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Philippe VAL ou la deuxième mort de Charlie Hebdo

Publie le jeudi 24 juillet 2008 par Open-Publishing
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de Slovar

Lorsque j’avais entre 16 et 17 ans, la lecture d’Hara Kiri puis de Charlie Hebdo était une vraie bouffée d’oxygène dans la France gaulliste de l’époque.

Mes meilleurs souvenirs (pas forcément pour les fondateurs du journal)

Le numéro d’Hara Kiri saisit par la justice à la demande de Valery Giscard D’estaing Président de la République pendant le premier choc pétrolier que j’ai pu avoir entre mes mains. On y voyait un montage dans lequel l’épouse du Chef de l’Etat était assise nue sur les genoux d’un émir. Le texte disait : Giscard vend sa femme aux émirs. Ledit émir disait : "Trop maigre, un baril"

Lorsqu’on voit aujourd’hui les fakes (montages photoshop), disponibles sur le web, on a du mal à croire que que cela pouvait suffire à l’époque pour interdire un journal.

Charlie Hebdo était interdit dans les casernes (au même titre que l’humanité) dans les années 70. En 1976, il était enfin autorisé Le premier numéro autorisé titrait : Premier numéro autorisé dans les casernes "Merde à l’armée" sur fond kaki. Interdit dès le lendemain.

C’était ça Charlie !!!

De Cavanna (" Il ne suffit pas d’être con. Il faut être fier de l’être" et son "je l’ai pas lu, je l’ai pas vu mais j’en ai entendu parler") à Choron (les jeux de con du Professeur Choron) en passant par Reiser (Gros dégueulasse) , Wolinski (vive les femmes) , Delfeil de Ton , GEBE (l’an 01) Cabu (Duduche, les beaufs) et tant d’autres on pouvait ressentir une authentique énergie contre un pouvoir réactionnaire et répressif. Il n’y a qu’à voir le nombre d’interdiction de publication ou de mise en vente.

Créé en 1960 sous le nom de Hara Kiri (nous conseillons à ceux qui ne le connaissent pas de faire des recherches sur un moteur de recherche d’images pour découvrir quelques couvertures), interdit à la publication en 1961. Reparaît puis de nouveau interdit en 1966. Interdit en 1970 (Bal tragique à Colombey) il renaîtra de ses cendres sous le nom de "Charlie Hebdo".

La liste des interdiction de parution, d’affichage ou de présentation au public pour les kiosque serait trop longue mais prouve la détermination des hommes.

Le Charlie Hebdo de Philippe VAL ne risque pas ce genre de mesures.
Pourquoi ?

Tout simplement parce que Philippe VAL a transformé un mythe en un fanzine qui ne dérange plus grand monde à part quelques religieux tatillons. Philippe VAL a transformé un brûlot en mag pour bobos amusés dont seule la couverture essaye encore de donner le change.

J’ai connu le Philippe VAL qui se produisait sur scène aux côtés de Patrick FONT dans les années 70. Qu’en dit le site Web Aubonsketch ?

Patrick FONT a surtout inventé un style, un ton nouveau pour le café-théâtre et la chanson. Et ce, en même temps que Coluche et bien avant Renaud. Un ton mordant, provocateur, libertaire, proche de l¹esprit d’ "Hara-Kiri" des années soixante mais sur la scène. Il a, par ce biais, influencé pas mal de nos nouveaux humoristes. Christophe Alévèque, Laurence Boccolini, Didier Porte, Laurent Violet, ... / ...

Dans sa jeunesse, il passait ses journées d’ado à écouter ses maîtres en matière de chanson : Brassens ( le détonateur de sa vocation), Roger Riffard, Guy Béart, Anne Sylvestre, Patachou, Marie-José Neuville, Pierre destailles ... / ... Mais c’est en juillet 1966 qu’il fit véritablement ses débuts de chansonnier en étant embauché au Caveau de la République pour trois chansons et 20 francs par soirée. C’est dans ce cabaret, véritable antre des chansonnier (ils sont tous passés par là...), qu’il fera son apprentissage de la scène et qu’il créera son style unique "toujours vulgaire, jamais grossier !..." ... / ...

Arrive enfin l’année 1970, année importante dans la vie de FONT, celle de sa rencontre avec Philippe Val. C’est le Coup de foudre artistique. Val, en 70, c’est un gros pull en laine troué, une moustache bizarre, des cheveux longs mal coiffés et des chansons pessimistes et destructrices qu’il crache à la gueule du public avec une rage non dissimulée. Dès le début de leur rencontre ils ont envie de monter un spectacle ensemble. C’est ainsi qu’en Janvier 1973, au Théâtre de Dix-Heures, aura lieu la première du duo "Font & Val". Le public est coupé en deux : les anarcho-gauchistes abonnés à vie à "Charlie Hebdo" sont heureux, tous les autres sont radicalement contre. .../...

Entre 77 et 86, Font & Val vivent leurs heures de gloire. Il n’y a pas un festival de la chanson où on ne les voit pas, pas une année sans la sortie d’un nouveau disque et un nouveau spectacle. Charlie Hebdo leur consacre même une double page entièrement dessinée par l’ami Cabu, qui signera également la plupart de leurs pochettes de disques et affiches.

Le Vendredi 16 Août 1996, je lis dans mon journal régional qui est "L’Est Républicain" : "Font a été arrêté, mis en examen et écroué sur plaintes de plusieurs familles pour des affaires de moeurs à l’encontre de filles mineures. ... / ... mais a catégoriquement nié toute autre accusation. Il fera 4 ans de prison.

Aujourd’hui, Font est tous les lundis soirs au théâtre du Lucernaire à Paris dans un spectacle intitulé "Politiquement Incorrect" avec plein de ses anciens potes ... Val, de peur que son histoire ne brise sa carrière, refuse de retravailler avec lui ... / ... La vie continue... et Font avec...

Déjà les prémices de l’angoisse du politiquement correct .. et du Qu’en dira-t-on ?

Est ce cette même angoisse qui pousse Philippe VAL à sanctionner Siné ?

Et pour les plus jeunes, qui est Siné ? - Source WIKIPEDIA

Il exprime ses opinions anti-colonialistes pendant la guerre d’Algérie. Alors qu’il remplace brièvement François Mauriac au bloc-note du journal lorsque ce dernier devra s’absenter pour raisons de santé, ce "débloque-note" vaut à L’Express de nombreuses lettres indignées de ses lecteurs et obligera Jean-Jacques Servan-Schreiber à publier une lettre d’excuses en première page du journal, ce qui n’arrangera pas ses relations avec Siné, celui-ci continuant à publier des dessins engagés dans le journal. Défendu par Jacques Vergès, alors avocat du FLN, Il quitte l’Express en 1962 pour créer son propre journal Siné Massacre où il exprime alors son anticolonialisme, anticapitalisme, anticléricalisme et son anarchisme.

En mai 1968, il fonde L’Enragé avec Jean-Jacques Pauvert. En 1981, il rejoint l’équipe de Charlie-Hebdo avec sa rubrique Siné sème sa zone et en 1981 Michel Polac fait appel à lui pour l’émission Droit de Réponse sur TF1. À la suppression de l’émission en 1987 en raison d’un dessin (de Wiaz) annoté d’un : Bouygues, une maison de maçon, un pont de maçon, une télé de m..., .../ ...

En 1992, il reprend sa rubrique Siné sème sa zone à la reprise du nouveau Charlie Hebdo, non sans quelques heurts avec la nouvelle direction. En 2004, il soutient la liste Euro-Palestine. Il est également membre du comité de parrainage de la Coordination française pour la Décennie de la culture de paix et de non-violence.

Siné a toujours affiché un athéisme militant.

"La religion m’énerve. C’est de l’obscurantisme, ça rend les gens idiots. La soumission enlève le libre arbitre et impose des tabous. Je n’ai jamais cru en Dieu. Ça m’a toujours paru infantile. Mais ce n’est pas le fait que les gens croient qui m’énerve, c’est le prosélytisme, cette façon de nous faire partager des trucs saugrenus. Les curés, les rabbins, les ayatollahs inculquent des choses fausses aux enfants. La religion devrait être quelque chose de personnel."

"Je vois d’un meilleur œil les religions orientales, par exemple l’hindouisme. Je trouve amusantes l’idée de renaître et leur représentation des dieux. Je n’y crois pas, mais ça me choque moins. Et j’adore les gospels. Ce qui me plaît, c’est la façon dont chantent les noirs américains, pas l’aspect religieux." Le 11 juin 2008, Siné avait publié, également dans Charlie Hebdo, une chronique violemment contre l’islam qui ne provoque pas de remous éditorial : « J’avoue que, de plus en plus, les musulmans m’insupportent et que, plus je croise les femmes voilées qui prolifèrent dans mon quartier, plus j’ai envie de leur botter violemment le cul ! »

Et oui, ça c’est Siné avec ses outrances et c’était aussi ça Hara Kiri et Charlie Hebdo

Mais Siné c’est une époque, un contexte et un journal dont lui même et VAL n’ont pas la même vision. Mettre Bob Siné au pilori et au chômage, signifie que l’esprit et le nom du journal ont définitivement cessé d’exister.

Quel est le motif pour lequel Philippe VAL a sanctionné Siné ?

Dans une chronique publiée le 2 juillet 2008, Siné écrit à propos de Jean Sarkozy :

« Jean Sarkozy, digne fils de son paternel et déjà conseiller général de l’UMP, est sorti presque sous les applaudissements de son procès en correctionnelle pour délit de fuite en scooter. Le Parquet a même demandé sa relaxe ! Il faut dire que le plaignant est arabe ! Ce n’est pas tout : il vient de déclarer vouloir se convertir au judaïsme avant d’épouser sa fiancée, juive, et héritière des fondateurs de Darty. Il fera du chemin dans la vie, ce petit ! »

Ce texte déclenche une vive polémique lorsque six jours plus tard, Claude Askolovitch dénonce sur RTL « un article antisémite dans un journal qui ne l’est pas », tandis que Philippe Val promettait de condamner le texte de Siné dans son journal. Siné, après avoir rédigé une lettre d’explications et d’excuses à paraître, se rend compte que Philippe Val voulait publier conjointement un texte que Val voulait faire signer par toute la rédaction - une partie refusera, dont Michel Polac, et le texte ne sera pas publié -, ce qu’il considère comme « une pétition contre lui ». Il trouve cela « dégueulasse » et refuse donc de publier ses excuses. Philippe Val lui annonce alors son licenciement, le 15 juillet 2008

Une pétition déclarant « Nous apportons notre soutien inconditionnel à Siné » a été signée notamment par des dessinateurs dont Jacques Tardi, Tignous, Willem, Pétillon, Pichon, Philippe Geluck, Desclozeaux, des écrivains tels Gilles Perrault, François Maspero et Raphaël Confiant, des philosophes comme Michel Onfray et Daniel Bensaïd, les humoristes Guy Bedos et Christophe Alévêque, l’écrivain et cinéaste Fernando Arrabal, le réalisateur Pierre Carles, des enseignants, des journalistes (Denis Robert, Denis Sieffert), la comédienne Marina Vlady, le porte-parole de la LCR Alain Krivine, l’entarteur Noël Godin, le vice-président de l’Union juive française pour la paix Pierre Stambul, le musicien François Hadji-Lazaro, le DAL ou encore Rony Brauman, ex-président de Médecins sans frontières, ...

Clairement, en ayant lu la partie de l’article consacré à FONT et VAL, il semblerait que le "gros pull en laine troué, une moustache bizarre, des cheveux longs mal coiffés et des chansons pessimistes et destructrices qu’il crache à la gueule du public avec une rage non dissimulée" ait repris le dessus mais avec toutefois une nouvelle habitude : Celle du politiquement correct. Il est vrai que les afficionados de Charlie Hebdo se souviennent d’avoir halluciné en voyant Philippe VAL sur les plateau de télévision en 2005 se faire le promoteur du OUI à la constitution européenne.

Que crains Philippe VAL ?

Que l’embourgeoisement de son journal ne soit remis en cause par un vieux guerrier anti conformiste ?

Que quelques philosophes ou grands intellectuels arrêtent leur abonnement à Charlie ?

ll semble que l’affaire des caricatures de Mahomet et la couverture de Charlie de cette époque ait sappé la résistance nerveuse de Philippe VAL. A moins que ce ne soit le soutien de Nicolas SARKOZY à cette époque ?

Rappel : Alors que Charlie Hebdo, poursuivi après la publication de caricatures du prophète Mahomet pour "injures publiques envers un groupe de personnes en raison de leur appartenance à une religion" par la Grande mosquée de Paris et l’Union des organisations islamiques de France (UOIF), deux composantes du Conseil Français du Culte Musulman (CFCM), répond depuis ce matin de ces accusations devant le tribunal correctionnel de Paris, Nicolas Sarkozy affirme dans une lettre lue à l’audience par l’un des avocats de l’hebdomadaire satirique : "Je tiens à apporter mon soutien à votre journal qui s’inscrit dans une vieille tradition française, celle de la satire".

La peur n’évite pas le danger M. VAL, et si la peur l’emporte sur tout le reste que penser de votre vue de l’impertinence ?

Impertinence, nous vous le rappelons, sans laquelle le journal que vous dirigez n’aurait jamais existé

J’avais déjà du mal ces derniers temps à acheter Charlie en raison de la faible qualité de son contenu. Cette fois-ci lorsque j’aurai cette envie, je me plongerai dans la lecture d’un livre qui m’a été récemment offert et qui montre et parle des années Charlie. Les vraies !!!

Pour finir, j’aimerais pasticher Diane Dufresne et sa "Chanson pour Elvis".

Tu vieillis mal, Charlie

T’aurais p’t’êt dû mourir

Comme Marilyn ou Janis

T’avais pas l’droit d’vieillir

Décidément M. VAL, vous êtes un imbécile que j’espère ... malheureux. Rendez-nous Charlie Hebdo et baptisez votre journal VAL Hebdo !!!

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