qui signifiera forcément et avant tout la fin de l’occupation israélienne des territoires occupés en 1967.

Traduit de l’italien par Karl & Rosa de Bellaciao

 http://www.ilmanifesto.it/Quotidian...