Accueil > Pinochet échappe une nouvelle fois à la justice
Pinochet échappe une nouvelle fois à la justice
Publie le vendredi 10 septembre 2004 par Open-Publishingde Eduardo Gallardo
Une manoeuvre de dernière minute de ses avocats a permis mercredi soir à l’ancien dictateur chilien Augusto Pinochet d’échapper une nouvelle fois à la justice de son pays, qui prévoyait de l’interroger sur la disparition d’opposants durant les 17 années de sa dictature (1973-1990).
L’audience avait été fixée à jeudi par le juge Juan Guzman, qui devait interroger le vieux caudillo de 88 ans à son domicile dans le cadre de l’enquête sur l’opération Condor. Le magistrat bénéficiait d’un arrêt de la Cour suprême chilienne, qui avait levé fin août l’immunité que Pinochet s’était lui-même octroyée avant de quitter la présidence.
Mais, dans un nouveau rebondissement judiciaire, la Cour d’appel de Santiago a accepté mercredi d’examiner une requête des avocats de la défense en faveur du déssaisissement du juge Guzman, au motif que ce dernier ferait preuve d »’animosité » à l’égard de leur client.
Dans l’attente de la décision de la Cour d’appel, l’affaire est retirée au juge Guzman et transférée à sa collègue Gabriela Perez. Si celle-ci a le droit théorique d’interroger Pinochet à tout moment, il lui faudrait plusieurs jours pour éplucher le volumineux dossier d’accusation.
Le représentant du ministère public, Hugo Gutierrez, s’est élevé contre ce « miracle judiciaire », s’étonnant de « la rapidité avec laquelle la Cour d’appel a réagi » pour venir en aide à Pinochet.
Juan Guzman enquête sur la participation présumée du général à l’opération Condor, vaste plan de répression mis en place par les dictatures latino-américaines dans les années 70 et 80 pour éliminer les opposants de gauche et écraser toute dissidence.
Selon les documents judiciaires liés au dossier, 20 Chiliens ont « disparu » à la suite d’actions de répression menées par les services secrets argentins, brésiliens, boliviens, chiliens, paraguayens et uruguayens.
Le juge Guzman avait placé l’ancien dictateur en résidence surveillée pendant 43 jours en 2001 après l’avoir inculpé d’enlèvements et d’assassinats d’opposants dans le cadre du dossier de la « Caravane de la mort », nom donné au commando militaire qui exécuta 75 opposants au lendemain du coup d’Etat du 11 septembre 1973.
Toutefois, le magistrat n’avait déjà pu interroger Pinochet, la Cour suprême classant même l’affaire en 2002, jugeant que la « légère démence » dont souffre l’ex-dictateur l’empêchait d’assurer sa défense.
Le 26 août dernier, l’argument n’a pas été retenu par le majorité des juges de la
plus haute juridiction chilienne. Le juge a ainsi obtenu la levée de l’immunité de Pinochet, tout en sachant que, pour aller au bout de son instruction, il lui faudrait livrer une nouvelle bataille centrée sur l’état de santé réel du général. A en croire ses avocats, il souffre en effet d’une douzaine de pathologies, de l’arthrose au diabète en passant par l’hypertension. (AP)
http://permanent.nouvelobs.com/etranger/20040909.FAP8615.html?1303