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Pourquoi attaquer l’Iran ?

Publie le samedi 23 septembre 2006 par Open-Publishing
5 commentaires

La raison est simple : le dollar. La valeur des importations d’énergie des USA fait passer le budget du Pentagone pour l’argent de poche d’un paysan soudanais. Tout ce qui permet de jouer avec le pétrole représente de flots de dollars qui peuvent sauver l’économie étatsunienne ou enrichir immensément les compagnies pétrolières, voire même les deux. Accessoirement, ces compagnies sont quasi-toutes anglo-américaines. Et qui était en Irak avec les USA et ne partira qu’en 2007 malgré toutes les pressions exercée par son parti et l’opinion publique ? Un anglais appellé Blair qui n’a jamais caché son intérêt pour l’argent.

Tout est prêt pour la guerre en Iran, ou presque.

1.Les élections américaines vont avoir lieu prochainement, si , si

Les élections législatives à mi-mandat au Congrès vont avoir lieu bientôt. Trois résultats sont possibles :
 Un Congrès restant acquis au thèses de Geroges W. Bush et aux néo-cons : alors la guerre devient une hypothèse très forte.
 Un gain marginal lors des élections pour les camp opposé à la guerre en Irak. Ce serait le pire car W ne peut qu’imaginer les mettre à mal en lançant une autre guerre qui les diviserait.
 Un gain fort pour les pacifistes. C’est la seule solution éloignant les guerres mais la probabilité est faible.

Deux éléments rentrent en jeu pour décider de la date. W. Bush pourrait avoir la volonté de provoquer un électro-choc avant les élections législatives. Une nation en guerre soutient le pouvoir en place et généralement ses franges les plus réactionnaires. D’un côté c’est peu probable, la machine de guerre américaine est lourde à mettre en place. D’un autre, cette mise en place n’est-elle pas déjà réalisée en Irak ? Et toujours de ce côté : il n’y a pas tant à mettre en place pour des frappes « chirurgicales » du type visant à détruire l’infrastrcture en Iran comme cela a été fait récemment au Liban en utilisant Israel comme lanceur. Nous y reviendrons ?

Si Bush est tenté de jouer les prolongations, c’est à dire de ne pas lancer l’attaque avant les élections au Congrès, les probabilités augmentent encore pour une guerre avant les présidentielles. W n’a aucune envie de partir de son trône en laissant derrière lui le bourbier irakien. Une guerre totale serait beaucoup plus difficile à lui attribuer comme un échec puisqu’elle serait menée par quelqu’un d’autre. Il vaudrait mieux ne pas négliger non plus le côté fondamentaliste chrétien de W qui pourrait lui souffler d’être responsable de l’Armageddon, justement ça se passe dans ce coin. Pire, un Congrès acquis à ses thèse pourrait imaginer de ne pas lancer des présidentielles au milieu d’une guerre touchant aux intérêts vitaux de la nation. C’est une thèse défendue par certains qui pointent du doigt un certain nombre d’éléments en ce sens mis en place par l’équipe Bush depuis 7 ans.

2.La loi légalisant la torture va être votée prochainement aux USA

Cette loi vient de la Maison Blanche et elle a déjà l’accord des républicains. Autant dire que c’est fait, sauf si....

Pour déclencher une guerre totale au moyen-orient, la légalisation de la torture est une étape aussi indispensable qu’inhumaine. Certes, l’armée américaine est assez opposée à cette loi car elle craint à juste titre le « choc en retour » des ennemis sur le terrain qui n’auraient aucune raison de se priver. A contrario, cette inhumanité réintroduite sur le champ de bataille est du pain benit les Faucons (aux USA comme en Europe) car elle bloque toute capacité de rationalisation. Imaginez combien sera diminué l’audience du camp de la paix face au spectacle navrant des corps martyrisés de nos soldats. L’opinion publique occidentale sera tétanisée.

La torture est un facteur de pourrissement du conflit car il entraîne inévitablement la vengeance Il n’est que de voir comme tout le monde enchaïne si bien en Irak sur le mauvais exemple lancé par les escadrons de la mort importés des dictatures sud-américaine par l’ambassadeur US John Negroponte.

Cette loi "pro-torture" a en plus quatre effets secondaires inscrits dans le texte :

 Elle va protéger W et ses subordonnés et tous ceux qui se sont rendus coupables de torture et/ou d’enlèvement de tous recours en justice nationale (USA) et internationale.

 Elle supprime définitivement la personnalité juridique des accusés de terrorisme et comme l’avait souligné Hannah Arendt, c’est une étape indispensable.

 Elle va permettre de menacer ou même de réaliser l’emprisonnement sans limite de tout opposant externe.

 Elle va permettre de « menacer de » ou de torturer réellement tout opposant. En dehors de l’aspect espionnage, Naomi Klein a déjà signalé que sur ce point, il ne faut pas sous-estimer l’aspect dissuasif d’une telle menace.

3. Un coup d’état se prépare dans l’opinion publique anglo-saxonne pour éliminer le 1e ministre (PM) irakien.

Un pouvoir fort et militaire (et donc non-confessionel) est indispensable pour tenir l’Irak en cas d’attaque sur l’Iran, les alliés Shiites risquant de devenir terriblement instables dans ce cas.

Quatre indices évidents et connus :

1° Ce PM souhaite que tous, y compris la Chine, puissent concourir pour l’exploitation du pétrole irankien. Au Congo, le président précédent avait payé une telle idée stupide d’une guerre civile et de sa vie alors qu’il ne s’agissait que protéger les bénéfices marginaux américain sur le cuivre. Pour le pétrole irakien, je vous laisse deviner ce qui va se passer.

2° Des articles sortent actuellement dans la presse américaine décrivant le PM comme incapable de maîtriser la guerre civile en cours. Pire même, il serait un obstacle à la volonté de l’armée de « remettre de l’ordre ». Voir à ce sujet http://www.wsws.org/articles/2006/sep2006/iraq-s21.shtml Refrain bien connu, hélas.

3° Accessoirement, le PM irakien a visité l’Iran (axe du mal)

4° Accessoirement (bis), il a critiqué Israel, « horresco referens ».

4. "L’occident chrétien" est coincé dans le processus. Il devra suivre.

1° L’OTAN est impliqué dans le processus. Il est présent en Afghanistan alors que celui-ci risque de détoner (de « détonation ») en cas d’attaque sur l’Iran. Les alliés seront donc quasi-mécaniquement entrainés dans le processus.

2° Pire, les quelques Européens dont la France et l’Italie qui auraient pu faire barrage à l’OTAN sont déjà impliqués de la « Pax Americana » au Liban alors que celui-ci aurait pu être une épine dans le flanc d’Israel par Hezbollah interposé. La victoire, bien réelle du Hezbollah n’est en ce sens qu’un trompe l’oeil. Traduction pour les chancelleries européennes : si ça pête au Iran, barrez-vous du Liban au galop. Mais vous ne pourrez pas.

Deux raisons pour que les européens se trouvent cloués au Liban. D’abord la mauvaise conscience vis-à-vis d’Israel : "on ne va pas encore lâcher les juifs", sous-entendu "comme avec les nazis". Tiens, qui parle du fascisme vert en ce moment ? Ensuite, le Hezbollah bougera trop vite si l’Iran est attaqué. Il lui doit trop. Et s’il est arrivé au bout des troupes israeliennes, il ne va faire qu’une bouchée des européennes. Là aussi, l’enchainement est mécanique et peu facilement entraîner une escalade du conflit sous le regard bienveillant des chrétiens libanais comme d’Israel trop heureux de voir les "tièdes européen" liquider les musulmans.

L’opinion publique française sera aussi coincée par les violences nées des provocations à l’égard des musulmans de France. Ni Le Pen, ni Sarkozy dont les fonds de commerce sont la violence et la ségrégation ne laisseront passer une telle occasion de hisser leurs agendas en première page des médias. Et comme ceux-ci sont majoritairement au mains du complexe militaro-industriel (Dassault, Matra), pour eux un conflit est une bénédiction.

3° A ce propos, la présence des bénits de Benoit XVI au Liban laisse les mains libres à Israel pour s’occuper de la Syrie si celle-ci s’avise de bouger. Le « casus belli » existe déjà aux yeux de l’opinion publique israelienne puisque le Hezbollah libanais est armé via la Syrie. Et pour Israel, son opinion publique est la seule chose qui importe. En ce sens, la victoire à la Pyrrhus du Hezbollah peut être un facteur gênant car l’opinion israelienne n’est pas (encore) prête pour une autre aventure. On peut cependant penser que le régime syrien est plus fragile que le Hezbollah et fournira donc des troupes moins solides.

5. Qui empêchera la guerre aux USA ?

Un moyen-orient en paix pourrait être tenté ou simplement menacer de quitter l’étalon-dollar. Or l’économie américaine ne vit que du fait que personne n’est jamais allés à la banque encaisser les chèques sans provisions qu’elle fait circuler sous le nom de « pétro-dollars ». On voit donc mal le pouvoir économique américain s’y opposer.

Quand au politico-militaire ... « Ainsi Washington s’approche-t-il de plus en plus de situations où l’analyse du danger réel (du danger dans la réalité) sera complètement occultée par la multitude des conflits internes, où chaque centre de pouvoir n’est plus capable d’analyser une situation qu’en fonction de ses intérêts de groupe. C’est dans de telles circonstances que de graves accidents, ou de graves événements ayant une potentialité de rupture peuvent survenir » rappelle fort opportunement Philippe Grasset sur http://www.dedefensa.org/article.ph...

Au surplus, les USA n’ont jamais toléré un pouvoir militairement fort dans leur « pompe à essence ». C’est à dire le moyen-orient dans son ensemble. Tous les moyens sont bons pour contrer ceux qui veulent s’y hasarder, de l’intérieur comme de l’extérieur. Quelques affaires au hasard : contre les français et les anglais (Suez 1956), contre la gauche irannienne (Mossadegh 1956), contre les soviétiques en Afghanistan, contre le nationalisme pan-arabe en suscitant une opposition religieuse à ces pouvoirs socialistes et laïques (en Egypte, en Palestine, en Irak, en Afghanistan), contre l’Iran une première fois (guerre irano-irakienne où ils soutenaient l’Irak), contre l’Irak et les Talibans avec la fable du terrorisme. etc...

Outre les aspect "dollars", je vous conseille de lire les arguments remarquablement développés (en anglais, hélas) dans http://www.antiwar.com/hadar/?artic... et sur lesquels je ne vais pas revenir.

Une note finale pour nos amis du Venezuela et de la gauche latino-américaine en général. Au-delà de ces quelques élements le futur c’est encore la bouteille à encre. Sauf si l’aventurisme au Moyen-Orient est entravé. Auquel cas, le Sud de l’empire se retrouvera la première priorité de l’agenda américain et un moyen de redorer à bon compte le blason de Georges W. Bush. En tout cas il le pense et l’expérience a montrée qu’il fait peu de cas du reste.

Messages

  • Tout à fait d’accord avec les grandes lignes de l’article... Qui mesure cela prend conscience de la nature de ce qui menace le monde et dans lequel nous sommes entraînés... Je pense à certain(e) irresponsable qui ont appelé de leur voeux l’intervention européenne au Liban, voir se sont plaint de l’absence d’enthousiasme de J.Chirac à envoyer des troupes.. ;

    Irresponsabilité encore de ceux qui n’ont pas la volonté de reconstituer un grand mouvement de la paix et préfèrent nous amuser avec l’âge du capitaine ou le défilé des prétendants...

    Je ne sais si beaucoup de gens liront ce texte, le style est désormais au chat, avec troll, un déroulé ultra rapide dans lequel ne surnage que les éternels affrontements entre PCF et LCR...
    Dommage parce que nous sommes en plein dans le système télé où tout est mis sur le même temps, un massacre de masse et le bulletin météo.... Un conditionnement, décérébrage... Que faire ?

    Danielle Bleitrach

    • Il y a un truc que je ne comprends pas, par rapport à la torture... Il me semble avoir lu des tas de rapports d’experts, des tas d’articles, expliquant que la torture n’avait que très peu d’intérêt en terme de renseignements. Par exemple, les informations issues de la tortures pendant la guerre d’algérie étaient classées dans le plus bas de l’échelle de fiabilité.

      On sait qu’un type torturé racontera n’importe quoi pour que la torture s’arrête, pour gagner du temps. Certains se savent ou se croient condamnés et n’ont aucune raison de parler, et attendent simplement que ça se termine.

      Alors comment peut-on faire passer une loi faisant la promotion de la torture ? C’est à l’encontre du bon sens, a priori. Comment se fait-il que personne ne s’en révolte ouvertement ? Qu’il n’y a pas d’études sur la question qui sont mis en avant pour sabrer tout argument pseudo-rationel ?? Que font les médias américains ?

      Il doit bien avoir une convention internationale contre ça tout de même ??

      Ca va vraiment mal....

      Slone
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    • Pourquoi la torture ?

      " Voici le vrai but de la torture : de terroriser - pas seulement les personnes qui sont dans les cages de Guantanamo ou dans les cellules d’isolement de Syrie, mais aussi, et surtout, l’ensemble de la communauté qui est informée de ces abus. La torture est une machine créée pour briser la volonté de résister - la volonté du prisonnier et la volonté collective."

      Extrait de l’excellent article de Naomi Klein, repris par exemple sur http://paxhumana.info/article.php3?....

      John V. Doe

    • Merci pour ta réponse.

      Je comprends tout à fait la réthorique de l’administration Bush, la pseudo-logique de leurs explications. Mais je ne comprends pas que personne ne les attaque sur ce terrain justement, que personne ne mette en avant le fait qu’aucune étude sérieuse n’a pu validé la soit-disante "efficacité" stratégique de la torture, c’est plutôt le contraire qui a été démontré jusqu’à présent !

      Mais bon les savants et scientifiques sont surement tous des "liberals", donc on ne peut pas leur faire confiance... ;-)

      Pathétique quoiqu’il en soit...

      @+

      Slone
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    • Autant pour moi, l’article que tu m’as donné est assez clair sur ce point ! :)

      Merci encore
      @+

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